Crise économique

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Une crise économique est une perturbation grave du système économique, se manifestant dans la production et la distribution des richesses.

En particulier, les crises économiques régulières du capitalisme sont importantes pour nous communistes révolutionnaires, parce qu'elles matérialisent les limites de ce mode de production périmé. Mais surtout, les crises économiques majeures ouvrent des périodes de crise sociale, qui favorisent généralement l'extrême droite[1], mais qu'un parti révolutionnaire doit savoir transformer en crise révolutionnaire.

1 Crises du capitalisme[modifier | modifier le wikicode]

Les crises économiques du capitalisme sont en même temps la manifestation d'une détérioration des conditions de l'accumulation, et un moyen pour lui de se restructurer pour rétablir son taux de profit.

1.1 Racines : Suraccumulation de capital[modifier | modifier le wikicode]

Le capitalisme est profondément traversé de contradictions, qui en économie se manifestent par l’alternance de phases de relative "prospérité" et de stagnation. Ces cycles se manifestent et évoluent de façon très différente selon de nombreux facteurs comme la possibilité de débouchés impérialistes, les innovations technologiques, les choix politiques de la bourgeoisie, et bien sûr la lutte de classe. Mais fondamentalement, ces cycles demeurent, et rien ne peut conduire ce système à la stabilité. La principale explication que Marx a fournie pour expliquer ces phases de déclin de l'économie repose sur la suraccumulation de capital causée principalement par la baisse du taux de profit : la concurrence pousse chaque capitaliste à augmenter son taux de profit en investissant dans des moyens de production toujours plus lourds, mais pour la bourgeoisie dans son ensemble, cela a pour effet de réduire le taux de profit, car la masse salariale exploitée représente une part toujours réduite du capital total.

« La baisse du taux du profit ralentit la formation de capitaux nouveaux et favorise la surproduction, la spéculation, les crises, la surabondance de capital et la surpopulation [chômage] »[2]

Les pays impérialistes sont englués dans une suraccumulation de capital depuis les années 1970, cause fondamentale de la crise actuelle.

1.2 Manifestation : surproduction / sous-consommation relative[modifier | modifier le wikicode]

Ce que l'on peut observer dans les grandes périodes de crises, c'est un écart massif entre ce que les capitalistes produisent pour leur profit, et ce que la société est capable de consommer. La surproduction est le premier phénomène qui a été remarqué par ceux qui ont observé les crises capitalistes. C'est pour cette raison que beaucoup font le choix de présenter le problème comme une "sous-consommation" des masses, point de vue qui a l'avantage d'offrir des débouchés politiques dans le cadre du système actuel (relance keynésienne...). C'est aussi pour cette raison que depuis le tournant néolibéral, de nombreux Etats ont favorisé l'endettement pour la consommation.

Mais il est historiquement démontré que ces issues ne sont que des palliatifs temporaires pour les crises du capitalisme. De plus, théoriquement, lorsque l'on dit que la crise est une "crise de surproduction", on n'a rien dit, on n'explique pas ce qui dans le capitalisme amène à un déséquilibre (entre l'offre et la demande solvable) et entraîne ces situations de surproduction.

1.3 Déclencheurs[modifier | modifier le wikicode]

La baisse du taux de profit est un phénomène s'inscrivant dans la durée, et souvent "caché" en tant que facteur, auquel s'opposent les contre-tendances. Cela agit comme une fragilisation du système, dont la "crise" peut éclater suite à un événément économique secondaire (panique bancaire, banqueroute d’une grande firme, mévente généralisée dans un secteur clef du marché mondial...).

Le fait que l'on sous-entende que la fin des "30 glorieuses" puisse être due à des "chocs pétroliers" est symptomatique de cette pensée bourgeoise superficielle... La tendance à ne voir dans la crise actuelle qu'une crise financière relève de la même incompréhension. La financiarisation et son cortège de bulles spéculatives est précisément un refuge pour les capitalistes lorsque l'efficacité du capital n'est pas au rendez-vous dans la production. Un krach boursier peut alors facilement par la suite révéler la crise économique latente.

En 1857, lors du premier grand krach mondial, de telles explications erronées avaient déjà été avancées. Un certain Karl Marx se moquait à l’époque: “Si, au bout d’une certaine période de commerce, la spéculation apparaît comme annonciatrice d’un effondrement, il ne faudrait pas oublier que cette spéculation est née auparavant dans cette même période de commerce et qu’elle représente donc un résultat, une apparence et non pas une cause ou une essence. Les représentants de l’économie politique qui tentent d’expliquer les soubresauts de l’industrie et du commerce en les attribuant à la spéculation ressemblent à l’école défunte des philosophes de la nature qui considéraient la fièvre comme la cause fondamentale de toutes les maladies.” [3]

« A première vue donc, toute la crise se présente comme une simple crise de crédit et d'argent. Et en fait il ne s'agit que de la convertibilité des effets de commerce en argent. Mais, dans leur majorité, ces traites représentent des achats et des ventes réels dont le volume dépasse les besoins de la société, ce qui est en définitive la base de toute crise. » « Une quantité énorme de ces effets ne représente que des affaires spéculatives qui, venant à la lumière du jour, y crèvent comme des bulles; ou encore ce sont des spéculations menées avec le capital d'autrui, mais qui ont mal tourné; enfin des capitaux marchandises qui sont dépréciés ou même totalement invendables, ou des rentrées d'argent qui ne peuvent plus avoir lieu. » [4]

1.4 La crise et son rôle de purge[modifier | modifier le wikicode]

L'effet le plus direct d'une crise est la faillite de nombreuses entreprises, c'est-à-dire la destruction de nombreux capitaux. Il s'en suit une très forte dévalorisation des moyens de production, qui peuvent être rachetés à bas coût par d'autres capitalistes, pour qui le capital constant pèsera donc moins sur le taux de profit. Mais la conséquence d'une crise économique est également une crise sociale : de nombreux travailleurs perdent leur emploi, le salaire des autres est pressuré à la baisse... ce qui concourt à la hausse de l'exploitation, donc du taux de profit.

La crise économique accentue donc la lutte de classe, et débouche presque toujours sur une crise politique, dont l'issue dépend de la conscience de classe et de la combativité des travailleurs, ainsi que de la stratégie choisie par les socialistes. De situations pré-révolutionnaires, les événements peuvent aussi conduire à des fascismes ou des guerres, qui sont aussi doublement dramatiques pour le prolétariat en ce qu'ils les écrasent et renforcent durablement la puissance des bourgeoisies.

1.5 Vieillissement du capitalisme[modifier | modifier le wikicode]

La crise permet donc au capitalisme de créer des conditions favorables pour une nouvelle phase d'accumulation. Mais une question se pose : au fil des crises, le capitalisme garde-t-il la même capacité à se régénérer ou subit-il un vieillissement ? Empiriquement, il semble clair que le taux de profit a été en mesure de repartir à des niveaux plus élevés qu'auparavant à la suite de grandes crises. Mais la concentration et la centralisation croissante du capital rend de plus en plus difficile pour les bourgeoisies de laisser des faillites importantes avoir lieu sans mettre à la fois en péril l'ensemble du système pour une longue période (comme l'a montré la Grande dépression et comme semble le montrer la crise actuelle, sans cesse différée par l'intervention de l'État bourgeois).

1.6 Débats et polémiques[modifier | modifier le wikicode]

Les crises de l'économie capitaliste et leur analyse sont un sujet qui a donné lieu à de nombreuses positions différentes. Au 19e siècle, dans l'opinion bourgeoise, on constate les crises, leur périodicité, leurs méfaits sociaux, mais on n’en donne que des explications superficielles (monétaires, « excès d’investissement »...), on débat encore assez peu des théories des crises, et jamais on ne les relie à des dérèglements de la production et du profit[5].

Les débats existent aussi au sein du mouvement ouvrier et des marxistes. Une des premières controverses est celle menée par Bernstein, qui entendait réviser le marxisme. Bernstein soutenait qu'il fallait abandonner l'idée que le capitalisme allait vers une « catastrophe » (crise économique et révolutionnaire). Kautsky et Luxemburg ont défendu la théorie de la catastrophe. Les controverses ont notamment porté sur la validité de la baisse tendancielle du taux de profit, la réduction de la crise à une sous-consommation qu'il suffirait de relancer, le rétablissement du taux de profit à sa valeur antérieure ou non après une crise...

Les schémas de reproduction du capital présentés par Marx dans le Capital ont notamment été interprétés différemment selon les auteurs. D'après les hypothèses prises dans le livre II du Capital, les secteurs 1 et 2 (production des moyens de production et production des biens de consommation) doivent croître au même rythme, sans quoi il s'en suit une disproportion entravant la reproduction du capital. C'est ce qui fait que de nombreux marxistes ont décrit les crises économiques du capitalisme comme des crises de disproportion, et ont fait le lien avec une crise de sous-consommation (les capitalistes auraient tendance à investir, augmentant le secteur 1, mais à baisser les salaires, comprimant donc le secteur 2). D'autres marxistes s'opposent à cette interprétation, rappelant que dans le livre III, Marx présente un modèle plus complexe et plus réaliste.[6] Dans ce modèle des schémas de reproduction, non seulement les secteurs 1 et 2 peuvent croître à des rythmes différents, mais en pratique l'importance relative du secteur 1 augmente au court du développement du capitalisme.

Un autre débat porte sur l'existence ou non d'ondes longues, c'est-à-dire d'une périodicité constante des grandes crises.

1.7 Périodisations des crises, stagnations et reprises[modifier | modifier le wikicode]

Le terme « crise » est souvent employé pour beaucoup de situations différentes. Il faut notamment distinguer les tendances sur des échelles de temps différentes :

  • A l'échelle de 10 à 30 ans, le capitalisme peut connaître des périodes de stagnation ou de boom
  • Ponctuellement, une crise financière peut éclater et provoquer une crise économique (touchant l'économie réelle) durant quelques années.

Avec ces termes, on peut établir la périodisation suivante :

Il y avait une certaine tendance parmi les communistes du début du 20e siècle à penser que le capitalisme ne sortirait pas de sa stagnation. Ainsi Trotski écrivait en 1922 :

« Dans les dernières années du dix-neuvième siècle, la courbe fondamentale du développement capitaliste commence soudain une ascension vertigineuse. Le capitalisme européen atteint rapidement son point culminant. En 1910, éclata une crise qui n´était pas une simple oscillation cyclique périodique, mais le début d´une époque de marasme économique prolongé. La guerre impérialiste fut une tentative de sortir de l´impasse ».[7]

2 Crises dans le monde précapitaliste[modifier | modifier le wikicode]

Les crises se manifestaient de façon bien différente d'aujourd'hui dans les sociétés précapitalistes.

Étant donné que les forces productives étaient beaucoup moins développées, elles étaient tout d'abord moins brutales et moins marquées.

Leurs causes étaient souvent un ralentissement des échanges commerciaux, des chutes de la production agricole, mais parfois aussi dans le monde antique la difficulté d'écouler des marchandises.

Une des dernières grande crise de "subsistance" a eu lieu dans l'agriculture en 1848, couplée à une crise capitaliste.

3 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

  1. Chaîne Hacking Social, Les crises nous rendent-elles plus autoritaires ? Codec #1, 19 nov. 2021
  2. Marx, Le Capital, livre III, chapitre 15
  3. Sur l’immense décharge du capital fictif, 2012
  4. Karl Marx, Le Capital, Livre III, Chapitre XV, 1865
  5. B. Gille, Les crises vues par la presse économique et financière (1815-1848), RHMC, janvier-mars 1964, p. 5-30.
  6. Roman Rosdolsky, La théorie de la réalisation chez Lénine, 1971
  7. Trotski, La nouvelle politique économique des Soviets et la révolution mondiale, 14 novembre 1922