La guerre civile en France
La Guerre civile en France est un pamphlet écrit par Karl Marx au nom du Conseil général de l'Association internationale des travailleurs.
Il s'agit d'une défense vigoureuse de la Commune de Paris qui vient tout juste de succomber sous la répression. Daté du 30 mai 1871, le texte est largement diffusé en 1871 et 1872, traduit dans de nombreuses langues et publié à travers l'Europe et les États-Unis.
1 Histoire[modifier | modifier le wikicode]
1.1 L'écriture du pamphlet[modifier | modifier le wikicode]
Entre la mi-avril et la fin de mai 1871, Karl Marx alors résident à Londres réunit et compile des coupures de journaux anglais, français et allemand sur la progression de la guerre civile, qui oppose les Communards aux forces versaillaises. Marx a accès à des journaux français soutenus par la Commune, ainsi qu'à divers périodiques proches de la bourgeoisie publiés à Londres en anglais et en français, et aux interprétations personnelles des événements communiquées par plusieurs personnalités de premier plan de la Commune et impliqués tels que Paul Lafargue et Piotr Lavrov.
À l'origine Marx a l'intention d'écrire une adresse aux travailleurs de Paris et fait cette proposition à la réunion du Conseil général de l'Association internationale des travailleurs le 28 mars 1871 - une proposition approuvée à l'unanimité. L'évolution des évènements en France le conduisent à se rendre à l'avis que le document doit plutôt être adressé à la classe ouvrière mondiale, et lors de la rencontre du 18 avril du Conseil général, il fait circuler cette proposition, soulignant sa volonté d'écrire sur la "tendance générale de la lutte." Cette proposition est approuvée et, à partir de cette date Marx commence à rédiger ce document2. La partie principale du texte semble avoir été rédigé entre 6 et le 30 mai, 1871. Marx écrit le document original en anglais.
1.2 Publication[modifier | modifier le wikicode]
La première édition du document, une mince brochure de 35 pages, est d'abord publiée à Londres aux alentours du 13 juin 1871, avec comme titre The Civil War in France: Address of the General Council of the International Working-Men's Association (La Guerre civile en France: Adresse du Conseil général de l'Association Internationale des Travailleurs). Tirée à seulement mille exemplaires cette édition est rapidement épuisée. Une deuxième édition, moins chère et tirée à 2 000 exemplaires, lui fait suite, puis une troisième édition, toujours en anglais et contenant un certain nombre de corrections, paraît plus tard la même année. Traduite en français, allemand, russe, italien, espagnol, néerlandais, flamand, croate, danois, polonais, ce texte est publié à la fois dans des journaux et sous forme de brochure dans divers pays en 1871-1872. La traduction en allemand est rédigée par l'ami de longue date de Marx, Friedrich Engels, et la publication dans cette langue a d'abord lieu en feuilleton dans le journal Der Volkstaat en juin-juillet 1871, puis dans Der Vorbote en août-octobre 18713. Une édition de la brochure est également publiée séparément par Volkstaat à Leipzig la même année. Rééditée lors du cinquième anniversaire de la chute de la Commune de Paris, Engels apporte des corrections mineures à sa traduction. Une deuxième édition paraît à Leipzig, publiée cette fois par la Genossenschaftsbuchdrukerei.
En 1891, lors du 20e anniversaire de la Commune de Paris, Engels propose une nouvelle édition de l'ouvrage écrivant une introduction où il souligne l'importance historique de l'expérience de la Commune de Paris, et sa généralisation théorique par Marx dans La Guerre civile en France, fournissant des informations supplémentaires sur les activités des Communards, notamment sur les blanquistes ou les proudhoniens. Il y intègre aussi un matériel antérieur que Marx avait rédigé pour le Mouvement international, produisant des éléments historiques supplémentaires à la Commune à partir des comptes rendus sur la guerre franco-prussienne.
2 Conséquences théoriques[modifier | modifier le wikicode]
2.1 Evolution de Marx sur l'État[modifier | modifier le wikicode]
L'histoire de la Commune de Paris permet à Marx de réévaluer l'importance de certains de ses écrits antérieurs. Dans la préface de 1872 au Manifeste communiste, il écrivait qu'«il ne faut pas attribuer trop d'importance aux mesures révolutionnaires énumérées à la fin du chapitre II. Ce passage serait, à bien des égards, rédigé tout autrement aujourd'hui.». C'est ce passage antérieur qui a cherché à montrer le processus de prise du pouvoir étatique par les travailleurs. À la suite de la publication de La Guerre civile en France : «La Commune, notamment, a démontré que la classe ouvrière ne peut pas se contenter de prendre telle quelle la machine de l'État et de la faire fonctionner pour son propre compte.»
2.2 Léninisme[modifier | modifier le wikicode]
Lénine reprend les conclusions de Marx sur la nécessaire transformation du pouvoir au-delà de sa simple conquête dans le chapitre 3 de l’État et la Révolution (écrit en septembre 1917) citant abondamment la Guerre civile en France. Lénine justifie ainsi la nécessité de briser la machine de l'État bourgeois pour la remplacer par une nouvelle forme, qui constituera l'État ouvrier. Cela représente pour Lénine une rupture avec la conception défendue par les leaders de l'Internationale ouvrière depuis des années. Jusqu'à 1917, Lénine avait plutôt considéré que les théoriciens comme Kautsky étaient révolutionnaires et avaient trahi leurs propres idées en 1914.
Dès son retour en Russie en avril 1917, il avait commencé à reconnaître dans les soviets une forme particulière de pouvoir, « du même type que la Commune de Paris de 1871 ». Il ajoutait : « C'est cette essence qu'ont oubliée et dénaturée MM. les Plékhanov [et] les Kautsky ».[1]
Un théoricien menchévik comme Martov attaquera justement le léninisme sur ce recours qu'il fait à La guerre civile en France.[2]
3 Notes[modifier | modifier le wikicode]
La Guerre civile en France, sur Marxists.org
- ↑ Lénine, Sur la dualité du pouvoir, Pravda n° 28, 9 avril 1917
- ↑ Julius Martov, Le bolchevisme mondial - Décomposition ou conquête de l’État ?, 1923