Société d'ordres

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Les trois ordres de la société féodale en Europe médiévale : le moine, le chevalier et le paysan.

La société d'ordres est une société dans laquelle des distinctions codifiées sont établies entre groupes sociaux, auxquels on attribue des rangs de dignité et d'honneur différents. Ce modèle décrit avant tout les sociétés féodales et d'Ancien Régime d'Europe (avec ses trois ordres : clergé, noblesse, tiers état). On peut toutefois en rapprocher les sociétés de castes, même si dans celles-ci les barrières sont souvent plus rigides.

On oppose parfois société d'ordres et sociétés de classes, mais ces catégories ne sont pas sur le même plan et donc pas forcément opposées. Les classes sociales au sens marxiste, définies par rapport aux rapports de production, existent dans toute société divisée en classe, que les distinctions sociales soient codifiées (comme dans une société de castes) ou officiellement niées (comme dans une république bourgeoise).

La plupart du temps, au moment où sont codifiées les distinctions de castes / ordres, les principales parmi celles-ci correspondent fortement aux classes sociales. Par exemple au Moyen-Âge européen, le gros du tiers-état correspond à la classe paysanne exploitée, tandis que le groupe clergé-noblesse forme ensemble la classe dominante. En revanche, les évolutions économiques peuvent faire diverger plus ou moins fortement les classes des castes / ordres. Par exemple, à la veille de la Révolution française, une partie du tiers-état (la bourgeoisie) était devenu suffisamment riche pour remettre en question la rigidité des ordres de l'Ancien régime qui la tenait à l'écart du pouvoir. Une trop forte discordance entre les castes et les classes est un facteur d'agitation révolutionnaire.

1 Les ordres dans l'Europe médiévale[modifier | modifier le wikicode]

L'organisation sociale en trois ordres

La société féodale du Moyen-Age (et la société d'Ancien Régime) est une société divisée en trois ordres : clergé, noblesse, tiers état. On parle souvent de oratores (celles·ceux qui parlent, prient), bellatores (celles·ceux qui se battent), laboratores (celles·ceux qui travaillent).

Selon certains anthropologues comme Georges Dumézil, cette tripartition serait un héritage indo-européen.

Ces ordres étaient parfois consultés formellement, lors de convocations des États généraux (en particulier lors de la levée de nouveaux impôts). Généralement ceux-ci ne représentaient pas du tout la paysannerie. Il n'y a qu'en Suède qu'il a existé une quatrième chambre, de députés des paysans, le “Quart État”.

1.1 Clergé[modifier | modifier le wikicode]

1.2 Noblesse[modifier | modifier le wikicode]

1.3 Tiers état[modifier | modifier le wikicode]

1.3.1 Paysans[modifier | modifier le wikicode]

Dans la société féodale, les laboratores sont essentiellement les paysans (tenanciers/vilains, serfs, colons ou paysans libres).

Ce sont des roturiers (non nobles), soumis au cens, à la taille, aux corvées, qui vivent en relative autosuffisance. Un ouvrier agricole peut également être journalier ou saisonnier. L'alleutier est un paysan libre sous protection seigneuriale.

La paysannerie médiévale hérite du colonat partiaire : tenure, manse, fermage, métayage. En droit coutumier, pour échapper au droit de mainmorte du seigneur sur ses serfs (mortaille, échute, forfuyance...), le système de famille communautaire constitue la forme la plus appropriée : système à maison, communauté taisible...

L'exploitation des paysans provoque régulièrement des révoltes (jacqueries).

1.3.2 Artisans et marchands[modifier | modifier le wikicode]

« J'suis du Tiers-état. » (eau-forte coloriée, années 1790)

Dans l’artisanat et le commerce, des associations organisent le travail et la vie de leurs membres, régulant notamment la concurrence et protégeant certains secrets de fabrication. Les corporations sont les formes les plus connues, mais on peut aussi parler de sociétés amicales, de fraternité / confrérie, de guilde...

1.3.3 Domestiques[modifier | modifier le wikicode]

On doit également mentionner les domestiques au service de personnes de la noblesse (page, écuyer, laquais, nourrice, servante) ou de la bourgeoisie naissante, même si cela concerne une population plus réduite.

2 Les castes en Inde[modifier | modifier le wikicode]

3 Les castes en Afrique[modifier | modifier le wikicode]

4 Historiographie[modifier | modifier le wikicode]

4.1 Vision anti-marxiste[modifier | modifier le wikicode]

Roland Mousnier a mis en avant dans les années 1960 l'idée que la société médiévale est une société de castes, en soutenant qu'elle ne pouvait pas être décrite en tant que société de classe. Selon lui, la société de classe (il pense uniquement au capitalisme) est une invention moderne, et toute tentative d'analyser le Moyen-Âge avec ce prisme (il visait en particulier l'école des Annales et Boris Porchnev) serait un anachronisme.

Mousnier souligne que les sociétés médiévales ne se pensaient pas en termes de classe. Cependant les classes au sens marxiste ne sont pas des catégories forcément conscientes (classes en soi).

Il souligne que l'argent n'avait pas l'importance qu'il a dans le capitalisme. L'analyse matérialiste historique n'a jamais prétendu le contraire, et Marx a justement étudié en détail la montée en puissance de l'argent avec les rapports de production bourgeois. Cela n'empêche pas le fait que la richesse, sous la forme du contrôle des terres agricoles, était tout aussi fondamentale sous le féodalisme.

Mousnier souligne que les distinctions sociales passaient davantage par l'honneur et les rangs prestigieux. C'est une opposition superficielle. Sous le capitalisme également, de très nombreuses distinction sociales reposent sur des positions jugées prestigieuses qui en apparence n'ont pas de rapport avec la richesse (positions de politiciens, de hauts fonctionnaires, d'artistes, d'intellectuels, concours de grandes écoles...). Mais tout comme ces différentes positions sont socialement favorisées par l'appartenance à la bourgeoisie, les positions privilégiées du Moyen-Âge étaient rendues possibles par le fait d'être dispensé de labourer le sol ou autre travail.

5 Bibliographie[modifier | modifier le wikicode]

  • Hommage à Roland Mousnier : clientèles et fidélités en Europe à l'époque moderne, édité par Yves Durand, PUF, Paris, 1981.
  • Roland Mousnier, Les hiérarchies sociales de 1450 à nos jours, Paris, PUF, 1969.
  • Fanny Cosandey (dir), Dire et vivre l'ordre social en France sous l'Ancien régime, Paris, Éditions de l'EHESS, 2005.