Marxien
Ceux qui se réclament marxiens sont majoritairement des penseurs qui se réclament de la pensée de Karl Marx tout en rejetant les implications politiques du marxisme. Ils tendent à faire du marxisme une simple philosophie, voire un amusement mondain, plutôt qu'une politique engagée.
1 Démarche des "marxiens"[modifier | modifier le wikicode]
L'idée générale serait que « se dégager de plus d’un siècle d’interprétations marxistes est une première condition pour relire l’œuvre marxienne » (Anselm Jappe). L'hostilité vis-à-vis du marxisme est claire, comme exprimée par Michel Henry : « le marxisme est l’ensemble des contresens qui ont été faits sur Marx ».
Les marxiens se contentent souvent d'affirmer que les "marxistes" n'ont fait que déformer la pensée profonde de l'original... ou alors la répéter comme un dogme sans jamais la "faire vivre" comme une méthode.
Le dogmatisme et le simplisme existent bien entendu, pour plusieurs raisons :
- inévitable vulgarisation au sein de partis politiques non constitués d'intellectuels, a fortiori dans des partis de masse ;
- emprise du stalinisme sur la pensée marxiste officielle pendant de nombreuses décennies ;
- méfiance compréhensible envers les avancées (en sociologie, histoire, économie...) qui sont réalisées par des chercheurs empreints d'idéologie dominante.
Mais les différentes nuances "marxiennes" s'égarent souvent dans des chemins verbeux et stériles. S'il peut y avoir des apports par des chercheurs marxiens, il y a souvent peu en commun entre les "différents Marx" auxquels les marxiens "reviennent".
2 Historique[modifier | modifier le wikicode]
A l'origine, les théoriciens marxistes étaient hors des universités, des positions reconnues et stables. Chez Marx, l’économie politique constituait la colonne vertébrale sur laquelle s’articulaient philosophie, sociologie et politique.
A l'inverse, dans le marxisme qui domine après la Seconde guerre mondiale, la philosophie acquiert une place prédominante. Plusieurs explications peuvent être avancées :
- les conséquences des défaites du mouvement ouvrier depuis la Révolution russe (écrasement des montées révolutionnaires en Europe centrale entre 1918 et 1923, défaites en France et en Espagne dans les années trente, incapacité des forces sociales radicales ayant mené la lutte contre le fascisme au cours de la Seconde Guerre mondiale d’affirmer une hégémonie politique durable) ;
- la large majorité des théoriciens marxistes disposaient après la Seconde guerre mondiale d’une position académique ;
- peu parmi eux étaient directement engagés dans la lutte sociale et politique ;
- cette séparation entre le marxisme et les conflits socio-politiques se serait reflétée, selon Perry Anderson, dans le changement de centre d’intérêt des élaborations marxistes.
Dans un contexte où le marxisme soviétique était hégémonique, beaucoup d’auteurs ont voulu se démarquer de la doctrine officielle des partis communistes et ont cherché une version plus subtile du marxisme dans les écrits du jeune Marx, ce qui les a conduits à se centrer sur les problèmes de méthode. La théorie de la valeur et de l’exploitation, les lois du développement du capitalisme ainsi que les concepts fondamentaux de l’économie marxiste se sont complètement dogmatises. Le point de départ de l’analyse du capitalisme n’était plus la production matérielle, conditionnant la distribution et la demande, mais des problèmes tels que le sujet, la structure économique, la relation avec la superstructure, la formation de la conscience de classe, etc. L’économie politique de Marx s’est trouvée dès lors sclérosée et l’espace fut occupé par des élaborations philosophiques - ayant certes enrichi l’arbre touffu du marxisme et marqué quelques avancées dans certains domaines - qui aboutissaient à éviter, de fait, l’analyse du cœur du système, pour le combattre.
3 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]
Jésus Albarracin, Pedro Montes, Le troisième âge du capitalisme, 1997