Politique d'austérité

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Manifestation contre les memorandums austéritaires à Athènes en 2011

Un plan d'austérité ou un plan de rigueur est une politique de rigueur visant à redresser l'économie d'un pays. Dans le cadre du capitalisme, il s'agit d'une politique visant à relancer l'accumulation de profits à moyen terme en dévalorisant la force de travail. Un plan d'austérité est donc un des leviers de la lutte de classe de la bourgeoisie contre les travailleur·ses.

1 Principe[modifier | modifier le wikicode]

AusteritéCartoon.jpg

Un gouvernement bourgeois pragmatique peut être amené à mettre en place un plan de rigueur pour :

  • réduire les déficits et la dette publique, afin
    • d'éviter un emballement (hausse des impôts indéfinie)
    • de retrouver la confiance des investisseurs et des créanciers (contenir la hausse des taux d'intérêt)
  • freiner l'inflation, qui notamment spolie les créanciers
  • limiter les bulles spéculatives

Les leviers d'un plan de rigueur sont budgétaires, fiscaux, monétaires, et en agissant sur le droit du travail :

  • augmentation des impôts et réduction des dépenses publiques pour réduire le déficit et la dette
  • augmentation des taux directeurs par la Banque centrale et augmentation des réserves obligatoires pour limiter les bulles spéculatives
  • réduction des salaires et précarisation du travail pour rendre à nouveau les investissements rentables

2 Exemples[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Austérité suite à la crise de 2008[modifier | modifier le wikicode]

Lorsque la crise de 2008 a éclaté, les États se sont massivement endettés pour renflouer les banques et grandes entreprises menacées de faillite. En conséquence, au nom de l'équilibre budgétaire, de nombreux plans d'austérité se sont abattus sur les populations. Ce phénomène a été particulièrement fort en Europe, où la crise de la dette a été amplifiée par une crise de la zone euro (les États se sont désolidarisés et les spéculateurs ont aggravé la crise pour les pays les moins riches).

2.1.1 États-Unis[modifier | modifier le wikicode]

Barack Obama annonce en août 2011 un grand plan d'austérité sur les dix années à venir[1]. Il est le fruit d'un accord au sommet entre les deux grands partis bourgeois (républicains et démocrates). Il s'agirait d'économiser 2 100 milliards $US, dont 900 milliards immédiatement.

2.1.2 Japon[modifier | modifier le wikicode]

Le Japon est le plus endetté des pays industrialisés, avec un rapport de la dette au PIB de près de 200% en 2010. Pour l'instant, il garde une relative confiance des marchés du fait de son fort excédent commercial et de sa croissance, mais en août 2011, l'agence Moody's a dégradé d'un cran la note du pays et de ses banques.

Mais l'austérité y est régulièrement évoquée (un plan de rigueur avait déjà été lancé en 2006). Un relèvement de la TVA est à l'étude.

2.1.3 Europe[modifier | modifier le wikicode]

🔍 Voir : Crise de la Zone euro.

2.2 Tournant néolibéral des années 1980[modifier | modifier le wikicode]

Dans les années 1970, un ralentissement économique se généralise dans les vieux pays capitalistes, et met fin à la période exceptionnelle de forte croissance de l'après guerre. C'est une conséquence de la baisse des taux de profit, une crise latente de suraccumulation. Les capitalistes réagissent en rognant les acquis des travailleur·ses, notamment en précarisant le travail et faisant en sorte que les salaires augmentent moins vite que la productivité. Ils réclament aussi des privatisations et des libéralisations pour augmenter les occasions de profit, ce qui a un impact austéritaire sur les services publics.

🔍 Voir : Tournant néolibéral.

2.2.1 Le tournant de la rigueur de Mitterrand[modifier | modifier le wikicode]

La victoire de Mitterrand à l'élection présidentielle de 1981 suscite un grand espoir dans l'électorat socialiste et communiste et dans le mouvement ouvrier. Mais rapidement, les quelques mesures sociales cèdent la place au tournant de la rigueur, c'est-à-dire à une politique plus brutalement pro-capitaliste. Des ministres PS et PC ont mené des attaques contre les salaires, rogné des services publics, cautionné des vagues de licenciements, ouvert la voie au racisme d'État... Cela conduira à une profonde démoralisation, et à plus long terme au recul des organisations de gauche, de la conscience de classe, et à une montée de l'extrême droite.

3 Critiques et alternatives[modifier | modifier le wikicode]

3.1 La dévaluation ?[modifier | modifier le wikicode]

Un des autres grands leviers de la politique économique bourgeoise est la dévaluation compétitive. Le principe est simple : dévaluer la monnaie nationale, pour augmenter le pouvoir d'achat des étrangers par rapport aux marchandises produites par l'industrie nationale, et ainsi favoriser les exportations du pays. C'est un levier qui a été massivement utilisé au cours du XXème siècle. Mais il a un effet déstabilisant pour l'économie globale, car un pays qui y a recours incite quasi-automatiquement ses concurrents à faire de même, ce tend à provoquer une inflation générale. C'est pourquoi lorsqu'ils en sont capables, les pays industrialisés essaient de s'accorder entre eux pour s'interdire d'y avoir recours. Par exemple, un des principaux intérêts de l'Euro pour les pays de la Zone est d'être certains qu'aucun d'entre eux ne peut concurrencer l'autre par une politique monétaire.

Avec l'aggravation de la crise des dettes publiques, les pays de la Zone Euro n'ont plus qu'une seule solution : les plans de rigueur. C'est pour cela que de nombreux courants souverainistes, surtout d'extrême-droite mais aussi à gauche, prônent de plus en plus ouvertement une sortie de l'Euro et le retour à une monnaie nationale pour pouvoir dévaluer. S'il est certain que ce n'est pas la solution souhaitée par la grande bourgeoisie, car très déstabilisante, cela pourrait s'avérer la seule solution bourgeoise à la crise si la contestation populaire et ouvrière empêche l'application des plans d'austérité. Mais en réalité, cela reviendrait également à faire payer les travailleurs avant tout, car cela provoquerait immanquablement une inflation généralisée détruisant rapidement leur pouvoir d'achat.

3.2 Planche à billets ?[modifier | modifier le wikicode]

Même en restant dans le cadre de l'UE, l'inflation est directement recommandée par certains économistes bourgeois. Notamment le néo-keynésien Paul Krugman, qui préconise que la BCE rachète, comme la Fed, des dettes d'Etat, et fasse un peu plus marcher "la planche à billet". Cela conduirait à une forte inflation, mais c'est là l'objectif affiché !

« Pour restaurer la compétitivité en Europe, il faudrait que, disons d'ici les cinq prochaines années, les salaires baissent, dans les pays européens moins compétitifs, de 20 % par rapport à l'Allemagne. Avec un peu d'inflation, cet ajustement est plus facile à réaliser (en laissant filer les prix sans faire grimper les salaires en conséquence). »[2]

Ironiquement, économistes néo-classiques ou keynésiens représentent simplement deux voies différentes pour faire baisser les salaires réels, c'est-à-dire faire payer la crise au prolétariat.

3.3 La sous-consommation ?[modifier | modifier le wikicode]

Certains courants politiques, principalement à gauche, critiquent l'austérité en expliquant qu'elle serait absurde du point de vue capitaliste. En se basant souvent sur une théorie erronée de la sous-consommation, ils avancent qu'en réduisant la consommation, on réduit la demande, et donc la croissance économique. C'est une vision bien trop simpliste : les économistes bourgeois eux-mêmes reconnaissent volontiers que l'austérité a un effet récessif à court terme. Mais l'objectif visé est de rétablir les conditions d'un taux de profit suffisamment élevé pour que les investissements capitalistes reprennent.[3]

3.4 Le socialisme[modifier | modifier le wikicode]

Du point de vue du prolétariat, toute sortie de crise dans le cadre du capitalisme ne peut passer que par un énorme recul social (austérité bien plus radicale ou inflation galopante), et il est plus que probable que cela conduise à des formes de barbarie inégalées, tant les rivalités entre pays impérialistes s'accentuent et peuvent servir de détournement à la lutte des classes.

Il y a donc moins que jamais de place pour les illusions régulationnistes ou réformistes : le capitalisme doit être renversé. La marge de manœuvre se réduisant chaque jour davantage pour les bourgeois et leurs serviteurs politiques, l'alternative devient chaque jour plus tranchée : austérité ou révolution.

4 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]