Internationale socialiste des femmes

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Frauentag 1914

L'Internationale socialiste des femmes (ISF) a été créée en 1907 comme organisation sœur de l'Internationale ouvrière. Elle incarnait un certain féminisme socialiste. Elle éclate en 1914, en un courant communiste et un courant socialiste (dont aujourd'hui l'Internationale socialiste des femmes).

1 Histoire[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Prémices[modifier | modifier le wikicode]

Lors du congrès fondateur de la IIe Internationale, en 1889, Clara Zetkin fait l'un de ses premiers discours publics[1] où elle polémique contre les socialistes qui veulent interdire le travail des femmes.

Parmi les socialistes, il y avait des tentatives de s'adresser spécifiquement aux femmes. Par exemple Clara Zetkin lance un journal "féministe" en 1891, appelé Gleichheit (égalité), qui atteindra les 100 000 exemplaires diffusés. C'est Zetkin qui fait pression pour que la revendication de l'égalité des droits entre hommes et femmes soit présente dans le programme d'Erfurt (1891).

Zetkin recrute un grand nombre de femmes à la social-démocratie et organise une structure féminine socialiste puissante mais clandestine, l'appartenance des femmes à un parti politique étant interdite à l'époque en Allemagne.

Rosa Luxemburg tenant un discours à Stuttgart (1907)

Vers 1906, l'existence de cette structure devient incertaine quand les femmes obtiennent peu à la peu le droit d'entrer officiellement en politique : il est alors question de rattacher la section féminine au parti, voire de la supprimer pour intégrer les femmes comme des travailleurs "comme les autres". Bien des femmes souhaitent conserver leur autonomie, les débats font d'autant plus rage que le mouvement de Zetkin est solidement ancré à la gauche du parti, constituant un enjeu important de politique interne.

Des sections féminines sont créées dans d'autres partis socialistes d'Europe, notamment en Autriche.

1.2 Première conférence (1907)[modifier | modifier le wikicode]

C'est dans ce climat qu'en 1907, à l'occasion du Congrès international de Stuttgart (Allemagne), Clara Zetkin organise une première conférence des femmes socialistes (Zetkin résidait par ailleurs à Stuttgart)[2]. Si, pour l'historienne Nicole Gabriel[3] « on ne peut douter de la sincère volonté internationaliste de Clara Zetkin », la tenue de ce congrès lui permet également de « renforcer sa place dans le parti, en tant que femme et membre de l'aile gauche ». En tout cas, l'initiative de ce regroupement des femmes socialistes ne vient pas de la direction de l'Internationale socialiste.[4]

La Première conférence internationale des femmes socialistes eut donc lieu le 17 août 1907 à Stuttgart (le congrès de l'Internationale suivra, du 18 au 24 août). Se voulant à l'origine un « premier contact » entre les femmes des différents partis socialistes, c'est un succès, avec des représentantes de 15 pays différents.

La conférence décide alors d'établir un secrétariat international sous la direction de Clara Zetkin, et de faire de son journal Die Gleichheit (L'Égalité), l'organe de l'Internationale socialiste des femmes (ISF). La conférence adopte une résolution faisant du vote des femmes le point de départ d'une campagne active des organisations socialistes de femmes, dans la société, mais aussi au sein de leurs propres partis. Cette résolution fut reprise lors du congrès de l'Internationale ouvrière qui suivit.

Malgré la grande unité idéologique, des divergences d'ordre stratégiques apparaissent assez vite. Clara Zetkin souhaite établir un positionnement commun sur certains sujets (pas d'alliance avec les féministes de la bourgeoisie, pas de soutien à l'obtention du droit de vote pour les seuls ouvriers hommes), mais cela rencontre de l'opposition dans la délégation autrichienne d'Adelheid Popp et les délégations anglaises et américaines.

1.3 Deuxième conférence (1910)[modifier | modifier le wikicode]

La deuxième conférence internationale des femmes socialistes se tient à Copenhague, le 26 août 1910 (avant l'ouverture du 8e congrès de l'Internationale, le 28 août)[5]. Elle rassembla environ 100 déléguées, presque deux fois plus que la précédente conférence. La présidente Clara Zetkin fit un discours où elle compara la croissance du mouvement socialiste féminin aux débuts du christianisme (« d'abord un, puis douze, puis cent, mille, des millions »). Elle fut réélue par acclamation.

Sur proposition de Zetkin et d'Alexandra Kollontaï, la conférence adopta la résolution d'une Journée internationale des Femmes chaque année, dont la première eût lieu le 19 mars 1911 (c'est ce qui deviendra le 8 mars). Elle adopta aussi une résolution pour la Paix.

La conférence fut également marquée par un incident causé par les déléguées britanniques, dont une grande partie, s'estimant mal représentée par l'oratrice choisie pour s'exprimer en leur nom, Dora Montefiore, décident de quitter la salle en signe de protestation.

A cette conférence il fut décider de créer des sections nationales.[6]

1.4 Section britannique[modifier | modifier le wikicode]

La section britannique fut créée avec Margaret Bondfield comme présidente et Margaret McDonald comme secrétaire. Ces deux femmes étaient issues de la Women's Labour League (WLL)[6]. Ethel Bentham, autre membre éminent de la WLL, a participé en tant que représentante de la Fabian Society.[7]

1.5 Autres conférences[modifier | modifier le wikicode]

Clara Zetkin et Alexandra Kollontaï en 1910 à Copenhague

Lors de la conférence de Bâle de l'Internationale ouvrière de 1912, Clara Zetkin prononça un discours enflammé pour la Paix et la nécessité des femmes socialistes de lutter contre la guerre qui touche principalement les « fils » du prolétariat.

Leur combat dépassait cependant largement celui de l'égalité des droits :

« Le droit de vote ou l'égalité civile de la femme, une fois inscrits dans les lois et les codes, l'exploitation économique des femmes n'en sera pas supprimée pour autant. »
« La femme est l'esclave de l'usine et du foyer, sur elle pèse le fardeau de la double journée de travail. » Clara Zetkin

1.6 Pendant la Première guerre mondiale[modifier | modifier le wikicode]

TractMamansGuerre1915.jpg

Après le début de la Première Guerre mondiale, les activités de l'ISF connurent un temps d'arrêt, cependant, une conférence se tint à Berne en mars 1915 ; ce fut d'ailleurs la première conférence socialiste internationale depuis le début de la guerre (avant la conférence de Zimmerwald). Les femmes internationalistes décident de lancer une propagande anti-guerre avec des tracts intitulés "Où sont vos fils ? Où sont vos maris ?".

Angelica Balabanoff témoigne de l'opposition de la petite minorité de femmes déléguées par le parti bolchévik :

« Les femmes bolcheviks, travaillant sous la direction de Lénine, déposèrent une résolution, sans rapport avec l’objet spécifique de la réunion, et que la majorité ne pouvait approuver. Elles réclamaient la rupture immédiate avec les directions des partis socialistes et ouvriers existants et la formation d’une nouvelle Internationale. Elles appelaient également à la transformation de la guerre en guerre civile. La majorité des délégués s’opposèrent à cette résolution, non pas parce qu’elle était trop radicale ou qu’ils approuvraient la Seconde Internationale, mais parce qu’ils souhaitaient rester membres de leurs partis respectifs afin d’exercer une influence à la base. (...) Lénine (...) ne se souciait que des problèmes politiques concernant l’avenir du mouvement. (...)

Les Bolcheviks, bien que parfaitement conscients de l’importance d’une unité de base, refusèrent de faire la moindre concession. A plusieurs reprises, Clara Zetkin leur demanda de retirer leur résolution. Elle était extrêmement malade et ceux d’entre nous qui savaient qu’elle ne tenait plus que par son extraordinaire pouvoir de volonté crai­gnaient les effets de cette lutte sur sa santé. La discussion ayant continué des heures, sans résultat, Clara, totalement épuisée, suggéra une interruption de séance. Dans cet intervalle, elle se retira avec Lénine et les délégués bolcheviks dans une pièce à part. Là Lénine finit par accepter un compromis. Les Bolcheviks voteraient pour la résolution de la majorité, mais on ferait figurer la leur dans le rapport officiel de la convention. Nous étions sortis de l’impasse et la convention se terminait heureusement. »[8]

2 Après l'éclatement[modifier | modifier le wikicode]

Après la Première Guerre mondiale, l'ISF connut la division, suivant en cela le reste du mouvement ouvrier.

2.1 Communistes[modifier | modifier le wikicode]

L'Internationale communiste (1919-1943) met en place un secrétariat international des femmes communistes.

Après la seconde guerre mondiale, Staline cherche partout à organiser largement autour des Partis communistes dans des organisation de masse au profil de "front populaire" (progressisme, antifascisme, démocratie...).

Ainsi, la Fédération Démocratique Internationale des Femmes (FDIF)  est créée en 1945, notamment par l'Union des Femmes Françaises (UFF) et leurs homologues au Royaume-Uni du National Comittee for the International Women's Day.

2.2 Sociaux-démocrates[modifier | modifier le wikicode]

En 1925, Edith Kemmis prend la tête du secrétariat international, avec le soutien de Friedrich Adler, secrétaire de l'Internationale ouvrière socialiste.

Internationale socialiste des femmes.png

La Seconde Guerre mondiale voit s'effondrer à nouveau l'ISF, déjà minée par les coups portés contre les puissants partis socialistes allemands et autrichiens par les nazis. Seule une conférence internationale en 1941, à l'initiative des femmes du Labour britannique permit aux femmes socialistes de se faire entendre pendant le conflit.

En 1955, se met en place un Conseil international des femmes sociales-démocrates, qui en 1978 devint l'Internationale socialiste des femmes.

3 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

  1. Clara Zetkin, La lutte pour la libération des femmes, 1889
  2. Wikipédia, Première conférence internationale des femmes socialistes
  3. Nicole Gabriel, L'internationale des femmes socialistes, Matériaux pour l'histoire de notre temps, vol. 16, no 16,‎ 1989, p. 34-41
  4. III° Congrès de l'Internationale communiste, La propagande parmi les femmes, 1921
  5. Report on the International Conference of Socialist women held in Copenhagen
  6. 6,0 et 6,1 Collette, C. (2009). The Newer Eve: Women, Feminists and the Labour Party (in English). Baasingstoke: Springer. ISBN 978-0-230-23698-1.
  7. Marks, Lara (1996). Metropolitan Maternity: Maternal and Infant Welfare Services in Early Twentieth Century London (in English). Amsterdam: Rodopi. ISBN 978-90-5183-913-5.
  8. Angelica Balabanoff, Ma vie de rebelle, 1938