Abolition de l'argent
Toute une série de mouvements divers visent l'abolition de l'argent, dont certains mouvements socialistes.
1 Vision marxiste[modifier | modifier le wikicode]
La société bourgeoise engendre des situations sociales absurdes, qui peuvent paraître le fruit d'autres conséquences du capitalisme plutôt que de ses fondements. Par exemple, « l'argent » a été vu par beaucoup comme une malédiction, un vice, voire une véritable manifestation du diable ! Plus prosaïquement et plus "laïquement", beaucoup pensent sincèrement que c'est l'argent qui engendre les inégalités, la misère, etc...
D'un point de vue marxiste, la plupart du temps les critiques « de l'argent » sont posées d'un point de vue idéaliste. Marx et Engels ont construit leur politique notamment sur une critique des socialistes utopiques et les proudhoniens qui parlaient de société sans argent sans analyser de façon matérialiste l'origine de l'argent et son rapport avec les rapports de production capitalistes. Pour les marxistes :
« Il est impossible d'abolir l'argent tant que la valeur d'échange reste la forme sociale des produits. Il est nécessaire de s'en rendre compte, si l'on veut éviter d'affronter des tâches impossibles, et si l'on veut bien connaître les limites dans lesquelles les rapports de productions et les conditions sociales correspondantes peuvent être transformées en réformant la monnaie et la circulation. »[1]
En revanche, les marxistes évoquent généralement la possibilité que l'argent finisse par ne plus être nécessaire au bout d'un certain temps après la révolution socialiste.
Dans la première phase du socialisme, au lendemain de la révolution, il est encore nécessaire de comptabiliser la part qui revient à chacun. Sur les outils pour réaliser cette répartition, les marxistes envisagent plusieurs options, sachant que dans tous les cas cela devra émerger de la situation concrète. Dans le Capital et dans la Critique du programme de Gotha, Marx évoque la possibilité d'utiliser des bons de travail.
A terme, dans la société communiste, il est possible que l'argent ne soit plus nécessaire. Ce serait une société sans classe et une société d'abondance, dans laquelle il n'est plus nécessaire de corréler la distribution des biens à la quantité de travail fournie par chacun. C'est-à-dire une société qui réalise l'adage « de chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins ». Une société dans laquelle « les membres de la communauté, bénéficiant d'une haute technique, rempliront suffisamment les magasins de la société pour que chacun puisse y puiser largement « selon ses besoins » sans contrôle humiliant ».[2]
Une telle évolution n'est cependant qu'une spéculation. Certains marxistes comme Kautsky ont affiché un certain scepticisme à ce sujet, raillant au passage un certain millénarisme. Il constatait que « aujourd'hui encore, de nombreux socialistes considèrent l'abolition de l'argent comme un élément essentiel du programme socialiste », ce qu'il voyait comme idéaliste.[3]
Quoi qu'il en soit, la plupart des marxistes estiment que l'argent continuerait d'être utilisé assez longtemps.
« Nous avons toujours affirmé que le prolétariat, après la conquête du pouvoir, serait obligé, pendant un temps très long encore, de tolérer aux côtés des entreprises étatiques, les entreprises privées, moins perfectionnées au point de vue technique, moins susceptibles d´être centralisées ; nous n´avons jamais douté que les rapports entre les entreprises étatiques et privées, et dans une mesure considérable, les rapports réciproques entre les différentes entreprises ou leurs groupes, seraient régularisés par la voie du marché, au moyen du numéraire. »[4]
2 Mouvements de la désargence[modifier | modifier le wikicode]
Depuis une dizaine d'années, plusieurs groupes travaillent à l'élaboration d'une théorie économique pouvant déboucher sur une abolition de l'argent, de la valeur, du salariat et des profits monétaires. Regroupés sous le label "désargence", ils imaginent comment pourrait fonctionner une société qui passerait de l'échange marchand à une mise en accès libre, sans condition et pour tous, à tous les biens et services. Cette construction sociale s'appuie sur la technologie de la blockchain et de l'open data, deux outils qui permettraient d'établir enfin une vraie démocratie et de sortir des nombreuses impasses structurelles, sociales et écologiques.
3 Notes[modifier | modifier le wikicode]
- ↑ Karl Marx, Contribution à la critique de l'économie politique (Grundrisse), 1859
- ↑ Léon Trotski, La Révolution trahie, 1936
- ↑ Karl Kautsky, The Labour Revolution, June 1922
- ↑ Trotski, La nouvelle politique économique des Soviets et la révolution mondiale, 14 novembre 1922