Narodniki

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Les narodniks, ou narodniki (du russe narod / народ , « peuple ») étaient des socialistes russes non-marxistes, appelés aussi « populistes ». Il fut actif surtout entre les années 1860 et la fin du 19e siècle.

1 Historique

1.1 Origines

Les premiers mouvements d'opposition au tsarisme apparaissent timidement à la fin du 18e siècle, avec notamment le Voyage de Pétersbourg à Moscou d'Alexandre Radichtchev paru au printemps 1790. (Les idéologues soviétiques ont d'ailleurs par la suite qualifié Radichtchev de « premier révolutionnaire »).

Il connaît une première heure de gloire lors de l'insurrection décabriste en décembre 1825. L'impitoyable répression policière qui a suivi a étouffé toute contestation politique pendant le règne de Nicolas Ier. Toute remise en cause du système, même légère, était sanctionnée par la condamnation ou l'exil (Fiodor Dostoïevski et le Cercle de Petrachevski, Alexandre Herzen, Nikolaï Ogarev, etc.). La Russie ne connaît pratiquement aucun soubresaut de la Révolution de 1848, qui secoue pourtant toute l'Europe centrale. Cette rigidité du système a conduit la contestation à se radicaliser et à s'élargir.

1.2 Organisations populistes

Divers groupements de lutte contre le régime tsariste apparaissent plus ou moins durablement : Cercle de Tchaïkovski, Terre et Liberté, Partage NoirNarodnaïa Volia, etc.

L'influence du socialisme occidental est importante, (en particulier Charles Fourier), mais le mouvement espère trouver une voie spécifiquement russe vers la Révolution : le « populisme ». Influencés par les écrits d'Alexandre Herzen et de Nikolaï Tchernychevski, dont les convictions ont été affinées par Nikolaï Mikhaïlovski, les narodniks (surtout des membres de l'intelligentsia) misaient sur le « peuple » en général, c'est-à-dire essentiellement la paysannerie.

Ils ont envisagé une société dans laquelle la souveraineté reposerait sur de petites unités économiques autonomes rassemblant les communes de village et liées dans une confédération remplaçant l'État.

La première voie tentée est l'acculturation (lutte contre l'analphabétisme en particulier) : les Narodniks sont allés pour la première fois dans un village en 1874, propager leur doctrine parmi les paysans, mais ils ont vite été rejetés.

Devant l'échec de ces tentatives, une partie des organisations se tourne vers ce que les futurs sociaux-démocrates russes appelleront le « terrorisme individuel ». L'organisation Narodnaïa Volia se réclame ainsi ouvertement « terroriste » et parvient à assassiner l'empereur Alexandre II de Russie le 13 mars 1881 lors d'un attentat à la bombe. Ce coup d'éclat marque la fin de l'organisation, décimée par la répression politique qui suit. Mais le terrorisme politique devient endémique jusqu'à la Première Guerre mondiale dans l'Empire russe…

En 1876, ils se sont transformés en société secrète, connue sous le nom de Terre et Liberté, pour favoriser un soulèvement révolutionnaire de masse. Expulsés de la campagne par la police, ils sont bientôt dominés par l'aile terroriste du mouvement formée en 1879, sous le nom de Narodnaïa Volia, qui a entrepris plusieurs assassinats politiques ; en 1881 plusieurs membres de ce groupe, notamment Andreï Jéliabov et sa compagne Sofia Perovskaïa qui lui succédera après son arrestation, ont organisé l'assassinat de l'empereur Alexandre II en mars 1881. Sofia Perovskaïa sera arrêtée quelques jours plus tard. Les conjurés seront jugés et condamnés à mort pour régicide et pendus en place publique le 1er avril 1881.

1.3 Postérité

En 1901, le Parti socialiste-révolutionnaire (SR) a été fondé en tant qu'héritier du mouvement des narodniks.

2 Marxistes et populistes

2.1 Influences

Le courant populiste, en tant que précurseur, a beaucoup servi d'inspiration pour le socialisme en général en Russie.

La célèbre brochure de Lénine, Que Faire ?, reprenait le titre d'un roman de Tchernychevski que beaucoup de révolutionnaires avaient lu à l'époque. Alexandre Oulianov, le frère aîné de Lénine, fut un membre actif de Noradnaïa Volia. À la suite d'une tentative d'attentat contre l'empereur Alexandre III, le jeune homme passa en jugement. Il fut condamné à mort et exécuté en mai 1887. Ce fut un des chocs qui conduisit Lénine à militer.

En 1883, la première cellule marxiste de Russie, Libération du Travail, est formée par d'anciens populistes : Gueorgui Plekhanov, Pavel Axelrod, Vera Zassoulitch, etc.

2.2 Combats politiques

Les narodniks soutenaient que la révolution à venir en Russie pourrait être directement socialiste, sur la base des communautés paysannes pré-capitalistes (mir, obchtchina).

C'est en luttant contre ces conceptions que se sont formés les marxistes russes, autour du groupe de lutte pour la Libération du Travail, et autour de publications comme Nos différends (1885)[1] de Plékhanov ou Le développement du capitalisme en Russie (1899)[2] de Lénine.

Paradoxalement, vers la fin de sa vie Marx s'était beaucoup intéressé à la Russie et avait correspondu avec la populiste Vera Zassoulitch, affinant le schéma marxiste. Il considérait que les mirs pouvaient servir de base directe à une société socialiste, à condition qu'ils soient englobés dans une révolution qui s'allie à la révolution ouvrière dans les pays capitalistes avancés. A l'époque de ces débats, cette correspondance de Marx avec Zassoulitch n'était pas connue du grand public.

3 Notes et sources