Rareté

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Pénurie dans un supermarché pendant la pandémie de Covid

La rareté est une caractéristique fondamentale en économie.

Elle dépend de caractéristiques naturelles mais aussi sociales.

Toutes les théories économiques donnent une importance à la rareté, mais la font intervenir de façons différentes.

1 Rareté et économie[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Entre naturel et social[modifier | modifier le wikicode]

La rareté de tel ou tel bien dépend de caractéristiques :

  • naturelles : présence plus ou moins grande de tel ou tel métal précieux sur Terre...) ;
  • physiques : si un bien A peut être transformé en B ou en C, mais que la transformation de A en B demande plus d'énergie, le bien B va avoir tendance à être plus rare ;
  • sociales : une société peut décider de mettre plus d'effort pour produire le bien B que le bien C, malgré la difficulté naturelle.

1.2 Base de l'échange[modifier | modifier le wikicode]

Pour certains, « l'économie est la lutte contre la rareté ».[1] Dans tous les cas, l'économie étudie la façon dont nous allouons nos différentes ressources, donc il est évident que la plus ou moins grande rareté des ressources a un impact fondamental.

Dans un passage des Grundrisse[2], Marx fait ce rappel élémentaire :

« En dehors de l'offre et de la demande, la rareté est un élément de la valeur. [...] Les cailloux n'ont pas de valeur relativement parlant, parce qu'on les trouve sans qu'il y ait production (même si celle-ci ne consiste qu'en une recherche). Pour qu'un objet soit soumis à l'échange et possède une valeur, il ne doit pas être trouvé par le premier venu qui pourrait l'obtenir sans passer par l'échange. Il ne doit pas être élémentaire au point d'être un bien commun. »

1.3 Rareté et valeur[modifier | modifier le wikicode]

1.3.1 Rareté et utilité[modifier | modifier le wikicode]

Le paradoxe de l'eau et du diamant est une image classique qui permet de réfléchir au lien entre rareté, utilité et valeur.

Un diamant a un prix plus élevé que l'eau, alors que l'eau est vitale, et le diamant superflu. L'école classique en économie en a d'abord déduit qu'il fallait distinguer valeur d'usage (fondée sur l'utilité) et valeur d'échange (qui, dans le cas d'un bien reproductible, est déterminée objectivement, par le temps de travail nécessaire).

Depuis le tournant marginaliste de la fin du 19e siècle, l'école dominante en économie considère que la valeur dépend de l'utilité marginale, c'est-à-dire d'utilité de la dernière unité du bien. Ainsi, la valeur d'un verre d'eau pour quelqu'un qui mourrait de soif en plein désert serait énorme, mais la valeur d'un deuxième, puis d'un troisième verre d'eau irait en décroissant. Comme l'eau est dans la plupart des endroits relativement abondante, son utilité marginale et donc sa valeur est faible, contrairement à celle du diamant. Les marginalistes ne font donc pas de distinction entre valeur d'usage et valeur d'échange, ni entre bien reproductible et bien unique. La rareté est centrale dans leur analyse.

1.3.2 Offre et demande[modifier | modifier le wikicode]

C'est aussi la rareté relative de telle ou telle marchandise qui peut faire fluctuer son prix de marché, selon la loi de l'offre et de la demande. Cependant, ce n'est qu'un aspect superficiel et "instantané" de la valeur d'échange, car celle-ci est déterminée en dernière analyse par le temps de travail socialement nécessaire dans la production.

2 Rareté, abondance et communisme[modifier | modifier le wikicode]

Pour qu'un bien commun soit marchandisé, il faut organiser sa rareté. Par exemple lors de la "guerre de l'eau" de Cochabamba (Bolivie) en 2000, la distribution d'eau ayant été privatisée, l'entreprise gestionnaire a tenté d'interdire les puits des particuliers.

Même si énormément de paramètres entrent en jeu, plus les ressources vitales sont rares, plus les rivalités entre humain·es sont favorisées. C'est ce qui faisait dire à Marx :

« Le développement des forces productives est une condition pratique préalable absolument indispensable, car, sans lui, c’est la pénurie qui deviendrait générale, et, avec le besoin, c’est aussi la lutte pour le nécessaire qui recommencerait et l’on retomberait fatalement dans la même vieille gadoue. »[3]

C'est pourquoi les socialistes matérialistes rappellent que si l'on vise une société communiste au sens strict, c'est-à-dire une société dans laquelle il n'y a plus aucune nécessité de comptabiliser le temps de travail et de restreindre l'accès aux biens (« prise au tas »)[4], cela ne peut être qu'une société d'abondance (les anglophones utilisent le terme post scarcity society, « post-rareté »).

Évidemment, la nécessité de limiter l'impact écologique de l'humanité vient questionner la possibilité d'une société d'abondance. Il est possible d'imaginer une société dans laquelle un contrôle de l'accès n'existerait que pour certains bien rares ou au fort impact environnemental. Dans tous les cas, une société socialiste reste possible.

3 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

  1. « Aux origines de la rareté », sur France Culture, (consulté le 24 août 2022).
  2. Manuscrits de 1857-1858 ("Grundrisse"), Chapitre de l'argent, Karl Marx
  3. K. Marx - F. Engels, L'idéologie allemande, 1845
  4. Ce qui est souvent résumé par l'adage « De chacun selon ses moyens, à chacun selon ses besoins »