Féminisme libéral

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Symbole utilisé par l'Alliance internationale des femmes, fondée en 1904

Le féminisme libéral est un féminisme désirant appliquer le libéralisme politique (égalité des droits, libertés individuelles...) aux rapports hommes-femmes.

On peut parler de féminisme bourgeois dans la mesure où ce féminisme est porté par la bourgeoisie ou plus largement par des forces politiques qui ne remettent pas en cause la société de classe.

On parle aussi parfois de féminisme institutionnel pour désigner les courants qui sont centrés sur des réformes juridiques (parité dans les institutions...).

1 Généralités[modifier | modifier le wikicode]

D'un point de vue marxiste, on ne peut caractériser de façon unilatérale le "féminisme bourgeois". D'une part parce que la bourgeoisie a joué un rôle progressiste face à la réaction nobiliaire, d'autre part parce que la bataille pour l'égalité des droits, si elle ne suffit pas, a été et reste nécessaire.

De plus, on ne peut pas résumer ces féministes à la bourgeoisie, car des femmes issues de la noblesse ont elles aussi porté les idées libérales (même si en dernière analyse c'est l'essor de la bourgeoisie qui a été déterminant).

Enfin, ce féminisme ne peut tout à fait être réduit à l'égalité des droits, car les réflexions des penseurs et penseuses les plus avancé-e-s de la bourgeoisie ont souvent esquissé des réflexions sur les conditions sociales d'existence, et sur la construction sociale des genres.

2 Historique[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Précurseur·ses[modifier | modifier le wikicode]

Christine de Pisan (1364-1430) fut une des premières femmes de lettre en Europe. Si on ne peut pas dire qu'elle ait eut des revendications féministes, elle écrivit dans La cité des dames que l'inégalité intellectuelle entre hommes et femmes n'est pas naturelle, mais due à l'éducation et aux représentations d'elles-mêmes fournies aux femmes par le discours misogyne dominant.

Marie de Gournay, qui était proche de Michel de Montaigne, écrivait en 1584 le Promenoir de Monsieur de Montaigne, dans lequel elle expose des réflexions féministes, approfondies en 1622 dans Égalité des Hommes et des Femmes. Elle affirme elle aussi que si les femmes avaient le même accès à l'éducation que les hommes, elles compteraient tout autant de penseurs qu'eux.

La philosophie des Lumières a fait avancer la notion d'égalité des droits entre humains. Mais cela cohabitait avec une misogynie majoritaire (par exemple chez Diderot, Montesquieu ou Rousseau). Contrairement à une certaine vision simpliste du progrès (une vision déformée par les besoins de l'idéologie bourgeoise triomphante du 19e siècle), l’Époque moderne a même souvent constitué un recul sur le plan des droits des femmes.

On peut cependant citer :

  • Poullain de La Barre, dans De l’égalité des sexes considère que l'infériorité féminine résulte d'un simple préjugé ;
  • Helvétius dans De l'esprit, défend l'idée d'un cerveau égal pour les hommes et les femmes, et préconise, aux antipodes de Rousseau, une éducation identique pour les deux sexes ;
  • Condorcet dénonce le rôle de l'Église sur l'asservissement des femmes dans Sur l’admission des femmes au droit de cité (1790) ;
  • Boissel prend la cause des femmes, « pour réparer les torts que les hommes leur ont faits jusqu’ici, et pour faire revivre tous les titres que la nature et son auteur ont établis en faveur de la femme, pour le bonheur du genre humain » (1789)[1]

2.2 Révolution française de 1789[modifier | modifier le wikicode]

La Révolution française a mis fin aux exceptions qui donnaient le droit de vote aux femmes sous l'Ancien régime : elles sont explicitement exclues du corps électoral à partir des élections à l'Assemblée législative de 1791[2].

En 1793, Olympe de Gouges, Louise Lacombe et d’autres, conscientes que les « Droits de l’Homme » ne parlent en fait que du droit des hommes, rédigent en réponse les « Droits de la Femme » en proclamant que : « Si la femme a le droit de monter sur l’échafaud, elle doit avoir aussi celui de monter à la tribune. ». Elles revendiquaient l'égalité des droits civils et politiques, l'instauration du divorce, et la suppression du mariage religieux. Olympe de Gouges meurt guillotinée.

2.3 19e siècle[modifier | modifier le wikicode]

Aux 19e siècle, les droits des femmes ne sont pas encore portés par un mouvement de masse. Ceux et celles qui les portent sont alors souvent des radicaux, souvent socialistes. Des socialistes utopiques comme Flora Tristan, Charles Fourier ou les saint-simoniennes sont en pointe.

En France, la Deuxième république, en 1848, renouvèle son libéralisme à deux vitesses, en limitant le suffrage "universel" aux seuls hommes. La Cour de cassation réaffirme en 1885 : « La Constitution du 4 novembre 1848, en substituant le régime de suffrage universel au régime censitaire ou restreint dont les femmes étaient exclues, n'a point étendu à d'autres qu'aux citoyens de sexe masculin qui, jusqu'alors, en étaient seul investis, le droit d'élire les représentants du pays. »

Lorsque le mouvement ouvrier et syndical commence à s'organiser, dans la deuxième moitié du 19e siècle, il est loin d'être automatiquement en faveur de l'égalité des droits. Mais le rapprochement est néanmoins plus facile entre courants progressistes, et des tentatives de jonction ont lieu assez tôt.

En plus de l'égalité des droits, certaines « féministes » du 19e siècle ont investi beaucoup d'effort (et d'argent pour certain·e·s philanthropes) dans l'aide matérielle (accès aux soins, à l'éducation...) aux femmes et aux jeunes filles. C'est par exemple le cas de Nadejda Stassova.

2.4 « Belle Époque »[modifier | modifier le wikicode]

Vers la fin du 19e siècle, des organisations féministes se forment, en prenant des formes variées suivant les pays. Dans leur grande majorité, il s'agit d'organisations s'inscrivant dans le prolongement du libéralisme politique, réclamant les mêmes droits pour les femmes que ceux qui sont peu à peu acquis pour les citoyens hommes. De ce point de vue, on peut voir dans cette première vague féministe un « féminisme libéral ». Comme le libéralisme politique (face aux réactionnaires monarchistes), le féminisme est alors apparu globalement « à gauche » de l'échiquier politique. Mais étant donné que ces revendications étaient majoritairement portées par des femmes issues de la bourgeoisie et ne réclamaient spontanément pas plus que l'égalité juridique, les organisations ouvrières les ont également caractérisées comme « féminisme bourgeois ».

Il y a cependant des nuances importantes entre ces mouvements. Le combat des suffragistes britanniques, à partir de 1903 (on parle souvent de « suffragettes », mais le terme comporte une connotation dévalorisante), a été un des plus radicaux. En France, l'Union française pour le suffrage des femmes, créée en 1909, était bien plus modérée.

Pour se démarquer de ces mouvement, la social-démocratie allemande et l'Internationale ouvrière refusèrent de se revendiquer du féminisme, vu alors comme un mouvement de femmes bourgeoises. Mais cela ne les empêchait pas de reprendre les revendications d'égalité des droits, à la suite de Marx et Engels. Les marxistes comme Eleanor Marx ou Clara Zetkin soutenaient que l'égalité formelle (juridique) ne déboucherait pas sur l'égalité réelle, et que le socialisme était nécessaire.

Selon les circonstances, notamment lorsqu'il n'existait pas de force politique libérale prête à s'allier aux organisations féministes, ces dernières ont pu se rapprocher du socialisme. Des féministes (même issues de la bourgeoisie) ont mis en avant le fait que les femmes subissaient comme la classe ouvrière une oppression, et avaient intérêt à s'allier. Ce fut par exemple le cas avec Hubertine Auclert, qui intervient au congrès ouvrier de Marseille en 1879. Ou encore avec une féministe comme Madeleine Pelletier qui se concevait d'abord comme une féministe et chercha plusieurs formes de militantisme au sein du mouvement socialiste, anarchiste et communiste.

Certaines femmes n'hésitent pas à mettre en avant les revendications des femmes, tout en défendant la société bourgeoise. Par exemple en Finlande en 1907, Hélène Salpakari, militante nationaliste bourgeoise, déclare :

« Il est important qu'avec la nouvelle Assemblée vienne le droit de vote pour les femmes ! Le peuple de Finlande a lutté pour le retour des libertés et il est juste que les femmes aient elles aussi leur part de liberté. Elle forment encore maintenant une caste sans aucun droit, et, si nos socialistes parlent des injustices sociales, il faut bien voir que c'est là la plus grande de toutes les injustices, et non, comme ils le prétendent, les différences entre les classes sociales. Dans ce pays, chaque citoyen est libre. Seule la femme ne l'est pas ! Et aujourd'hui, quand toutes les forces sont nécessaires pour la défense des libertés, il est essentiel que les femmes puissent participer à ce combat ! »[3]

2.5 Années 1920[modifier | modifier le wikicode]

Dans les années 1920, dans certains milieux, des femmes remettent en question certaines normes. Des jupes plus courtes font leur apparition... En 1924, les jupes sont à environ 26 cm du sol ; en 1925, elles sont à 30 ou 35 cm ; en 1926, elles sont à 40 cm puis rallongent progressivement jusqu’en 1930 où elles se stabiliseront à 30 ou 32 cm du sol.

Un style "garçonne" apparaît (cheveux courts, vêtements plus longilignes...). Le terme devient synonyme de femme active et autonome, libre de ses mouvements — elle sort, danse, fume, a des pratiques sportives ou de plein air, conduit une automobile, voyage —, et aux mœurs libérées, faisant fi des convenances — elle affiche une liaison hors mariage, voire son homosexualité ou sa bisexualité, ou vit ouvertement en union libre.[4]

Aux États-Unis, Suzanne La Folette est un exemple de « féminisme libertarien ».

2.6 Années 1960-1970[modifier | modifier le wikicode]

Ces années-là sont celles de la deuxième vague du féminisme. Toute une génération de femmes accède à l'université pour la première fois, et y trouve des armes intellectuelles pour critiquer radicalement la domination masculine, avec un foisonnement de théories sur le patriarcat. Certaines comme les féministes matérialistes en font un système indépendant du capitalisme, d'autres cherchent à penser une articulation entre les deux (féminisme marxiste). Dans tous les cas, la deuxième vague est très marquée à gauche, même si elle entre souvent en conflit avec les organisations du mouvement ouvrier traditionnel.

La radicalité de ce mouvement fait qu'on parle rarement à son sujet de féminisme bourgeois. Mais certains courants marxistes ont cependant qualifié des mouvements de la deuxième vague comme bourgeois ou petit-bourgeois.

2.7 Années 1980 à aujourd'hui[modifier | modifier le wikicode]

Les constitutions démocratiques reconnaissent désormais qu'aucun individu ne peut être discriminé en raison de son sexe. Cependant la parité hommes-femmes n'est atteinte nulle part. Le parlement suédois compte environ 45% de femmes, tandis qu'en France et en Italie, elles sont environ 11%. Le Conseil de l'Europe, s'appuyant sur la convention des Nations unies de 1981, recommande une participation minimale de 30% de femmes.

En 1991, lorsque le nombre d'élues suédoises a chuté de 38% à 33%, les féministes ont menacé de fonder un parti féminin avec ses propres listes électorales. Un sondage leur ayant attribué 40% des intentions de vote a convaincu les partis de constituer des listes paritaires aux élections de 1994.

En France, la loi du 6 juin 2000 sur la parité vise à favoriser l'égal accès des femmes et à des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives.

En Norvège, depuis 2006, seules les entreprises disposant d'un conseil d'administration (CA) composé d'au moins 40 % de femmes pourront s'inscrire au registre des sociétés anonymes.

Des féministes continuent à dénoncer un féminisme libéral, critique lancée par exemple à Lucile Peytavin.[5]

3 Différentialisme ou universalisme[modifier | modifier le wikicode]

Le féminisme libéral n'implique pas automatiquement une position tranchée sur la question du « féminisme différentialiste », c'est-à-dire les visions qui valorisent « féminin », au risque de l'essentialiser en le naturalisant.

Historiquement, le différentialisme ayant été dominant, les féministes de la première vague revendiquaient majoritairement d'êtres "égales et différentes". Lors de la deuxième vague, le différentialisme a été mis en minorité dans le féminisme, que ce soit le féminisme bourgeois ou socialiste. Les études de genre ont insisté sur le caractère social de la plupart des différences perçues entre hommes et femmes, et nombre de féministes ont mis l'accent sur le fait que le sexe (biologique) est un plus un spectre autour de deux pôles principaux que deux boîtes rigides.

Cela n'empêche pas qu'un courant différentialiste a existé dans la deuxième vague et continue d'exister. La position opposée au différentialisme a pu être qualifiée d'universalisme.

Cependant, l'universalisme a pris progressivement un sens différent à la fin du 20e et au début du 21e siècle.

Dans les années 1990 a émergé un mouvement pour viser activement la parité hommes-femmes (dans les organisations[6], les parlements...). Pour atteindre ce but, des mesures de discrimination positive ("affirmative action" en anglais) ont été défendues, parfois avec des quotas. Une majorité du mouvement féministe a considéré qu'il s'agit d'un outil pour faire avancer l'égalité et transformer les sociétés, jusqu'à ce que de telles mesures ne soient plus nécessaires. Si ces mesures ont plutôt été portées par la gauche, elles ont été relativement consensuelles. Un Observatoire de la parité est même créé en 1995 sous le président de droite Chirac. Pour cette raison, on peut parler d'un certain féminisme bourgeois, ou institutionnel, centré sur ces questions.

Certains féministes ont critiqué ce mouvement, considérant que cela tournait le dos à l'universalisme et qu'il serait dégradant pour les femmes d'avoir besoin d'une béquille[7]. En France, cela passe particulièrement par la défense d'un « universalisme républicain » (Elisabeth Badinter, Danièle Sallenave[8]...). Par exemple, lorsqu'en 1999, la Constitution a été amendée[9] pour viser explicitement « l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives », Badinter proclame :

« Plutôt que d'accuser l'universel d'être masculin pour mieux le jeter aux poubelles de l'histoire, il eût été plus juste de mettre en accusation les hommes qui bafouent le principe de l'universalité. » Nouvel Observateur du 14-20 janvier 1999[8]

A l'inverse, Elisabeth Guigou, ministre PS défendant la réforme, écrivait : « Il faut repenser l'universalisme, quitter la conception abstraite, la neutralité qui a marqué la domination masculine, faire reconnaître que la souveraineté s'incarne dans les hommes et les femmes. » [8]

A partir des années 2000, cet universalisme va aussi beaucoup être utilisé pour s'opposer aux revendications antiracistes, accusées de « communautarisme ». Les courants revendiquant alors le plus fortement le terme d'universalisme vont alors être de facto de plus en plus au centre et à droite.


4 Critiques marxistes[modifier | modifier le wikicode]

4.1 Eleanor Marx[modifier | modifier le wikicode]

Par exemple Eleanor Marx disait qu'elles avaient des « revendications parfaitement justes »[10], mais qu'elles « proviennent en règle générale des couches aisées » et que « aucune d'entre elles ne va au-delà pour atteindre les fondements de la société elle-même : la détermination économique. » Pour elle, l'oppression des femmes, qu'elle ne niait pas, avait la même fondation que l'oppression des travailleur-se-s, le capitalisme. Par conséquent le féminisme bourgeois était vain :

« Les femmes sont soumises à une tyrannie masculine organisée comme les ouvriers sont soumis à la tyrannie organisée des oisifs. Même lorsque ceci est saisi, il ne faut jamais se lasser de faire comprendre que pour les femmes, comme pour les travailleurs, il n'y a pas dans la société actuelle de solution effective aux difficultés et aux problèmes qui se présentent. Tout ce qui est fait, quel que soit le cortège de trompettes qui l'annonce, n'est que palliatif, non pas solution. »

Elle faisait une analogie avec le pacifisme bourgeois :

« Tout comme sur la question de la guerre le Congrès a souligné la différence entre l'ordinaire "ligue bourgeoise pour la paix", qui crie «Paix, paix» là où il n'y a de la paix nulle part, et le parti économique de la paix, le parti socialiste, qui veut supprimer les causes de la guerre - de même sur la "question des femmes" le Congrès a aussi clairement souligné la différence entre le parti [bourgeois] des "droits des femmes" d'une part, qui ne reconnaît aucune lutte de classe, mais seulement une lutte entre les sexes [...] et, d'autre part, le vrai parti des femmes, le parti socialiste, qui a une compréhension de base des causes économiques de la position défavorable actuelle des travailleuses. »[11]

4.2 Clara Zetkin et les socialistes allemands[modifier | modifier le wikicode]

Clara Zetkin, une dirigeante socialiste allemande importante, reprenait globalement ces critiques.

« Le droit de vote ou l'égalité civile de la femme, une fois inscrits dans les lois et les codes, l'exploitation économique des femmes n'en sera pas supprimée pour autant. »

Les militant-e-s socialistes allemand-e-s rejetaient le terme de féminisme, qu'elles associaient au féminisme bourgeois. Les féministes bourgeoises qui centraient leur combat sur l'égalité des droits, appelées Frauenrechtlerinnen (littéralement les "droit-des-femmistes") étaient vertement critiquées.

Une minorité parmi les femmes socialistes, notamment derrière Lilly Braun, prônait un rapprochement avec les organisations féministes bourgeoises. Gertrude Guillaume-Shack, qui fut une dirigeante féministe, rejoignit le SPD en 1885, puis dut s'exiler en Angleterre en 1886 où elle rencontre Engels. Après quelques échanges, elle rompt avec les socialistes en 1887.

4.3 Internationale ouvrière[modifier | modifier le wikicode]

L'Internationale socialiste des femmes (ISF) a été créée en 1907 comme organisation sœur de l'Internationale ouvrière. Sa première conférence eut lieu du 17 au 19 août 1907 à Stuttgart (Allemagne). Elle établit un secrétariat international sous la direction de Clara Zetkin, et adopta une résolution pour le droit de vote des femmes, qui fut le départ d'une campagne active des organisations socialistes de femmes, dans la société, mais aussi au sein de leurs propres partis. Parmi les 7 femmes déléguées par la SFIO, Madeleine Pelletier vota contre la résolution affirmant qu'il fallait maintenir strictement une indépendance par rapport au féminisme bourgeois.

Cette coupure organisationnelle et idéologique a surtout été marquée en Allemagne, où le SPD, parti de masse, avait aussi des organes féminin de masse. Clara Zetkin lance en 1891 le journal féminin Gleichheit (égalité), qui atteindra les 100 000 exemplaires diffusés. A partir de janvier 1892 sera aussi publié à Vienne un Arbeiterinnenzeitung (journal des travailleuses). Ces journaux, dans lesquels écrivaient Louise Kautsky, Eleanor Marx ou Laura Lafargue, se voulaient aborder la question des femmes d'un point de vue marxiste.

En France, cette coupure était beaucoup moins nette. De nombreuses militantes se revendiquait à la fois féministes et socialistes, adhérant à la fois au parti socialiste et à des organisations féministes interclassistes.

Étant donné que Clara Zetkin dominait les femmes socialistes allemandes, et qu'elle faisait partie de la gauche révolutionnaire, tandis que la plupart de ses contradictrices étaient proches du révisionnisme de Bernstein, de nombreux marxistes considèrent que « la question de l'attitude envers le féminisme bourgeois divisait les socialistes en ailes droite et gauche. »[12]

4.4 Internationale communiste[modifier | modifier le wikicode]

L'Internationale communiste dénonçait comme illusoire l'émancipation des femmes par la seule conquête de l'égalité des droits (formels) :

« Ce que le communisme donnera à la femme, en aucun cas, le mouvement féminin bourgeois ne saurait le lui donner. Aussi longtemps qu'existera la domination du capital et de la propriété privée, l'affranchissement de la femme n'est pas possible. Le droit électoral ne supprime pas la cause première de l'asservissement de la femme dans la famille et dans la société et ne lui donne pas la solution du problème des rapports entre les deux sexes.  »[13]

L'IC critiquait la collaboration de classe que représente la participation de femmes socialiste à des organisations du féminisme bourgeois :

« tout rapport de l'ouvrière avec le féminisme bourgeois, de même que tout appui apporté par elle à la tactique de demi-mesures et de franche trahison des social-coalitionnistes et des opportunistes ne fait qu'affaiblir les forces du prolétariat et, en retardant la révolution sociale, empêche en même temps la réalisation du communisme, c'est-à-dire l'affranchissement de la femme. Nous n'atteindrons au communisme que par l'union dans la lutte de tous les exploités et non par l'union des forces féminines des deux classes opposées. »[13]

5 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

  1. François Boissel, Catéchisme du genre humain, avril 1789
  2. Alexandre Maral, Les derniers jours de Versailles, Perrin, (ISBN 978 2 262 06411 2), p. 62.
  3. Citée dans Ici, sous l'Étoile polaire de Väinö Linna
  4. https://fr.wikipedia.org/wiki/Garçonne_(mode)
  5. Clémence Clos et Mathilde Royet, Le coût de la virilité ou les déboires du féminisme libéral : problèmes épistémologiques et enjeux politiques d’une mesure, Nouvelles Questions Féministes 2023/1 Vol. 42
  6. Euractiv, La gauche radicale est le seul parti européen à respecter la parité homme/femme, 12 juin 2014
  7. « La parité est humiliante pour les femmes, qui ne sont pas une espèce à protéger », déclare Françoise Cachin, directrice des musées de France, à L'Express (11 février 1999)
  8. Revenir plus haut en : 8,0 8,1 et 8,2 Sabine Valici-bosio, Michelle Zancarini-Fournel, Femmes et fières de l'être, mars 2001
  9. LOI constitutionnelle n° 99-569 du 8 juillet 1999 relative à l'égalité entre les femmes et les hommes
  10. Eleanor Marx, La question féminine, 1886
  11. Eleanor Marx, How Should We Organise? 1892
  12. Hal Draper et Anne G. Lipow, Marxist Women versus Bourgeois Feminism, 1976
  13. Revenir plus haut en : 13,0 et 13,1 III° Congrès de l'Internationale communiste, La propagande parmi les femmes, 1921