David Korner

De Wikirouge
Aller à la navigation Aller à la recherche
Photo de Barta dans les années qui suivent la Seconde guerre mondiale

David Korner, dit Barta[Note 1], né le à Buhuși et mort le , est un militant trotskiste franco-roumain.

Avec sa première compagne Claire Faget, il est le fondateur du groupe Barta en 1939. Il en assure la direction politique ainsi que la rédaction de son organe, La Lutte de classe, jusqu'à sa dissolution en 1950.

Il est connu comme étant l'une des inspirations politiques de Lutte ouvrière, qui a été fondée en 1956 par plusieurs anciens militants du groupe Barta.

1 Biographie[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Jeunesse et premiers engagements[modifier | modifier le wikicode]

David Korner naît le dans la petite ville de Buhuși en Roumanie. D'origine juive, ses parents sont des petits commerçants[M 1].

À la fin de ses études secondaires, David Korner est actif au sein du Parti communiste roumain à Bucarest[M 1]. Il y milite vraisemblablement entre 1931 et 1933, et en est membre deux ans[M 1],[2]. Cette première activité politique l'amène à être poursuivi par la justice puisqu'il fait partie des communistes et syndicalistes jugés par un tribunal de Bucarest en répression de la grève des cheminots de Grivița de 1933. Il est condamné à une peine de 18 mois de prison[3].

Il se rend à Paris pour la première fois en novembre 1933. C'est sans doute là qu'il acquiert ses convictions trotskistes. Entre ce premier séjour et octobre 1936, son activité politique est partagée entre la France et la Roumanie. En France, il participe notamment à la lutte antifasciste dans le Quartier latin ainsi que dans les 13e, 14e et 15e arrondissements ; en Roumanie, il fonde le Groupe bolchevik-léniniste de Roumanie. Il fait part de l'activité de cette organisation roumaine à Léon Trotski dans deux courriers envoyés en 1936[M 2].

1.2 Militantisme au POI et au PSOP[modifier | modifier le wikicode]

En 1936, la révolution sociale espagnole éclate à la suite de la tentative de coup d'État de Franco. Il décide alors de rejoindre l'Espagne aux côtés de Klara Feigenbaum[Note 2], qui deviendra sa compagne, et de deux autres militants roumains[M 3]. Faisant étape en France en octobre 1936, ils décident d'y rester. Cette décision est prise en raison du climat social tendu en France, où une vague de grèves et d'occupations d'usines vient d'avoir lieu en mai et juin[M 3].

Il devient membre du Parti ouvrier internationaliste (POI), qui vient d'être fondé par des trotskistes exclus de la SFIO. En 1938, il suit les conseils de Trotski aux militants français et rejoint le Parti socialiste ouvrier et paysan (PSOP) de Marceau Pivert[H 1], où il existe une tendance défendant des positions internationalistes[Note 3], cet entrisme devant permettre aux trotskistes de s'implanter et de tisser des liens dans la classe ouvrière[M 4].

Avec la direction de la fraction trotskiste du PSOP, il participe à la rédaction du journal La Voie de Lénine où il signe deux articles[M 4]. Aux côtés de Yvan Craipeau, Jean Rous et Daniel Guérin, il crée le « Comité pour la 4e Internationale » qui diffusera un autre journal confidentiel, appelé L'Étincelle[4].

À la suite de la signature du Pacte germano-soviétique, puis de l'entrée en guerre de la France à la suite de l'invasion de la Pologne, les partis politiques communistes sont officiellement interdits (26 septembre 1939). Barta rompt alors avec les Comités pour la Quatrième Internationale.) et doivent continuer dans la clandestinité. David Korner, qui était déjà indisposé par l’état d’esprit « petit-bourgeois » qui régnait alors dans la 4e Internationale, va quitter le PSOP et le POI à la suite d'un désaccord personnel lors d'une réunion du parti[M 5],[H 2].

1.3 Groupe Barta[modifier | modifier le wikicode]

🔍 Voir : Groupe Barta.

Il crée avec sa compagne, Claire Faget alias Irène, le bulletin L'Ouvrier qui connaîtra trois numéros[4], dont deux édités le [5]. Ce journal a une faible diffusion et circule, grâce au réseau de Irène, au sein d'un petit groupe composé d'anciens jeunes de l'organisation de jeunesse du PSOP[6],[M 5].

Irène est ensuite arrêtée en 1940 et emprisonnée à la prison de la Petite Roquette en raison de son militantisme[M 5]. Libérée au moment de l'exode de mai-juin 1940, ils quittent Paris et font étape dans l'Isère avant de revenir dans la capitale[M 5]. David Korner, au gré de ses rencontres, va fonder un petit groupe trotskiste qui sera connu sous le nom de « groupe Barta » ou « groupe Lutte de classe » en rapport au nom du journal qu'il rédige[H 3]. Par l'intermédiaire de cette revue ou de manifestes, comme La Lutte contre la deuxième Guerre impérialiste mondiale, se démarque la singularité de sa politique, en rupture avec les autres trotskistes français du POI[H 4]. Il y exprime un refus catégorique de toute union sacrée, défend l'intention d’établir « un contact réel et étendu avec la classe ouvrière » et fait part d'une volonté de se consacrer à la propagande contre la « guerre impérialiste mondiale »[H 4],[7].

Le 7 novembre 1942, le groupe Barta se baptise « Groupe communiste » dans ses publications puis prend le nom, en 1944, de « Union communiste ».

Après la Libération, alors que le PCI se flatte de son "titre" de premier résistant, Barta refuse de réclamer ainsi aux autorités la légalisation de la Lutte de Classe, dont l’édition restera, pour une courte période, clandestine.

Après guerre, le groupe Barta, sous la direction politique de David Korner, joue un rôle important dans les grèves de 1947 chez Renault. Pour le PCF c’est l’époque du "produire d’abord, revendiquer ensuite". Dans la grève les ouvriers s’affrontent directement au PCF et à la CGT. Le succès de la grève entraîne la sortie du PCF du gouvernement. France-Dimanche titre : « Un petit ouvrier de 25 ans a forcé Auriol à  démissionner Maurice Thorez ».

Mais, après le succès de la grève Renault, l’Union Communiste, qui n’a jamais compté plus d’une vingtaine de membres, est dépassée par ses tâches. Une crise interne se déclare, l’organisation se scinde en deux morceaux fin 1949 et disparaît.[H 5]

1.4 Après 1950[modifier | modifier le wikicode]

Il tente en de relancer une activité militante en raison de la guerre de Corée, sans succès[M 6].

Il refuse ensuite de s’impliquer lorsque Robert Barcia le contacte pour reconstruire une organisation révolutionnaire. C'est alors sans lui, mais en s’appropriant sa démarche, son exemple et en se réclamant de ses textes, que Pierre Bois, Robert Barcia et quelques autres anciens du groupe Barta créent en 1956 l'organisation Voix ouvrière, qui devient Lutte ouvrière en 1968.

David Korner s'éloigne ensuite du militantisme ainsi que de la politique et garde ses distances avec Voix ouvrière et Lutte ouvrière. Il explique ne pas s'y reconnaître dans un texte paru en 1972, qu'il complète en 1975, intitulé Mise au point concernant l’histoire du mouvement trotskiste[M 6],[8].

2 Notes et références[modifier | modifier le wikicode]

2.1 Notes[modifier | modifier le wikicode]

  1. En plus de Barta, David Korner a utilisé les pseudonymes et identités suivantes : Albert, Mathieu, A. Mathieu et M. Gauthier[1].
  2. Klara Feigenbaum est le nom de naissance de Claire Faget, qui est par la suite surtout connue sous les pseudonymes de Louise et de Irène.
  3. Cette tendance internationaliste du Parti socialiste ouvrier et paysan est celle de Daniel Guérin. Par ailleurs, l'ensemble du PSOP était internationaliste.

2.2 Références[modifier | modifier le wikicode]

Références extraites des ouvrages bibliographiques

  1. Barcia 2003, p.83
  2. Barcia 2003, p.84
  3. Barcia 2003, p.81
  4. 4,0 et 4,1 Barcia 2003, p.84-85
  5. Barcia 2003, p.86
  1. 1,0 1,1 et 1,2 Moyon 1993, p.8
  2. Moyon 1993, p.9-10
  3. 3,0 et 3,1 Moyon 1993, p.10
  4. 4,0 et 4,1 Moyon 1993, p.11
  5. 5,0 5,1 5,2 et 5,3 Moyon 1993, p.12
  6. 6,0 et 6,1 Moyon 1993, p.40-41

Autres références

  1. « KORNER David. Pseudonymes : BARTA, ALBERT, A. MATHIEU », sur Le Maitron (consulté le 27 avril 2022)
  2. (en) « How the Bolshevik-Leninist Group of Romania was Founded », cf. Introduction, sur marxists.org (consulté le 10 novembre 2022)
  3. (ro) Stelian Tănase, « Dej - omul resentimentului », Magazin istoric, vol. 36, no 1,‎ , p. 18-22 (lire en ligne)
  4. 4,0 et 4,1 Christophe Nick, Les Trotskistes, Fayard, , p. 296-297
  5. Pierre Bois, Une vie de militant ouvrier communiste révolutionnaire, Les Bons caractères, , p. 9
  6. « FEIGENBAUM Claire (ou FEYGENBAUM). Pseudonymes : Louise, FAGET Claire », sur Le Maitron (consulté le 10 novembre 2022)
  7. Barta, La lutte contre la deuxième guerre Impérialiste mondiale, (lire en ligne)
  8. Barta, « Mise au point », sur marxists.org (consulté le 10 novembre 2022)

3 Voir aussi[modifier | modifier le wikicode]

  • Robert Barcia, La Véritable histoire de Lutte ouvrière : Entretiens avec Christophe Bourseiller, Paris, Denoël, , 326 p.
  • Richard Moyon, « Barta », Cahiers Léon Trotsky, Institut Léon Trotsky, no 49,‎ , p. 8-41 (lire en ligne)