Vormärz
Le Vormärz [ˈfoːɐ̯mɛʁt͡s][1] (litt. l'« avant-mars ») est, dans les États allemands, la période allant du congrès de Vienne en 1815 au Printemps des peuples avorté en 1848-49. On qualifie parfois cette période de Jeune-Allemagne (Junges Deutschland), nom repris par un groupe d'écrivains allemands de la même période. S'ensuit la révolution de Mars de 1848 dans les trente-huit États germaniques formant la Confédération germanique, avec la demande du peuple d'accéder à la liberté de la presse et une monarchie parlementaire où il serait représenté par une assemblée élue. Durant cette période, les monarchies allemandes commencent à être contestées, et l'empire des Habsbourg en Autriche commence lui aussi à décliner. L'unification allemande qui s'achève ensuite sous l'impulsion de Bismarck fut elle aussi conditionnée par le Vormärz.
Le Biedermeier couvre la même période, mais alors que le premier terme a une connotation plus artistique, le Vormärz a une connotation plus politique.
1 Contexte économique et social[modifier | modifier le wikicode]
La situation de l'Allemagne à cette époque-là est particulière. Le territoire est divisé en plusieurs terres dirigées par des princes ecclésiastiques ou laïcs qui sont assemblées pour former le Saint-Empire romain germanique. Rien ne les unifie. De plus en plus, les Allemands aspirent à l'unité et à plus de libertés. Des mouvements libéralistes se forment avec notamment les Wartburgfeste. Les révolutions françaises influencent les Allemands qui aspirent aux mêmes changements.
Une crise économique éclate en Europe en 1847, suite à la combinaison de mauvaises récoltes et d'une crise financière. Dans les pays allemands, l'augmentation des prix des denrées agricoles entraîne des famines et des révoltes de la faim presque partout[2]. La fraction la plus pauvre de la population composée des ouvriers, artisans appauvris, travailleurs agricoles, etc., soutient les revendications des cercles démocratiques et libéraux[3]. Une autre conséquence de la crise est la diminution de la valeur de la monnaie dans la commercialisation des produits industriels, ce qui cause, entre autres, le déclin du secteur textile, encore largement dominé par l'artisanat[4].
Le secteur textile est encore le fait d'un travail à domicile généralisé : pour un faible salaire, nombreuses sont les familles des campagnes allemandes qui cèdent leur production à quelques riches entrepreneurs et propriétaires fonciers. Son déclin et généralement celui de l'ensemble de l'artisanat sont aussi dus à la progression de la révolution industrielle dans toute l'Europe[5], celle-ci bouleversant peu à peu les rapports sociaux, économiques et industriels de tout le continent autour du milieu du 18e siècle sous l'effet des inventions techniques venant du Royaume-Uni. De plus, il y a à cette époque une forte croissance démographique à la campagne comme à la ville résultant de l'augmentation de la productivité agricole, tandis que l'industrie ne peut employer un tel volume de main-d'œuvre, ce qui cause un taux de chômage extrêmement important et l'émergence d'un prolétariat. La main-d'œuvre excédentaire forme une « armée de réserve de travailleurs »[6]. Les villes étant en expansion continuelle, de plus en plus de personnes cherchent du travail dans les manufactures et les usines construites pour la fabrication de produits nouveaux et à bon marché grâce à une production en série plus efficace[7].
Les conditions de vie et de travail dans les entreprises industrielles et leur environnement sont, en règle générale, des plus mauvaises au 19e siècle[8]. Les ouvriers connaissent généralement les conditions misérables des ghettos et bidonvilles, ayant à peine de quoi vivre, sans couverture sociale, et sont menacés par le chômage[9]. Déjà quelques années avant la révolution de Mars se produisent régulièrement des émeutes locales contre les « barons d'industrie ». Par exemple, la « révolte des tisseurs » de en Silésie, une révolte de la faim des tisserands de Bielawa et de Pieszyce, est considérée comme le premier soulèvement public significatif du prolétariat allemand, même s'il est réprimé en quelques jours par les troupes prussiennes[6]. La bourgeoisie aisée se voit, elle aussi, de plus en plus freinée dans son développement. En raison de la politique douanière des principautés, les possibilités de libre-échange sont très limitées. Dans les États allemands également, les aspirations à une libéralisation de l'économie et du commerce se font entendre de plus en plus dans les premières décennies du 19e siècle. Le est fondé le Zollverein qui facilite le commerce entre les pays allemands. Cependant, à la fin des années 1830, l'essor économique global[10] ne profite que peu aux couches de population les plus pauvres[11].
2 Contexte politique[modifier | modifier le wikicode]
2.1 Congrès de Vienne et début de la Restauration[modifier | modifier le wikicode]
Les conquêtes napoléoniennes avaient eu eu double effet : d'une part, un enthousiasme de nombreux secteurs de la population pour les acquis de la révolution française apportés (fin du féodalisme, rénovation de la justice avec le Code civil...), surtout dans les territoires occupés, et un sursaut national pour chasser l'envahisseur. Cela donna un grand stimulant aux désirs d'unité et de liberté politique (« Einheit und Freiheit »).
Mais ce n'était pas du tout l'intention des puissances monarchiques victorieuses. Juste avant la défaite de la bataille de Waterloo, fatale à Napoléon Bonaparte le , le congrès de Vienne, réuni le [12], décide une politique de restauration, de retour à la société d'Ancien Régime. Cela implique la prédominance de la noblesse, le rétablissement de ses privilèges, et le maintien de l'éclatement en différents États germaniques[13],[14].
Maigre concession au désir d'unité, le congrès mit en place la Confédération germanique (1815-1866). Elle comptait 41 États indépendants mais n'avait pas de chef d'État. Elle dépendait du bon vouloir des deux plus grands États qui la composait : l'Autriche et la Prusse.
Suite au congrès est aussi créée la Sainte Alliance entre la Russie, l'Autriche et la Prusse, un accord entre puissances réactionnaires pour s'assurer du maintien de l'ordre international. Les échanges diplomatiques entre les mêmes États, dans les années qui ont suivi, tels le recès de Francfort en 1819, confirment la même situation, et évitent d'envisager une évolution vers une unification politique de l'Allemagne[15]. L'homme fort de cet ordre réactionnaire est le chancelier autrichien Klemens Wenzel von Metternich[16].
Sur le plan de la politique intérieure, dans le cadre de la restauration, les exigences de réformes libérales ou d'unification nationale sont étouffées, les mesures de censure renforcées et la liberté de la presse très diminuée[4]. Ainsi en , les œuvres de la Jeune-Allemagne, un groupe de jeunes écrivains révolutionnaires, sont censurées ou interdites[17]. D'autres poètes sociocritiques ou nationalistes sont censurés, et pour certains contraints à l'exil, notamment vers la France ou la Suisse[17]. C'est le cas par exemple d'Heinrich Heine, de Georg Herwegh, de Georg Büchner (auteur du libelle « Le Messager des campagnes hessoises » (Der Hessische Landbote) dont le mot d'ordre est « Paix aux chaumières, guerre aux palais ! » (Friede den Hütten, Krieg den Palästen![18]),[17], ou encore d'August Heinrich Hoffmann von Fallersleben (qui écrit le chant patriotique Deutschlandlied).
2.2 Fête de la Wartbourg et décrets de Carlsbad[modifier | modifier le wikicode]
Tous les soulèvements populaires seraient réprimés par le régime réactionnaire de Metternich, qui profita des errements de Ferdinand Ier d'Autriche pour se positionner idéalement dans l'échiquier politique allemand.
Les Burschenschaften (sociétés étudiantes) de cette époque exigent l'unité nationale ainsi que la reconnaissance de droits démocratiques. Le , elles se réunissent massivement à proximité du château de la Wartbourg à l'occasion du quatrième anniversaire de la bataille de Leipzig et du 300e anniversaire de la réforme protestante de Martin Luther. C'est pendant cette fête de la Wartbourg qu'elles défendent avec véhémence leur revendication d'unité allemande, recourant à des autodafés : des participants brûlent des œuvres d'écrivains réactionnaires qualifiées d'anti-allemandes, comme la Deutsche Geschichte d'August von Kotzebue, le Code Napoléon, ou encore des œuvres d'auteurs juifs comme la Germanomanie de Saul Ascher, une condamnation du nationalisme allemand[19],[20],[21].
Heinrich Heine, aux opinions démocrates, est néanmoins réservé à l'égard du nationalisme exacerbé des Burschenschaften, et énonce à cette époque une formule prophétique et devenue célèbre « Ce n'est qu'un début. Là où on brûle des livres, on finit par brûler des hommes. » Celle-ci fait certes littéralement référence à la Reconquista espagnole dans sa pièce de théâtre Almansor, mais elle est également empreinte d'une expérience contemporaine, Heine ayant toujours été un poète critique à l'égard de son temps[22].
Les frasques de la fête de la Wartbourg attirent l'attention des autorités sur les Burschenschaften qui subissent bientôt une répression grandissante. En 1819, cette répression prend une forme légale : les décrets de Carlsbad, en réaction à l'assassinat du poète August von Kotzebue par Karl Ludwig Sand, un nationaliste fanatique, membre d'une Burschenchaft[23]. Malgré l'interdiction et les persécutions, les membres des Burschenschaften restent souvent actifs dans la clandestinité. Des organisations se camouflent sous une apparence apolitique, comme le mouvement gymnique allemand (Turnbewegung) du « Turnvater Jahn », où on continue à la fois à développer des idées libérales inspirées des romantiques, mais aussi culturelles et nationales qui portent cependant des aspects contraires aux idées émancipatrices et à celles des Lumières[24]. Ainsi, l'antisémitisme est très répandu dans ces groupes comme dans l'ensemble des Burschenschaften, signes précurseurs des concepts antisémites à base de préjugés racistes biologiques de la fin des années 1870, auxquels Friedrich Ludwig Jahn se reconnaît ouvert. Pendant le Vormärz, l'expression de cette haine des juifs se matérialise par les émeutes Hep-Hep de 1819. Elles commencèrent à Wurtzbourg, mais s'étendent rapidement à presque tous les États allemands. Ces émeutes dirigées contre l'émancipation des Juifs en général et contre leur égalité économique en particulier, dégénèrent en bien des endroits en pogrom[25].
La classe ouvrière était tenue sous contrôle constant, plus pour son potentiel de danger politique que social.
2.3 Révolution de 1830[modifier | modifier le wikicode]
En France, la révolution de Juillet de 1830, pendant laquelle la maison de Bourbon représentée par Charles X est renversée, et au cours de laquelle les forces libérales instituent le « roi des Français » (et non « roi de France ») Louis-Philippe Ier, donne aussi un élan aux forces libérales en Allemagne et dans d'autres régions d'Europe[26]. Cela provoque dès 1830 des soulèvements dans plusieurs principautés allemandes, comme à Brunswick, en Hesse-Cassel, dans le royaume de Saxe et à Hanovre, et conduit à l'adoption de constitutions[27].
Il y a également des soulèvements en 1830 dans les États italiens ainsi que dans les provinces polonaises de l'Autriche, de la Prusse et de la Russie (royaume du Congrès) dont le but est l'autonomie d'un État national. Dans le royaume uni des Pays-Bas, la révolution belge mène au détachement des provinces du sud et à la création d'un État belge indépendant prenant la forme d'une monarchie constitutionnelle[28].
2.3.1 Fête de Hambach et attaque de la Garde de Francfort[modifier | modifier le wikicode]
Dans l'ensemble, le système de Metternich se maintient néanmoins, même si des fissures apparaissent dans de nombreux endroits. Ainsi, les décrets de Carlsbad n'empêchent pas des rassemblements spectaculaires dans la lignée de la fête de la Wartbourg, comme la fête de Hambach en 1832, pendant laquelle on arbore des drapeaux républicains tricolores, noir, rouge et or pourtant interdits (comme déjà en 1817 lors de la fête de la Wartbourg[19],[29]).
L'attaque de la Garde de Francfort du est la première tentative, menée par une cinquantaine d'étudiants, de déclencher une révolution dans toute l'Allemagne. L'action vise le siège du Bundestag situé à l'époque à Francfort-sur-le-Main et considéré par les démocrates comme un instrument de la politique de restauration. Après la neutralisation des deux postes de police de Francfort, les insurgés veulent capturer les envoyés des princes et ainsi favoriser le soulèvement de toute l'Allemagne. Révélée avant même de commencer, l'action tourne court, dès le début, après un échange de coups de feu qui fait quelques morts et blessés[29].
En Italie, en 1831, le révolutionnaire et patriote Giuseppe Mazzini fonde la société secrète Giovine Italia (Jeune Italie). Elle donne naissance à d'autres sociétés en Europe comme Junges Deutschland (Jeune-Allemagne) ou « Jeune Pologne ». Ensemble elles forment en 1834 la société secrète supranationale Giovine Europa (Jeune Europe[30]).
En 1834, Georg Büchner et Friedrich Ludwig Weidig diffusent clandestinement le libelle Le Messager des campagnes hessoises (Der Hessische Landbote[31]) avec le mot d'ordre « Paix aux chaumières, guerre aux palais ! » (Friede den Hütten, Krieg den Palästen!) dans le grand-duché de Hesse[17]. En 1837, la lettre de protestation solennelle des Sept de Göttingen (groupe de professeurs d'université, libéraux notables, parmi lesquels on comptait les frères Grimm) contre la révocation de la constitution du royaume de Hanovre, trouve un écho dans toute la Confédération germanique. Les professeurs sont renvoyés et certains expulsés du pays[32],[33].
2.4 Guerre du Sonderbund et veille de la révolution de Mars[modifier | modifier le wikicode]
En 1847, la guerre du Sonderbund éclate en Suisse qui est une confédération d'États peu solidaires et politiquement très hétérogènes, avant que la constitution fédérale de 1848 la transforme en un État fédéral libéral[34],[35].
Les libéraux et démocrates des États allemands aspirent à la mise en place de libertés politiques par le biais de réformes démocratiques ainsi qu'à l'unité nationale des principautés au sein de la Confédération germanique. Ils soutiennent particulièrement les idées du libéralisme[36],[37].
3 Un mouvement littéraire[modifier | modifier le wikicode]
Le mouvement littéraire du Vormärz s'oppose au Biedermeier qui lui est un mouvement conservateur et résigné politiquement. Le Vormärz quant à lui exige des changements politiques et des meilleures conditions de vie.
3.1 La « Jeune Allemagne »[modifier | modifier le wikicode]
La Jeune-Allemagne s'étend de 1830 à 1835. C'est une littérature engagée influencée par Heinrich Heine notamment. C'est sûrement le plus important groupe d'auteurs du Vormärz. Le but est pour eux de sensibiliser à la politique. Il n'y a plus le souci esthétique, on critique la société, l'Église, la Politique. Ils refusent tout ce qui est conventions, traditions, moralité. Les genres les plus utilisés dans ce mouvement littéraire sont les lettres, les récits de voyage, les poèmes influencés politiquement. En 1835, la « Junges Deutschland » est interdite par la diète de Francfort. Les auteurs fuient. Les auteurs importants de ce mouvement littéraire sont Karl Gutzkow (1811-1878), Georf Herwegh (1817-1875), Rudolf Wienbarg (1802-1872), Heinrich Laube, Theodor Mundt, Ludolf Wienbarg. Cependant on retrouve des traces de ces "jeunes allemands", liés au mouvement des jeunes hégéliens, qui remettront en cause la chanson (et ses imitations) de Nikolaus Becker intitulée Rheinlied, que l'on peut traduire littéralement par "La chanson du Rhin"[38].
Hoffmann von Fallersleben est aussi un auteur reconnu de cette période et son œuvre "Lied der Deutschen" ou "Deutschlandlied" (le chant des Allemands) 1841, devient l'hymne national en 1871.
Einigkeit und Recht und Freiheit
Für das deutsche Vaterland!
Danach lasst uns alle streben
Brüderlich mit Herz und Hand.
Einigkeit und Recht und Freiheit
Sind des Glückes Unterpfand-
Blüh im Glanze dieses Glückes,
Blühe, deutsches Vaterland!
Union et droit et liberté
Pour la patrie allemande !
Visons tous ce but
Dans la fraternité du cœur et de l'esprit !
Union et droit et liberté
Sont un gage de bonheur
Rayonne dans la splendeur de ce bonheur,
Rayonne, patrie allemande !
3.2 Auteurs importants[modifier | modifier le wikicode]
D'autres auteurs ne faisant pas partie de ce groupe participent au Vormärz et critiquent la société, la censure, la politique de ce temps-là. On peut citer notamment Ludwig Börne, Georg Büchner, Heinrich Heine, Ernst Dronke, Fanny Lewald, Louise Aston.
3.2.1 Georg Büchner[modifier | modifier le wikicode]
En Georg Büchner et Friedrig Ludwig Weidig publient un tract révolutionnaire : « Le messager des campagnes hessoises » (« Der Hessische Landbote »). Ils y appellent au soulèvement par la violence s'il le faut : « Paix aux chaumières! Guerre aux palais! » (« Friede den Hütten! Krieg den Palästen! ») Il garde contact avec Gutzkow.
En 1835 il doit fuir à Strasbourg. Il devient plus tard un auteur très reconnu avec notamment La mort de Danton, Lenz 1835.
3.2.2 Heinrich Heine[modifier | modifier le wikicode]
C'était un poète, un auteur et un journaliste. Il écrit pendant cette période, en 1844, un poème nommé die Schlesischen Weber (les tisserands silésiens) en hommage au soulèvement des tisserands silésiens contre leur situation de grande pauvreté.
Il se détache de la jeune Allemagne car il reste très exigeant pour ce qui est de l'esthétique.
4 Naissance du nationalisme allemand[modifier | modifier le wikicode]
4.1 Le conflit franco-allemand[modifier | modifier le wikicode]
4.1.1 La crise du Rhin (1839-1841)[38][modifier | modifier le wikicode]
La crise du Rhin découle directement de conséquences de la crise d'Orient résultant globalement de conflits au sein du pourtour méditerranéen; de l'effritement, à la suite de nombreuses divisions, de l'Empire ottoman, mais aussi des conflits, avec "l'Entente cordiale", engagés par Nicolas Ier et que Frédéric-Guillaume III de Prusse puis son successeur Frédéric-Guillaume IV soutiennent. Ce conflit entre grandes puissances européennes cherche à se calmer avec la Traité de Londres réunie à partir de 1839 (à ne pas confondre avec le Traité de Londres la même année) réunissant les grandes puissances de la Prusse, la Russie, l'Autriche, la France et enfin l'Angleterre. Il en résulte le traité du qui promet une défense de l'Empire ottoman par la mer. Ce traité n'est pas signé par la France. Marc Thuret écrit en 1984 combien ce traité du stipulait que : "les quatre puissances garantissaient l’Empire ottoman « contre toute attaque venue de la mer », équilibraient et répartissaient leurs forces dans la région des détroits et s’engageaient, dans un protocole secret, à chasser Mehemet Ali de Syrie"[38].
C'est dans ce contexte, où la France se sent trahie, seule face à 4 puissances européennes, qu'il naît de nombreux articles appelant à récupérer la Rhénanie. Celle-ci est perdue à la suite de la défaite de l'ambition napoléonienne, mais aussi à cause du Congrès de Vienne du au , rendant le territoire de la Rhénanie anciennement intégré à l'Empire français, à la Prusse. On lit par exemple dans Le National : "une armée de cent mille hommes irait chercher son champ de bataille sur le Rhin". Ces déclarations entraînèrent, en 1840, un véritable sentiment "anti-français" au sein de la Prusse, mouvement critiqué notamment par les jeunes hégéliens et la "Junges Deutschland". Ce courant "anti-français", aussi provoqué par la revendication de la Rhénanie par Adolphe Thiers, fait écrire à Becker l'hymne de la Rhénanie, pour la préservation du "libre Rhin Allemand" dans son Rheinlied qui servira d'un hymne national allemand non-officiel.
En effet, la crise du Rhin fait éclater aux yeux de l'Europe la complexité du cas de la Rhénanie. Auparavant intégrée au sein de l'Empire de Napoléon Ier, elle avait hérité des institutions françaises que le père de Karl Marx connut et salua[39]. Cependant, à la suite du Congrès de Vienne, la Rhénanie se retrouve à subir l'occupation d'une monarchie luthérienne et militariste (le royaume de Prusse) proche de l'Empire russe par liens matrimoniaux. La région se voit occupée par des troupes prussiennes envoyées par la confédération germanique pour contrer de possibles invasions françaises. Seulement, cette occupation est très mal vue par la population rhénane, notamment à Trèves, qui se voit contrainte à se convertir amplement au luthéranisme, notamment la population juive, pour pouvoir continuer à exercer leurs métiers. Heinrich Marx en fait les frais, en se voyant obligé de baptiser selon les rites luthériens ses enfants, dont Karl Marx, mais aussi de devoir se plier aux rites luthériens, et donc refuser sa foi juive, pour pouvoir continuer à exercer son poste d'avocat[39]. Victor Hugo va jusqu'à écrire en 1842 que : "La rive gauche du Rhin est restée française"[38]. Mais pourtant, la région y préfère la domination prussienne, notamment grâce à un sentiment national, issu de la confédération germanique, naissant aussi au sein de la Prusse tout entière.
Parallèlement, des sociétés patriotiques et des corporations étudiantes naissent en Rhénanie. À Cologne, on voit l'archevêque promulguer des mariages religieusement mixtes. Tout ceci est condamné et une forte répression est faite par le roi de Prusse Frédéric-Guillaume III. Cependant, son successeur, Frédéric-Guillaume IV, amnistie le les sociétés patriotiques et les corporations étudiantes. Il libère la même année l'archevêque de Cologne. La réconciliation entre la Prusse et la Rhénanie jouit aussi du succès des réformes effectuées autour de l'Union Douanière (Zollverein) , permettant un épanouissement économique de la région. Il naît progressivement, dans les esprits rhénans, la création d'un grand Etat-nation, constitué sur la base d'une "révolution par le haut" qui aboutira, en , à la Révolution de Mars aussi appelée "printemps des peuples allemands".
5 La Révolution de Mars 1848[modifier | modifier le wikicode]
La révolution de Mars s'étendit dans toute la Confédération germanique de à la fin de l'été 1849 et fut un échec. Elle commença le en Autriche où une insurrection populaire s'éleva contre Metternich et ses lois. Le le conflit s'étend à Berlin.
6 Notes et références[modifier | modifier le wikicode]
- ↑ Prononciation en haut allemand standardisé retranscrite selon la norme API.
- ↑ Clark 2008, p.522
- ↑ Clark 2008, p.518
- ↑ 4,0 et 4,1 Brandt 2002, p.192
- ↑ Langewiesche 1983, p.28
- ↑ 6,0 et 6,1 Clark 2008, p.515
- ↑ Dipper et Speck 1998, p.114
- ↑ Siemann 1985, p.38
- ↑ Dipper et Speck 1998, p.82
- ↑ Burg 1984, p.126-138
- ↑ Hesse 2010, p.13
- ↑ Burg 1984, p.56
- ↑ Jean Sellier et André Sellier, Atlas des peuples d'Europe occidentale, La Découverte, , « L'Allemagne et l'Autriche de 1815 à 1945 », p. 120
- ↑ Burg 1984, p.7
- ↑ Jean Sellier et André Sellier, Atlas des peuples d'Europe occidentale, La Découverte, , « L'Allemagne et l'Autriche de 1815 à 1945 », p. 120.
- ↑ Brandt 2002, p.188
- ↑ 17,0 17,1 17,2 et 17,3 Nipperdey 1994, p.373-374
- ↑ (de) « Der Hessische Landbote sur Wikisource » (consulté le 29 avril 2012)
- ↑ 19,0 et 19,1 Clark 2008, p.437
- ↑ Nipperdey 1994, p.280
- ↑ Winkler 2002, p.72
- ↑ (de) « Almansor de Heinrich Heine » (consulté le 14 décembre 2013)
- ↑ Clark 2008, p.462
- ↑ Winkler 2002, p.62
- ↑ Winkler 2002, p.76
- ↑ Mommsen 2000, p.42
- ↑ Gall 1998, p.41, 42 et 62
- ↑ Mommsen 2000, p.45-48
- ↑ 29,0 et 29,1 Gall 1998, p.64
- ↑ Gall 1998, p.56
- ↑ (de) « Biographie de Friedrich Ludwig Weidig » (consulté le 28 novembre 2012)
- ↑ (de) « Site sur les 7 de Göttingen » [archive du ] (consulté le 28 novembre 2012).
- ↑ Nipperdey 1994, p.376
- ↑ Dipper et Speck 1998, p.354
- ↑ Brandt 2002, p.210
- ↑ Langewiesche 1983, p.14
- ↑ Langewiesche 1983, p.26
- ↑ 38,0 38,1 38,2 et 38,3 Thuret Marc dirigé par Gilbert Krebs, ASPECTS DU VORMÄRZ : Société et Politique en Allemagne dans la première moitié du XIXe siècle. "La crise du Rhin et le malentendu franco-allemand (1839-1841)", Paris, Presses Sorbonne Nouvelle, , 228 p. (ISBN 9782878549294, lire en ligne), p. 27-40
- ↑ 39,0 et 39,1 Attali Jacques, Karl Marx ou l'esprit du monde, Paris, LGF, , 571 p. (ISBN 978-2-253-11606-6)
7 Bibliographie[modifier | modifier le wikicode]
Films
- Heimat (film, 2013) d'Edgar Reitz : Heimat : Chronique d'un rêve (Die andere Heimat : Chronik einer Sehnsucht) et Heimat : L'Exode (Die andere Heimat : Die Auswanderung), préquelle à la mini-série Heimat, pour la période Vormärz (1815-1848)
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