LGBTI

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Statuette égyptienne représentant deux femmes, Idet et Ruiu, dans un style qui classiquement correspond aux représentations de couples.

Les normes dominantes de genre et d'orientation sexuelle, qui découlent du patriarcat (ou hétéropatriarcat), engendre une oppression des personnes LGBTI+ (lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres, intersexes entre autres) : homophobie, transphobie...

1 Généralités[modifier | modifier le wikicode]

Le besoin même de catégoriser de façon plutôt rigide les genres et les orientations sexuelles est variable historiquement. Par exemple, le terme d'homosexualité est forgé au 19e siècle.

Certain-e-s militant-e-s considèrent que l'homophobie est très lié au patriarcat qui impose la soumission des femmes aux hommes, et appellent ce système de domination l'hétéropatriarcat.

2 Tendances historiques[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Rome antique[modifier | modifier le wikicode]

Selon la latiniste Florence Dupont, il n'y avait pas d'identité définie par l'orientation sexuelle dans la Rome antique. Il y avait des hommes catégorisés mollis («mou», ceux qui s'adonnent "trop" aux plaisirs de la chair et de la gourmandise) et d'autres durus (« dur », qui sont "trop" brutaux et focalisés sur la guerre ou la politique), mais dans les deux cas cela pouvait inclure des relations avec des hommes comme avec des femmes.[1]

2.2 19e siècle : Révolution industrielle[modifier | modifier le wikicode]

La révolution industrielle et la prolétarisation a profondément déstabilisé la famille paysanne et ses traditions. Les concentrations ouvrières dans les villes ont augmenté les possibilités pour les individus d’exprimer leur orientation homosexuelle.

En réaction, la plupart des Etats bourgeois passent des législations répressives à l'encontre des homosexuel-les au 19e siècle.

  • 1871 :  L’empire Allemand vote le « paragraphe 175 » qui rend passible de prison les pratiques sexuelles entre hommes.
  • 1885 : Loi répressive en Angleterre, qui donne lieu à des procès retentissants, comme celui d’Oscar Wilde.[2]

Pour beaucoup de marxistes[3], rétrospectivement, il faut voir dans ce mouvement de répression une volonté de la bourgeoisie de défendre la famille patriarcale car elle serait un pilier du système capitaliste, qui stabilise l'ordre établi grâce l’autorité du « père de famille ».

2.3 20e siècle : lentes avancées et réactions[modifier | modifier le wikicode]

En réponse à cette répression, des homosexuel-les se forgent leur propre identité et commencent à s’organiser dans les villes. L’Allemagne devient vite la place centrale de la culture et des débats sur l’homosexualité en Europe. Le docteur Magnus Hirschfeld y fonde, au travers du « comité humaniste scientifique », le premier groupe de défense de la cause homosexuelle en 1897. Son but est de réunir les soutiens d’un maximum de personnalités pour l’abrogation du paragraphe 175. La pétition recueille plus de 5 000 signatures dont celles d'Albert Einstein, Hermann Hesse, Richard von Krafft-Ebing, Thomas Mann, Stefan Zweig, Rainer Maria Rilke, Léon Tolstoï, Émile Zola, etc. Hirschfeld défendait l'idée que l'homosexualité était une des manifestation naturelles de la sexualité humaine et qu'elle n'était pas condamnable parce qu'innée.

Le Parti social-démocrate (SPD)  n'aura pas toujours une attitude claire. Plusieurs dirigeants du SPD, comme Eduard Bernstein ou August Bebel, s’étaient déjà positionnés contre la condamnation d’Oscar Wilde. Mais lorsque la suppression du paragraphe 175 est proposée au Reichstag en 1898, elle sera rejetée car seule une minorité du SPD l'avait soutenue (même s'il faut noter que le SPD est le seul groupe à l'avoir soutenu). Hirschfeld, désappointé, remet le combat à plus tard en espérant pouvoir bénéficier de l'appui de parlementaires qu'il savait être homosexuels.

La campagne de pétition de Magnus Hirschfeld avait comme limite de ne s’adresser presque qu’exclusivement aux élites de la société, pour leur demander la dépénalisation, sans vraiment se tourner vers la classe ouvrière et ses organisations pour engager une lutte de masse. L'idée portée par ce projet de loi continuera sa progression et, à la fin des années 1920, il sera sur le point d'être adopté ; la montée du nazisme rendra cependant la chose impossible.

La fin de la Première guerre mondiale et la période révolutionnaire en Allemagne provoquent une effervescence qui favorise le progressisme. Au début des années 1920, une vingtaine d’associations et de magazines gays sont impulsés en Allemagne. Hirschfeld témoigne :

« L’évènement de l’année 1918 a sans aucun doute eu un certain effet sur la lutte pour la libération des homosexuels car, au-delà des groupes de scientifiques humanistes et justes, des organisations homosexuelles se sont développées et ont repris la lutte pour leurs semblables ».

Le Parti communiste d'Allemagne (KPD), fondé en 1918, se positionne vite en faveur des droits pour les homosexuel-les. Il est alors fort de plusieurs dizaines de milliers de jeunes militants dévoués à la révolution socialiste. Le Parti n’hésite pas à déclarer :

« Le prolétaire politiquement engagé aborde la question de la vie sexuelle et aussi le problème de l’homosexualité sans préjugé. Le prolétariat demande la même liberté pour ces formes d’actes sexuels que celle pour les rapports entre sexes ».

Après la révolution d'Octobre 1917, les LGBTI de Russie connurent un bref épisode de liberté[4]. Le parti Bolchevik était moins porté sur la question que le PC allemand mais était influencé par les idées et le combat de Magnus Hirschfeld. L’action de certains de ses militant-e-s permit, dès 1919, de dépénaliser l’homosexualité dans le jeune État ouvrier, en même temps que l’avortement et le divorce étaient autorisés. Toute référence à ce "crime"  fut supprimée dans le code criminel entièrement réécrit en 1922 puis 1926. Grigori Batkis, l’un des militants bolcheviks actifs dans la lutte contre les préjugés homophobes, déclarait en 1923 :

« La législation courante en matière sexuelle en Union Soviétique est le fruit de la révolution d’octobre. (…) L’homosexualité, la sodomie et les autres formes de plaisir sexuel condamnées par la législation européenne comme offenses à la moralité publique sont traitées par la législation soviétique exactement comme est communément appelé l’accouplement ‘naturel’ ».

Néanmoins ce changement pénal ne supprimait pas l'oppression structurelle. Dans les années 1920 les LGBTI étaient souvent victimes de violences, de chantages et de licenciements. Certains écrivirent des lettres au psychiatre Vladimir Bekhterev en le suppliant de les aider, de les sortir de leur dépression et de «guérir leur maladie». La communauté LGBTI restait aussi traversée d'un clivage de classe, entre celles et ceux qui se nommaient les « aristocrates » et qui nommaient les autres les « simples ».

En janvier 1921, le marin Afanasy Shaur, de la Flotte de la Baltique, organisa un grand mariage gay à Petrograd. Les participants étaient d'origines sociales assez mixtes (des anciens officiers et des soldats de rang inférieur), et il y avait une femme habillée « en homme ». C'était alors sans précédent. En réalité, Afanasy Shaur était un membre de la Tchéka qui voulait faire du zèle en dénonçant à ses supérieurs ces « contre-révolutionnaires menaçant de détruire l'Armée rouge de l'intérieur ». A la fin de la fête, il fit arrêter tous les invités. Mais l'affaire fut vite close, et les accusations abandonnées.[5]

Les participant·e·s du mariage gay de janvier 1921

Les homosexuel·les commencent à perdre leurs droits dans les années 1930. La contre révolution stalinienne touche tous les domaines de la société russe, y compris la question sexuelle. Staline s’emploie à rétablir la famille patriarcale et à mettre fin à la liberté sexuelle.

En juillet 1933, 175 gays de différents milieux sont arrêtés, dans ce qui sera connu comme « l'affaire des homosexuels de Leningrad ». Les accusations allaient de « complicité avec le renseignement britannique » à « contre-révolutionnarisme malveillant » et « corruption morale de l'Armée rouge ». Le nouveau code criminel de 1934 condamne à nouveau l'homosexualité...

Le régime enverra des centaines d’homosexuels dans les goulags. Les idéologues du Kremlin présenteront même l’homosexualité comme une « dégénérescence fasciste ». Ce positionnement, repris par une majorité des partis communistes en voie de stalinisation, en parallèle de l’extermination en Allemagne des organisations et des groupes homosexuels par Hitler, marquent un coup décisif à la première vague du mouvement homosexuel en Europe.

Il faut attendre les années 1960 et une nouvelle monté des luttes ouvrières dans le monde pour voir se réaffirmer les revendications pour les libertés sexuelles.

Avancées :

  • 1962 : L'Illinois, premier État étasunien à dépénaliser la sodomie
  • 1982 : Homosexualité dépénalisée en France
  • 1990 : L'OMS supprime l'homosexualité de la liste des maladies mentales...

2.4 21e siècle : polarisation[modifier | modifier le wikicode]

Les tendances de la fin du 20e siècle se poursuivent : d'un côté les avancées en termes d'égalité des droits sont prolongées (notamment dans les vieux pays impérialistes), mais les courants réactionnaires homophobes se renforcent. Si l'homosexualité semble plus acceptée socialement, la question de la transidentité a pris une place analogue.

  • 2001 : Les Pays-Bas sont le premier pays à légaliser le mariage homosexuel.
  • 2005 :
    • Première journée mondiale de lutte contre l'homophobie
    • L'Espagne autorise le mariage homosexuel et l'adoption homoparentale.
      Peu après, rassemblement de mécontents à Madrid, organisé par l'Eglise et la Droite.
  • 2006 : L'Afrique du Sud légalise le mariage homosexuel
  • 2012-2013 : La France fait passer le « mariage pour tous ».
Les Manif pour tous expriment les visions les plus traditionalistes de la famille, hétérosexuelle et aux rôles de genre rigides.

Réactions:

  •  1960 : En France, une loi stipule que la peine pour atteinte à la pudeur est doublée en cas d'homosexualité (retirée en 1980)
  • 2001 : Rafle de 60 homosexuels présumés en Égypte, certains torturés, 52 arrêtés...
  • 2008 : Un référendum d'initiative populaire en Californie interdit le mariage homosexuel, "cassant" 18 000 unions qui venaient de se faire
  • 2009 : Au Nigeria, vote unanime des députés contre le mariage "de deux personnes de même sexe"
  • 2013 : En réaction, la droite conservatrice et l'extrême droite réactionnaire défilent dans le mouvement de la « manif pour tous ». Cependant le FN est divisé. Marine Le Pen refuse de participer, tandis que son compagnon Louis Aliot ira, ainsi que Marion-Maréchal Le Pen et Bruno Gollnish. Certains cadres du FN sont homosexuels (Florian Philippot, Steeve Briois) et veulent plutôt surfer sur l'homonationalisme.[6]

Par exemple, Jerry Falwell (prédicateur protestant proche de George Bush) :

« Les avorteurs doivent assumer une partie du fardeau dans cette affaire. Dieu ne se laisse pas bafouer. Et quand nous détruisons 40 millions de petits bébés innocents, nous rendons Dieu furieux. Je crois vraiment que les paiens, et les avorteurs, et les homosexuels et les lesbiennes [...] tous ont voulu séculariser l'Amérique. Je les montre du doigt et leur dis : Vous avez rendu possible ce qui vient de se produire. »

3 Les hypocrites[modifier | modifier le wikicode]

Certains politiciens, n'hésitent pas à se prétendre défenseurs de la cause des homosexuels par opportunisme, alors qu'ils sont fondamentalement réactionnaires. Par exemple Nicolas Sarkozy disait en 1998 :

« Nous avons combattu fermement le PACS, car il nous semblait remettre en cause l'idée que nous nous faisions de la famille (...). C'était notre droit, je dirais même que c'était notre devoir de défendre nos convictions. »

Puis, en 2007, le PACS étant devenu banal, il fanfaronnait :

« Je suis le ministre des Finances qui a garanti par le PACS l'égalité fiscale entre les couples homosexuels et les couples hétérosexuels »

4 Le mouvement ouvrier et l'homosexualité[modifier | modifier le wikicode]

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Le marxiste Eduard Bernstein a écrit une analyse de l'homosexualité suite aux débats soulevés par le procès d'Oscar Wilde (1895). Il s'oppose à certains arguments (l'argument que c'est contre-nature n'est pas valable), souligne que la norme sociale sur l'homosexualité a varié historiquement, s'oppose aux lois punitives, mais considère néanmoins que l'attirance pour le même sexe est pathologique.[2]

Les marxistes sont divisé-e-s sur l'analyse des rapports entre homosexualité et le capitalisme (souvent en lien avec les divisions sur la question plus générale du patriarcat / hétéropatriarcat). Pour certains, « l’obtention des droits homosexuels correspond de manière quasi symétrique au pic de remontée des luttes ouvrières ».[3] Pour d'autres, l'homophobie constitue un système oppressif bien plus indépendant de la lutte de classe.

De nombreux exemples montrent qu'il n'y a pas d'automatisme entre les différents axes du progressisme :

On peut parler d'un certain homoérotisme (qui va souvent avec un certain virilisme) dans l'imagerie du mouvement ouvrier.[8]

5 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]