Corruption

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Lycéenne militant contre la corruption en RDC.

La corruption est le fait de passer un accord avec quelqu'un en position de pouvoir pour obtenir un avantage, souvent de façon illégale.

La corruption peut toucher toute personne qui se retrouve à avoir un peu de pouvoir dans une situation donnée, y compris un médecin, un syndicaliste, un arbitre, etc. Mais évidemment, en terme d'impacts et de scandale, la corruption des politiciens et des capitalistes est celle qui est la plus grave.

1 Définitions[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Pot-de-vin[modifier | modifier le wikicode]

Représentation d'un pot-de-vin.

À l’origine, le « pot » était le récipient de terre cuite ou d’étain dans lequel l’on servait le vin ou la bière. Dans la culture occidentale, on offre à une personne un « pot à boire » par sympathie ou en échange d’un petit service rendu. L’expression « donner un pot-de-vin » apparaît au début du 16e siècle et signifiait simplement « donner un pourboire » (soit littéralement à boire, soit quelques pièces de monnaie ne représentant qu’une valeur symbolique).

Au fil des siècles, cette expression a pris une connotation péjorative et est devenu synonyme d’illégalité et de corruption. La valeur de ce « pot » est devenue beaucoup plus importante, qu’elle soit monétaire ou en nature.

1.2 Problèmes de définition[modifier | modifier le wikicode]

Il est difficile de proposer une définition de la corruption qui convienne à tous les pays et toutes époques. En effet les formes de corruption dépendent des types de sociétés (formalisation plus ou moins poussée de services publics d'État censés être impartiaux, existence d'entreprises privées plus ou moins puissantes...) et des normes sociales subjectives en vigueur.

Par exemple, compter le « pot-de-vin » du 16e siècle évoqué ci-dessus dans la corruption serait anachronique, alors qu'il s'agit plutôt d'une reflet d'une mentalité « don contre don ». Une mentalité qui tend à subsister dans beaucoup de pays, et pour cette raison certains sociologues considèrent que les chiffres de la corruption plus élevés dans les pays pauvres reflètent en partie une incompréhension voire un mépris des occidentaux.

A l'inverse, dans un pays comme les États-Unis, le financement de politiciens ou de partis par des entreprises est largement décomplexé, et n'est pas considéré comme de la corruption...

« une entreprise qui souhaite influer sur les choix d’un élu n’a pas besoin de recourir aux dessous-de-table. Depuis janvier 2010 et l’arrêt « Citizens United v. Federal Election Commission » rendu par la Cour suprême, il lui suffit de subventionner des associations liées à son poulain, le plus légalement du monde et sans plafonnement des montants. (...) Selon un rapport de la Sunlight Foundation, entre 2007 et 2012, les deux cents entreprises américaines les plus actives politiquement ont, au niveau fédéral, dépensé 5,8 milliards de dollars en frais de ce type. Durant la même période, elles ont reçu l’équivalent de 4 400 milliards de dollars en cadeaux divers : subventions, exonérations, réduction d’impôts. (...) Les multinationales américaines souhaitant s’implanter dans des pays pauvres sont ainsi autorisées à effectuer des « paiements de facilitation » (facilitating payments) pour accélérer une procédure, obtenir une autorisation, faire passer un dossier sur le dessus de la pile. De leur côté, les justiciables suffisamment fortunés peuvent mettre un terme aux poursuites dont ils font l’objet en versant de l’argent à la partie adverse. Fluctuante, la frontière entre corruption et pratiques légales apparaît dès lors soumise aux aléas du droit. Et de la logique qui en sous-tend souvent l’élaboration : faire entrer les pratiques des dominants dans la légalité, tout en garantissant la plus grande sévérité pour les forfaits des classes populaires »[1]

1.3 Autres termes[modifier | modifier le wikicode]

  • En français, on emploie les termes pot-de-vin, dessous-de-table, gracieuseté, graisser la patte, commission, pourboire.
  • Enveloppe brune : somme d’argent liquide versé à un journaliste afin d’orienter sa couverture.
  • Subornation de témoin : pression en vue d'inciter une personne à déposer en justice d'une façon contraire à la vérité.
  • Frais commerciaux extraordinaires : terme du jargon de l'Union européenne[2].
  • Frais commerciaux exceptionnels (FCE) : terme utilisé par l'administration fiscale française[3].
  • Bakchich : dans l'Empire ottoman, au Maghreb et au Moyen-Orient. On l'utilise aussi pour « pourboire ».
  • Payola (de pay, en anglais payer, et Victrola, marque de platines de disques) : corruption des années 1950 aux États-Unis, dans laquelle les DJ des radios se faisaient payer (des sommes minimes) pour passer des titres nouveaux d'artistes peu connus.
  • « Aspects culturels de la dépense » : euphémisme parfois utilisé dans le discours officiel au Viêt Nam.
  • Gombo : terme camerounais pour désigner le fait de monnayer un service normalement gratuit.
  • Mange-mille : policier africain véreux cherchant à verbaliser à tout prix.
  • Cahoua : mot arabe qui veut dire « café », euphémisme utilisé pour designer un pot-de-vin dans les pays du Maghreb.
  • tchipa ou kahwa termes algériens pour désigner le pot de vin.
  • Igiturire terme burundais pour désigner le pot de vin.
  • Tadwira / Rachoua : terme Marocain pour désigner le pot de vin

2 Indicateurs[modifier | modifier le wikicode]

Malgré les problèmes de définition évoqués ci-dessus, la modernisation des sociétés et le développement de la sensibilité de l'opinion publique à la corruption a créé un besoin de comparer les situations entre différents pays, et donc à estimer la corruption par des indicateurs internationaux.

Index mondial de perception de la corruption en 2022 selon Transparency International[4]

Transparency International est toutefois controversée puisqu'elle ne considère que les malversations concernant le secteur public, ignorant celles du secteur privé[1].

3 Causes[modifier | modifier le wikicode]

Les causes de la corruption sont multiples, mais indirectement, la plupart prennent racine dans le capitalisme.

3.1 Presse, justice et opinion moins libre[modifier | modifier le wikicode]

La liberté de la presse joue un rôle important pour pouvoir dénoncer les cas de corruption, et faire en sorte que l'opinion publique exerce une pression morale sur les personnes susceptibles d'être corrompues.

Corrupt legislation, peinture murale à la bibliothèque du Congrès des États-Unis.

Et bien évidemment, un État de droit et une justice relativement indépendante des pouvoirs exécutifs et législatifs sont des facteurs essentiels. Une justice corrompue rend forcément plus difficile la lutte anti-corruption.

Mais il ne s'agit pas simplement d'une question de droits formels, mais aussi d'un niveau de développement social permettant à une part significative de la population d'utiliser cette liberté.[5] Sans une population suffisamment alphabétisée, et ayant un minimum de temps libre, les cas de corruption auront tendance à être acceptés avec résignation.[6] C'est pourquoi cette formation d'une opinion sensible à la corruption est elle aussi corrélée au niveau de richesse des pays, et donc, étant donné la domination impérialiste, limitée par le capitalisme.

3.2 Guerres[modifier | modifier le wikicode]

Dans des pays en guerre ou qui sortent de situations de guerre, la corruption est généralement élevée. Notamment par l'effet d'affaiblissement des institutions nationales qui favorisent les « solidarités » à des micro-échelles, ou de par les compromis faits pour mettre fin à la guerre (on accorde l'impunité à de nombreux anciens dignitaires belligérants, ce qui tend à museler la justice...).[7][8][9]

🔍 Voir sur Wikipédia : Corruption post-conflit.

3.3 Salaires insuffisant[modifier | modifier le wikicode]

Un facteur couramment évoqué est celui du niveau de revenu. Un fonctionnaire (douanier, médecin hospitalier...) peu payé peut se laisser plus facilement corrompre.

Ce point est cependant utilisé de façon largement hypocrite pour justifier les salaires élevés de nombreux politiciens.

3.4 Capitalistes corrupteurs[modifier | modifier le wikicode]

Si l'on parle souvent des facteurs qui peuvent faire qu'une personne va être plus ou moins facilement corrompue, on parle plus rarement des corrupteurs. La raison de fond de la corruption est qu'il y a des inégalités majeures, et des personnes (en particulier les capitalistes) qui se retrouvent en position de pouvoir corrompre.

On peut penser par exemple aux représentants du patronat faisant du lobbying auprès des politiciens, ou aux financements internationaux à des pays pauvres, qui sont donnés au grès des intérêts des impérialistes, et qui alimentent la plupart du temps la corruption.[7][8]

4 Conséquences[modifier | modifier le wikicode]

La corruption a des coûts pour la collectivité, notamment lorsqu'elle consiste à blanchir de l'argent, accepter des fraudes fiscales, fermer les yeux sur des pollutions...

En 2001-2002, 1 000 milliards de dollars auraient été détournés en pots-de-vin dans le monde (3 % des échanges de la planète)[10].

Dans l'Union européenne, le coût de la corruption pourrait atteindre 990 milliards d'euros dans dont 120 milliards pour la France[11].

En Indonésie, Suharto aurait détourné entre 15 et 35 milliards de dollars.[12] Au Canada, des politiciens et hauts fonctionnaires associés au Parti libéral ont falsifié des centaines de millions de factures de programmes de commandites gouvernementales, pour assurer la réélection de leurs candidats.

En revanche, pour les entreprises qui pratiquent la corruption, l'affaire est rentable.[13]

5 Éléments historiques[modifier | modifier le wikicode]

5.1 Avant le capitalisme[modifier | modifier le wikicode]

Dès l’antiquité grecque, la corruption des fonctionnaires est condamnée (que ce soit philosophiquement / moralement dans les écrits de Platon[14] ou dans la loi[15][16]).

5.2 Essor de la lutte anticorruption[modifier | modifier le wikicode]

Affichage d'une campagne de prévention contre la corruption à Nouakchott (Mauritanie)

Ces dernières décennies, la lutte spécifique contre la corruption s'est développée. Des institutions spécifiques ont été mises en place (Service central de prévention de la corruption en 1993 en France, devenue Agence française anticorruption en 2016...), des programmes dédiés ont été lancés par des institutions nationales et internationales (ONU, OCDE, Conseil de l'Europe...)...

L’intérêt porté par les médias aux affaires de corruption a considérablement augmenté depuis quelques décennies. En France notamment, Le Figaro, Le Monde et Libération ont publié 2 630 articles traitant de corruption entre 1981 et 1990. Une décennie plus tard, le chiffre a quadruplé. [1]

Selon certains, l'affaiblissement des différences idéologiques entre les grands partis de gouvernement de gauche et de droite a pu les conduire à se focaliser sur l'accusation de corruption des adversaires, et expliquer ainsi une montée en importance de ces questions.[1]

Ce combat est bien sûr parfois utile, surtout lorsqu'il s'agit d'associations indépendantes, comme Anticor (créée en 2002).

Mais il peut aussi servir idéologiquement à présenter les cas de corruption comme des anomalies dues à des individus mauvais, et en miroir, à détourner l'attention des institutions et du système capitaliste qui favorise la corruption.[1]

Dans tous les cas, son effet reste très limité. La lutte la plus volontariste ne peut pas grande chose contre la corruption dans les pays pauvres ou en guerre. Même dans les pays du centre, les États opposent souvent le secret défense dans des affaires de corruption, notamment celles qui impliquent des ventes d'armes. Globalement, très peu d'affaires de corruption aboutissement à des condamnations.[17]

Il peut aussi y avoir des reculs assumés, comme lorsque que l'Italie a simplement supprimé son Haut commissariat pour la prévention et la lutte contre la corruption et les fraudes dans l’administration publique (2008)[18].

6 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

  1. 1,0 1,1 1,2 1,3 et 1,4 Benoît Bréville et Renaud Lambert, « Sermonner le monde ou le changer », Le Monde diplomatique,‎ septembre 2019
  2. Marchés de travaux hors de l'Union européenne, Bernard-Michel BLOCH
  3. Projet de loi relatif à la lutte contre la corruption, Senat.fr.
  4. « Corruption Perceptions Index : Results », sur transparency.org
  5. Abigail Barr et Danila Serra, Culture and corruption, Economic and Social Research Council.
  6. Pour un cas relaté à Madagascar, voir Gouvernance et corruption … vous avez bien dit « Fahamarinana» et « Fihavanana » ?, Patrick Rakatomalala, 2009.
  7. 7,0 et 7,1 Jonas Lindberg, Camilla Orjuela, « Corruption in the aftermath of war: an introduction », Third World Quarterly, 2014, p. 723-736
  8. 8,0 et 8,1 Philippe Le Billon, « La corruption liée aux reconstructions d'après-guerre : Juguler la corruption au lendemain des conflits », Rapport mondial sur la corruption, Economica, 2005, p. 87-105
  9. « A Candidate for Relegation? Corruption, Governance Approaches and the (Re)construction of Post-war States - GSDRC », 6 janvier 2011
  10. Banque mondiale, Le coût de la corruption, .
  11. Parlement européen, « Criminalité organisée et corruption, rapport sur le coût de la non Europe. »,
  12. Transparency International, Rapport mondial sur la corruption 2004, KARTHALA Editions, 2004, p. 15.
  13. Nathalie Kaleski, Les entreprises face au défi de l'anticorruption, Compliances, juin-août 2019.
  14. Platon, Les Lois, Livre XII, 955 c-d.
  15. δῶρον sur le Bailly
  16. Louis Gernet, introduction aux Lois de Platon, édition Les Belles Lettres, 1951, p. CCI.
  17. Eric Alt, « Impunité : seulement 0,025 % de condamnations pour corruption », Le Monde diplomatique,‎ 1er avril 2010
  18. Challenges, L'OCDE s'inquiète de la corruption en Italie, 22.09.2008