Stalinisme

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Stalinisme

Le stalinisme (aussi dénommé de manière impropre « marxisme-léninisme ») est la politique menée par la bureaucratie de l'URSS et l'Internationale Communiste pendant et après le thermidor soviétique. Cela désigne aussi l'idéologie de cette bureaucratie, personnifiée par Staline, bien qu'il n'y ait derrière que peu de cohérence idéologique.

Le terme de stalinisme est employé par certains au sens étroit de la politique menée en URSS du vivant de Staline, mais est souvent employé au sens large pour englober la politique des régimes se revendiquant du « marxisme-léninisme » (URSS y compris après la « déstalinisation », Chine maoïste, Corée du Nord...).

Le stalinisme a été une réaction victorieuse en URSS, notamment contre le trotskisme, mais a aussi été le fossoyeur de nombreuses révolutions socialistes, et probablement un des responsables principaux du recul du mouvement ouvrier pendant la seconde moitié du 20e siècle.

1 La dégénérescence stalinienne

1.1 Les racines du stalinisme

Le stalinisme s'est construit en même temps que la jeune révolution d'Octobre dégénérait. C'est la bureaucratisation de l'appareil d'État soviétique et du parti bolchévik qui a constitué la base sociale de cette régression. Cette bureaucratisation a progressivement confisqué le pouvoir des mains des soviets et donc des ouvriers et paysans, sous l'effet de plusieurs facteurs qui font largement débat : la guerre civile qui a aggravé la ruine du pays et tué de nombreux ouvriers bolchéviks conscientisés pendant la révolution, la démoralisation et le repli sur la survie individuelle qui a tué le dynamisme des soviets, l'entrée de nombreux arrivistes peu encombrés de principes dans les rangs du parti, les mesures extrêmes de terreur rouge prises par le parti bolchévik et l'interdiction des fractions...

La bureaucratie, qui détenait à présent des leviers du pouvoir dans un rapport descendant vers les masses, ne voulait plus être gênée par des considérations politiques : les débats pouvant remettre en cause le poste de tel ou tel apparatchik, les révolutionnaires sincères réclamaient des efforts pour l'extension de la révolution mondiale que les cadres ne voulaient plus faire... Cette bureaucratie s'est reconnue dans Staline, qui a su patiemment se constituer un réseau d'influence. C'est la raison de fond qui a fait que la fraction de Staline a pu progressivement s'imposer en écrasant les autres courants du parti.

1.2 La victoire des staliniens

C'est ce poids croissant qui a permis au stalinisme de se présenter de grès ou de force comme la continuateur de Lénine, en calomniant tout opposant comme Trotski et l'Opposition de gauche.

En 1937-1938 Staline ouvre un grand procès contre les partisans de Boukharine, qu'il fait appeler le procès du « bloc des droitiers et des trotskistes »[1].

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1.3 Stalinisme et Opposition de gauche en URSS

Le stalinisme a cherché à théoriser ses politiques d'abandon de la révolution internationale, voire contre-révolutionnaires. L'exemple le plus frappant en est la théorie du « socialisme dans un seul pays ». C'est notamment ce qui fera que Trotski dénoncera le « nationalo-socialisme » de Staline.

1.4 Assassinats d'opposants

C'est principalement en URSS qu'ont eu lieu des éliminations massives d'opposants, ou même de leaders communistes qui potentiellement auraient pu inquiéter Staline (notamment lors des Grandes purges).

Néanmoins au plus fort de la terreur stalinienne, des oppositionnels ont été éliminés y compris à l'international :

2 Stalinisme et Internationale Communiste

2.1 Les débuts

Née dans l'élan de la Révolution russe, l'Internationale Communiste s'est développée très rapidement, et face à la discréditée Deuxième internationale, elle avait vocation à donner un nouveau souffle révolutionnaire au mouvement ouvrier et au socialisme scientifique. Mais sa rapide stalinisation a tragiquement eu l'effet inverse : l'IC a conduit à l'échec ou a directement étouffé des révolutions ouvrières prometteuses. L'échec de la révolution allemande en 1923 s'explique encore en grande partie par des erreurs (notamment l'inexpérience du KPD). Mais quoi qu'il en soit, cela va avoir un effet démoralisant qui renforcera les conservateurs dans l'appareil soviétique, et affaiblira les révolutionnaires.

2.2 L'opportunisme croissant

Au cours des années 1920, la politique de l'Internationale communiste devient progressivement de plus en plus opportuniste, au fur et à mesure de sa bureaucratisation. L'État soviétique utilise de plus en plus l'Internationale comme un outil pour défendre ses intérêts matériels et diplomatiques, dans une logique d'autoconservation qui se cache derrière le concept de socialisme dans un seul pays.

Cela conduit à une alliance avec les dirigeants syndicaux anglais qui brise la grève générale de 1926, et surtout à l'écrasement de la révolution chinoise (1925-1927).

Des concessions verbales aux restes de communistes sont encore faites, comme par exemple les textes de 1928 de l'Internationale communiste qui contiennent des passages évoquant des mesures à prendre contre la bureaucratisation en URSS, alors que celle-ci était déjà très avancée[4].

2.3 La « Troisième période » (1928-1935)

En 1928 l'Internationale opère un brusque revirement, qui sera nommé la politique « classe contre classe », ou « troisième période ». Toutes les sections de l'IC reçoivent la consigne de passer immédiatement à l'agitation et action révolutionnaire.[5] En Chine, les communistes repliés dans les campagnes proclament de petites républiques soviétiques (sans aucune auto-organisation des masses).

En Europe, cela se traduit surtout par une attitude sectaire envers les partis social-démocrates, que les PC vont désormais qualifier de « social-fascistes ». Ils refusent tout front unique, et en particulier refusent d'organiser une riposte de classe face aux attaques des groupes fascistes.

Pire, les staliniens vont parfois jusqu'à brouiller les lignes idéologiques entre fascisme et communisme pour draguer l'électorat du parti nazi.

« Le fait est là, dans une campagne déterminée, le bureaucratisme stalinien entraîna les ouvriers révolutionnaires dans un front unique avec les hitlériens contre la social-démocratie. Dans la fanfare communiste du 1er août, en pleine agitation pour le "referendum rouge", on publie, à côté du portrait de Scheringer, un de ses messages apostoliques, voici ce qu'on y lit textuellement . "Quiconque s'oppose aujourd'hui à la révolution populaire, à la guerre révolutionnaire libératrice, trahit la cause des morts de la guerre mondiale qui ont donné leur vie pour une Allemagne libre". Ainsi, la bureaucratie stalinienne tend de plus en plus à agir contre le fascisme en utilisant les armes de ce dernier ; elle lui emprunte les couleurs de sa palette politique et s'efforce de la dépasser en surenchère patriotique. Il est difficile d'imaginer une capitulation de principe plus honteuse que celle des staliniens qui ont remplacé le mot d'ordre de la révolution prolétarienne par celui de la "révolution populaire". »[6]

En 1932, le PC allemand met sur pied l'Action antifasciste, qui prétend être un front d'autodéfense contre les nazis. Mais il refuse encore de réaliser des milices ouvrières unifiées avec les milices du SPD.

Cette politique désastreuse sera en grande partie responsable de la victoire des nazis en 1932. C'est cet échec menant à la destruction du mouvement ouvrier allemand qui convainc Trotski que l'Internationale ne peut plus être redressée et qu'une Quatrième internationale doit être fondée.

2.4 Les fronts populaires

Staline fait faire un nouveau zigzag à l'Internationale à partir de 1935 avec la ligne des fronts populaires. Craignant directement pour la survie de l'URSS, il promeut l'alliance des forces antifascistes (qu'elles soient communistes, social-démocrates, bourgeoises...), et sur le plan diplomatique il flatte « le camp des démocraties » contre les Etats fascistes. Pour s'allier à leur bourgeoisie nationale, les PC vont épouser le nationalisme, mettre en veilleuse la dénonciation de l'impérialisme français et anglais...

Ainsi en France le tournant à 180° du PCF est spectaculaire. L'Humanité publie le 15 mai 1935 un communiqué suite à la visite de Laval à Moscou : « M. Staline comprend et approuve pleinement la politique de défense nationale faite par la France pour maintenir sa force armée au niveau de sa sécurité ». Alors que L'Humanité était engagée dans une campagne antimilitariste contre le gouvernement, elle devient brusquement patriote. Elle reprend la Marseillaise et le drapeau bleu blanc rouge...  Elle abandonne du jour au lendemain sa ligne « classe contre classe », et vantera bientôt le rapprochement non seulement avec la SFIO mais aussi avec le Parti radical (parti de gouvernement appuyé sur la petite-bourgeoisie), dans le cadre du Front populaire. Lorsqu'éclatera la grève générale de juin 1936, le PCF et la CGT feront tout pour calmer les ouvriers.

Dans la Révolution espagnole (1936-1939), les staliniens (qui sont au départ faiblement implantés mais qui bénéficient de l'appui de l'État soviétique) font un bloc acritique avec les bourgeois démocrates contre les franquistes, allant pour leur plaire jusqu'à désamorcer l'élan socialiste révolutionnaire et à assassiner des leaders anarchistes et poumistes. Or l'élan révolutionnaire était le seul qui pouvait donner aux masses la combativité suffisante pour vaincre le fascisme.

Jusqu'au milieu des années 1930, les militants communistes de certains pays ont parfois des réflexes démocratiques élémentaires pour défendre Trotski. Ainsi en août 1936, lorsque des fascistes s'introduisent dans la maison où est hébergé Trotski en Norvège, le PC norvégien convoque immédiatement un meeting de condamnation des fascistes. Mais Moscou opère aussi un recadrage : l'agence Tass affirme que les fascistes rendaient visite à Trotski, l'Humanité reprend cette diffamation, et le PC norvégien revendique alors l'expulsion de Trotski.[7]

2.5 Stalinisme et impérialisme

L'Internationale des origines faisait de l'anti-impérialisme un principe, et devait lutter contre des tendances chauvines présentes dans tout parti de masse. L'Internationale stalinisée va cesser très vite de mener cette lutte, qui n'intéressait plus une bureaucratie tournée vers la préservation de ses intérêts. Les principes vont devenir à géométrie variable.

Le premier grand recul sur l'internationalisme est dû à la ligne des fronts populaires. Puisqu'il s'agissait de s'allier aux secteurs petits-bourgeois, il fallait épouser leur discours nationaliste (le nationalisme en tant que discours interclassiste détournant de la lutte de classe a toujours été une arme puissante des idéologies bourgeoises). Comme dit plus haut, c'est à ce moment que le PCF reprend l'imagerie tricolore, la Marseillaise, etc. Mais cela avait aussi des conséquences dans les pays dominés. Ainsi à la même période, le Parti communiste indochinois avait pour consigne de ne pas mener une lutte trop frontale contre la France, puisque l'URSS était alliée à la France. Plus tard, en janvier 1947, cinq ministres du PCF entrent au gouvernement français, gouvernement qui mène une guerre coloniale contre un mouvement dirigé par un parti frère... C'est un signe très net du fait que l'Internationale n'a plus rien d'un parti mondial de la révolution, mais n'est plus qu'un ensemble de partis réformistes et nationalistes de gauche dont le point commun et d'être (certes de moins en moins) dirigés au grès des intérêts de Moscou.

2.6 Du Pacte germano-soviétique à la Résistance (1939-1941)

Caricature aux États-Unis, 9 octobre 1939

Sentant peser la menace des armées nazies, Staline va signer un pacte de non agression avec Hitler en août 1939. Ce pacte contenait aussi des clauses secrètes actant des zones d'influences en Europe. Partout les PC doivent faire l'apologie du pacte et dénoncer la Guerre mondiale commençante comme un conflit inter-impérialiste. Cela choque profondément de nombreux communistes, qui étaient investis dans l'antifascisme. Beaucoup quittent les PC, et certains PC quittent l'Internationale comme le PC britannique. Cela provoque aussi un vent de condamnation nationaliste, et le PCF est interdit.

Dès 1939-1940, dans les zones contrôlées par l'Armée rouge (Carélie finlandaise, pays Baltes, Est de la Pologne, Moldavie et Bessarabie roumaines), le pouvoir passe aux mains des bureaucrates des PC locaux.

Dès 1940, Staline songe à dissoudre l'Internationale (un héritage qui rappelait malgré lui l'objectif de révolution mondiale), mais diffère l'annonce pour ne pas sembler la sacrifier à l'entente avec Hitler. En juillet 1940, une poignée de dirigeants clandestins du PCF avec Jacques Duclos et Maurice Tréand demandent l'autorisation aux occupants nazis de faire reparaître L'Humanité. Moscou, avertie, ordonna de mettre fin immédiatement aux démarches.

Au printemps 1941, Staline préconise maintenant discrètement aux PC d'Europe occupée de conclure des ententes avec des forces non-communistes pour la résistance contre les Allemands. Le 15 mai 1941, le PCF fonda ainsi le Front National de Lutte pour l'Indépendance de la France.

Hitler attaque finalement l'URSS le 22 juin 1941, et aussitôt Staline s'allie avec le Royaume-Uni. Les PC mettent maintenant toute leur énergie la résistance, y compris jusqu'à l'imprudence totale, car Moscou voulait voir plus de troupes allemandes fixées dans les pays occupés. Les PC pratiquent alors une stratégie d'attaques frontales de l'occupant allemand, exposant ainsi les militant·es, les otages et les populations civiles à de terrifiantes répressions. Cela tendit souvent les relations avec les autres formations de la Résistance en France, en Yougoslavie ou en Pologne, qui critiquaient l'inutilité et le danger des attentats individuels contre les soldats allemands ainsi que le lourd coût des sabotages spectaculaires et des combats de guerilla prématurés.

Beaucoup cependant admirèrent la détermination et le courage des communistes, qui leur semblaient les plus décidés à se battre tout de suite et les plus riches en martyrs (Colonel Fabien, otages de Châteaubriant...). Le lourd tribut payé par les militant·es communistes restaurera en bonne partie le prestige entamé par le Pacte, tout comme les victoires de l'Armée rouge.

2.7 La IIe guerre mondiale et la dissolution de l'Internationale

A présent, c'est avec les Alliés que Staline négocie le futur repartage de l'Europe (notamment aux conférences de Moscou en 1943 et de Yalta en 1945). Pour rassurer les alliés il dissout la IIIe Internationale le 15 mai 1943, en maintenant seulement un « bureau d'information communiste » (Kominform). Bien sûr la bureaucratie de l'État soviétique contrôlait toujours, par son pouvoir matériel et ses menaces, une grande partie des PC, mais elle n'avait pas besoin d'une Internationale avec des votes censés être démocratiques pour ça.

A la fin de la guerre, L'URSS et les États-Unis apparaissent comme les deux principaux superpuissances, et une sorte d'entente semble s'établir entre eux pour assurer le patronage du monde (découpage de l'Allemagne vaincue, création de l'ONU...).

La guerre est suivie d'une vague révolutionnaire, mais de nature « moins socialiste » que celle post 1918 (bien que forte sur le plan anticolonial), et ce en grande partie à cause des efforts combinés des occidentaux et des appareils staliniens. Par exemple, lorsqu'ils traitaient de la gestion de l'Allemagne après sa défaite, les états-uniens et les soviétiques s'étaient mis d'accord pour ne traiter avec un éventuel gouvernement né d'un soulèvement à caractère socialiste. Un reporter états-unien témoigne :

« De nombreux Russes, avec lesquels l'auteur a parlé franchement, discutaient les dangers d'une Allemagne communisée. Ils pensaient qu'elle pourrait éventuellement se tourner vers le trotskysme et pourrait ainsi provoquer des dangers pour l'Union soviétique, - une possibilité qui doit être évitée à tout prix. »[8]

La puissance du mouvement ouvrier fut canalisée pour obtenir des réformes sociales (certes non négligeables, comme les systèmes de sécurité sociale), que la bourgeoisie était prête à accorder pour éviter toute remise en question radicale de la propriété capitaliste.

Les pronostics de Trotski sur la chute du stalinisme après la guerre se sont avérés trop optimistes. La rupture de continuité dans la conscience révolutionnaire de toute une génération a beaucoup joué.[9] Au début de la guerre froide, beaucoup de jeunes rejoignaient les communistes en ayant le sentiment qu'il s'agissait, à l'échelle mondiale, du bloc progressiste. Ils n'avaient souvent pas assez de connaissance sur ce qui se passait réellement dans les dictatures staliniennes, et pas assez de repères pour comprendre à quel point les partis communistes jouaient un rôle anti-révolutionnaire dans les pays occidentaux.

Dans les pays conquis par l'Armée rouge pendant la Seconde guerre mondiale, les parti communistes prennent progressivement le pouvoir, sous la houlette de Moscou. Dans les premières années, ils font cependant mine de garder un semblant de pluralisme, tout en manœuvrant pour écarter tous les leaders non contrôlés par les PC. En Hongrie, on a parlé de « tactique du salami ».

Le Kominform est dissout le 17 avril 1956.

3 Le régime stalinien

3.1 Culte de la personnalité de Lénine et Staline

Poster de 1921 représentant l'alphabet, avec Lénine et Trotski.

Juste après Octobre 1917, le prestige de Lénine est immense, mais il n'y a pas de culte de la personnalité au sens strict. Déjà, il n'était pas encore très bien connu dans les régions reculées de l'ex empire Russe. Ensuite, il était loin d'être le seul dirigeant inspirant le respect pour sa conduite dans la révolution : Zinoviev, bon orateur, disposait d'une aura à Petrograd, Boukharine à Mouscou... Par ailleurs, Trotski jouissait d'un immense prestige également, en particulier pour son rôle dans l'organisation de l'Armée rouge. Pendant les années 1918-1921, il était très courant d'entendre désigner le parti bolchévik par l'expression « parti de Lénine et Trotski », aussi bien en Russie qu'à l'étranger.

Dans les matériels éducatifs et de propagande, il était bien plus souvent question d'idées et d'accomplissements collectifs que de « grands hommes », mais si des dirigeants bolchéviks étaient mis en avant, c'était fréquemment Lénine et Trotski. Staline est absent des matériels à destination du grand public dans toute cette période, et il n'est connu que des cadres du parti.

Ce n'est que la puissance de l'appareil du parti devenu machine bureaucratique contrôlant l'État qui permettra à Staline de réécrire l'histoire au fil des années, et d'instaurer un véritable culte de la personnalité autour de Lénine et de lui-même.

Dans les années 1930 l'imagerie étatique consistait essentiellement en de lourdes répétitions de messages du type « Marx-Engels-Lénine-Staline », afin de présenter Staline comme l'héritier direct de ses illustres prédécesseurs.

En ce qui concerne Lénine, la propagande officielle du régime va en faire une figure surhumaine, réécrivant largement l'histoire pour cela. Par exemple, une biographie officielle de Lénine publiée à Moscou en 1960 décrit le père de Lénine comme un éducateur radical progressiste et sa maison de Simbirsk comme une espèce de club révolutionnaire. « Le ton était donné par Alexandre » (le frère aîné de Lénine), et Vladimir lui-même « participait fréquemment à la discussion avec un grand succès. » En réalité, Alexandre cachait ses idées politiques à la maison, et son père était un fonctionnaire de rang noble, et conservateur. Cette même biographie fait comme si Lénine avait presque dès son enfance été un révolutionnaire, et qu'il avait compris dès l'exécution de son frère (impliqué dans une tentative d'assassinat narodnik), la supériorité du marxisme. En réalité cela prit encore de longues années d'études à Lénine.

3.2 Calomnies et falsifications

Le régime stalinien et ses relais à l'échelle mondiale vont se faire une spécialité de transformer la réalité à leur guise et de calomnier leurs opposants.

En 1929, la Pravda titre sur « Mister Trotski au service de la bourgeoisie britannique ».

Le 20 juin 1937, paraît dans L'Humanité un article de George Soria, « Le trotskisme au service de Hitler » qui invente que le POUM préparerait un complot avec les franquistes. Le même Soria récidive dans le numéro du 25 septembre en titrant « Le trotskisme au service de Franco ».

L'Humanité du 20 avril 1934 affiche en première page « La fraction trotskiste dans le camp de la contre-révolution »[10].

Ces pratiques iront jusqu'à la falsification de nombreuses photographies (opposants comme Trotski effacés...).

Cette propagande anti-trotskiste se poursuivra dans l'après-guerre. Par exemple en 1969 paraissent aux Editions de Moscou Le parti des bolchéviks en lutte contre le trotskisme, et Le Trotskisme, cet antiléninisme.

3.3 Domination sociale

La société sous Staline était bien sûr brutale (des millions de morts...), mais aussi profondément inégalitaire. La particularité par rapport aux sociétés capitalistes, était que cette inégalité ne se basait pas vraiment sur des différences de revenus, car les écarts sont restés relativement faibles depuis la révolution, même s'ils ont grandi. En revanche, les dirigeants de la production étatisée, c'est à dire la bureaucratie (ou Nomenklatura), s'est arrogée de grands privilèges dans l'accès aux biens.

Staline justifiait cet état de fait par une des formules lapidaires et pseudo-léninistes dont il avait le secret :

« Tout léniniste sait (s’il est un véritable léniniste) que l’égalisation dans le domaine des nécessités et de la vie individuelle est une absurdité réactionnaire petite-bourgeoise. » [11]

Sous le régime stalinien, les syndicats deviennent un simple rouage de l'État, sans autonomie. La législation soviétique ne comportait pas d'interdiction formelle de la grève, mais elle n'était pas non plus autorisée, donc la grève constituait une infraction à la discipline du travail (consacrée, elle, par la loi)[12].

La bureaucratie a réussi à s'ériger en couche dominante (certains marxistes parlent de classe, certains contestent). Elle exerçait sa domination sur les producteurs, que ce soit les paysans (comme le montre la collectivisation forcée de 1929) ou les ouvriers (comme le montre la répression de la grande grève de Vitchouga en 1932).

A cette période est mis en place le premier plan quinquennal d’industrialisation, de façon brusque (ce qui, après la NEP, désorganise profondément l'économie) et autoritaire, et des grandes famines apparaissent. Staline a recours à une répression massive, sous des formes qui présageaient les grandes purges, les déplacements de populations avec leurs milliers de victimes ainsi que des mesures de mise au «travail forcé» de centaines de milliers de personnes (loin d'être tous des pro-capitalistes...) au cours des années 1930, notamment dans les goulags.

3.4 Recul du féminisme, des droits LGBTI...

Le stalinisme a aussi représenté un recul sur la condition des femmes et des LGBTI. Entre 1927 et 1930, les autorités amorcent une vague homophobe : ces sujets sont censurés, l'homosexualité est considérée comme une maladie mentale...[13]

Le 7 mars 1934, l'interdiction de l'homosexualité masculine est ajoutée au code criminel (article 121), et attaquée comme « signe de fascisme » (dans un contexte de lutte contre l'Allemagne nazie). Autre signe de la profonde réaction de cette époque, l'avortement est interdit par un décret du 27 juillet 1936.

Entre 1985 et 1987, la police politique de la Pologne stalinienne lança une vaste campagne d'arrestations et de fichage des homosexuel-les du pays (Opération Hyacinthe[14]).

3.5 Regain du racisme

Par rapport à la politique des bolchéviks qui étaient progressistes sur la question nationale en Russie (notamment sous la vigilance de Lénine qui critiquait activement les tendances au chauvinisme grand russe, y compris dans le parti), le stalinisme a représenté un recul. L'affaire géorgienne, dans les derniers moments de Lénine, montre que cela a même été un des symboles du basculement.

Sous le régime stalinien, l'antisémitisme a vite connu une résurgence, finissant par frapper même ceux des juifs qui étaient les plus zélés staliniens, comme le journaliste/dénonciateur David Zaslavski[15].

Staline n'hésitait pas à sous-entendre que l'Opposition de gauche était dominée par des juifs (ce qui était factuellement faux), et ce fut encore pire au moment de l'Opposition unifiée (avec Zinoviev et Kamenev), où des staliniens répandaient l'idée que l'opposition était le fait de « trois intellectuels juifs mécontents ».[16] Officiellement, Staline niait cependant tout antisémitisme. Il dut même déclarer un jour : « Nous nous battons contre Trotski, Zinoviev et Kamenev non parce qu’ils sont juifs, mais parce qu’ils sont dans l’opposition, etc. ». Mais il prenait soin de véhiculer de nombreux sous-entendus, par exemple en insistant sur les noms juifs des bolchéviks qui avaient des pseudonymes, ou contre le fils de Trotski qui avait pris le nom russe de sa mère :

« lorsque mon fils Serge Sedov fut l’objet de l’incroyable accusation d’avoir comploté d’empoisonner des travailleurs, le GPU a annoncé dans la presse soviétique et étrangère que le véritable nom de mon fils n’était pas Sedov, mais Bronstein. Si ces falsificateurs avaient voulu souligner les liens de l’accusé avec moi, ils l’auraient appelé Trotski, puisque politiquement le nom de Bronstein ne dit rien à personne. Mais ils avaient en tête une autre idée : en fait, ils voulaient souligner mon origine juive  »[16]

A l'étranger parmi les soutiens et compagnons de route du « communisme officiel » (le stalinisme), on ne voulait pas voir ces problèmes et celui de l'antisémitisme en particulier. L'URSS était vue comme porteuse de paix entre les peuples et d'opposition radicale au nazisme.

3.6 Répression puis instrumentalisation de la religion

La révolution d'Octobre a entraîné une vague d'anticléricalisme, relativement populaire. Des églises et des reliques ont été brûlées, d'autres biens sont confisqués, et un bon nombre de membres du clergé orthodoxe ont payé le prix d'une ancestrale collaboration avec le tsarisme. S'ajoute à cela le sentiment anti-religieux propre aux cadres bolchéviks, en tant que militants formés à l'idée que la religion est un pilier de l'aliénation des masses. Cependant la liberté de croyance n'était pas remise en cause et la direction du parti bolchévik tendait à modérer la propagande anti-religieuse, Lénine notamment intervenant régulièrement dans ce sens. Les religions des minorités nationales du pays (musulmans, juifs...) faisaient l'objet d'une attention encore plus particulière.

Avec la stalinisation, un durcissement s'opère. La politique passe d'une attitude plutôt laïque à un athéisme d'État, et à une répression de toute pratique religieuse[17]. Après la mort de Lénine, de nombreuses églises ont été détruites par le régime (par exemple à Oulianovsk[18]). En 1925 est créée une organisation de masse destinée à promouvoir activement l'athéisme, l'Union des sans-dieu.[19]

La saisie de tous les biens restant à l'Église est ordonnée en 1934, officiellement pour lutter contre la Grande Famine. Avec la Seconde guerre mondiale, la politique soviétique vis-à-vis de la religion orthodoxe change : pour souder la population autour du régime, il ne s'agit plus de persécuter, mais d'instrumentaliser l'Église. Celle-ci connaît un nouveau départ avec l'élection d'un nouveau patriarche en 1943 (le dernier n'avait pas été remplacé à sa mort en 1925). Staline s'adresse à la radio aux citoyens en utilisant non plus le terme de « camarades » mais celui de « frères ». Pratiquer l'orthodoxie ne conduit plus au Goulag et même des membres du Parti et de la Nomenklatura finissent par s'y adonner.

3.7 Recul artistique, scientifique...

La période stalinienne entraînera dans les domaines artistiques, scientifiques et culturels une véritable chape de plomb. Toute production intellectuelle (comme manuelle) est mise au pas au service du régime. Ceux qui étaient reconnus dans leur domaine sont souvent mis à l'écart, même ceux qui avaient percé dans la période de la fin des années 1920 déjà bureaucratisée. Staline se méfie d'eux parce que leur poste et leur influence n'est pas totalement subordonnée à lui, ou parce que les créations ou recherches qu'ils ont développées ne sont pas parfaitement adaptées à la propagande de l'Etat. Ainsi les recherches novatrices sur l'écologie sont mises de côté, les thèses de l'historien Pokrovsky sont rejetées... Le symbole le plus caricatural de la « science » manipulée (et donc non scientifique) est la doctrine de Lyssenko, qui conduira au rejet pendant plusieurs années de la génétique, considérée comme « bourgeoise ».

3.8 Le « diamat » et le « marxisme » officiel

Dans la doctrine officielle de l'État soviétique, le matérialisme dialectique (abrégé « diamat » en russe) est devenu un dogme. On professait comme un prêt à penser les « trois lois de la dialectique » évoquées par Engels dans Dialectique de la nature , et il fallait impérativement voir la dialectique en œuvre dans toute science. Même des scientifiques reconnus dans leur discipline furent purgés parce qu'ils ne montraient pas assez qu'ils appliquaient le « diamat ». Cela pouvait aller jusqu'à l'incompétence flagrante et même la contradiction frontale avec le savoir scientifique accumulé jusque là.

C'était, en partie, un effort pour contraindre la science à s'adapter aux besoins spécifiques de l'Union soviétique pour se maintenir comme puissance mondiale. Il ne pouvait plus être question de science pure. Les scientifiques devaient justifier leur travail en démontrant sa pertinence dans le cadre du Plan quinquennal. Mais c'était aussi un effort idéologique pour justifier l’État soviétique, tant aux yeux de ses propres citoyens que pour les sympathisants d'Occident, comme une société totalement organisée selon les intérêts du prolétariat.

On pourrait croire que la pensée marxiste, a minima, a pu progresser avec un tel soutien d'un des États les plus puissants du monde. Mais c'est tout l'inverse. Avec l'intimidation généralisée de toute pensée sceptique, l'impossibilité de remettre en question ne serait-ce que des points particuliers du marxisme, celui-ci ne pouvait que se transformer une idéologie grotesque, et se vider de ce qui potentiellement en fait un socialisme scientifique. Comble de l'ironie, certains ouvrages de Marx étaient même censurés en URSS.[20]

3.9 Stalinisme, maoïsme, hoxhaïsme, juchéisme...

Les staliniens s'autoproclament généralement « marxistes-léninistes ». Soit ils refusent d'employer le terme de stalinisme, soit ils en font un usage non péjoratif et réduit à la seule période du vivant de Staline. A l'inverse, les communistes révolutionnaires font un usage étendu du terme de stalinisme, pour désigner à la fois le pouvoir bureaucratique dans les PC et les États « communistes », et les éléments idéologiques communs.

Il est évident que les différentes variantes d'idéologies qui se sont développées dans les différents PC du monde ont des spécificités. Notamment parce que l'abandon de l'internationalisme prolétarien a quasi-systématiquement fait évoluer ces partis vers des formes denationalisme de gauche, adaptées à l'idéologie dominant dans la petite-bourgeoisie nationaliste, en particulier dans les pays dominés.

Mais cette évolution a été facilitée par un socle idéologique commun au stalinisme des années 1920-1940, qui représentait déjà une déformation grossière du marxisme et des apports de Lénine. En particulier, la théorie de la révolution par étapes, que Staline a repris aux menchéviks (notamment via des menchéviks recyclés comme Martynov).

S'il est certain que Mao Zedung a développé quelques éléments tactiques et stratégiques propres (qui s'éloignent encore davantage du marxisme, dans l'accent qu'ils mettent sur la paysannerie), il partageait fondamentalement l'idée stalinienne de la révolution par étapes, et ce n'est pas en suivant une idéologie qu'il opéré l'étatisation de l'économie chinoise en 1953. Dans ce sens, on peut rattacher le maoïsme au sens large du stalinisme.

Les idéologies qui ont par la suite dérivé du maoïsme, comme l'hoxhaïsme ou le juchéisme, n'ont fait qu'approfondir l'éloignement vis-à-vis du marxisme. Elles n'ont jamais conduit à un retour vers la démocratie ouvrière.

4 Le stalinisme après Staline

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A la mort de Staline en 1953, le régime opère un léger assouplissement de son totalitarisme. Les « excès » de Staline sont dénoncés par Khrouchtchev, ce qui sera appelé la « déstalinisation ». Mais les bases de la société resteront les mêmes.

Les travailleurs d'URSS n'étaient pas dupes, et voyaient bien la contradiction avec le dogme officiel. On peut en voir un exemple dans cette blague qui circulait sur Leonid Brejnev (chef de l'URSS de 1964 à 1982) :

Brejnev tenait [démontrer à sa mère] sa réussite. Il la fait venir de Dniéprodzerjinsk, en Ukraine, pour lui montrer son vaste appartement, mais elle reste muette, même un peu gênée. Alors il téléphone au Kremlin, ordonne qu’on lui amène sa Zil, et il conduit sa mère à sa datcha d’Ousovo, où ont résidé Staline et Khrouchtchev. Il lui fait tout visiter, lui montre les magnifiques jardins, mais elle ne dit toujours rien. Alors il commande son hélicoptère personnel et l’emmène droit à son pavillon de chasse de Zavidovo. Là, il la fait entrer dans la salle de banquet, lui fait admirer l’énorme cheminée, ses fusils, tout le luxe et, incapable de se retenir plus longtemps, il supplie : « Dis-moi, maman, qu’est-ce que tu en penses ? » Elle hésite, et puis hasarde : « Ma foi, c’est bien beau. Leonid… Mais si les Rouges reviennent ? »[11]

La loi du 23 novembre 1955 autorise à nouveau l’avortement. En revanche la répression de l'homosexualité se maintient. En 1968, un chirurgien soviétique est le premier à réaliser une opération de réassignation sexuelle, ce qui lui vaudra des ennuis et sera tenu secret pendant 20 ans[21].

5 Luttes contre les régimes staliniens

Il y a eu différents exemples de luttes contre des régimes staliniens :

6 Nature du stalinisme

6.1 États (État ouvrier dégénéré, capitalisme d'État...)

De nombreux débats ont eu lieu sur la nature de l'État issu de la révolution russe. En quelque sorte, ces débats ont eu lieu avant même la révolution, de manière prospective, selon que les marxistes estimaient que la révolution serait bourgeoise, bourgeoise mais dirigée par les ouvriers et les paysans, ouvrière-socialiste... Ces débats ont continué au sein des bolchéviks au lendemain de la révolution. Lénine pouvait par exemple parler à la fois « d'État ouvrier présentant une déformation bureaucratique », de capitalisme d'État dirigé par la classe ouvrière...

Dès les années 1920 avec les débuts de la bureaucratisation, et plus encore avec le plein développement du totalitarisme stalinien, ces débats sont devenus plus aigus, parce que lié à la position par rapport à l'URSS (hostilité, défense partielle ou inconditionnelle...). Trotski caractérisait l'État soviétique comme un « État ouvrier bureaucratiquement dégénéré », mais d'autres marxistes l'ont plutôt caractérisé comme un « capitalisme d'État » ou un « collectivisme bureaucratique ». Après 1945, l'apparition de nombreux autres États dirigés par des bureaucraties de type stalinien a encore complexifié ce débat.

6.2 Partis communistes staliniens

Des débats ont également eu lieu sur la nature des partis communistes. Ceux-ci se considéraient comme des partis ouvriers révolutionnaires, mais la ligne objectivement anti-révolutionnaire imposée par Moscou à partir du milieu des années 1920 a alimenté de plus en plus de polémiques entre marxistes.

L'opposition de gauche menée par Trotski a caractérisé l'Internationale communiste (et ses partis) comme centriste, oscillant entre des politiques gauchistes et des politiques opportunistes (celles-ci dominant de plus en plus), en fonction des intérêts de la bureaucratie de l'État soviétique. Ce lien (idéologique mais aussi matériel) avec l'État soviétique créait une certaine indépendance des PC par rapport aux États capitalistes dans lesquels ils évoluaient, qui pouvait contraster avec la politique des PS, plus intégrés aux bourgeoisies et donc centrés sur la collaboration de classe. Même si dans la pratique ces deux directions trahissaient les intérêts du mouvement ouvrier, ils le faisaient pour des raisons différentes.

Cela créait des situations complexes, qui ont engendré des polémiques sur l'attitude à avoir vis-à-vis de ces forces, y compris entre marxistes révolutionnaires. Par exemple aux États-Unis en 1947, le WP, scission du SWP, mettait en avant le risque qu'un parti stalinien instaure une dictature (cela venait de se produire dans de nombreux pays d'Europe de l'Est).[22]

6.3 Clivage gauche droite

Les États staliniens sont des régimes à parti unique. Donc à première vue il n'y a pas de sens à parler de clivage gauche droite. Cependant des études de psychologie en URSS ont montré que les « personnalités autoritaires » (RWA, trait de personnalité corrélé au conservatisme, au conformisme et à la droite) se trouvaient plutôt du côté des membres du parti unique.[23]

Il faut souligner que cela ne peut pas être plaqué sur l'analyse des PC dans le contexte des pays capitalistes. Sur cette même échelle RWA, les membres des PC obtiennent (années 1980) des scores bien plus bas que les autres.[24]

7 Bolchévisme et stalinisme

Naturellement, la politique intérieure et extérieure de l’URSS sous Staline n’a rien à voir avec l’élan émancipateur et internationaliste de la révolution d’Octobre. Comment est-on passé d’un mouvement révolutionnaire inédit, créateur et libérateur à une dictature totalitaire ?

La thèse de la continuité entre bolchévisme et stalinisme est défendue, pour des raisons opposées, à la fois par les staliniens, qui se présentent comme les héritiers d’Octobre, et par les réactionnaires qui veulent couvrir d’un même opprobre le stalinisme et le communisme en général. Certains anarchistes font ou ont également fait ce raccourci entre marxisme et stalinisme.

Face à ce raccourci, Trotski et les trotskystes voient dans l’isolement international de la Russie et dans l’affaiblissement numérique de la classe ouvrière la source de la bureaucratisation du régime, bureaucratisation dont Staline deviendra le nom.

Cependant, sans remettre en cause cette analyse générale, certains auteurs trotskystes se sont attachés à montrer comment certains défauts contenus dans la première phase de la révolution russe ont pu, par la suite, contribuer à donner naissance au monstre stalinien.

8 Notes et sources

  1. En Une de L'Humanité du 1er mars 1938
  2. Pierre Broué et Raymond Vacheron, Meurtres au maquis, en collaboration avec Alain Dugrand, Bernard Grasset, 1997 (ISBN 2-246-54021-6)
  3. Le Maîtron, BROCARD Marcel, Alfred, Louis dit parfois Pierre
  4. Internationale Communiste, VI° Congrès, Programme, 1928
  5. Trotski, La troisième période d'erreurs de l'Internationale Communiste, 8 janvier 1930
  6. Léon Trotski, Contre le national-communisme - Révolution populaire au lieu de révolution prolétarienne, 1931
  7. Alfred Rosmer, Appendice à Ma vie, de Trotski, 1954
  8. C. L. Sulzberger dans le New-York Times du 31 octobre, cité dans Pierre Broué, Le parti bolchévique, 1963
  9. Ernest Mandel, Actualité du trotskisme, Critique Communiste, novembre 1978.
  10. https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k404980f
  11. 11,0 et 11,1 Hedrick Smith, Les Russes, 1976
  12. Semion Ivanov, La grève en droit soviétique, Revue internationale de droit comparé, Année 1991
  13. https://en.wikipedia.org/wiki/LGBT_history_in_Russia
  14. https://fr.wikipedia.org/wiki/Opération_Hyacinthe
  15. Mediapart, Octobre 17. David Zaslavski, le zélé «travailleur de la libre presse soviétique», Août 2017
  16. 16,0 et 16,1 Léon Trotski, Thermidor et l'antisémitisme, 22 février 1937
  17. https://fr.wikipedia.org/wiki/Politique_anti-religieuse_soviétique
  18. https://fr.wikipedia.org/wiki/Oulianovsk
  19. Anderson, John (1994). Religion, State and Politics in the Soviet Union and Successor States. Cambridge, England: Cambridge University Press. pp. 3. ISBN 0-521-46784-5.
  20. Maximilien Rubel, « Karl Marx, auteur maudit en URSS », 1951, Preuves no 7 et 8.
  21. Beyond Russia, Transsexualité en URSS : les confessions du pionnier du changement de sexe, 2014
  22. Max Shachtman, La nature des partis staliniens. Leurs racines de classe, rôle politique et buts fondamentaux, mars 1947
  23. Chaîne Hacking Social, Les soumis autoritaires: l'autoritarisme de droite, 17 mars 2023
  24. Chaîne Hacking Social, Le dédale de l'autoritarisme - Les Autoritaires, partie 3, 16 mars 2022