Liberté

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Statue de la Liberté à New York

La liberté est un concept fort, abstrait et philosophique, qui peut se référer à un idéal, ou de façon plus concrète à l'étendue des actions que peut accomplir un être humain dans la société. Mais la notion de liberté a trop souvent été utilisé par les intellectuels bourgeois pour l'opposer aux idéaux communistes. Il convient donc de revenir réellement sur ce qu'est la liberté, et ce qu'une révolution socialiste y apportera.

Cette page traite de liberté au sens politique, et pas de la liberté au sens de libre-arbitre.

1 Types de liberté[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Liberté de pensée[modifier | modifier le wikicode]

Citation de Benjamin Franklin (1722)

La liberté de pensée, aussi appelée liberté d'opinion, est la liberté d'émettre son avis sur tous les sujets et notamment d'avoir des convictions politiques (qu'elles soient réactionnaires ou plus ou moins progressistes).

Elle est directement liée à liberté d'expression, mais cette liberté se concrétise souvent dans d'autres droits (de réunion, de la presse...), et est toujours plus ou moins encadrée (on ne peut pas hurler en pleine rue au milieu de la nuit, on ne peut pas utiliser n'importe quelle insulte...).

1.2 Liberté de croyance[modifier | modifier le wikicode]

La liberté de croyance, ou liberté religieuse, est une forme de liberté d'opinion. Elle a eu une place particulièrement importante pendant la période de lutte contre l'Ancien régime étant donné que de très nombreuses idéologies contestataires prenaient la forme de schismes religieux. Elle trouve son aboutissement dans la mise en place d'une forme ou une autre de laïcité.

1.3 Liberté de déplacement[modifier | modifier le wikicode]

La liberté de déplacement est la liberté de se rendre où l'on veut (dans les limites de l'espace public ou de son espace privé) à tout type de moment. Elle peut être restreinte explicitement par la mise en place d'un couvre-feu, de barrages, ou encore par la fermeture des frontières. Mais implicitement, elle peut aussi être restreinte pour une large partie de la population (travailleurs) par le coût exorbitant des moyens de transports (pour voyager à l'étranger notamment), par l'impossibilité de disposer de suffisamment de temps (les ouvriers chinois n'ont que quelques jours de vacances...).

1.4 Liberté de réunion[modifier | modifier le wikicode]

La liberté de réunion est la liberté, pour des groupes de personnes, de se rassembler à tel endroit public en telle heure/période, dans la limite des autres lois et le respect des autres. Cette liberté en amène une autre, très importante pour le mouvement des travailleurs, qui est celle de faire la grève, de manifester contre l'austérité, la précarité, la destruction du droit des travailleurs... Pour cette raison, que les gouvernants cachent souvent sous des causes "sécuritaires" renforcées par l'actualité récente, elle tend à être restreinte : obligation d'annoncer tout mouvement de grève, interdiction de certains rassemblements (notamment d'« extrémistes »).

1.5 Liberté de la presse[modifier | modifier le wikicode]

La liberté de la presse est la liberté d'éditer et de vendre ses journaux. Cette forme de liberté est cependant précaire, car la quasi-totalité des journaux tirés aujourd'hui sont aux mains d'éditeurs bourgeois, quant une minorité représentent réellement les points de vues (et intérêts) des travailleurs.

L'intérêt de la presse en ligne est donc, pour des courants différents, de passer outre les contraintes mécaniques (imprimerie, kiosques...) ainsi que de la censure et de faire de la propagande ; d'autant plus que les gens lisent de moins en moins la presse "papier" pour se reporter de plus en plus aux actualités sur le web.

1.6 Liberté d'entreprendre[modifier | modifier le wikicode]

Enfin, la liberté d'entreprendre, qui est la plus "sacrée" pour nombre de libéraux, et qui s'inscrit dans une logique individualiste, est celle de créer et d'étendre son entreprise, d'embaucher/de débaucher des salariés...

Mais cette liberté cache de grandes disparités entre les classes sociales, et est donc à géométrie variable : afin de démarrer son entreprise, des bagages techniques sont nécessaires, ce qui nécessite d'avoir fait, au préalable, des études ; mais également, de disposer d'argent. Cet argent peut être octroyé par les banques sous forme de prêt, ou par l'Etat sous forme de subventions ; mais très peu de prolétaires se lançant dans l'aventure en recevront, pour la bonne et simple raison que tous ces prêteurs potentiels ne leur feront pas confiance.

Enfin, le capital se tendant à s'accumuler dans les mains dirigeant les grands trusts, les petites entreprises finissent, pour la plupart, par sous-traiter de plus grandes qu'elles, et ne peuvent atteindre la prospérité, à tel point qu'un nombre croissant de petit entrepreneurs, de paysans, sont aujourd'hui dans des situations de précarité. L'ironie, c'est que cette masse de petits-bourgeois en cours de paupérisation forment un terreau réceptif aux idées réactionnaires et démagogues, notamment celles fascistes, comme l'avait analysé Trotski. Et que l'instabilité engendrée par le système capitaliste risque donc, directement, de les porter au pouvoir. Ces derniers mettraient alors un terme à toute... liberté d'entreprendre, en réorientant et bureaucratisant la production afin de surmonter la situation de crise et de neutraliser le mouvement ouvrier.

C'est pour ces raisons que les idéologies néolibérales et anarcho-capitalistes sont fondamentalement irréalisables, car elles s'effondreraient sous le poids de leurs propres contradictions titanesques. Mais c'est aussi pour ces raisons qu'il faut lutter contre les politiques protectionnistes, qui ne font qu'artificiellement prolonger l'espérance de vie du système capitaliste.

Pour les communistes, il ne s'agit pas de supprimer toute "liberté d'entreprendre", mais de collectiviser et socialiser les moyens de production, c'est-à-dire de faire en sorte que les travailleurs et non pas une masse d'accapareurs capitalistes, aussi doués et cultivés soit-il, dirigent l'économie, et qu'aucun capitaliste n'exploite plus personne. Les formes que prendront cette collectivisation (étatisation de l'économie ?), et donc, l'importance de la liberté d'entreprendre dans la société de demain, restent débattues, mais nul, parmi les révolutionnaires, ne contestent la nécessité d'une planification économique dans le cadre des nécessités écologiques.

1.7 Liberté de contrat[modifier | modifier le wikicode]

La liberté de passer des contrats est un des piliers de la société bourgeoise. En effet, la naissance du marché du travail s'est fondée sur l'hypocrisie de la liberté des patrons et des ouvrier·ères de passer des contrats de travail, une fois qu'une grande partie des travailleur·ses ont été dépossédés et obligés de vendre leur force de travail pour vivre.

2 Progrès des libertés[modifier | modifier le wikicode]

L'émancipation, le fait de passer d'un état de servitude ou d'aliénation à un état plus libre, doit être le combat de tout humaniste, progressiste.

Les marxistes reconnaissent que le capitalisme a apporté, globalement, d'immenses progrès sur le plan des libertés. De nombreuses révolutions démocratiques ont été dirigées par des bourgeois au nom du libéralisme, ont balayé les rapports féodaux de sujétion directe des individus, et ont instauré des droits individuels. Bien sûr, ces droits se sont avérés être plus profitables pour la bourgeoisie que pour les classes populaires, ce qui a conduit à la critique socialiste. Mais dans la vision marxiste, la lutte pour la fin du salariat et des classes, condition pour passer à une liberté réelle pour tous, ne consiste pas à « revenir en arrière » par rapport aux droits-liberté acquis, mais à aller de l'avant. Ceux qui veulent limiter la notion de liberté à l'existant, c'est-à-dire à la liberté d'exploiter et d'être exploité, cessent d'être des progressistes.

C'est cela qu'exprimait Lénine par exemple, quand il disait :

« Nous, marxistes, nous devons savoir qu’il n’y a pas et qu’il ne peut y avoir pour le prolétariat et la paysannerie d’autre chemin vers la liberté véritable que celui de la liberté bourgeoise et du progrès bourgeois. »[1]

Cela ne veut pas dire que le fonctionnement du capitalisme implique automatiquement des libertés pour les masses. Il est tout à fait possible qu'un État garantisse la propriété privée des patrons et soit par ailleurs un régime non démocratique. Dès les premières révolutions bourgeoises, il y a très vite eu des vagues réactionnaires, venant briser les aspirations populaires à plus de liberté et d'égalité : terreur blanche, bonapartisme, restauration... Le libéralisme en tant qu'idéologie complète, embrassant le libéralisme politique et économique, peut très vite faire place à des politiques autoritaires bien plus pragmatiques d'un point de vue capitaliste.

C'est pourquoi la conquête du suffrage universel (celui-ci était souvent censitaire dans les premières démocraties), et de nombreuses libertés profitant directement aux opprimé·es (droit de faire grève, de se syndiquer, de manifester...), a la plupart du temps dû être arrachée par le mouvement ouvrier et socialiste. C'est pour cela que pendant des décennies ce mouvement était surtout connu sous le nom de social-démocratie.

Cependant, la bourgeoisie étant une classe minoritaire, elle a besoin d'une hégémonie idéologique, donc d'un appui plus large, parmi des secteurs significatifs de la petite-bourgeoisie, de la paysannerie, ou de la classe ouvrière. C'est pourquoi le capitalisme a tendance a favoriser une domination basée sur le soft power (démocratie bourgeoise, méritocratie...), et donc de préserver un minimum de libertés publiques. Cette tendance peut être contre-balancée par d'autres tendances : la peur d'un État d'être déstabilisé par un mouvement populaire révolutionnaire (renforcement de l'autoritarisme, bonapartisme), ou par des influences étrangères, ou enfin une crise telle qu'elle conduit à la victoire d'un mouvement fasciste...

De très nombreux États capitalistes actuels sont dictatoriaux ou très autoritaires : l'Arabie saoudite, la Russie, l'Iran, la Chine avec son parti unique..

3 Liberté formelle et liberté réelle[modifier | modifier le wikicode]

Le libéralisme est d'abord né en tant que courant porté par la bourgeoisie et visant à limiter l'arbitraire du pouvoir royal. De ce fait, il prend la forme de « libertés négatives », c'est-à-dire de droits de ne pas subir d'ingérence d'autrui dans l'exercice d'activités que l'on peut faire par soi-même (cela correspond aux « droits-libertés »). Ne pas voir sa propriété privée menacée, ne pas être inquiété si son commerce nuit à un proche du pouvoir, etc. Évidemment, une idéologie n'est jamais limitée purement et simplement à la défense des purs intérêts matériels. Elle a besoin de draper dans des revendications plus nobles, comme la défense des droits de l'homme en général : droit de ne pas être arrêté pour sa religion, ses opinions, etc. Mais le libéralisme bourgeois dépasse rarement ce terrain des « libertés négatives ».

Le cœur de la critique marxiste a consisté à dénoncer ces libertés comme des libertés sur le papier, mais qui n'existent pas pour les prolétaires :

  • quelle est la « liberté d'entreprendre » si l'on est né dans la mauvaise classe sociale, celle qui ne possède aucun capital ?
  • quelle est la « liberté de s'exprimer dans un média » si l'on n'a pas les moyens de fonder un média qui défende ses intérêts ?
  • quelle est la « liberté de réunion et d'association » si l'on est condamner à travailler H24 et que l'on ne peut avoir accès à des locaux ?

Les capitalistes n'ont bien sûr pas intérêt aux « libertés positives » qui impliquent des moyens (le fait d'être délivré des facteurs restrictifs comme la faim, la maladie, l'insécurité, l'indigence, etc.), et qui correspondent aux « droits-créance ».

Karl Marx a dénoncé les droits de l'homme portés par la bourgeoisie comme des « droits de l'homme égoïste »[2]. Il opposait la liberté formelle (bourgeoise) à la liberté réelle (communiste).

4 Le communisme, une dictature ?[modifier | modifier le wikicode]

Pour nombre d'anticommunistes et de réactionnaires en général, le communisme est un modèle affreux et totalitaire, dont l'URSS en est le plus grand exemple : parti unique, censure de la presse, répression des opposants...

Marx et Engels ne voyaient pas le moins du monde le communisme comme nécessitant une restriction des libertés (contrairement à certains des premiers communistes[3]). Leur parcours est au contraire celui de démocrates qui ont poussé leur réflexion jusqu'à vouloir aussi les conditions sociales d'une liberté réelle. Cela les a même conduit à une critique radicale de l'État.[4]

Les « États communistes » du 20e siècle ont été des régimes terribles. Mais on ne peut pas réduire une idéologie aux pays qui s'en réclament. Les bolchéviks portés au pouvoir décrétèrent une série de mesures révolutionnaires et exemplaires, qui furent âprement combattues par les Cadets (qui se réclamaient du libéralisme). On reprocha aux bolchéviks de censurer des journaux : mais ils ne firent que répondre à la censure de leurs propres organes de presses lors de la Révolution de Février. Après la guerre civile russe, la classe ouvrière, réduite à peau de chagrin, n'avait plus aucun pouvoir, de sorte que seuls les cadres du Parti communiste de l'époque subsistaient. Le pouvoir des Soviets s'atrophia, puis disparut. Et les mesures de nécessité liberticides prises par Lénine, dans le but de sauvegarder les intérêts des travailleurs, furent conservées et amplifiées par la nouvelle nomenklatura, incarnée notamment par Staline, que Trotski cherchera alors, jusqu'à sa mort, à défaire.

De plus, il faut bien comprendre que dans les démocraties bourgeoises, les "citoyens" ne sont pas aussi libres qu'on pourrait le croire :

  • les citoyens ne sont appelés à voter que tous les cinq ans. Mais quand bien même ces derniers sont incités à débattre et à exprimer leurs opinions autrement qu'aux élections (conseils de quartiers, référendums...), le travail, qui occupe leur journée, ainsi que la famille, les amis et les autres nécessités, les en empêche ;
  • les travailleurs se passeraient bien du chômage, de l'inflation, de la précarité au quotidien... mais qui sont délibérément entretenus par le patronat et l'État bourgeois, qui lui est complice ;
  • les gouvernements profitent de la menace terroriste (et plus particulièrement islamiste) pour mettre sur écoute la quasi-totalité des citoyens.

Rien n'empêcherait les travailleurs, lors de la future révolution socialiste victorieuse, d'organiser différemment de l'URSS le nouvel État qu'ils bâtiraient ensemble. Contrairement à ce que l'on croit parfois sous l'influence des discours réactionnaires, le communisme ne constitue pas, par rapport à la démocratie bourgeoise, une restriction de la démocratie, mais au contraire son extension. Le communisme verrait fleurir des organes de démocratie directe (conseils d'usine, de quartier...), élirait des organes sur la base de mandats tournants et révocables... La démocratie ne se limiterait pas à élire tous les quatre ou cinq ans une bande de politiciens bourgeois pour gouverner le pays, mais inclurait la gestion par les travailleurs eux-mêmes de leur outil de travail (leur usine par exemple) et le contrôle permanent sur leurs élus. Les décisions seraient prises à l'issue de discussions libres et contradictoires.

🔍 Voir : Communisme.

5 Citations[modifier | modifier le wikicode]

« Le domaine de la liberté commence là où s'arrête le travail déterminé par la nécessité. » Karl Marx

« Celui qui ne bouge pas ne sent pas ses chaînes. » Rosa Luxemburg

6 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

6.1 Bibliographie de référence[modifier | modifier le wikicode]