Campisme

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Illustration d'un article dénonçant le campisme[1]. La formule « les ennemis de mes ennemis sont mes amis » (tirée d'un ancien traité indien), est souvent utilisée pour décrire la logique simpliste des campistes.

On parle de campisme dans le mouvement communiste pour désigner la tendance à réduire une situation politique à l'affrontement entre deux camps impérialistes, et souvent à s'aligner sur l'un de ces deux camps.

1 Problématiques liées[modifier | modifier le wikicode]

Les débats autour du campisme proviennent de la question de savoir si, lors d'un affrontement entre deux puissances, l'un des camps en présence est progressiste par rapport à l'autre.

1.1 États ouvriers[modifier | modifier le wikicode]

Par exemple, depuis la dégénérescence bureaucratique de l'URSS, ni le bloc de l'Est ni le bloc de l'Ouest ne représentaient les intérêts de la classe travailleuse. Mais pour Trotski et différents courants à sa suite, l'URSS est restée un État ouvrier dégénéré, ce qui signifie que malgré sa tyrannie, la bureaucratie continue de défendre objectivement l'économie planifiée, qui représenterait un progrès par rapport à l'économie de marché. Par conséquent, il en découlait une politique de "défense de l'URSS" face aux attaques des pays capitalistes.

1.2 Pays impérialistes et dominés[modifier | modifier le wikicode]

Pour les communistes, il a toujours été un principe clair qu'un pays dominé par l'impérialisme doit être défendu face aux agressions militaires, et ce, quel que soit la politique de la classe dirigeante de ce pays dominé. Cela n'empêche évidemment pas que si la classe exploitée se soulève contre ses exploiteurs, notre soutien doit lui revenir avant tout.

Mais des difficultés apparaissent lorsque les deux luttes sont entrecroisées, lorsque la lutte de classe est superposée à une lutte nationale.

2 Exemples[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Première guerre mondiale[modifier | modifier le wikicode]

Les dirigeants de l'Entente avaient intérêt à soutenir les troubles politiques dans le camp des Empires centraux, et vice-versa. Les chancelleries et autres services d'espionnage ont eu recours à diverses manœuvres dans ce sens. Mais cela ne veut absolument pas dire que les luttes sociales et politiques sont créées par les impérialistes, elles ne sont qu'un facteur secondaire. Mais les forces réactionnaires ont largement mis l'accent sur ce facteur, s'appuyant sur les sentiments nationalistes pour calomnier les opposants et en particulier les socialistes.

2.2 Cuba[modifier | modifier le wikicode]

La révolution de 1959 dirigée par Castro à Cuba, qui avait des velléités socialisantes, a très vite fait l'objet d'attaques de l'impérialisme états-unien tout proche (un des facteurs qui l'a poussé à devenir allié de l'URSS).

Au nom de la lutte contre anti-impérialiste, une grande partie de la gauche dans le monde s'est faite le porte-voix du castrisme et a nié ou minimisé les critiques du régime. Même parmi la gauche non stalinienne, il y avait de vifs débats sur Cuba. Par exemple, lorsqu'en 1965 un universitaire écrit un article analysant la « stalinisation de Castro »[2], la revue New Politics engage un débat contradictoire sur la question.[3][4]

2.3 Vietnam[modifier | modifier le wikicode]

Pendant la longue lutte du peuple vietnamien pour son indépendance (guerre d'Indochine contre la France, puis guerre du Vietnam contre les États-Unis), qui s'est combinée à une guerre civile prolongée, de nombreuses violences ont été commises dans les deux camps.

En particulier, le camp vietnamien a rapidement été dominé par les staliniens (notamment grâce à l'aide soviétique), et cela a conduit à de la répression brutale des opposants (dont le massacre des trotskistes vietnamiens, à l'origine très implantés). Parmi les soutiens anti-impérialistes à la cause vietnamienne dans le monde (y compris parmi les trotskistes), il y a eu une tendance à apporter un soutien acritique à Ho Chi Minh.[5]

2.4 Syrie[modifier | modifier le wikicode]

Depuis le début de la guerre civile en Syrie en 2011, une polémique traverse la gauche et y compris les communistes révolutionnaires. Pour certains, le régime de Bachar Al Assad est anti-impérialiste et serait victime d'une tentative de renversement par djihadistes interposés. Il faudrait donc se placer dans le camp militaire du régime syrien. Pour d'autres, l'élément déclencheur est une révolte populaire et démocratique contre le régime, et ces forces progressistes seraient encore un secteur significatif du camp rebelle - malgré la présence de djihadistes. Dans cette deuxième optique, c'est le camp rebelle qu'il faut défendre.

2.5 Ukraine[modifier | modifier le wikicode]

Les événements de 2013-2014 en Ukraine sont très marqués par l'affrontement entre États-Unis / Union Européenne et Russie. Dans ces conditions, la question de l'attitude à avoir vis-à-vis de la mobilisation Euromaïdan (pro-UE) et des mobilisations à l'Est (pro-Russie) est complexe. La question de la nature impérialiste ou non de la Russie entre en ligne de compte.

Depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie en 2022, ce sujet est encore plus brûlant.[6]

3 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

Articles sur le campisme :

  1. Blog « Socialisme libertaire », Campismes, 17 Janvier 2017
  2. Irving Louis Horowitz, The Stalinization of Fidel Castro, New Politics IV, n°4 (Fall 1965):61-69
  3. C. Ian Lumsden, On Socialists and Stalinists, New Politics V, n°1 (Winter 1966): 20-26.
  4. Irving Louis Horowitz, Castrologists and Apologists, New Politics V, n°1 (Winter 1966): 27-34.
  5. Voir le débat dans la revue New Politics, Vol. IV, No. 2 (Spring 1965)
  6. Marc Semo, Le « campisme », ou choisir son camp dans un monde divisé, Le Monde, 22 mai 2024