Commerce

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Un marchand d'épices (Nuremberg, 15e siècle)

Le commerce désigne l'activité économique d'achat et de revente de biens et de services, en particulier l'achat dans le but de revendre avec un profit.

L'apparition de l'échange marchand, qui se produit très tôt dans l'histoire de l'humanité, est une condition nécessaire mais non suffisante de l'apparition du capitalisme.

1 Histoire du commerce[modifier | modifier le wikicode]

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Dans les premières communautés humaines existait une forme de « communisme primitif » : il y avait très peu de division du travail, et pas d'échange marchand, le travail et les richesses étant partagées de façon plus ou moins égalitaires.

Cette organisation communautaire peut atteindre des échelles assez vastes et n'est pas limitée à des "tribus". Quoi qu'il en soit pour que des échanges marchands apparaissent, il faut que les deux échangistes se considèrent comme des propriétaires indépendants.

« [U]n tel rapport d'indépendance réciproque n'existe pas encore pour les membres d'une communauté primitive, quelle que soit sa forme, famille patriarcale, communauté indienne, État inca comme au Pérou, etc. L'échange des marchandises commence là où les communautés finissent, à leurs points de contact avec des communautés étrangères ou avec des membres de ces dernières communautés. Dès que les choses sont une fois devenues des marchandises dans la vie commune avec l'étranger, elles le deviennent également par contrecoup dans la vie commune intérieure. »[1]

Le commerce avait une tendance à se développer dans toute société précapitaliste où une relative stabilité existait. Il se développait notamment dans et entre (commerçants phéniciens...) les grands empires de l'Antiquité.

Cependant, tout en créant des conditions favorables, les empires pouvaient constituer des freins, car la classe dominante, assise sur la rente foncière, avait aussi la force de réprimer les marchands si elle se sentait menacée par eux. Par exemple avec la dynastie Ming (1368), l’État chinois bride les marchands qu'il voit comme une menace, et prend le monopole du commerce extérieur, réduisant nettement les convois de marchands, et interdisant aux sujets chinois de se rendre dans les ports étrangers.[2]

La déstabilisation consécutive à l'effondrement de l'Empire romain fait d'abord chuter le commerce de longue distance. Néanmoins, l'Europe connaît ensuite un renouveau du commerce au cours du Moyen-Âge (foires de Champagne, ligue hanséatique...). Certains marxistes ont alors pu parler d'un rôle progressiste des marchands :

« Pendant mille ans, avant l'avènement du capitalisme industriel et avant que les conditions techniques modernes n'aient transformé la production, le marchand était l'un des facteurs de progrès les plus puissants. (...) Le marchand ne pouvait tirer son profit qu'en achetant des marchandises au-dessous de leur valeur et en les revendant au-dessus de leur valeur. Cela était difficile à réaliser lorsque l'achat et la vente avaient lieu sur le même marché. Le marchand était obligé de chercher des marchandises dans les localités où leur valeur était basse et de les écouler là où leur valeur était élevée. Cela le poussait à rechercher constamment de nouveaux marchés pour acheter et vendre, souvent au péril de sa vie. A une époque où la masse de la population, paysans comme artisans, était attachée à la terre, le marchand remplissait les fonctions d'explorateur et élargissait sans cesse les horizons de l'humanité. »[3]

Le commerce connaît également un essor pendant le Moyen-Âge japonais.

Le développement du capitalisme commercial a précédé et a conditionné le capitalisme industriel (qui est le capitalisme au sens de mode de production qui est devenu hégémonique et non cantonné à une couche marchande). Avec l'essor du commerce longue distance, dans lequel la traite des esclaves a joué un rôle central, les Européens ont pu accumuler un capital qui a rendu possible la révolution industrielle.

On peut relever que les réformes économiques de libéralisation étaient plus acceptables pour les monarques que les libertés politiques, comme en témoignent les tentatives de libéralisation du commerce des grains sous Louis XV et Louis XVI. Cependant les révoltes populaires que cela provoqua conduisirent à des reculs rapides. Les riches spéculateurs n'étaient pas encore en contrôle de l'État.

En revanche la constitution des États bourgeois modernes est allé de pair avec la libéralisation quasi complète du commerce intérieur.

A partir de la révolution industrielle, le commerce continue à jouer un rôle fondamental, car sans circulation des matières premières et des marchandises (dont la vente est une condition de la réalisation des profits), il n'y aurait pas d'essor industriel. On peut voir une forme de complémentarité dans le boom qu'ont connu les villes de Liverpool et Manchester dans l'Angleterre du 19e siècle : Liverpool est la ville portuaire, spécialisée dans le négoce et transport des marchandises, tandis que Manchester était plutôt le lieu où les produits étaient transformés de façon industrielle (industrie textile avant tout). Cependant c'est bien la révolution technique et sociale dans la sphère de la production qui est devenu l'élément moteur du capitalisme, celui qui engendre un surproduit social avec une croissance exponentielle, au delà d'un jeu à somme nulle.

2 Histoire de la pensée économique[modifier | modifier le wikicode]

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Les activités commerciales ont généré très tôt des réflexions sur la nature de l'échange marchand, la source de la richesse apparente des marchands etc. Mais les réflexions suivent l'essor de l'économie réelle, et commencent réellement à s'approfondir à partir de l'époque des Grandes découvertes européennes.[4]

Si l'on s'intéresse aux marchandises en tant que valeur d'usage, l'échange marchandise contre marchandise (hors arnaque) est toujours un échange gagnant-gagnant. Si l'un des échangistes dispose d'un surplus d'un bien X, mais manque d'un bien Y, et que c'est l'inverse pour son voisin, ils y gagneront tous les deux. Mais en termes de valeur d'échange, exprimée dans les prix, y a-t-il un gain, une perte, ou rien de tout cela ?

Les mercantilistes vont alors théoriser que les États doivent tout faire pour accumuler des réserves d'or, au détriment des autres puissances. Ils voyaient le commerce essentiellement comme un jeu à somme nulle, dans lequel certains sont gagnants et d'autres perdants.

Les physiocrates vont ébaucher les idées du libéralisme économique, notamment le fait que le libre-échange est favorable à l'augmentation globale des richesses, et qu'il est donc préférable que l’État lève les restrictions au commerce international. Néanmoins l'origine des richesses restait obscure. Alors que certains penseurs de l'époque (comme Condillac) soutenaient que l'échange entre deux marchandises est un enrichissement mutuel, le physiocrate Le Trosne comprenait clairement que l'échange « moyen » ne créé pas de richesse :

« L'échange est de sa nature un contrat d'égalité qui se fait de valeur pour valeur égale. Il n'est donc pas un moyen de s'enrichir, puisque l'on donne autant que l'on reçoit. (...) L'échange « devient désavantageux pour l'une des parties lorsque quelque chose étrangère vient diminuer ou exagérer le prix : alors l'égalité est blessée, mais la lésion procède de cette cause et non de l'échange. »[5]

En revanche les physiocrates se trompaient en soutenant que seule l'agriculture créait des richesses.

Marx souligne donc que dans les sociétés précapitalistes, le capital commercial ne pouvait être qu'une forme parasitaire :

« [L]e capital commercial paraît impossible dès que l'échange se fait entre équivalents. Il ne semble pouvoir dériver que du double bénéfice conquis sur les producteurs de marchandises dans leur qualité d'acheteurs et de vendeurs, par le commerçant qui s'interpose entre eux comme intermédiaire parasite. C'est dans ce sens que Franklin dit : « La guerre n'est que brigandage, le commerce que fraude et duperie.» »[6]

3 Commerce intérieur et commerce extérieur[modifier | modifier le wikicode]

La constitution des États bourgeois modernes est allé de pair avec la libéralisation quasi complète du commerce intérieur. L'homogénéisation économique que cela a engendré (au prix de nombreux dégâts sociaux) a d'ailleurs été un des facteurs conduisant à des homogénéisations nationales (cimentées par des politiques volontaristes).

Les bourgeoisies nationales ont ensuite eu la tentation de libéraliser le commerce avec l'étranger, de façon plus ou moins profonde, et de façon bilatérale (accord avec un pays « ami ») ou multilatérale (accord général). Elles l'ont fait à chaque fois qu'elles estimaient qu'elles pouvaient manger des parts aux concurrents, ou dans l'idée que ce serait gagnant-gagnant (suivant par exemple la théorie des avantages comparatifs). Lorsqu'elles estiment y perdre, elles remettent en place des barrières protectionnistes.

Globalement, le commerce international a eu tendance à prendre de l'ampleur (mondialisation), et les barrières douanières n'ont jamais été aussi basses qu'aujourd'hui dans le monde. En plus des accords multilatéraux décidés au niveau de l'OMC, certaines zones de libre-échange plus poussées ont été mises en place (ALENA, ASEAN, Mercosur...). La plus approfondie est l'Union européenne, pour laquelle le « marché intérieur » est quasiment le « marché commun » européen (bien qu'il reste encore de nombreuses barrières non tarifaires).

Il y a eu cependant un recul brusque du commerce international dans les années 1930, fruit de la grande dépression et des replis protectionnistes qui ont suivi. Il n'est pas impossible que le capitalisme conduise à nouveau à une telle période.

4 Distribution[modifier | modifier le wikicode]

Le secteur de la distribution est le secteur dédié à la mise à disposition des marchandises aux consommateur·ices. Il s'agit d'une branche du commerce intérieur. Cela peut aller des petites épiceries aux hypermarchés.

🔍 Voir : Distribution.

5 Notes[modifier | modifier le wikicode]

  1. Karl Marx, Le Capital, Livre I - Chapitre II : Des échanges, 1867
  2. Chris Harman, Une histoire populaire de l'humanité, 2011
  3. Karl Kautsky, The Labour Revolution, June 1922
  4. Jacques Valier, Brève histoire de la pensée économique: d'Aristote à nos jours, 2011
  5. Le Trosne, De l'intérêt social, in Physiocrates, Ed. Daire, Paris, 1846
  6. Karl Marx, Le Capital, Livre I, Chapitre V : Les contradictions de la formule générale du capital, 1867