Économie

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L'économie est le système formé par la production, la distribution, l'échange et la consommation. Le terme peut désigner l'état économique (structurel/conjoncturel) d'une organisation, ou bien la théorie qui se propose de décrire cet état. Cette page aborde simultanément ces deux aspects, qui sont étroitement liés (matérialisme historique).

1 Généralités[modifier | modifier le wikicode]

L'économie repose sur des concepts simples. En revanche, la division en classes de la société la complexifie beaucoup en pratique, puisque les lois du marché sont des lois sociales que l'on ne peut évaluer qu'a posteriori, sans qu'il y ait une conscience de l'ensemble de la part des acteurs. L'économie était bien sûr d'une simplicité basique aux premiers temps de l'humanité, dans les communautés tribales. Mais il est tout à fait envisageable qu'elle trouve à l'avenir une forme d'autant plus simple qu'elle serait consciemment choisie, dans une société socialiste.

Marx fait la remarque suivante à propos de l'économie, liée au fond la gestion du temps de travail humain :

"Dans les conditions de la production communautaire [dans le communisme], la détermination du temps demeure, bien entendu, essentielle. Moins il faut de temps à la société pour produire du blé, du bétail, etc... plus elle gagne de temps pour d'autres productions, matérielles ou spirituelles. De même chez un individu, l'universalité de son développement, de sa jouissance et de son activité dépend de l'économie de son temps. En dernière analyse, c'est à quoi se réduisent toutes les économies. En outre, la société doit répartir judicieusement son temps pour obtenir une production conforme à ses besoins généraux; de même, l'individu doit bien diviser son temps pour acquérir ce qu'il faut de connaissances ou pour satisfaire aux diverses exigences de son activité."[1]

2 Historique[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Antiquité[modifier | modifier le wikicode]

Parmi les premières considérations théoriques sur l'économie, il y a les penseurs grecs. On trouve chez Aristote une distinction entre l'économie, vue comme la production/accumulation de richesses matérielles, et la chrématistique, l'art du négoce ou de l'usure, qu'il dénonce.

2.2 Moyen-Âge[modifier | modifier le wikicode]

Dans l'Europe médiévale féodale, les rares penseurs traitant d'économie sont des théologiens. Au sein d'une économie qui était redevenue quasi-exclusivement agricole et non-marchande, le développement du commerce est surveillé de près par les idéologues chrétiens. Thomas d'Aquin (13e siècle) insiste sur le fait que les marchands doivent pratiquer un "juste prix", doivent gagner leur argent sur un service (au moins le transport des marchandises), mais absolument pas "de l'argent avec de l'argent" et à ce titre il condamne les prêts avec intérêt.

Au 14e siècle, de l'autre côté de la Méditerrannée, Ibn Khaldoun va plus loin et propose en plus des considérations moralistes des éléments d'explication économique (notamment de la formation des prix, du lien entre division du travail et croissance...) ce qui en fait un précurseur de l'économie moderne.

2.3 Le mercantilisme[modifier | modifier le wikicode]

Le mercantilisme est le début de la pensée économique moderne. À partir du 15e siècle en Europe, le développement du commerce, les grandes découvertes, l'accumulation du capital commencent à transformer les sociétés féodales. Les royaumes absolutistes suivent les conseils de penseurs qui les incitent à prendre des mesures protectionnistes pour renforcer leur puissance, qui passe de plus en plus par l'économie.

2.4 Les physiocrates[modifier | modifier le wikicode]

La bourgeoisie commerçante est la plus grande bénéficiaire de l'essor économique. Elle va alors développer des thèses visant à la libérer : c'est en quelques sortes le point de départ du libéralisme économique. Au 18e siècle, les physiocrates français menés par François Quesnay affirment que la richesse d'un pays est la richesse non pas de l'État mais de ses habitants (comprendre : ses bourgeois), et ils prônent le "laissez-faire".

2.5 L'école classique[modifier | modifier le wikicode]

Outre-Manche, Adam Smith observe le formidable enrichissement de l'Angleterre et des Pays-Bas et tente d'en décrire les mécanismes. Il dresse un premier système théorique cohérent, avec des apports majeurs dans la compréhension de la division du travail, de la valeur-travail, de la monnaie et du capital. Mais surtout, il décrit le fonctionnement du marché, qu'il voit comme une force conduisant à l'optimum social ("main invisible").[2]

David Ricardo reprit et systématisa les travaux d'Adam Smith, tout en approfondissant plusieurs aspects, comme la loi des rendements décroissants (d'abord étudiée par Malthus) et la rente foncière . Il représente l'apogée de l'économie dite classique.

Il est à noter que les économistes classiques ne niaient pas encore l'exploitation du monde ouvrier, comme le relevait Marx :

Il n'est pas jusqu'à J. B. Say qui ne dise : « Les épargnes des riches se font aux dépens des pauvres. » « Le prolétaire romain vivait presque entièrement aux frais de la société... On pourrait presque dire que la société moderne vit aux dépens des prolétaires, de la part qu'elle prélève sur la rétribution de leur travail. » (Sismondi, Etudes, etc., t. 1, p. 24.)[3]

Marx faisait une différence entre économistes classiques et économistes vulgaires, qui étaient beaucoup plus idéologues et beaucoup moins scientifiques :

« Je fais remarquer une fois pour toutes que j'entends par économie politique classique toute économie qui, à partir de William Petty, cherche à pénétrer l'ensemble réel et intime des rapports de production dans la société bourgeoise, par opposition à l'économie vulgaire qui se contente des apparences, rumine sans cesse pour son propre besoin et pour la vulgarisation des plus grossiers phénomènes les matériaux déjà élaborés par ses prédécesseurs, et se borne à ériger pédantesquement en système et à proclamer comme vérités éternelles les illusions dont le bourgeois aime à peupler son monde à lui, le meilleur des mondes possibles. »[4]

2.6 Le marxisme[modifier | modifier le wikicode]

🔍 Voir : Marxisme.

Les travaux de Marx et Engels se situent à la fois en profonde continuité avec les avancées de l'économie classique de leur époque, et en rupture révolutionnaire. Le socialisme scientifique reprend la description de la valeur travail, de la division du travail, du capital... mais déborde systématiquement du champ de "l'économie pure" : pour comprendre la société moderne, il faut à la fois une sociologie, une économie et une étude de l'histoire. Il n'y a pas de lois intemporelles de l'économie, qui permettraient à elles seules d'expliquer les profondes transformations des modes de production.

Au sein du mode de production capitaliste, les facteurs économiques ont de fait pris une plus grande importance que dans les autres sociétés, car les marchés ont été étendues à des échelles très larges (États-nations, et partiellement à l'échelle mondiale), ce qui fait que les règles purement économiques exercent une forte pression sur les sociétés. L'étude de l'économie est donc pour les marxistes d'une importance clé pour comprendre les contradictions structurelles de ce système, dont les plus manifestes sont l'exploitation du prolétariat et les crises cycliques. La compréhension de l'économie permet également d'expliquer pourquoi les États bourgeois gouvernement d'une façon qui bénéficie très majoritairement à la bourgeoisie. Contrairement à des explications reposant exclusivement sur du lobbying (voire sur du complotisme), il faut bien comprendre que les politiques économiques ont une certaine rationalité dans le cadre du système.[5]

Cependant même sous le capitalisme, aucune explication satisfaisante ne peut se contenter de l'économie pure. Les grèves, les différences de combativité entre secteurs de la classe ouvrière, les effets à long terme des acquis des luttes ou au contraire les défaites, ont une influence profonde sur les taux de profits, les différences de compétitivité entre pays, et le niveau plus ou moins offensif du patronat dans ses attaques anti-sociales. Surtout, contre tout mythe d'un optimum dans la société bourgeoise, une révolution est nécessaire pour renouer avec le progressisme et établir une société humaine consciente.

2.7 L'école autrichienne[modifier | modifier le wikicode]

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2.8 L'école néoclassique[modifier | modifier le wikicode]

À la fin du 19e siècle a lieu un grand changement de paradigme parmi les économistes bourgeois. Ceux-ci vont chercher à refouler tout ce qu'il y avait de subversif dans les fondements de l'économie classique, et en particulier, la théorie de l'utilité marginale remplace la valeur travail. "L'économie politique" est rejetée, au profit du mythe d'un économisme autonome. Intellectuellement, c'est une formidable réaction bourgeoise. Mais cette école est au coeur de l'économie "orthodoxe" enseignée aujourd'hui. Ses grands noms sont Walras, Jevons, Menger.

2.9 L'école keynésienne[modifier | modifier le wikicode]

Après les ravages de la Seconde guerre mondiale, les économies européennes sont si dévastées qu'il faut une forte intervention de l'État pour réorienter la production et pour "remettre en état" les travailleurs terriblement paupérisés, d'autant plus que le mouvement ouvrier est assez offensif et qu'il faut bien faire des concessions. La reconstruction, accompagnée par une multiplication des produits de consommation, offre des marchés qui permettent une forte croissance.

Le keynésianisme constitue donc à cette époque une sorte de pacte social qui préserve fondamentalement l'exploitation capitaliste. L’État dit providence permet de réguler une partie du marché, de garantir les taux de profit et de lisser les crises. Les salaires socialisés permettent de garantir la réalisation de la valeur dans le temps et de planifier le développement des secteurs de production et d’accroître notablement la production de biens de consommation.

2.10 Le tournant néolibéral[modifier | modifier le wikicode]

2.11 La Nouvelle économie classique[modifier | modifier le wikicode]

Entre néolibéralisme et post-keynésianisme...

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3 Étymologie[modifier | modifier le wikicode]

Du grec « οἶκος »(maison) et « νόμος » (loi), soit "administration d'un foyer". Xénophon et Aristote écrivent tous deux des livres nommés Économie. Le terme a également été utilisé pour décrire la composition d'une oeuvre littéraire.

C'est surtout avec le développement de la société marchande que des penseurs ont été amenés à utiliser un concept pour décrire "la façon dont un pays est organisé" : Montchrestien utilise le terme d'économie politique. C'est cette notion que recouvre le sens actuel d'économie.

4 Les robinsonnades[modifier | modifier le wikicode]

De nombreux économistes ont recours à des expériences de pensée se plaçant sur une île déserte à la Robinson Crusoé, pour exposer leur modèle économique de façon simplifiée.

Marx se moquait souvent de cette mode, mais répond néanmoins dans le Capital par un passage avec sa propre robinsonnade.

5 Science et/ou idéologie ?[modifier | modifier le wikicode]

L'économie est-elle une science et/ou une idéologie ? La question soulève des débats complexes.

Pour prendre un exemple, Marx considérait que l’École classique (Adam Smith, David Ricardo...) exprimait à la fois des résultats scientifiques incontestablement plus solides que d'autres théories, et à la fois les intérêts de la bourgeoisie. Ainsi il disait de la théorie de Ricardo sur la rente foncière qu'elle est « un système scientifique »[6], et en même temps, qu'elle « n'est que l'expression économique d'une lutte sans merci des bourgeois industriels contre les propriétaires fonciers. ».

Il critiquait durement le protectionniste allemand Friedrich List lorsque celui-ci accusait les économistes anglais de n'avoir défendu qu'une idéologie anglaise :

« Comme il s'agit, en effet, pour le bourgeois allemand, de droits protecteurs, il est naturel que tout le développement de l'économie depuis Smith n'ait aucun sens pour lui, étant donné que les représentants les plus remarquables de cette économie ont pour point de départ la société bourgeoise actuelle de la concurrence et du libre-échange. Le philistin allemand montre ici, de mainte façon, son caractère « national ». Dans toute l'économie politique, il ne voit que systèmes élucubrés dans les cabinets d'étude. Que le développement d'une science telle que l'économie soit liée au mouvement réel de la société, ou même en soit seulement l'expression théorique, M. List ne le soupçonne même pas : c'est un théoricien allemand. Étant donné que sa propre théorie (son ouvrage) recèle un but caché, il flaire partout des buts secrets. »[7]

Dans le même ordre d'idée, il dira bien plus tard qu'il n'y avait jamais réellement eu les conditions pour que l'économie allemande soit un minimum scientifique, comme elle avait pu l'être en Angleterre à ses débuts :

« Depuis 1848, la production capitaliste s'est de plus en plus enracinée en Allemagne, et aujourd'hui elle a déjà métamorphosé ce ci-devant pays de rêveurs en pays de faiseurs. Quant à nos économistes, ils n'ont décidément pas de chance. Tant qu'ils pouvaient faire de l'économie politique sans arrière-pensée, le milieu social qu'elle présuppose leur manquait. En revanche, quand ce milieu fut donné, les circonstances qui en permettent l'étude impartiale même sans franchir l'horizon bourgeois, n'existaient déjà plus. En effet, tant qu'elle est bourgeoise, c'est-à-dire qu'elle voit dans l'ordre capitaliste non une phase transitoire du progrès historique, mais bien la forme absolue et définitive de la production sociale, l'économie politique ne peut rester une science qu'à condition que la lutte des classes demeure latente ou ne se manifeste que par des phénomènes isolés. »[8]

Pour Marx, l'économie était un domaine dans lequel les intérêts capitalistes pesaient bien plus lourdement que sur n'importe qu'elle autre discipline. Comme il l'écrivait lors de la première publication du Capital :

« Sur le terrain de l’économie politique la libre et scientifique recherche rencontre bien plus d’ennemis que dans ses autres champs d’exploration. La nature particulière du sujet qu’elle traite soulève contre elle et amène sur le champ de bataille les passions les plus vives, les plus mesquines et les plus haïssables du cœur humain, toutes les furies de l’intérêt privé. »[9]

Par ailleurs, il soulignait qu'une partie du fait que l'économie soit très chargée d'idéologie vient de la difficulté elle-même de son objet d'étude.

« La forme de la valeur réalisée dans la forme monnaie est quelque chose de très simple. Cependant l'esprit humain a vainement cherché depuis plus de deux mille ans à en pénétrer le secret, tandis qu'il est parvenu à analyser, du moins approximativement, des formes bien plus complexes et cachant un sens plus profond. Pourquoi ? Parce que le corps organisé est plus facile à étudier que la cellule qui en est l'élément. D'un autre côté, l'analyse des formes économiques ne peut s'aider du microscope ou des réactifs fournis par la chimie; l'abstraction est la seule force qui puisse lui servir d'instrument. Or, pour la société bourgeoise actuelle, la forme marchandise du produit du travail, ou la forme valeur de la marchandise, est la forme cellulaire économique. »[9]

Il estimait que des sujets comme « l'économie politique et la religion » ne devaient pas être enseignés à l'école, pour laisser les adultes se faire leur opinion sur ces sujets.[10]

Lénine avait aussi cette vision par rapport à l'économie. Il soulignait que les économistes dominants pouvaient faire des études factuellement solides sur des sujets précis, tout en ayant une vision d'ensemble (la théorie globale du marché capitaliste) chargée d'idéologie :

« On ne peut croire un mot d'aucun des professeurs d'économie politique, capables d'écrire des ouvrages de très grande valeur dans le domaine des recherches spéciales, au sujet des faits réels, dès qu'il est question de la théorie générale de l'économie politique. Car cette dernière est, tout autant que la gnoséologie, dans la société contemporaine, une science de parti. Les professeurs d'économie politique ne sont, de façon générale, que de savants commis de la classe capitaliste. »[11]

La caractérisation de "bourgeoise" n'a pas de rapport direct avec la position sociale de ceux/celles qui produisent cette science. Pour des raisons matérielles, l'essentiel des économistes étaient issus de la bourgeoisie, même ceux qui critiquent le capitalisme comme Marx. Avec le développement du capitalisme et la démocratisation de l'enseignement supérieur, on trouve davantage de penseurs issus du prolétariat, et pour autant les théories économiques dominantes restent "bourgeoises" pour des raisons structurelles.

Le conflit d’intérêts est fréquent chez les économistes dominants. Beaucoup se font financer par des organisations patronales, et expliquent ensuite que les mesures (pro-capitalistes) qu'ils proposent sont de la pure science...[12] Cependant la plupart de ces économistes n'ont pas besoin de recevoir de l'argent du patronat pour être convaincus que « le marché » est une forme d'économie supérieure (même la majorité des « économistes hétérodoxes », keynésiens ou autres, raisonnement dans le cadre d'un marché). A l'échelle mondiale et historique, c'est le dynamisme du capitalisme qui est le principal facteur explicatif de la force de l'idéologie bourgeoise, bien plus que les facteurs directement « intentionnels ».

6 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]