Quatrième congrès du POSDR

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Jusqu'en 1918, la Russie utilisait le calendrier julien, qui avait à l'époque 13 jours de retard sur le calendrier grégorien. Le 23 février « ancien style » correspond donc au 8 mars « nouveau style » (n.s.).


Les délégués bolchéviks au 4e congrès

Le 4e congrès du Parti ouvrier social-démocrate de Russie , dit congrès d'unification, se tient à Stockholm du 10 au 25 avril 1906 (nouveau style : 23 avril au 8 mai).

1 Contexte[modifier | modifier le wikicode]

Le 3e congrès (printemps 1905) avait été un congrès entre bolchéviks, non reconnu par les menchéviks. Le parti n'avait plus d'organe central, l'Iskra étant menchévique, et les bolchéviks faisant paraître le Proletarii.

Mais la montée révolutionnaire de l'année 1905 avait renforcé la volonté de réunification du parti. Beaucoup de jeunes et d'ouvriers avaient été recrutés, dont la plupart ne comprenait pas les divisions. D'autant plus que dans la pratique, les militants des deux fractions se rapprochaient. L'aile réformiste des menchéviks était en sourdine. Face au Tsar qui avait concédé des élections législatives (Douma d'État), les deux fractions étaient sur la ligne du boycott.

La nécessité du rapprochement était réclamée par la base depuis longtemps. Lénine appela à l’unité à partir de février 1905, d'autant plus qu'il paraissait désormais possible de tenir des réunions plus démocratiques où il serait possible de voter.[1] A l’été 1905, toute une série de comités bolcheviks et mencheviks fusionnèrent de leur propre initiative.[2]

Les dirigeants (Lénine et Martov en premier lieu) s'accordent, notamment sur le fait que la formulation de Lénine de la première règle des statuts (qui avait était l'origine de la scission), serait acceptée. Les deux fractions élisent des délégués sur la base de deux plates-formes, avec représentation proportionnelle au nombre des voix.

A la veille du congrès, Lénine dit à Lounatcharski :

« Si nous avons la majorité au comité central (…), nous exigerons la discipline la plus stricte. Nous insisterons pour que les mencheviks se soumettent à l’unité du parti. Tant pis pour eux si leur nature petite-bourgeoise ne leur permet pas de nous suivre. Laissons-leur l’odium de la rupture de l’unité du parti. »

« Mais si nous sommes minoritaires ? » demanda Lounatcharski. « Irons-nous à l’unification ? »

Lénine sourit et répondit :

« Nous ne permettrons pas de nouer une corde autour de notre cou pour l’unité, et nous ne permettrons en aucun cas aux mencheviks de nous mener derrière eux avec une chaînette. »[3]

Les menchéviks sont devenus nettement majoritaires (environ 34 000 militants contre 14 000 pour les bolchéviks). Ils se sont construit en intervenant de façon bien plus volontariste dans les organes spontanément créés par les masses (syndicats, soviets...).

2 Déroulement du congrès[modifier | modifier le wikicode]

Chaque point soulève une forte polémique entre fractions. Les menchéviks font passer la plupart de leurs positions.

2.1 Délégation[modifier | modifier le wikicode]

Les délégués sont au nombre de 112, représentant 57 organisations locales, et il y avait également 22 délégués avec voix délibérative mais sans droit de vote.

Parmi les délégué·es bolchéviks : Lénine, Bogdanov, Krassine, Frounzé, Kalinine, Kroupskaïa, Lounatcharski, Sergueïev (Artyom),Chahoumian, Skvortsov-Stepanov, Staline, Vorochilov, Litvinov et V. V. Vorovski.

C'est alors la première fois que Staline se rendit hors de Russie.

L’aile gauche, influencée par Trotski et Parvus, était pratiquement invisible. Comme disait Lénine,

l’absence parmi les mencheviks du courant qui s’est clairement manifesté dans le Natchalo et qu’on avait pris l’habitude de lier aux noms des camarades Parvus et Trotsky, cette absence donc sautait aux yeux. Certes, il est possible qu’il y ait eu parmi les mencheviks des « parvusistes » et des « trotskystes » — on m’a affirmé par exemple qu’il y en avait huit.[4]

2.2 Sur la révolution de 1905[modifier | modifier le wikicode]

La droite des menchéviks se déchaîne contre les bolchéviks, accusés d'utopisme, de romantisme révolutionnaire. « Soulèvement — gouvernement révolutionnaire provisoire — république, voilà tout le schéma politique des bolcheviks. » dit Jordania. Plékhanov ne cessait de reprocher un « manque de tact » vis-à-vis de la bourgeoisie libérale[5].

Pour la plupart des délégués menchéviks, la situation révolutionnaire s'est refermée, et il faut cesser tout appel à l'insurrection.

Plékhanov va même plus loin en affirmant que les ouvriers de Moscou n'auraient pas dû prendre les armes en décembre 1905.

Lénine continuait à voir la situation comme montante, jusqu'en décembre 1906.[6]

2.3 Elections à la Douma d'État[modifier | modifier le wikicode]

Les menchéviks de Transcaucasie proposèrent que le parti renonce à son boycott et désigne des candidats aux élections encore en cours. La fraction bolchevique accusa les mencheviks de trahison. Mais, à leur grande consternation, ils découvrirent que Lénine était le seul délégué bolchevik à se ranger du côté des mencheviks. En fait, il ignora la discipline de fraction et vota avec les mencheviks.

A la fin juin 1906, il justifiait sa position :

Mais le boycottage entraîne-t-il obligatoirement le refus de former à la Douma notre propre fraction du parti ? Nullement. Les boycotteurs qui le pensent (…) se trompent. Nous devions tout faire — et nous avons tout fait – pour empêcher la convocation d’une représentation d’hommes de paille. C’est un fait. Mais puisque, malgré tous nos efforts, la représentation a été convoquée, nous ne pouvons pas refuser de l’utiliser.[7]

2.4 Question agraire[modifier | modifier le wikicode]

L'un des principaux sujets abordés fut la révision du programme du parti sur la question agraire.

Deux rapports furent présentés :

  • l'un par Lénine, qui défendait la confiscation des terres des grands propriétaires, et la nationalisation du sol ; cela signifiait que l'achat et la vente de terre serait interdits, bien qu'il y ait encore une répartition de l'usufruit ;
  • l'autre par Maslov (« John »), qui défendait la municipalisation, avec indemnisation des propriétaires selon le rapport de force.

Plékhanov fit un rapport complémentaire, avec des modifications sur la version de Maslov, déclarant qu'il faut « arrêter d'avoir peur de la révolution paysanne ».

Une autre position a été présentée par une partie des délégués bolcheviks, dirigés par Shanine, Borissov et Finn, et parmi lesquels se trouvaient Staline, Matvev (Bazárov-Rúdnev) et Sakarélov (N. Sakvarelidze). Ils étaient opposés à la nationalisation de la terre et estimaient qu'elle devrait simplement être répartie entre les paysans en tant que propriété privée.

La résolution menchévique passe, avec des amendements bolchéviks, notamment pour supprimer l'indemnisation des grands propriétaires, et faire passer la nationalisation des eaux et forêts.

2.5 Réunification formelle[modifier | modifier le wikicode]

Le comité central élu comprend deux Polonais, un Letton, sept mencheviks et trois bolcheviks, Krassine, Rykov et Desnitski.

Néanmoins, le parti est officiellement réunifié, en incluant le Bund, le parti letton et le SDKPiL. Les fractions se sont même formellement dissoutes.

Lénine annonce solennellement : « II n'y a plus de schisme [...] les fractions précédentes des 'bolcheviks' et des 'mencheviks' se sont entièrement fondues. »[8] Vingt-six « délégués de l'ancienne fraction bolchevique », dont Lénine, déclarent que, malgré leurs divergences avec la majorité du congrès, ils sont hostiles à toute scission. Il déclare que les bolchéviks continueront à défendre leurs positions. La fraction bolchevique sera bientôt dirigée par un centre clandestin, autour du Proletari, qui continue de paraître, officiellement en tant qu'organe du comité de Saint-Pétersbourg.

Lénine accepte d'être minoritaire, convaincu que l'essor révolutionnaire va pousser les menchéviks à gauche.

3 Voir aussi[modifier | modifier le wikicode]

Congrès du POSDR Conférences du POSDR

4 Notes[modifier | modifier le wikicode]

Protocoles du 4e congrès du POSDR (en russe)