Antiparlementarisme

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Affiche de la Fédération Anarchiste (1978)

L'anti-parlementarisme est l'opposition au régime parlementaire et par extension à la démocratie sous sa forme actuelle.

Cet anti-parlementarisme peut provenir de tendances politiques très différentes.

La gauche ouvrière a tendance à critiquer la démocratie bourgeoise derrière le parlementarisme, et vise à le dépasser par une forme de démocratie plus organiquement liée à la population (de fait des formes plus collégiales). De son côté, l'extrême droite s'attaque à la démocratie tout court, et souhaite favoriser un gouvernement fort, voire un homme fort, dans une logique bonapartiste voire fasciste. [1][2][3][4]

1 Critiques des politiciens[modifier | modifier le wikicode]

La critique des politiciens et de leurs privilèges est une critique populaire, que l'on retrouve tout le long du spectre politique. La critique des députés ou des sénateurs est un cas particulier de cette critique. Ceux-ci sont particulièrement pointés du doigt pour leurs revenus et autres avantages, leur hypocrisie (lorsqu'ils votent des mesures d'austérité tout en se votant des augmentations...), leur corruption (conflits d'intérêts divers, cadeaux reçus par des capitalistes...), et le coût qu'ils représentent pour la société. Les parlementaires sont aussi souvent critiqués pour leur absentéisme (d'autant plus que beaucoup cumulent des mandats), leur manque de principes et leur comportement de vote godillot...

L'extrême droite, qui est particulièrement portée sur les discours populistes anti-élites, aspire pourtant à s'intégrer à son tour aux institutions pour profiter des mêmes avantages. L'absentéisme est élevé chez les députés RN.[5]

2 Conceptions de l'antiparlementarisme[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Extrême droite[modifier | modifier le wikicode]

De nombreux courants d'extrême droite s'opposent à la démocratie. Traditionnellement, c'est le camp de la réaction, qui depuis les révolutions bourgeoises ont voulu restaurer les monarchies. Aujourd'hui, le contexte a bien changé et la signification de l'extrême droite avec. Il ne s'agit plus de s'opposer à la bourgeoisie, qui s'est fermement établie comme classe dominante, mais au contraire d'écraser toute résistance à son pouvoir. Bien sûr, les différents courants d'extrême droite parlent très peu de classes sociales, et prétendent souvent se situer au dessus d'elles. Ils misent sur des leaders censés diriger fermement l'Etat (bourgeois) dans des situations "de déclin d'un système corrompu" (crise du capitalisme).

Un insigne « je ne suis pas député » arboré par des sympathisants des ligues nationalistes au lendemain du 6 février 1934. L'antiparlementarisme est alors très fort à l'extrême droite, qui compte beaucoup de royalistes dans ses rangs.

En temps de relative paix sociale, les partis "stables" des capitalistes sont des partis de droite ou de gauche qui s'inscrivent totalement dans la démocratie bourgeoise, et qui parviennent à la faire passer pour la représentation populaire, de tous les citoyens, etc... Mais les crises sociales qu'engendre le capitalisme mettent à mal cette chimère démocratique. En particulier, la ruine des petits-bourgeois ("classe moyenne") sape la plus large base sociale de cette "démocratie". Ce qu'on l'a pu observer au début du 20e siècle, principalement durant la Grande Dépression.

Hitler écrivait en 1925 que le nazisme « est dans son essence et dans son organisation intime antiparlementaire, c'est-à-dire qu'il dénie en général le principe - comme dans sa propre organisation intérieure - d'une souveraineté de la majorité en vertu de laquelle le chef du gouvernement est rabaissé au rang de simple exécutant de la volonté des autres ».[6]

Ce phénomène est à nouveau très fort depuis le début du 21e siècle, et une course de vitesse est engagée. D'un côté, des forces réactionnaires tentent de forger une idéologie de domination étatique brutale au service de la bourgeoisie (fascisme), de l'autre, les communistes révolutionnaires tentent de vaincre la direction réformiste du mouvement ouvrier et ouvrir la voie vers le socialisme...

Au cœur de la crise politique en Grèce en 2012, un communiste grec faisait l'analyse suivante :

« L’indifférence ou la haine envers le parlementarisme, cependant, n’a pas nécessairement les caractéristiques progressistes que les anarchistes espèrent. Le problème de la déception populaire envers la démocratie parlementaire est qu’il ne s’agit pas seulement d’une déception envers le "parlementarisme", mais aussi envers la "démocratie". Tant qu’il n’y aura pas de structures d’autogestion qui lieraient l’antiparlementarisme à l’espoir révolutionnaire, le fascisme les liera au "désespoir petit-bourgeois", comme le dit Trotski. Stohos, un journal fasciste, l’a écrit en première page sans aucune autocensure : la solution "ne viendra pas des élections, mais du quartier général de l’armée". »[7]

2.2 Anti-parlementarisme anarchiste[modifier | modifier le wikicode]

Les anarchistes (traditionnels) prônent l'abolition de l'Etat. Comme les marxistes, ils dénoncent la démocratie actuelle et ses institutions comme des masques de la domination capitaliste. Mais le plus souvent, ils ont une vision très spontanéiste du processus révolutionnaire, et ils envisagent une transition directe de l'État capitaliste à l'absence d'Etat. L'anti-parlementarisme anarchiste va donc de pair avec cette vision de l’abolition de l'Etat. En conséquence, c'est un anti-parlementarisme de principe, qui implique de ne prendre aucune part dans les institutions bourgeoises : boycott des élections et appel à l'absention, appels (intemporels) à des grèves générales insurrectionnelles...

2.3 Position des communistes[modifier | modifier le wikicode]

Le mouvement socialiste, comme le mouvement républicain radical, revendiquait historiquement un gouvernement à bon marché, ce qui signifiait une dénonciation du faste des régimes monarchiques autoritaires.

Les communistes révolutionnaires sont pour le renversement de cette démocratie mensongère. C'est, si l'on veut, une forme d'anti-parlementarisme. Mais pour les communistes, ne pas utiliser les institutions actuelles pour la propagande est stérile, puisqu'une grande majorité des travailleurs accordent encore une légitimité à ces institutions et y placent encore des espoirs.

Certes, depuis la rupture d'avec les socialistes opportunistes en 1914-1918, les communistes savent qu'en ayant une politique envers les parlements (parlementarisme) il y a toujours un risque d'absorption par l'État bourgeois. C'est notamment pour cela que la IIIe internationale avait détaillé les principes du "parlementarisme révolutionnaire" : élus rigoureusement contrôlés par les instances démocratiques du parti, propagande révolutionnaire irréconciliable avec les forces bourgeoises et réformistes...

Pour les communistes, l'anti-parlementarisme peut et doit devenir très concret si la situation est révolutionnaire. Si une situation de double pouvoir se généralise, avec des conseils de travailleurs en face des vieilles institutions, il faut pousser plus loin que ce mouvement et affaiblir le régime en boycottant les parlements.

Il est à noter que la gauche communiste s'est opposé à la majorité communiste autour de Lénine et Trotski. Bordiga par exemple eut un début avec Lénine sur cette question, car il était contre la participation aux élections.

3 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

Un article critique de Lénine : Le communisme, 12 juin 1920

  1. Bavaj Riccardo, Von Links Gegen Weimar : Linkes Antiparlamentarisches Denken In Der Weimarer Republik, Bonn: Dietz, 2005.
  2. Michel Winock, La Droite, hier et aujourd'hui, Perrin, 2012, p. 238-240
  3. Raoul Girardet, « FASCISME », Encyclopædia Universalis, consulté le 5 février 2013
  4. La droite de droite et la France depuis 1793. La tentation du pire : toute une histoire. L'Humanité, 11 décembre, 2015.
  5. Les députés RN rappelés à l’ordre, en interne, pour leur absence à l’Assemblée la nuit de mardi à mercredi, Le Journal du Dimanche, 12/10/2022
  6. Adolf Hitler, Mein Kampf,1925
  7. Manos Skoufoglou, The Pendulum, juin 2012