Socialisme
Le socialisme désigne un ensemble de mouvements politiques opposés au capitalisme (les révolutionnaires ou le réformisme classique) ou à certaines de ses conséquences (pour les mouvements réformistes d'aujourd'hui, qui ne parlent plus d'un horizon au-delà du capitalisme).
Les mots « communisme » et « socialisme » signifient étymologiquement la même chose, « socius » signifiant en latin « commun ». Ces sont les utilisations de ces termes par des courants menant des politiques différentes, en particulier à partir du 20e siècle, qu'ils en sont venus à avoir des connotations si différentes.
Pour les marxistes, le socialisme désigne aussi le mode de production socialiste qui vient après la révolution socialiste. On peut distinguer le socialisme (phase inférieure) du communisme (phase supérieure).
1 Mouvements socialistes[modifier | modifier le wikicode]
1.1 Origines[modifier | modifier le wikicode]
Dans les sociétés de classe du passé, au cours des révoltes qui ponctuaient l'histoire, il arrivait que certains imaginent des sociétés plus égalitaires, voire complètement égalitaires. Cela prenait alors toujours des formes idéalistes : mythes de retour à un âge d'or ancestral, millénarismes religieux, rêves de philosophes... Pour la simple raison qu'il n'existait pas vraiment de bases matérielles permettant de concrétiser une société sans classe. Il arrivait que suite à de grandes révoltes (ou colonisation), de grands partages des terres aient lieu, mais l'inégalité tendait toujours à réapparaître.
A l'époque moderne eu Europe, les écrits d'utopie se sont multipliés, dont beaucoup ont des aspects socialisants. Comme le modèle antique de La République de Platon, ces écrits ont la caractéristique de décrire avec beaucoup de minutie l'organisation idéale selon leur auteur, ce qui reflète leur aspect profondément subjectif. Mais au travers de ces écrits restait vivante l'idée que la société pourrait être bien meilleure, que si les hommes et femmes n'avaient pas à se battre pour survivre, ils·elles seraient bien plus heureux et vertueux. Le siècle des Lumières a développé les réflexions sur la différence entre l'homme à l'état de nature et dans la civilisation, donc sur la nature humaine et l'impact de l'organisation sociale. Agir sur le levier politique pour transformer radicalement la société devenait concevable.
A l'époque même d'une grande révolution bourgeoise comme la Révolution de 1789, certains commencent à se battre contre la bourgeoisie elle-même, anticipant le socialisme. La plupart ont cependant une perspective qui ne dépasse pas celle d'une société de petits producteurs indépendants, même des radicaux comme Jacques Roux. Un des précurseurs du communisme est Gracchus Babeuf, qui envisage concrètement la mise en commun du travail et des produits du travail.
1.2 19e siècle[modifier | modifier le wikicode]
En France, le terme « socialisme » est attesté en 1831 dans le sens d'opposé de l'individualisme,[1] puis dans Le Globe saint-simonien et en 1833 dans un journal fouriériste, Le Phalanstère de Victor Considerant. Pierre Leroux affirmait être le premier à avoir employé le terme de socialisme. Le terme commence à être utilisé dans son sens actuel vers 1835. Le mot est d’un usage assez courant pour que, dans La Revue des Deux mondes, Louis Reybaud puisse, le Ier août 1836, commencer une série d’articles intitulés : « Socialistes modernes ». Dans les années 1830-1830 les théories socialistes foisonnent en France : les grandes utopies de Saint-Simon, Fourier, Cabet... Le mutuellisme de Proudhon, les socialismes républicains de Leroux ou Louis Blanc, les communistes néo-babouvistes... Malgré leurs différences, ces courants s'influencent mutuellement et contribuent à faire du mouvement socialiste quelque chose d'identifié, même s'il n'est pas encore très délimité de la gauche républicaine. En augmentant ses liens avec le mouvement ouvrier naissant, et suite au massacre de nombreux ouvriers en Juin 1848 par des républicains bourgeois, l'antagonisme commence à devenir plus net.
En Angleterre, le terme « socialism » aurait en premier été utilisé en 1832 pour désigner l'owenisme.[2][3] Le terme « socialist » aurait été utilisé oralement dès les années 1820. Certains affirment que le mot « communism » serait apparu avant le mot « socialism ».[4] C'est vraiment Owen qui fut le premier socialiste moderne en Angleterre. Il fut d'abord un « patron de gauche » qui tenta de créer des communautés idéales, mais il tenta aussi d'aider le mouvement ouvrier naissant à se structurer, et à obtenir des réformes sociales. Cependant, malgré l'owenisme et les franges de gauche du chartisme, le socialisme réussit assez peu à s'implanter dans la classe ouvrière anglaise, qui se concentra sur un syndicalisme assez peu idéologique.
En Allemagne le développement du socialisme fut plus tardif par rapport à la France et à l'Angleterre, en lien avec l'industrialisation plus tardive. En revanche, la pensée philosophique s'y développa abondamment, et chercha activement à aboutir à des systèmes décrivant l'évolution du monde contemporain. C'est cet esprit de système, en particulier celui de Hegel, qui inspira les premiers intellectuels socialistes allemands, dont Marx et Engels.
Engels dira que « le socialisme signifiait en 1847 un mouvement bourgeois, le communisme un mouvement ouvrier »[5]. L’opposition est un peu trop tranchée, car les courants socialistes touchent aussi un certain nombre d'ouvriers. L'Atelier, premier journal écrit par des ouvriers, défend le socialisme chrétien de Buchez.
En 1864 fut fondée l'Association internationale des travailleurs (Première internationale), qui était surtout une alliance des différents mouvements ouvriers, mais qui de fait était idéologiquement acquis à divers mouvements socialistes : le proudhonisme, le bakouninisme, le marxisme... Elle proclamait l'abolition du salariat comme son but.
Vers la fin du 19e siècle, des partis ouvriers de masse commencent à se former, et à vouloir s'investir dans la politique. Le marxisme, qui encourage cette dynamique, tend à devenir la doctrine dominante de ces partis. C'est en particulier le cas en Allemagne avec la social-démocratie, puissant mouvement syndical, coopératif, électoral, médiatique, associatif, contre-société qui semble connaître une croissance inexorable, donnant confiance dans l'avènement d'une société socialiste. Marx et Engels n'aimaient pas les termes de socialisme et de social-démocratie, et se désignaient eux-mêmes comme communistes, mais c'était une question secondaire pour eux.
En 1889, sous l'impulsion du parti allemand, est créée l'Internationale ouvrière, appelée aussi Internationale socialiste. La social-démocratie est alors vue comme la forme la plus réussie des différents mouvements socialistes. Officiellement, elle vise la transformation révolutionnaire de la société, et comprend des courants réellement socialistes révolutionnaires, mais est en réalité dominée de plus en plus par des pratiques opportunistes et réformistes.
1.3 20e siècle[modifier | modifier le wikicode]
En 1906, l'économiste Thorstein Veblen disait à Harvard : « Le socialisme qui suscite aujourd’hui espoirs et craintes est de l’école de Marx. Personne n’a d’appréhension sérieuse à l’égard d’un autre mouvement dit socialiste. »[6] Et cela même si d'autres petits courants se revendiquaient du socialisme : le socialisme de guilde au Royaume-Uni, des anarchistes en Allemagne...
Lorsque la Guerre de 1914 éclate, la plupart des dirigeants socialistes se joignent aux partis bourgeois dans un même élan nationaliste. Abandonnant les principes internationalistes qu'ils avaient proclamés, ils appellent les ouvriers à se battre contre leurs frères des autres pays. L'Internationale cesse d'exister dans la pratique. Puis la révolution éclate en Russie en 1917, et le parti social-démocrate russe (bolchéviks) parvient à prendre la tête d'un mouvement sans précédant d'auto-organisation ouvrière, instaurant un nouveau pouvoir, qui se heurte à une violente contre-révolution aidée par les impérialismes étrangers, plongeant le pays dans une guerre civile dévastatrice. Malgré tout, les bolchéviks tentent de se diriger vers le socialisme.
Les dirigeants des principaux partis socialistes condamnent la révolution bolchévique, se joignant au concert des attaques de la bourgeoisie. Pourtant, la révolution russe soulève aussi un immense espoir dans les masses populaires. Ce clivage s'ajoutant à la question de la guerre, achève de marquer une rupture dans le mouvement socialiste au niveau international. Une Troisième internationale est créée en 1919, appelée Internationale communiste pour marquer la rupture avec le socialisme discrédité.
L'ancienne Internationale se reforme, le socialisme devenant encore davantage synonyme de mouvement « modéré » par rapport au communisme. Néanmoins, la plupart des partis socialistes continuent encore en parole à se dire pour le remplacement du capitalisme par le socialisme, même s'ils rejettent de plus en plus ouvertement l'idée de révolution.
Avec la dégénérescence stalinienne de l'URSS et du mouvement communiste international, le communisme a fini par être associé par l'opinion dominante à un régime bureaucratique et dictatorial, et les dirigeants socialistes en ont profité pour se définir, par contraste, comme partisans du « socialisme démocratique ». Cela leur permet de façon commode de masquer leur total abandon d'une vraie démocratie réelle au delà de la démocratie bourgeoise, en lien avec leur acceptation du capitalisme.
En Scandinavie, les partis sociaux-démocrates ont été à la fois forts et modérés, et ont bénéficié d'un enrichissement de ces pays, conduisant à une situation particulière. Par exemple en Suède, ils accèdent au gouvernement à partir de 1932 et y demeurent de façon quasi-ininterrompue jusqu'en 1976. Ils mettent en place des réformes sociales importantes, et on l'on parle souvent du « modèle scandinave » à propos de ces États-providence. Cependant, puisqu'il ne s'agissait pas d'une sortie du capitalisme, ces systèmes sociaux sont restés vulnérables, et ont fini par subir le tournant néolibéral également.
L'ensemble des partis socialistes abandonnent le marxisme, à un rythme inégal selon les pays. Cela se fait plus tôt en Allemagne (dès 1959) et dans les pays du Nord, dans lesquels on parle de partis social-démocrates, et moins vite dans le PS français et le PS italien. C'est une des raisons qui font que le terme de social-démocratie a une connotation encore plus réformiste que le terme de socialisme.
Ces partis tendent à remplacer Marx par Keynes comme référence économique, à remplacer l'idée d'un parti de classe par celle d'un parti du peuple, l'idée de solidarité de classe par l'idée de citoyenneté, les intérêts de la classe ouvrière par l'appel kantien à l'intérêt général... A partir des années 1950, il y a un rapprochement entre socialistes et toute une génération de chrétiens de gauche.
Dans les nombreux mouvements anti-impérialistes du 20e siècle, et en particulier dans la période qui suit la Seconde guerre mondiale, les idées socialistes et communistes vont souvent être utilisées comme ferment de mobilisation populaire. Mais au delà des mots et de certaines théorisations intéressantes, ce sont des partis nationalistes (de gauche) qui vont diriger de façon assez verticale les mouvements d'indépendance, et mettre en place des États bourgeois développementistes, et interclassistes (bonapartisme sui generis). Dans les PC issus du stalinisme, on présentait cet interclassisme comme une étape, tandis que dans d'autres cas comme dans le socialisme arabe, la lutte des classes était explicitement reniée.
Vers la fin du 20e siècle, l'évolution toujours plus poussée des partis socialistes vers le social-libéralisme a contribué a vider de son sens le terme de socialisme aux yeux de larges masses de la population.
Les principaux partis socialistes ou travaillistes sont devenus des partis de gouvernement crédibles pour la bourgeoisie. Non seulement ils ne mettent plus en place des réformes sociales coûteuses quand ils arrivent au pouvoir, mais ils mènent activement des contre-réformes pro-patronales. Pour Jospin, le socialisme se définit non plus comme un « système » mais comme un ensemble de « valeurs démocratiques et sociales » et « une façon de réguler la société et de mettre l'économie de marché au service des hommes ».[7]
1.4 21e siècle[modifier | modifier le wikicode]
Les idées socialistes partent a priori de bien bas en ce début du 21e siècle. Cependant, il y a des signes de renouveau de l'intérêt pour le socialisme. Aux États-Unis et au Royaume-Uni par exemple, la génération des millenials voit le socialisme d'un œil beaucoup plus favorable que les boomers, si bien que certains parlent d'un millenial socialism.[8]
2 Mode de production socialiste[modifier | modifier le wikicode]
La production socialiste désigne un mode de production où les travailleur-se-s possèdent collectivement les grands moyens de production (les usines, les entreprises, les supermarchés...) et le pouvoir politique (dans les communes, les régions, les assemblées nationales et internationales...). Cette possession sociale permet d'instaurer une démocratie réelle et de décider de ce qui est produit et comment cela est produit (planification). Ainsi, les moyens de production sont utilisés directement pour produire de la valeur d'usage (pour satisfaire directement les besoins humains). La plus-value revient aux travailleurs et à la société dans son ensemble.
A l'inverse, le capitalisme repose sur les forces du marché qui pousse les capitalistes en concurrence à produire pour le profit, et la valeur d'usage n'est qu'un sous-produit de cette concurrence. Cette concurrence engendre aussi les cycles de l'économie de marché capitaliste (cycles de crise et de croissance), qui n'existeront pas dans une économie socialiste. Au lieu des capitaux privés en concurrence, il y aurait un seul capital social alloué aux investissements démocratiquement décidés. La planification rationnelle remplace les forces économiques qui dépassent les hommes sous le capitalisme.
Le socialisme ferait usage de systèmes incitatifs librement décidés. La méthode de compensation et de récompense dans une société socialiste serait fondée sur une méritocratie authentique, selon le principe de chacun selon ses capacités, à chacun selon sa contribution.
Par conséquent, des inégalités sociales héritées du capitalisme existeraient toujours dans cette première phase, mais dans une mesure décroissante puisque tous les travailleurs serait propriétaires des moyens de production.
Sur le plan des rapports entre nations, la perspective du socialisme est l'alliance dans des États-Unis du monde.
2.1 Transition vers le communisme[modifier | modifier le wikicode]
Le stade avancé du socialisme, dénommé le stade supérieur du communisme ou communisme tout court dans la Critique du programme de Gotha, est basé sur le mode de production socialiste, mais se différencie du socialisme en quelques manières fondamentales. Le communisme serait fondé sur la propriété commune des moyens de production (et non plus sur la propriété sociale). Les distinctions de classes fondées sur la propriété du capital disparaitront, ainsi que la nécessité d'un Etat. Une surabondance de biens et de services sont rendus possibles par la production automatisée qui permettront que les marchandises soient distribuées en fonction des besoins plutôt que sur le mérite.
2.2 Les relations sociales[modifier | modifier le wikicode]
L'objectif fondamental du socialisme à la vue de Marx et d'Engels a été la réalisation de la liberté humaine et de l'autonomie individuelle. Plus précisément, cela fait référence à la liberté de l'aliénation imposée aux individus sous la forme de relations sociales coercitives ainsi que la rareté matérielle, par laquelle l'individu est obligé de se livrer à des activités simplement pour survivre. Le but du socialisme est de fournir un environnement dans lequel les individus sont libres d'exprimer leurs véritables intérêts, la liberté de création, et les désirs sans entrave par des formes de contrôle social.
Comme un ensemble de relations sociales, le socialisme est défini par le degré auquel l'activité économique dans la société est prévue par les producteurs associés, de sorte que le produit excédentaire produite par les actifs socialisés est contrôlé par une majorité de la population à travers des processus démocratiques. La vente de la force de travail serait supprimé afin que chaque individu participe à la gestion de leur institution en tant que parties prenantes ou des membres sans un ayant un pouvoir coercitif sur quelqu'un d'autre dans une division sociale verticale du travail.
2.3 Matérialisme historique[modifier | modifier le wikicode]
Ce schéma général de l'évolution sociale découle de la méthode d'analyse de Marx et Engels, le matérialisme historique. Il ne s'agit pas d'une prophétie ou d'un schéma programmé à l'avance, mais d'une analyse (économique, historique, sociologique...) du capitalisme, de son origine et de ses contradictions, qui permet de penser que le combat socialiste peut déboucher sur une meilleure société. Marx et Engels parlaient de « socialisme scientifique ».
3 « Socialisme démocratique »[modifier | modifier le wikicode]
Le terme de « socialisme démocratique » est souvent utilisé comme synonyme de social-démocratie, mais il est parfois utilisé pour appuyer sur la nécessité de la démocratie dans des débats.
3.1 Délimitations historiques[modifier | modifier le wikicode]
Le socialisme est spécifiquement l'exigence d'égalité sociale, mais à son origine, très majoritairement, il a été un prolongement du combat démocratique. Une grande partie des premiers socialistes étaient des démocrates ou des républicains devenant, en plus, socialistes. Le courant dit social-démocrate, à l'origine un courant majoritairement marxiste, incarnait cela.
Le courant communiste est à l'origine une scission de la social-démocratie, après que les chefs de celle-ci se soient majoritairement montrés contre-révolutionnaires pendant la période 1914-1921. Très vite, la question de la démocratie est devenue la justification idéologique des leaders sociaux-démocrates : pour eux, les communistes (en particulier le léninisme) sont des autoritaires bafouant la démocratie, alors que eux sont pour un « socialisme démocratique ». En réalité, le soutien des chefs sociaux-démocrates au militarisme de leur propre bourgeoisie pendant la guerre mondiale, ou leur soutien plus ou moins assumé à la contre-révolution (par exemple avec le meurtre de Luxemburg et Liebknecht) montre l'hypocrisie de « démocratisme ».
A cette époque, le clivage majeur était entre soutien quoi qu'il arrive à la bourgeoisie libérale et à ses institutions pseudo-démocratiques, ou soutien à des mouvements populaires susceptibles de faire naître une démocratie réelle (soviets, conseils ouvriers...), ce que l'on peut reformuler en clivage entre démocratie bourgeoise et démocratie ouvrière.
Cela n'empêche pas que des critiques internes au camp communiste ont pu être émises sur l'insuffisance de la démocratie dans les révolutions. L'attitude de Luxemburg illustre bien cela : elle critiquait Lénine et Trotski, mais se considérait clairement dans leur camp révolutionnaire et dénonçait la trahison des chefs sociaux-démocrates européens.
En revanche, avec la bureaucratisation du nouveau régime russe, et à travers lui, de l'ensemble de l'Internationale communiste, la destruction de la démocratie par les staliniens est devenu un problème de premier plan.
Par comparaison avec les PC stalinisés, les partis de la social-démocratie ont eu beau jeu de se présenter comme plus démocratiques, ce qui n'était pas un point de comparaison bien exigeant. En revanche, même lorsque ces partis ont gouverné pendant de longues périodes, ils n'ont jamais fait la démonstration de leur capacité à aller au delà du capitalisme et d'une démocratie libérale avec quelques réformes.
D'autres courants se sont aussi revendiqués d'un socialisme démocratique par opposition au stalinisme, comme les communistes de gauche, les luxemburgistes, les trotskistes...
Dans les années 1970, certains auteurs mettent avant les idées d'autogestion, populaires à l'époque, et définissent le socialisme démocratique comme le socialisme par en bas, émanant de la population, par opposition au socialisme par en haut, ou socialisme d'État, qui englobe aussi bien les staliniens que les sociaux-démocrates. C'est le cas par exemple d'un auteur comme Hal Draper (issu du trotskisme), qui superpose globalement ce clivage avec le clivage révolutionnaires / réformistes. D'autres reprennent cette mise en avant de la participation populaire, mais s'en servent pour se faire passer pour plus progressistes qu'ils ne sont, comme Peter Hain qui s'en est même servi pour cautionner le tournant social-libéral du New Labour.[9]
Beaucoup d'auteurs dans la mouvance eurocommuniste ont également parlé de socialisme démocratique, comme Nicos Poulantzas.[10]
3.2 Par définition[modifier | modifier le wikicode]
Les tenants d'un socialisme démocratique soulignent souvent que le socialisme doit par définition être démocratique, sans quoi il ne s'agit pas véritablement de socialisme, ou d'une forme de socialisme vouée à l'échec.
Trancher ces questions signifie bien sûr se mettre d'accord sur des définitions.
Si le socialisme est défini comme la gestion « en commun » des moyens de production, cela implique, en toute rigueur, que tous les membres de la communauté aient les mêmes droits de décision, donc une démocratie. Ce sens est reconnu par des auteurs qui ne sont pas eux-mêmes socialistes. Bertrand Russell décrit en 1918 « l'essence du socialisme » comme étant « par définition la revendication de la propriété commune de la terre et du capital. La propriété commune peut signifier la propriété par un État démocratique, mais n'inclut pas la propriété par un quelconque État qui ne serait pas démocratique »[11].
Mais l'association entre socialisme et démocratie est moins automatique si on le définit comme un ensemble de mesures de redistribution des richesses (mais sans abolition des classes), ou si on le définit comme la seule étatisation de l'économie, indépendamment de la coupure entre État et société.
4 Critiques[modifier | modifier le wikicode]
Les critiques apportées au socialisme ont été extrêmement nombreuses, évidemment avant tout de la part des possédants qui réagissent aux critiques de leur accaparement des richesses.
Les critiques entre courants socialistes sont logiquement très importantes aussi, puisqu'il s'agit de débattre sur les différentes alternatives au capitalisme et les moyens de les mettre en place.
Parmi les critiques les plus classiques et basiques du communisme (au sens d'une société ayant largement instauré une communauté des biens et du travail), on entend souvent que :
- plus personne ne voudra faire les travaux pénibles si chacun reçoit à volonté les biens selon ses besoins ;
- si la propriété privée est abolie tout le monde se battra pour s'accaparer une plus grande part de la production commune et cela dissoudra la communauté.
Engels mentionnait déjà ces critiques en 1845.[12]
Un des clichés très courant à l'encontre des socialistes est que ceux-ci voudraient instaurer du jour au lendemain une égalité stricte de tous les revenus. Si certains courants socialistes utopiques prêtent le flanc à cette critique, le marxisme a depuis longtemps fondé son idée de la transition vers le socialisme de façon beaucoup plus réaliste.[13]
5 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]
Bibliographie
Jacques Droz, Histoire générale du socialisme (PUF) :
- Tome 1 : des origines à 1875 (1ère ed. 1972)
- Tome 2 : De 1875 à 1918 (1ère ed. 1974)
- Tome 3 : De 1918 à 1945 (1ère ed. 1977)
- Tome 4 : de 1945 à nos jours (1ère ed. 1978)
Autres notes
- ↑ Le Semeur, n o12, 23 nov. 1831, p. 94, 2e col.
- ↑ Socialisme sur le CNRTL
- ↑ Socialism, Online etymology dictionary
- ↑ Emerson Kent, Communism
- ↑ Friedrich Engels, Préface de 1890 au Manifeste du Parti communiste
- ↑ Thorstein Veblen, The Socialist Economics of Karl Marx and His Followers, April 1906
- ↑ Lionel Jospin, Ma Social-démocratie, texte écrit pour la Fabian Society, reproduit dans Libération, 19 novembre 1999
- ↑ Independant, More than a third of millennials approve of communism, YouGov poll indicates, November 2019
- ↑ Peter Hain, Rediscovering our libertarian roots, Chartist, July/August 2000
- ↑ Nicos Poulantzas, L'État, le pouvoir, le socialisme, Paris, 1978 (Dernier chapitre : Vers un socialisme démocratique)
- ↑ Bertrand Russel, Proposed roads to freedom. Socialism, Anarchism and Syndicalism, Henry Holt and Company, édition de 1919, page 10 (Première publication : 1918)
- ↑ Friedrich Engels, Description de colonies communistes surgies ces derniers temps et encore existantes, 1845
- ↑ Karl Kautsky, Le programme socialiste. IV. La Société future, 1892