Corporatisme (intérêts particuliers)

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Les notaires sont un exemple de ces professions réglementées vivant dans un esprit petit-bourgeois corporatiste.

Le corporatisme désigne la défense des intérêts particuliers d'un groupe, parfois au détriment de l'intérêt général. C'est une tendance que l'on retrouve dans beaucoup d'organisations et de contextes historiques différents. C'est de ce sens-là de corporatisme que parle cette page.

Le corporatisme désigne aussi une idéologie et des pratiques visant à rassembler les ouvriers et les patrons dans un tout harmonieux ; cette idéologie, qui s'oppose à la lutte de classe, a été développées par le catholicisme social au 19e siècle, et les régimes fascistes s'en sont largement inspirés.

1 Tendances corporatistes[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Corporations[modifier | modifier le wikicode]

En un sens, les corporations de métier de l'Ancien régime faisaient preuve de corporatisme.Il pouvait y avoir des « guerres interminables entre les boulangers et les pâtissiers se disputant le droit de faire des gâteaux, entre les cordonniers et les fabricants de pantoufles voulant les uns et les autres faire des galoches ».[1]

Toutefois cette tendance est toujours relative, et doit être comparée à l'attitude des autres classes de l'époque.

« Les compagnons étaient insensiblement arrivés à reconnaître que les travailleurs se heurtent partout aux mêmes adversaires, ont partout les mêmes intérêts. Ils ont créé des organisations nationales, s’étendant à tout le pays, à une époque où la bourgeoisie ne voyait pas plus loin que sa petite ville ou son petit État. »[2]

A une époque où les États-nations étaient moins établis, et le nationalisme moins développé, le corporatisme de métier pouvait être relativement internationaliste :

« Nous trouvons déjà chez les compagnons même des commencements d’organi­sations internationales. Ils furent capables de dépasser les frontières nationales. Mais il est une limite qu’ils n’ont jamais pu franchir : c’est le métier, la profession. Le chapelier ou le chaudronnier allemand pouvait, dans ses voyages, trouver l’hospitalité chez ses collègues suédois ou suisses. Mais les cordonniers, les menuisiers de son propre pays restaient pour lui des étrangers. »[2]

Les révolutionnaires bourgeois, par exemple en 1789, ont fortement critiqué le corporatisme au nom d'une conception unitaire de la Nation, dans laquelle il ne devrait plus y avoir de corps intermédiaires entre le peuple et ses représentants (l'Assemblée).

1.2 Mouvement ouvrier et syndical[modifier | modifier le wikicode]

Dans le mouvement ouvrier, le terme de corporatisme est utilisé pour caractériser et dénoncer les tendances au repli sur les intérêts de certains corps de métiers au détriment de l'intérêt de la classe travailleuse dans son ensemble.[3]

« L’esprit corporatif se fait également jour d’un autre côté ; c’est la tendance à se constituer en caste fermée, à poursuivre uniquement des intérêts professionnels étroits, sans égard pour les intérêts généraux de la classe ouvrière. Dans certaines circonstances, cette disposition peut amener des syndicats composés de travailleurs syndiqués non seulement à négliger tous les devoirs de solidarité avec la classe ouvrière tout entière, mais encore à chercher à obtenir des avantages au détriment des autres travailleurs, en limitant par exemple le nombre des apprentis formés dans la profession. On diminue ainsi, il est vrai, l’offre de forces de travail dans une profession déterminée, mais ce n’est qu’au détriment des travailleurs des autres branches, qui n’ont pas la force nécessaire pour réaliser de semblables restrictions, si bien que des forces de travail de plus en plus nombreuses s’adressent à ces métiers. »[2]

Kautsky citait comme tragique exemple :

« Nous ne rappellerons que l’attitude bien connue des mineurs du Northumberland et du Durham, qui sont en opposition avec la masse de leurs camarades, au sujet de la journée normale de huit heures, parce qu’ils ont obtenu la journée de sept heures, et qu’ils trouvent avantageux que les enfants employés à côté d’eux à pousser les wagonnets travaillent dix heures. »[1]

Beatrice et Sidney Webb ont étudié des exemples de luttes d'ouvriers de différentes métiers entre eux, y compris par la grève pour affaiblir d'autres syndicats.[4]

Les couches ayant des positions privilégiées par rapport à la moyenne des travailleur·ses (on parle fois d'une « aristocratie ouvrière ») sont plus susceptibles de verser dans le corporatisme syndical.

2 Notes[modifier | modifier le wikicode]

  1. 1,0 et 1,1 Karl Kautsky, Politique et Syndicats, 1900
  2. 2,0 2,1 et 2,2 Karl Kautsky, Le programme socialiste. V. La Lutte de classe, 1892
  3. Michel Husson, Syndicalisme mexicain : la lente sortie du corporatisme, Solidaires International n°2, février 2007
  4. Beatrice Potter Webb, Sidney Webb, Industrial Democracy, 1897