Impérialisme états-unien

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USA Flag - Hyannis - Massachusetts.jpg

Les États-Unis sont aujourd'hui la principale puissance impérialiste. Leurs entreprises dominent le marché mondial, imposant une terrible exploitation aux salariés des entreprises sous-traitantes, avec la complicité des gouvernements du tiers-monde et des pays émergents (pays asiatiques comme l'Inde, la Chine "populaire"...). De plus, leur mode de vie, l'american way of life, ou la société de consommation, constitue un danger pour l'équilibre écologique de la planète. Cette page vise à regrouper les éléments historiques et actuels sur la politique de puissance des États-Unis.

1 Origines[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Libération et esclavage[modifier | modifier le wikicode]

Les États-Unis arrachent leur indépendance de l'Empire britannique lors d'un profond processus révolutionnaire (1763-1783), qui était un processus national mais aussi social : les révolutionnaires abolissent ce qui reste de vestiges féodaux importés d'Europe, et certaines aspirations égalitaristes minoritaires s'expriment. Il y avait un aspect progressiste dans la libération nationale (même si les Blancs des États-Unis à cette époque étaient loin d'être « esclaves » des Britanniques) et dans la constitution d'une nouvelle nation formant nécessairement un creuset de cultures (même si les wasp y dominaient). Mais en parallèle, l'esclavage des Noirs et la colonisation des terres des autochtones perdurait, les oppresseurs en chef changeant simplement de nationalité.

1.2 Guerre avec le Mexique[modifier | modifier le wikicode]

American Progress, peinture de 1872 par John Gast, allégorie de la « Destinée manifeste ».

En 1845, les États-Unis conquièrent la Californie à l'issue d'un conflit avec le Mexique.

1.3 « Destinée manifeste »[modifier | modifier le wikicode]

A partir de 1845 l'expression Manifest Destiny commence à circuler aux États-Unis pour désigner l'idée que la « nation américaine » aurait pour mission divine l'expansion de la « civilisation » vers l'Ouest. Cela s'inscrit dans l'idée calviniste de prédestination.

A partir du 20e siècle, des idéologues élargissent cette idée : c'est au monde entier que les États-Unis doivent apporter leurs lumières...

1.4 Massacre des autochtones[modifier | modifier le wikicode]

Les premières victimes furent les autochtones, improprement appelés amérindien·nes. Environ 90% d'entre elleux ont disparu suite à l'arrivée des européens.

En terme de nombre de morts, la grande majorité de cette hécatombe fut causée (entre 1492 et le 19e siècle principalement) par l'importation de nombreuses maladies qui n'étaient pas présente sur le continent, et contre lesquelles les natifs n'avaient pas de protection immunitaire. Mais cela ne suffit pas à expliquer la quasi-extinction des autochtones : il y a eu un processus actif de colonisation, surtout à partir de la fin du 18e siècle, les colons avançant rapidement et massivement vers l'Ouest pour s'emparer de terres.

Cela provoque les « guerres indiennes », qui sont, malgré une résistance acharnée, surtout l'histoire d'un massacre. Les colons ont mené des exactions que certains historiens qualifient de génocides, comme celui des Yukis[1], en Californie - bien que la plupart des historiens s'accordent à dire qu'il n'y eut pas de génocide global, mais "seulement" de génocides "localisés". De plus, les survivants ont été parqués dans des "réserves", ce régime particulier persistant aujourd'hui pour les rares tribus restantes. Si de nombreuses hypothèses ont été émises afin d'expliquer (voire de justifier) ce massacre, rien ne peut masquer qu'il s'agissait clairement d'une politique

2 Affirmation[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Essor industriel fulgurant[modifier | modifier le wikicode]

« 10 000 miles d'une extrémité à l'autre - des Philippines à Porto Rico. » Dessin de 1898

Au début du 20e siècle, de nombreux marxistes décrivent cette montée en puissance des États-Unis : Kautsky, Trotski, Boukharine...

2.2 Domination de l'Amérique[modifier | modifier le wikicode]

Avant de devenir une superpuissance mondiale, les États-Unis sont devenus la puissance hégémonique du continent américain, et ont particulièrement exercé une domination impérialiste sur les pays d'Amérique du Sud.[2]

2.2.1 « Républiques bananières »[modifier | modifier le wikicode]

De puissantes entreprises états-uniennes, notamment de l'agroalimentaire, vont s'étendre en Amérique du Sud, la plus emblématique étant la United Fruit Company.[V 1]

Ces entreprises forment le prototype des multinationales rapaces qui se développeront massivement à la fin du 20e siècle. Alors que l'impérialisme des Européens étaient encore principalement un colonialisme, les États-Unis se présentaient comme respectueux de la souveraineté des nations, et se spécialisaient dans la domination que leur apportait leur suprématie industrielle. Les mécanismes de spécialisation du Sud dans l'agriculture à destination du Nord sont ainsi en grande partie le fruit de l'échange inégal et de l'impérialisme économique en général.

Mais en réalité les États-Unis ne se sont pas privés de bafouer la souveraineté politique des États du Sud, de façon à peine plus discrète que les Européens. A de nombreuses reprises, la United Fruit Company, épaulée par les gouvernements états-uniens, a renversé ou aider à renverser des gouvernements qui menaçaient ses intérêts.

Vu la place centrale qu'avait l'exploitation de la banane pour la compagnie, le terme de République bananière a commencé à être utilisé dès 1904 pour dénommer les gouvernements à sa botte.

La United Fruit Company est devenue Chiquita en 1989.

2.2.2 Doctrine Monroe[modifier | modifier le wikicode]

En 1823, le président James Monroe a déclaré que les Européens ne devaient plus intervenir dans les affaires « des Amériques », et qu'en contrepartie les États-Unis n'interviendraient pas dans les affaires des Européens.

Cette « doctrine Monroe » était une doctrine d'affirmation d'indépendance, plutôt isolationniste.

Mais c'était aussi en germe une doctrine faisant de l'Amérique toute entière une chasse gardée des États-Unis. C'est surtout à partie de la fin du 19e siècle qu'elle a pris ce contenu nettement impérialiste. Au début du 20e siècle, Roosevelt prononce « le corollaire de la doctrine de Monroe ». Ce discours ne prône plus une neutralité absolue et affirme que le pays ne tolérerait pas que l'on s'oppose frontalement à ses intérêts.

2.2.3 Interventions militaires[modifier | modifier le wikicode]

Un états-unien pose devant des cadavres de révolutionnaires haïtiens (1915)

Entre 1891 et 1915, les interventions militaires des États-Unis se sont multipliées : [2]

  • 1891 en Haïti et au Chili
  • 1895 au Nicaragua
  • 1898 au Porto Rico et à Cuba
  • 1899 au Nicaragua
  • 1903 au Venezuela ; en République dominicaine et en Colombie
  • 1904, République dominicaine et Guatemala
  • 1906-1909 au Cuba
  • 1907 en République dominicaine
  • 1908 au Venezuela
  • 1909-1910 en Nicaragua
  • 1910-1911 en Honduras
  • 1912 à Cuba, au Nicaragua et en République dominicaine
  • 1915 en Haïti

La mer des Caraïbes est considérée comme une mare nostrum.

2.3 Première guerre mondiale[modifier | modifier le wikicode]

La Première guerre mondiale va hisser les États-Unis aux rangs de puissances financière et militaire. Les États-Unis soutiennent l'Entente (France, Royaume-Uni, Empire russe) et interviennent directement à la fin de la guerre, alors qu'elle a déjà fait des millions de victimes[3]. Bien que peu nombreux, les États-Unis comptent sur leurs nouvelles armes, notamment les tanks, pour écraser leurs adversaires.

Boukharine écrit en 1915 que la guerre mondiale est en train de révéler l'ascension des États-Unis, qui passent de débiteurs à créditeurs de l'Europe[4].

A l'issue de la guerre, les États-Unis vont prêter des millions de dollars aux puissances européennes ruinées sous forme de crédits. Ces excès vont favoriser le déclenchement de la crise qui explique en partie la montée du nazisme en Allemagne.

2.4 Entre-deux-guerres[modifier | modifier le wikicode]

Au lendemain de la victoire des Alliés, c'est Roosevelt qui propose la création de la Société des Nations (précurseur de l'ONU), censée préserver la paix. Cependant, ironiquement, les États-Unis ne feront pas partie de la SDN, le Sénat ayant refusé. Dans ce pays en plein essor impérialiste, beaucoup ne veulent pas de la SDN, soit par reste d'isolationnisme, soit pour ne pas se lier les mains. Le sénateur républicain Henry Cabot Lodge exprimait assez bien, dans un discours de 1919, la nouvelle façon « progressiste » de justifier l'impérialisme états-unien.

« Les États-Unis sont le meilleur espoir de la planète, mais si vous les embourbez dans les intérêts et les querelles d’autres nations, si vous les empêtrez dans les intrigues européennes, vous anéantirez leur pouvoir de faire le bien en menaçant leur existence même. Laissez l’Amérique avancer librement dans les siècles à venir. »[5].

Dans les années 1920, les États-Unis détrônent l'Angleterre comme première puissance industrielle, même si celle-ci reste la première puissance financière jusqu'à la Seconde guerre mondiale.

2.5 Seconde guerre mondiale[modifier | modifier le wikicode]

La part des États-Unis dans le PIB mondial ne cessera de croître, atteignant un sommet durant la Seconde guerre mondiale. Elle connaît un lent déclin relatif depuis.[6]

Part-USA-PIB-mondial.png

3 Guerre froide[modifier | modifier le wikicode]

Par la suite, les impérialismes états-unien et soviétique vont s'opposer pendant plus de cinq décennies. Aucun affrontement direct n'a éclaté (« guerre froide »), même si certains épisodes l'ont frôlé comme la crise des missiles de Cuba. L'Union soviétique était à la tête du Bloc de l'Est, tandis que les États-Unis étaient le pôle dominant du Bloc de l'Ouest. Chacun des blocs soutenait financièrement et militairement différentes forces politiques alliées, notamment dans les pays dominés qui étaient en pleine fermentation politique dans le contexte de la décolonisation.

3.1 Guerre par procuration[modifier | modifier le wikicode]

D'un certain point de vue, ils se faisaient la guerre par pays interposés. même si les révolutions et coups d'État dans ces pays avaient aussi leur propre dynamique interne.

Guerre du Vietnam : les États-Unis soutiennent délibérément le régime corrompu de Ngô Dinh Diêm face aux communistes staliniens (Viet-Cong) du Nord[7]. Plus de 10 000 victimes parmi les américains, et des millions parmi les rebelles.

3.2 Course aux armements[modifier | modifier le wikicode]

La guerre froide est aussi le moment d'une intense course aux armements, chaque camp développant de nouveaux moyens offensifs, et des moyens de défense face aux menaces du camp d'en face, maintenant un équilibre de la terreur. La dissuasion nucléaire est le symbole le plus évident de cette tension.

Les États-Unis furent le premier pays au monde à avoir crée et utilisé avec succès la bombe atomique. Aujourd'hui, malgré la politique de "démantèlement des armes nucléaires" amorcée par l'administration Obama, les États-Unis restent en tête de milliers d'ogives nucléaires. Leur arsenal atomique serait littéralement capable de pulvériser la planète...

3.3 Affrontement idéologique[modifier | modifier le wikicode]

L'affrontement était aussi idéologique. L'URSS, même si elle n'avait rien de communiste, avait une influence à l'intérieur des pays de l'Ouest via les « partis communistes ». Face aux horreurs du stalinisme, les États-Unis ont beau jeu de se présenter comme les champions du « monde libre ». Le rayonnement idéologique se fait aussi par la course aux prouesses techniques, dont la conquête spatiale. Si les États-Unis ont d'abord un certain retard face à l'URSS (qui la première, lance un satellite en 1957, des hommes et femmes dans l'espace...), ils sont finalement les premiers à envoyer un homme marcher sur la Lune (1969).

3.4 Soutien à des trafiquants de drogues[modifier | modifier le wikicode]

Les États-Unis n'ont pas hésité à soutenir des groupes armés qui se financent principalement par le trafic de drogue, si ces groupes servent indirectement leurs intérêts. Additionnés, ces soutiens au trafic de drogue ont eu impact significatif pour aboutir aux réseaux internationaux de trafic qui perdurent jusqu'à aujourd'hui.

Dans les années 1950, ils envoient des armes à des seigneurs de la guerre chinois qui se battaient contre le gouvernement maoïste. Ceux-ci finissent par traverser la frontière et se tailler un territoire dans le Nord du Myanmar, créant ce qui deviendra le Triangle d'or (zone d'intense production d'opium à l'échelle mondiale).

Dans les années 1980 sous Reagan, plusieurs hauts responsables du gouvernement ont soutenu un trafic d'armes vers l'Iran malgré l'embargo touchant ce pays, dans le but d'utiliser les produits de la vente d'armes pour financer les Contras au Nicaragua (groupes paramilitaires d'extrême droite opposés aux sandinistes), malgré l'interdiction explicite du Congrès. Lorsque cette affaire a éclaté au grand jour, on l'a appelé l'Affaire Iran-Contra.

Vers la fin des années 1980, la CIA a soutenu (le plus souvent indirectement, via les services secrets pakistanais en particulier) des combattants afghans qui se battaient contre le régime soutenu par les soviétiques. Elle ne se souciait absolument pas du fait que ceux-ci se financent largement par le trafic d'opium, ou qu'ils soient des réactionnaires islamistes. Robert Oakley, ambassadeur US au Pakistan entre 1988 et 1991, s'est plaint que la section locale de la CIA lui dissimulait ce qu'elle savait sur le trafic de drogue des moudjahidines afghans.

Beaucoup de hauts responsables aux États-Unis ont fermé les yeux sur le trafic de drogue provenant des groupes qu'ils soutenaient, au prix d'une forte hausse des addictions parmi les pauvres aux États-Unis.

3.5 Néocolonialisme[modifier | modifier le wikicode]

En 1996, le géant pharmaceutique états-unien Pfizer a mené des essais cliniques illégaux sur des populations au Nigéria, ayant entraîné la mort de plusieurs enfants. Le fait que des décideurs capitalistes se sentent libres de faire impunément ce genre de choses dans certaines zones rurales d'Afrique (ce qui n'aurait jamais été fait sur des populations blanches) illustre bien la persistance de rapports néocoloniaux.[8][9][10]

4 Dernières décennies[modifier | modifier le wikicode]

4.1 Gendarmes du monde[modifier | modifier le wikicode]

Après l'effondrement de l'URSS (1989-1991), les États-Unis apparaissent dans les années 1990 comme la seule superpuissance mondiale. Ils se retrouvent alors sans grand rival, et se positionnent dans un premier temps comme des sortes de gendarmes du monde, qui seraient au travers de l'ONU les garants protecteurs de l'humanité, par exemple avec la Guerre du Golfe (1991) ou l'intervention en Somalie en pleine guerre civile (1992-1995).

Cependant il apparaît déjà que les États-Unis ne sont pas tout-puissants, avec des épisodes qui troublent l'opinion comme la bataille de Mogadiscio, et le fait que les occidentaux décident finalement de se retirer sans que la Somalie ne soit sortie du chaos.

4.1.1 Essor du terrorisme djihadiste[modifier | modifier le wikicode]

Pire, les décennies de lutte par tous les moyens contre l'URSS ont des conséquences de long terme désastreuses pour de nombreuses populations, qui provoquent des retours de flamme sur les États-Unis. Par exemple, en Afghanistan dans les années 1980, de nombreux combattants comme Mohammad Omar (futur fondateur des Talibans) ou Gulbuddin Hekmatyar ont été financés par la CIA[11], qui apportait son aide à n'importe qui se battant contre le régime proche de l'URSS. Les Talibans ont finalement instauré une dictature réactionnaire en 1996, qui est devenue un foyer de terrorisme (hébergeant notamment Ben Laden) visant notamment des ambassades états-uniennes en 1998, et directement New York le 11 septembre 2001.

Il s'agissait pour le gouvernement néo-conservateur de G. W. Bush de renforcer sa crédibilité, intérieure comme extérieure, en montrant que des attaques pareilles ne pouvaient pas rester impunies par la première armée du monde, et de saisir cette occasion pour réaffirmer la suprématie états-unienne, et donner des débouchés au passage à de nombreuses entreprises, et de profiter de cet élan d'union sacrée pour faciliter le flicage intérieur (avec le Patriot Act notamment). Il déclare l'ouverture d'une lutte sans merci contre le terrorisme (War on Terror), pour la « défense de la liberté et de la démocratie ». Le concept de « croisade » est même utilisé...

4.1.2 Invasion de l'Afghanistan (2001)[modifier | modifier le wikicode]

Collage of the War in Afghanistan (2001-2021).png

Les États-Unis répliquent d'abord en envahissant l'Afghanistan en 2001, à la tête d'une coalition internationale.

Il est possible que des considérations géostratégiques aient joué en plus, comme la volonté de s'assurer d'avoir un gouvernement vassal dans cette zone stratégique (entre les pays rivaux que sont l'Iran et la Chine et les puissances plus ou moins alliées que sont l'Inde et le Pakistan). Un projet de gazoduc passant par l'Afghanistan (et dans lequel l'entreprise états-unienne Unocal avait une part importante), stoppé après les attentats d'Al-Qaïda de 1998, pouvait ainsi être facilité. Ce sera effectivement le cas sous le gouvernement de Karzai (Karzai lui-même aurait été consultant pour Unocal[12]), où les travaux reprendront.

Parmi les nombreuses théories du complot qui ont fleuri après les attentats du World Trade Center, certaines racontent qu'ils auraient été commandités par les États-Unis pour avoir un prétexte à l'invasion de l'Afghanistan, et pouvoir construire ce gazoduc. Outre qu'il s'agirait d'un plan qui aurait forcément impliqué un grand nombre de personnes (qu'on imagine mal être toutes assez machiavéliques pour tuer autant de compatriotes sans broncher), on voit mal pourquoi pourquoi les États-Unis auraient subitement eu besoin d'un prétexte aussi disproportionné, en 2001, alors que les négociations sur le pipeline avaient déjà cessé avec les talibans suite aux attentats de 1998. Il est certain que les capitalistes des États-Unis profitent de chaque occasion pour faire avancer leurs intérêts impérialistes, il n'est pas nécessaire pour autant d'imaginer des théories non matérialistes.

Le plus frappant est les États-Unis ont beau avoir mis en place un gouvernement vassal encadré par leurs troupes, ils n'ont réussi à susciter aucune adhésion idéologique de la population locale. Et pour cause, ils sont simplement vus comme des envahisseurs qui n'ont apporté que des bombardements, qui ont pris ce qui les intéressait, et qui n'ont apporté aucun développement socio-économique. Vingt ans après, les Talibans ont repris le pouvoir en Afghanistan aussitôt que les forces de l'OTAN ont quitté le pays, en 2021.

4.1.3 Invasion de l'Irak (2003)[modifier | modifier le wikicode]

Iraq header 2.jpg

Puis, dans une fuite en avant militaire, le gouvernement Bush décide en 2002 de prendre l'Irak pour cible. Parmi ses motivations :

  • L'Irak était le 4e détenteur mondial de réserves pétrolières. S'assurer un régime allié permet aux États-Unis de diversifier leurs sources et limiter la dépendance à l'Arabie Saoudite, au Venezuela etc.
  • Sur le plan géopolitique, encercler l'Iran (qui est hostile depuis la révolution de 1979) après avoir conquis l'Afghanistan, et défendre l'allié israélien de menaces potentielles.

Il met en avant que le régime de Saddam Hussein est une dictature, argument qui tombe un peu à plat étant donné que cela ne dérangeait pas les États-Unis lorsqu'il était un allié dans les années 1980, notamment contre le voisin iranien.

La diplomatie US prétend que ses services secrets savent que l'Irak met au point des « armes de destruction massive » menaçant l'Occident. Bien qu'à l'époque une très grande part de la communauté internationale doute de ces éléments, et qu'une tentative d'enquête par l'ONU ait été lancée, l'Irak acceptant la visite d'experts, les États-Unis décident de passer en force, en envahissant l'Irak en 2003.

L'OTAN et les alliés traditionnels des États-Unis sont divisés. L'Allemagne et la France de Chirac refusent de participer à la guerre. Rarement des justifications "officielles" n'ont paru aussi peu crédibles aux yeux d'une large part de l'opinion internationale, ce qui est un nouveau symptôme de l'affaiblissement de l'hégémonie états-unienne (le président G. W. Bush étant vu comme belliqueux et stupide à une large échelle). Beaucoup de manifestations anti-guerre ont eu lieu dans le monde entier. De très nombreux jeunes se sont politisés à cette occasion, face à un exemple brut de guerre impérialiste. Même si face à un exemple aussi peu subtil de leadership idéologique, il y a un risque d'idéaliser à tort les autres puissances, dont l'impérialisme français.

L'état major US parle de « frappes chirurgicales », censées atteindre uniquement des cibles militaires stratégiques, mais des civils meurent tous les jours. Au total, il y aura plus de 100 000 morts côté irakien, d'immenses destructions.

Évidemment, les États-Unis ont facilement la victoire militaire. Mais les troupes états-uniennes, qui sont à juste titre bien plus perçues comme des troupes d'occupation que comme des forces de libération, sont harcelées par des guérillas et des attentats, qui vont causé énormément de morts de soldats. Lorsque les troupes sont évacuées en 2011, le pays est dans une situation sociale catastrophique, ce qui a joué un rôle majeur dans la montée de Daesh à partir de 2006.[13]

En mettant en place un gouvernement fantoche, les États-Unis ont procédé à une cynique semi-colonisation du pays. Avant même l'invasion, le gouvernement et les grands capitalistes US s'étaient entendus sur le partage des profits de guerre et de reconstruction de l'Irak (40% de la dépense de l'État fédéral serait revenu à des contractants privés). On a ainsi pu parler à l'époque de « la plus privatisée des guerres »[14]. Certains sont sur le créneau de la guerre en elle-même :

  • Blackwater : une société de mercenaires qui a tiré d'énormes profits de la guerre en Irak : croissance de 600% entre 2001 et 2005. L'avantage de faire appel à ces mercenaires est notamment qu'ils ne sont pas aussi surveillés que des militaires et peuvent tuer impunément des civils, et qu'ils ont moins de droits que les militaires en cas de blessure ou décès... Après les troupes états-uniennes, les mercenaires forment le plus gros contingent de troupes en Irak.
  • CACI : une société qui a mené des "interrogatoires" dans les prisons, comme à Abu Grahib tristement célèbre pour ses affaires de torture sur des prisonniers irakiens. CACI a reçu 60 millions de dollars. Un "interrogatoire" sur deux était réalisé par une société privée.
  • TITAN : la société fournissant la plupart des interprètes. Elle a signé un contrat de 2 milliards de dollars.

Le premier profiteur de guerre fut sans doute la société parapétrolière Halliburton avec sa filiale KBR qui ont empoché au moins 20 milliards de dollars. Son dirigeant de 1995 à 2000 fut Dick Cheney, vice-président sous G. W. Bush. Halliburton et KBR sont entachés de nombreux scandales liés à la guerre en Irak :

  • ils ont économisé un maximum sur la sécurité de leurs employés civils en Irak (camionneurs envoyés sur des routes en zone de tir...)
  • ils ont économisé un maximum sur la sécurité des soldats auxquels ils rendaient des services :
    • l'eau qu'ils fournissaient aux soldats (pour leurs douches notamment) était contaminée (malaria, typhus...)
    • mauvais branchements électriques conduisant à des morts par électrocution
    • incinération de tout et n'importe quoi sur les bases rejetant des fumées ultra-nocives
  • ils bénéficiaient de contrats léonins leur permettant de déclarer les dépenses qu'ils voulaient et se faire rembourser intégralement par les contribuables états-uniens :
    • camions faisant des aller-retour à vide...
    • camions brûlés sur place lorsqu'ils tombaient en panne, pour les racheter à neuf...
    • nourriture des soldats surfacturée (alors qu'elle était produite sur place par des Irakiens sous-payés)
    • lavage du linge complètement baclé... et les soldats avaient interdiction de laver le linge à la main, Halliburton touchant 99$ par panier
    • voitures de luxe, jet-ski, hotels grand luxe pour les hauts cadres de la société
  • les multiples liens de lobbying, corruption, connivence avec les hauts fonctionnaires de l'État fédéral, les marchés de gré à gré...

Plus largement, beaucoup de capitalistes ont profité du marché de la reconstruction :

  • les sociétés de BTP états-uniennes se sont partagées le gros du pactole : 5,3 milliards de dollars pour Parsons, 1,03 milliards pour Bechtel[15]...
  • la société DynCorp, chargée d'entraîner la police irakienne, a reçu 1,9 milliards
  • la société de surveillance aérienne Transatlantic traders a reçu 5 milliards

Les « armes de destruction massive » n'ont par ailleurs jamais été trouvées, et il est indéniable à présent qu'il s'agit d'une falsification grossière.

4.1.4 Intervention en Libye (2011)[modifier | modifier le wikicode]

De façon similaire, l'intervention en Libye de 2011 (prenant prétexte des répression de Kadhafi contre son peuple) a plongé le pays dans le chaos.

4.2 Tendance au déclin[modifier | modifier le wikicode]

L'économie états-unienne connaît un lent déclin relatif dans l'après-guerre, et on commence à parler de déclin dans les années 1980.[16] L'industrie a progressivement cédé sa place aux services, à la fois parce que globalement, les évolutions technologiques diminuent les emplois industriels, mais aussi parce que les secteurs industriels tendent être délocalisés, un processus accéléré par la mondialisation. Les États-Unis ont été le fer de lance de la mondialisation néolibérale des années 1980-1990, ce qui leur a permis à court terme d'offrir à leurs multinationales de nouveaux marchés, et de différer le problème de suraccumulation de capital, mais n'a fait qu'accélérer leur tendance au déclin.

La production de masse tend à être relocalisée dans des pays où la main d’œuvre est moins payée (justement parce que ces pays sont des capitalismes plus jeunes) comme la Chine. Ce phénomène a été en partie amorcé par des délocalisations contrôlées par des multinationales états-uniennes (ou européennes / japonaises), qui voulaient conserver les parties les plus rentables de la chaîne de production, mais il est devenu un facteur autonome, avec des entreprises chinoises maîtrisant de plus en plus elles-mêmes la base de la production. Les États-Unis conservent une avance dans les secteurs à plus forte valeur ajoutée (haute technologie, services nécessitant une éducation importante...), mais cette avance se réduit, d'une part parce que d'autres puissances relativement anciennes comme le Japon ou l'Allemagne font parfois mieux que les États-Unis sur le plan technologique, d'autre part parce que l'accumulation rapide de capital permet à la Chine d'investir massivement pour rattraper son retard.

Les États-Unis restent la première puissance financière, ce qui est l'héritage de leur immense accumulation de capital. Cependant cette puissance est menacée par l'érosion de la puissance industrielle, et par le décalage de plus en plus gigantesque entre les valorisations boursières (instables, spéculatives et largement gonflées de capital fictif) et la survaleur dégagée dans l'économie réelle. Cela se manifeste par des tendances à la crise de plus en plus marquées, comme en témoigne la crise de 2007-2010.

Tout cela se répercute avec une certaine inertie sur le plan politique, diplomatique et militaire. Depuis le début du 21e siècle, le leadership des États-Unis est menacé par d'autres puissances, notamment la montée en puissance de la Chine.

Les interventions militaires des États-Unis sont des victoires de court terme, mais qui chaque fois conduisent à miner un peu plus les conditions du soft power.

D'un côté les États-Unis prétendent « apporter la démocratie » à coup d'invasions militaires, de l'autre ils sont incapables d'entraîner un développement économique et social source de progrès pour au moins de larges parties des populations. Ceci de par la nature du capitalisme en général, mais de façon aggravée par le déclin économique relatif des États-Unis.

Les États-Unis sont de moins en moins aimés de par le monde, et leur leadership apparaît de moins en moins comme idéologiquement justifié.

5 Soft power[modifier | modifier le wikicode]

Aujourd'hui, leur domination (ou impérialisme) s'exprime de différentes manières, que les historiens qualifient de "soft power" et de "hard power". Le "soft power" regroupe toutes les formes de domination non-militaires.

5.1 Domination économique[modifier | modifier le wikicode]

Les États-Unis constituent l'une des premières puissances économique mondiale. Leurs multinationales se sont implantés partout dans les pays capitalistes, et ne cessent de s'étendre et de gagner en pouvoir, souvent au détriment des entreprises nationales et des consommateurs. Ces derniers usent d'un très bon marketing pour masquer l'exploitation de leurs "bas" salariés[17], ceux dont les lois et les consommateurs ignorent injustement...

Les recettes de certains trusts dépassent le PIB de certains États, y compris "riches" : ainsi, le PIB de General Motors, l'un des plus grands trusts américain, dépassait celui du Danemark en 1999[18]... De manière générale, les trusts américains disposent d'un immense pouvoir financier (et se renforçant même en  temps de crise !), confirmant le rôle déterminant de la haute bourgeoisie dans le contrôle du monde.

Bien qu'aujourd'hui, les trusts américains se heurtent aux trusts étrangers, européens et chinois notamment, ils conservent encore et toujours la position dominante.

5.2 Domination scientifique[modifier | modifier le wikicode]

La majorité des scientifiques "nobelisés" sont de nationalité états-unienne. Les Américains investissent énormément d'argent dans les pôles technologiques afin que leurs entreprises restent à la pointe du progrès.

5.3 Domination artistique[modifier | modifier le wikicode]

Les compagnies de production cinématographiques américaines produisent et diffusent la majorité des films et documentaires[19] sortant au cinéma. Ces mêmes films sont souvent articulés autour de valeurs américaines "importantes", comme l'amour, l'individualisme et le dépassement de soi, la recherche du pouvoir et/ou de la gloire, de l'argent...

De manière générale, cette domination en nourri une autre, bien plus grave et importante, celle idéologique.

5.4 Domination idéologique et propagande[modifier | modifier le wikicode]

La domination  idéologique des États-Unis commence vraisemblablement après la Première guerre mondiale, et s'accentue avec la guerre froide. Les américains n'ont cessé et ne cesseront de promouvoir leur "démocratie" (bien que seuls deux partis bourgeois et corrompus se partagent le pouvoir, sans apporter de réformes significatives...) et leur mode de vie (l'american way of life) face au "totalitarisme soviétique" et à la "menace stalinienne"...

Les conditions de vie misérables des habitants de l'Europe de l'Est et de l'URSS ont donné du crédit à la propagande idéologique. Pourtant, il faut savoir que les entreprises américaines emploient majoritairement dans des pays autoritaires, et qu'au sein même des États-Unis, les oppressions sont très importantes entre les communautés.

Lors de la 1ère conférence mondiale sur le climat à Rio de Janeiro, Bush déclarera : « The american way of life is not negotiable. »

6 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

Vidéos

  1. Chaîne Oui d'accord, L'entreprise qui a pillé l'Amérique latine, 13 novembre 2021

Textes

  1. California's Yuki Indians (en)
  2. 2,0 et 2,1 Leslie Manigat, L’Amérique latine au XXe siècle,1889-1929, Points, 1991, p. 360-370
  3. Histoire et mémoires des deux Guerres
  4. Boukharine, Imperialism and World Economy, Chapter 13: War and Economie Evolution, 1915
  5. Henry Cabot Lodge - Against the League of Nations, 12 August 1919
  6. Jorge Niosi, Le déclin de l'industrie américaine, Revue d'économie industrielle, 1984
  7. 1963-1975 : la guerre du Vietnam (Herodote)
  8. Le Monde, Le Nigeria porte plainte contre le géant pharmaceutique américain Pfizer, juin 2007
  9. Jeune Afrique, Affaire Pfizer-Nigeria : les victimes attendent toujours leur dédommagement, février 2011
  10. France info, En 1996, des essais cliniques illégaux de Pfizer sur des enfants nigérians ? "Complément d'enquête" a retrouvé un témoin de l'époque, Mai 2023
  11. "Pakistan: A Plethora of Problems" (PDF). Global Security Studies, Winter 2012, Volume 3, Issue 1, by Colin Price, School of Graduate and Continuing Studies in Diplomacy. Norwich University, Northfield, VT. Retrieved 22 December 2012.
  12. Cathérine Schwartz et Matthias Erne, « Hamed Karzaï est-il une pièce sur l’échiquier géopolitique? », sur horizons-et-debats.ch, Horizons et Débats (consulté le 7 octobre 2009)
  13. Anne Alexander, Daech et la contre-révolution : pour une analyse marxiste, 12 juin 2015
  14. Irak à vendre : les profiteurs de guerre, documentaire 2006
  15. War profiteers- Bechtel : qui sème le vent..., 2007
  16. Jorge Niosi, Le déclin de l'industrie américaine, Revue d'économie industrielle, 1984
  17. Libération, article sur l'exploitation des salariés chinois sous-traitant Apple, http://www.liberation.fr/economie/2011/10/07/en-chine-un-brutal-systeme-d-exploitation_766315
  18. Banque Mondiale (World Development Repport 1998-1999), Forbes, The Nation, Institut de recherche des Nations Unies pour le développement social (States of Disarray, Genève, 1995)
  19. https://fr.wikipedia.org/wiki/Cin%C3%A9ma_am%C3%A9ricain#La_domination_du_cin.C3.A9ma_hollywoodien_dans_le_monde