Antiquité
L'Antiquité est l'époque allant de la fin de la Préhistoire (invention de l'écriture vers 3300-3200 av. J.-C.) jusqu'au début du Moyen-Âge (chute de l'Empire romain d'Occident en 476). C'est une catégorisation généralement appliquée géographiquement à l'Europe, l'Asie occidentale et le Nord de l'Afrique.
Scientifiquement, elle ne peut pas être transposée mécaniquement partout dans le monde, parce qu'elle est propre à l'historiographie occidentale, parce que les transformations historiques des sociétés ne sont pas prédéterminées à suivre un schéma défini.
Dans une approche matérialiste historique (marxiste), le passage de la Préhistoire à l'Antiquité correspond effectivement à un processus significatif à l'échelle de toute l'histoire humaine (la révolution néolithique et la naissance des sociétés de classe), mais le découpage Antiquité / Moyen-Âge est lui plus secondaire et occidentalo-centré (on ne peut généraliser un processus de passage nécessaire d'un mode esclavagiste à un mode féodal, et ces deux derniers sont plutôt des variantes possibles au sein des modes de production précapitalistes).
1 Périodisation[modifier | modifier le wikicode]
1.1 Actuelle[modifier | modifier le wikicode]
Dans le langage courant et l'imaginaire, l'Antiquité est souvent réduite à l'antiquité grecque et l'antiquité romaine, une paire que les historiens appellent « Antiquité classique » (8e s. av. J.-C. - fin du 3e siècle). L'Antiquité au sens des historiens est une période plus large.
La majorité des historiens estiment que l'Antiquité commence dans la seconde moitié du 4e s. millénaire avant notre ère (v. 3500−3000 av. J.-C.) avec l'invention de l'écriture en Mésopotamie et en Égypte. Ces deux civilisations fondent les premiers États et les premières villes, puis développent des royaumes territoriaux de plus en plus stables et étendus (impérialisme), ces phases de croissance étant interrompues par des périodes de division et d'instabilité.
Certaines civilisations de ces périodes charnières n'avaient pas d'écriture, mais sont mentionnées dans les écrits d'autres civilisations : on les place dans la Protohistoire.
L'Égypte antique se forge dès le début autour du principe idéal d'une monarchie unifiée, dominant toute la vallée du Nil et s'étendant au-delà pour obtenir les ressources dont elle a besoin. Le premier développement de la Mésopotamie se fait en particulier autour de sa région sud, le pays de Sumer, au IIIe millénaire av. J.-C., où se constituent notamment l'écriture cunéiforme qui sera reprise par de nombreux pays du Proche-Orient ancien, et une culture savante qui sert également de référence même longtemps après sa disparition en tant qu'entité culturelle (autour de la fin du même millénaire). Son héritage est préservé et prolongé au millénaire suivant par des peuples parlant une langue sémitique, l'akkadien, qui coexistaient avec elle jusque-là, finalement rassemblés autour de la monarchie de Babylone.
Plus au nord émerge dans la seconde moitié du IIe millénaire av. J.-C. une autre puissance mésopotamienne, l'Assyrie. Aux marges de ce premier monde antique se trouvent la civilisation de l'Élam dans le sud-ouest de l'Iran, et celle des Hittites au cœur de l'Anatolie. À la même époque le Nouvel Empire égyptien porte la puissance de ce pays à son apogée. Après une phase de reflux marqué à la fin du IIe millénaire av. J.-C., de nouvelles entités ethniques et culturelles se forment à partir du moule antérieur, en particulier en Syrie et au Levant (Araméens, Phéniciens, Philistins, Israélites). Au début du Ier millénaire av. J.-C., l'Assyrie pose les bases d'un empire qui domine progressivement la majeure partie du Moyen-Orient. Lui succède à la fin du 6e siècle av. J.-C. un empire de Babylone, dont la conquête par les Perses en 539 av. J.-C. marque la fin de la domination mésopotamienne. L'empire perse s'étend plus loin que ses prédécesseurs, intégrant notamment l'Égypte, qui n'était pas parvenue à restaurer sa puissance passée.
L'Antiquité classique, qui va d'environ 776 av. J.-C. (date supposée des premiers Jeux olympiques) jusqu'à la crise de l'Empire romain du 3e siècle (au plus tard jusqu'en 284 avec l'avènement de Dioclétien), est traditionnellement la période de référence de l'Antiquité, celle des civilisations grecque et romaine classiques. Elle est en particulier marquée dans sa première partie par l'émergence de la civilisation grecque antique puis le rayonnement culturel d'Athènes, et sa rivalité avec Sparte, la résistance des deux aux tentatives d'hégémonie perse. Le rayonnement de la culture grecque s'étend avec la conquête de l'empire perse par le roi macédonien Alexandre le Grand, qui marquent le début de la période hellénistique, durant laquelle des dynasties gréco-macédoniennes dominent les pays des plus anciennes civilisations antiques. Dans l'ouest du monde méditerranéen, l'Italie passe au même moment sous le contrôle de la République romaine, qui étend ensuite sa domination sur toutes les rives de la Méditerranée, soumettant les royaumes hellénistiques, et s'imprégnant profondément de culture grecque. À la fin du 1er siècle av. J.-C., Rome devient une monarchie, l'empire romain, qui connaît son apogée au 2e siècle (la pax romana), avant de connaître une période d'instabilité interne et de menaces extérieures au 3e siècle face à un nouvel empire perse à l'est et aux raids de peuples « barbares » sur sa frontière nord.
La date de fin de l'Antiquité est débattue et imprécise. La déposition du dernier empereur romain d'Occident en 476 est un repère conventionnel pour l'Europe occidentale, mais d'autres bornes peuvent être significatives de la fin du monde antique. Mais la notion d'Antiquité tardive s'est imposée depuis les années 1970, définissant une période à cheval entre l'Antiquité et le haut Moyen Âge conventionnels, connaissant de profonds changements politiques, économiques et culturels, avec la christianisation, qui amène par exemple une redéfinition de l'héritage classique, et plus largement donne un poids croissant au fait religieux. Elle se prolonge au moins jusqu'à la conquête musulmane (au plus tard en 800).
1.2 Origines[modifier | modifier le wikicode]
La notion d'une époque historique désignée comme l'Antiquité a des racines anciennes : au Haut Moyen-Âge les mots latins antiquus ou antiquitas peuvent déjà désigner la période gréco-romaine.
Mais c'est surtout à partir de la la Renaissance puis des Lumières que la périodisation que l'on connaît actuelle se forge, en lien avec les autres grandes périodes historiques : le Moyen-Âge et l'époque moderne. Les penseurs humanistes de la Renaissance considéraient qu'ils revivifiaient le savoir de la période antique, avec laquelle ils étaient séparés par une période obscure. Les philosophes des Lumières ont approfondi cette vision, voyant la christianisation et la chute de l'Empire romain (pour Voltaire, la christianisation est même la cause de la chute) comme le marqueur du passage de l'Antiquité au Moyen-Âge.
Cette vision est fortement biaisée idéologiquement, du fait de l'essor de la bourgeoisie qui avait tendance à se présenter comme porteuse de progrès. La notion d'Antiquité en tant qu'époque historique s'impose plus encore au 19e siècle, pour devenir enseignée massivement depuis.