Entreprises publiques

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Une affiche sur Renault en 1952, alors régie publique

Les entreprises publiques sont les entreprises gérées par un État ou une autre collectivité territoriale (commune, intercommunalité, département, région...). Par extension on y inclut aussi souvent les sociétés anonymes où l'État détient plus de 50% des actions.

Les services publics peuvent être assurés par des entreprises publiques mais aussi par des administrations (formellement pas des entreprises), mais aussi par des entreprises privées largement subventionnées par nos impôts (délégation de service public).

1 Les entreprises publiques sous le capitalisme[modifier | modifier le wikicode]

Le fonctionnement du capitalisme repose sur la concurrence, et la présence d'entreprises publiques est limitée. Néanmoins, il n'existe jamais d'économie entièrement privatisée, ne serait-ce que parce qu'aucun marché ne peut exister sans des régulations et des services publics qui ne rapportent rien directement, et qui sont donc gérées par les États capitalistes.

Par ailleurs selon les contextes techniques et économiques (nécessité d'investissements lourds ou non, phénomènes de « monopole naturel », rachats pour éviter la faillite...), et selon les contestations sociales qui peuvent émerger contre des inégalités d'accès à des services jugés essentiels, des États capitalistes peuvent être amenés à prendre en charge eux-mêmes certaines entreprises.

Cela peut être le résultat de créations d'entreprises, ou de nationalisations d'entreprises privées.

1.1 Belgique[modifier | modifier le wikicode]

Le Royaume de Belgique détient les participations suivantes :

1.2 France[modifier | modifier le wikicode]

En 1871, il n'existait que quelques établissements en régie : l’Imprimerie nationale, les Monnaies et médailles, l’Atelier de fabrication d’armements du Louvre, la Manufacture des Gobelins, les entrepôts dépendant de la Manufacture des tabacs.

La plupart des entreprises publiques le sont depuis les nationalisations de 1945. Le tournant néolibéral des années 1980 amorce un recul. A partir de 1986, sous la présidence de Mitterrand et le gouvernement Chirac, une première grande vague de privatisations a lieu. Puis des cessions lentes et progressives au cours des années 1990 et 2000[1].

Anciennes entreprises publiques :

  • Thales : 33,4 % en 2002, 31,3 % en 2006, 27,30 % en 2007, entièrement privatisée en 2010
  • SNPE : 100 % en 2006, privatisation totale en cours en 2011
  • Charbonnages de France : 100 % en 2006, établissement dissous le
  • EMC : 100 % en 2006, dissoute en 2010

Beaucoup d'entreprises publiques sont la propriété de collectivités territoriales, tel que la Ville de Paris pour une vingtaine de sociétés d'économie mixte. Les collectivités territoriales contrôlent parfois des entreprises conjointement avec l'État, comme dans le cas de la Compagnie nationale du Rhône.

1.3 Allemagne[modifier | modifier le wikicode]

En 1892, Kautsky soulignait à quel point le manchesterianisme (le laissez-faire prôné en Angleterre au milieu du 19e siècle) était désormais bafoué, et combien l'intervention de l'État était devenue massive en Allemagne :

« Étant donnés cette circonstance et les besoins financiers croissants de l’État, il n’est pas étonnant que le monopole d’État reprenne de la faveur ; il l’a emporté dans bien des circonstances. Nous jouissons déjà des monopoles du tabac, du sel, de des allumettes et les projets de mise en régie d’autres industries ne manquent pas. »[2]

1.4 Suède[modifier | modifier le wikicode]

1.5 Suisse[modifier | modifier le wikicode]

1.6 Canada[modifier | modifier le wikicode]

1.7 États-Unis[modifier | modifier le wikicode]

Les sociétés régulées et détenues par le Gouvernement fédéral (Federal Government chartered and owned corporations, ou FGCOC’s) sont un ensemble séparé de sociétés qui ont une personnalité juridique séparée de celle du Gouvernement fédéral :

Les entreprises soutenues par le Gouvernement (government-sponsored enterprises, ou GSEs) sont des entreprises financières à capitaux mixtes :

D'autres entreprises ont été nationalisées temporairement :

Il existe également des entreprises publiques gérées non pas au niveau fédéral, mais par les États des États-Unis.

1.8 Mexique[modifier | modifier le wikicode]

1.9 Venezuela[modifier | modifier le wikicode]

1.10 Argentine[modifier | modifier le wikicode]

1.11 Brésil[modifier | modifier le wikicode]

  • FiqueNoLar, plateforme de livraison qui opère dans le nord du pays, où les applications de livraison privées les plus populaires n’opéraient pas.[3]

1.12 Indonésie[modifier | modifier le wikicode]

  • LinkAja!, un service de paiement numérique

1.13 Mali[modifier | modifier le wikicode]

1.14 Nauru[modifier | modifier le wikicode]

2 Monopole public ou pôle public[modifier | modifier le wikicode]

Selon les cas, une entreprise publique peut être en concurrence avec des entreprises privées ou détenir un monopole (de fait ou garanti par des lois).

Par exemple, lorsqu'il y a eu nationalisation des chemins de fer ou de l'électricité, cela s'est souvent fait « en bloc », et donc avec des monopoles publics. Depuis le tournant néolibéral, les cas de concurrence avec le privé sont devenus courants (libéralisation), même si c'est souvent un prélude à une privatisation.

Historiquement, les socialistes revendiquent historiquement la création d'un monopole public bancaire, et c'est ce que continue à revendiquer l'extrême gauche. A l'inverse, un mouvement réformiste comme la France insoumise revendique un « pôle public bancaire », c'est-à-dire une banque publique qui serait en concurrence avec des banques privées.[4]

L'idée de pôle public n'est pas incompatible avec une vision marxiste révolutionnaire, à condition que ce pôle public soit nettement dominant. Or, une entreprise socialisée, qui serait gérée dans l'intérêt des travailleur·ses et plus largement l'intérêt général (santé, écologie...), serait dans beaucoup de cas moins rentable qu'une entreprise privée. La mise en concurrence d'une entreprise publique avec une entreprise privée comparable n'est donc pas tenable. En revanche, il est possible et même nécessaire -pour la plupart des marxistes- de faire cohabiter des entreprises publiques détenant les principaux moyens de production et des petites entreprises privées, durant la période de transition au socialisme.

3 Les entreprises publiques et le socialisme[modifier | modifier le wikicode]

3.1 Une défense face au privé[modifier | modifier le wikicode]

Le mouvement ouvrier se bat généralement pour étendre la sphère publique et défendre les entreprises et services publics contre les privatisations.

Une des raisons est qu'au sein d'une entreprise publique (ou d'une administration de service public), les effets de la concurrence entre travailleur·ses sont limités, ce qui offre donc souvent des conditions de travail meilleures.

Une autre raison centrale est que ces entreprises ou administrations rendent souvent des services utiles à la population, en particulier aux plus pauvres (les plus riches pouvant se permettre de compter plus sur des services marchands plus chers).

Le socialisme ajoute à cela des considérations plus générales en faveur d'une meilleure égalité d'accès, en termes de revenus (possibilités de tarifs sociaux...) et de territoire (possibilité de développer un service même dans les territoires moins denses ou géographiquement isolés, pour lesquels le marché n'aurait trouvé aucune rentabilité). Les expériences d'entreprises publiques au niveau local ont été appelées socialisme municipal, ou communisme municipal.

Le socialisme révolutionnaire voit également dans les entreprises publiques une progression vers le mode de production socialiste, dans lequel la planification remplace la propriété privée des moyens de production. C'est pourquoi les marxistes considèrent généralement que même si la révolution socialiste implique une rupture avec l'État bourgeois, cette rupture ne met pas sur le même plan des branches comme la police et des branches comme les services publics. Marx définissait ainsi la rupture opérée par la Commune avec l'ancien État :

« Tandis qu'il importait d'amputer les organes purement répressifs de l'ancien pouvoir gouvernemental, ses fonctions légitimes devaient être arrachées à une autorité qui revendiquait une prééminence au-dessus de la société elle-même, et rendues aux serviteurs responsables de la société. »[5]

Un des angles d'attaque principaux de l'idéologie bourgeoise est de présenter les entreprises publiques comme des bureaucraties incompétentes, car elles ne bénéficieraient pas des incitations du marché. La libéralisation est donc mise en avant comme un moyen de remettre de l'efficacité dans certains services rendus, au bénéfice des consommateurs. S'il peut y avoir une opposition d'intérêt immédiate entre les travailleur·ses de l'entreprise publique et les consommateurs, il est totalement cynique de tenir ce raisonnement alors qu'en le généralisant, cela revient à tirer l'ensemble des conditions de travail vers le bas. Par ailleurs, la libéralisation a une tendance à générer de la bureaucratisation, car elle nécessite la création d'institutions complexes pour créer des marchés.

3.2 Une nécessaire critique de fond[modifier | modifier le wikicode]

Cependant, il n'y a pas un trait d'égalité entre entreprises publiques sous le capitalisme et entreprises socialisées sous le communisme.

La direction de ces entreprises publiques n'est pas entre les mains des travailleur·ses, mais entre les mains d'administrateurs publics, qui sous le capitalisme restent une branche de la classe dominante. La gestion est donc toujours (bien que plus indirectement) soumise à l'intérêt général de la bourgeoisie, et les rapports entre fonctionnaires et direction (bien que différents des rapports salarié·es / patrons) ne sont pas des rapports de production socialistes (stratification sociale entre petits et hauts fonctionnaires, bureaucraties non élues...).

Ainsi en 1922, le marxiste Kautsky soulignait qu'il y avait encore beaucoup de grèves dans les services gérés par les municipalités ou les États, parce que ces services n'étaient « pas suffisamment socialisés ». Il soulignait :

« La socialisation des moyens de production signifie que l'État possédera les plus importants d'entre eux, mais n'implique pas que ces entreprises soient dirigées par la bureaucratie d'État. Les travailleurs doivent s'y opposer, car le socialisme doit apporter la liberté et non la servitude. Là où les services publics existent déjà, nous devons veiller à ce que, tout en restant propriété de l'État, ils soient soustraits à la bureaucratie d'État. »[6]

Il ne faut donc pas idéaliser ces conditions de travail dans le public, qui n'effacent pas les rapports hiérarchiques reflétant la divisions des classes. C'est par un vigile de la régie Renault que Pierre Overney est tué en 1972...

La conquête d'une démocratie ouvrière et autogestionnaire, y compris dans les entreprises publiques, ne peut se faire que dans l'élan d'une situation révolutionnaire.

4 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

  1. étude de l'OCDE, 2003, page 5
  2. Karl Kautsky, Le programme socialiste, 1892
  3. 3,0 et 3,1 Cecilia Rikap, Nationaliser Amazon ? Une expérimentation en Argentine, Revue Contretemps, janvier 2021
  4. Nouveau Parti Anticapitaliste, Mélenchon, de « L’Humain d'abord » à « L’Avenir en commun », 22 janvier 2017
  5. Karl Marx, La guerre civile en France, mai 1871
  6. Karl Kautsky, The Labour Revolution, June 1922