Socialisme de guilde

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G. D. H. Cole, théoricien du Guild socialism

Le socialisme de guilde (Guild socialism) est un courant socialiste prônant le contrôle ouvrier de l’économie par l’intermédiaire de guildes, principalement influent au Royaume-Uni au début du 20e siècle.

Il a été fortement associé à George D.H. Cole et influencé par les idées de William Morris.

1 Principe[modifier | modifier le wikicode]

A l'époque médiévale, les guildes étaient plus ou moins synonymes de corporations de métiers.

Au 19e siècle, le mouvement ouvrier britannique met sur pied les premiers syndicats de masse (Trade unions), qui héritent beaucoup de leurs méthodes et traditions dans anciennes guildes. Comme partout, les premiers syndicats ont été des syndicats de métiers, regroupant principalement des ouvriers qualifiés (encore proches de l'artisanat, mais dépossédés de leurs moyens de production).

Vers la fin du 19e siècle, les syndicats britanniques, malgré leur puissance, se limitaient très majoritairement à des revendications sur les salaires et les conditions de travail, sans horizon socialiste.

Le socialisme de guilde voulait mettre sur pied des nouvelles « guildes », organisations qui seraient à la fois investies dans la lutte des classes aujourd'hui, et qui auraient vocation à diriger collectivement toute l'économie demain. En cela, le courant se rapproche du syndicalisme révolutionnaire.

Le socialisme de guilde veut combattre l’aliénation des travailleur·ses en leur redonnant le contrôle de l'économie, et tend à se concentrer sur la « démocratie économique » plutôt que la « démocratie politique ». En cela, il rejoint la tendance « anti-politique » présente dans l'anarchisme.

Plusieurs débats internes ont eu lieu sur la forme de propriété collective qu'auraient les moyens de production sous le socialisme de guilde. Il s'agit globalement d'une propriété d'État, mais avec des nuances entre un État plutôt centralisé et un État fédérant les diverses organisations de travailleurs (guildes), de consommateurs, gouvernements locaux, organismes sociaux, etc. G. D. H. Cole prônait une combinaison entre le parlement et une chambre issus des guildes.[1]

On retrouve dans le socialisme de guilde la tension entre l'objectif du contrôle ouvrier (ou autogestion) à l'échelle de chaque entreprise, et du contrôle par les citoyens et consommateurs en général. Certains ont parlé d'une « relation contractuelle implicite avec le public »[2].

Le socialisme de guilde reposait cependant sur un syndicalisme de type « syndicalisme de métier », qui a progressivement été dépassé par le « syndicalisme d'industrie ».

2 Historique[modifier | modifier le wikicode]

Le socialisme de guilde trouve son origine dans le livre du socialiste chrétien Arthur Penty (1875-1937) intitulé The restauration of the Guild system, publié en 1906, dans lequel il s’oppose à la production en usine et prône un retour à une période antérieure de production artisanale, organisée par le biais de guildes[3].

À partir de 1907 le journal The New Age[4], fondé par A.R. Orage (1873-1934) milite en faveur du socialisme de guilde, adaptation du système de Penty, dans le contexte de l’industrie moderne plutôt que de l’ambiance médiévale favorisée par Penty et inspirée du socialisme fédéraliste de William Morris.

En 1914, Samuel George Hobson (1864-1940), contributeur à The New Age, publie National guilds : An Inquiry into the Wage system and the Way Out. Dans cet ouvrage, les guildes sont présentés comme une alternative au contrôle étatique de l’industrie ou à l’activité conventionnelle des syndicats. Dans son système, les guildes, à la différence des syndicats existants, ne limitent pas leurs revendications aux questions des salaires et des conditions de travail, mais cherchent à obtenir le contrôle de l’industrie pour les travailleurs qu’ils représentent.

En 1915, deux jeunes universitaires d’Oxford, G.D.H. Cole (1889-1959) et W. Mellor (1888-1942) fondent la National Guilds League. Leurs travaux vont finaliser le corpus théorique du socialisme de guilde.

Une expérimentation en vraie grandeur aura lieu, entre 1921 et 1922 : la National Building Guild, fondée avec le syndicat du bâtiment. Toutefois, la National Building Guild fit rapidement faillite, car le contexte économique des années 1920, à la suite des restrictions budgétaires, n’était pas favorable aux dépenses publiques. Des guildes éphémères furent également créées dans la fabrication mécanique, l’ameublement (à Manchester), la confection, les docks (Aberdeen), la fabrication de balles de cricket (Norwich), l’imprimerie et l’agriculture[5].

Dans un ouvrage de 1922, Karl Kautsky, qui fut considéré comme le principal théoricien marxiste pendant des années, consacre tout un chapitre à la critique du socialisme de guilde.[6]

3 Bibliographie[modifier | modifier le wikicode]

  • François Bédarida Le socialisme en Grande Bretagne de 1875 à 1914 in Histoire générale du socialisme Tome 2 1974 Presses Universitaires de France
  • Jean Paul Révauger Morris & le Guild Socialism 2005 http://jprevauger.over-blog.com/article-1474543.html#_ftn29
  • G.D.H. Cole, Self Government in Industry Londres : Bell, 1917, Guild Socialism, Londres : Fabian Tract, 1919, Chaos and Order in Industry, Londres, methuen, 1920, Guild Socialism Restated, Londres, Leonard Parsons, 1920.
  • André Philip Guild-socialisme et trade-unionisme 1923, Presses Universitaires de France

4 Références[modifier | modifier le wikicode]

  1. G. D. H. Cole, Self-Government in Industry (1917)
  2. (en) « "Guild Socialism". », Encyclopædia Britannica.,‎
  3. (en) Hirst, Paul, Associative Democracy : New Forms of Economic and Social Governance, Polity Press., , 232 p. (ISBN 978-0-7456-0952-2)
  4. (en) Martin, Wallace ., "The New Age" under Orage, Manchester University Press., , p. 206
  5. J.P. Revauger, article cité
  6. Karl Kautsky, The Labour Revolution, June 1922