Ferdinand Flocon
Ferdinand Flocon est un journaliste et un républicain « socialisant », né à Paris le , mort à Lausanne le 15 mai 1866. Il fut membre du Gouvernement provisoire de la Deuxième république, du 24 février au 11 mai 1848.
1 Biographie[modifier | modifier le wikicode]
Fils d'un employé du télégraphe Chappe, il entra tout d'abord dans l'enseignement et s'engagea de bonne heure dans le mouvement du libéralisme sous la Restauration. Il fit ses premières armes comme journaliste dans le Courrier français, où il avait d'abord commencé comme sténographe. Il publia en 1824 un mordant pamphlet : Dictionnaire de morale jésuitique, un compte-rendu du Salon de cette même année, puis en 1827 un recueil de Ballades allemandes traduites de Bürger et d'autres poètes, et enfin un roman de mœurs Ned Wilmore.
Il fut associé très tôt aux conspirations et aux tentatives contre les Bourbons, et il appartint à plusieurs sociétés secrètes républicaines, telles la Société des Amis du Peuple et celle des carbonari[1].
Il prit une part active à la révolution de juillet, et il collabora quelque temps au Constitutionnel. Sa hardiesse, son initiative, sa résolution et son talent de polémiste attirèrent sur lui l'attention du parti démocratique, et il fut bientôt appelé à la rédaction du journal républicain la Tribune, qui, pendant son existence orageuse et semée d'innombrables procès, fit une guerre acharnée au gouvernement de Louis-Philippe et aux hommes du juste-milieu. En même temps, Flocon participait à toutes les luttes du parti républicain contre la monarchie, et, jusqu'à la fin du règne, il resta, avec Caussidière, Alexandre Martin dit l'ouvrier Albert et d'autres, un des chefs des sociétés secrètes.
En 1843, il entra au journal la Réforme, dont il eut la direction conjointement avec Baune et Grandménil, et dont il devint bientôt le rédacteur en chef. Un peu plus tard, Ledru-Rollin, qui patronnait le journal, fit adjoindre à la direction Godefroy Cavaignac, dont la mort laissa de nouveau Flocon en possession de la rédaction en chef. Le journal la Réforme était alors plus accentué que le National, et il représentait l'extrême gauche et la révolution démocratique. Il publia par exemple des articles de Proudhon, Bakounine, Pecqueur, Engels et Marx. Ce dernier considérait Flocon comme un ami sincère et cordial, « un des hommes les plus honnêtes que j'aie jamais rencontrés ».
À la révolution de février 1848, le nom de Flocon fut inscrit sur une des listes de gouvernement provisoire, ne figurant d'abord qu'en qualité de secrétaire avec Louis Blanc, Albert et Armand Marrast, afin de faire admettre leur présence aux autres membres, tous députés. Cette situation, d'ailleurs, ne dura que quelques jours, avant qu'il soit nommé ministre de l'agriculture et du commerce.
Dans le gouvernement provisoire, il fit partie de la minorité, mais plus proche de Ledru-Rollin (auquel l'unissait une étroite amitié) que de Blanc et Albert.
Flocon délivra, le 10 mars, au « brave et loyal Marx » un sauf-conduit sous forme de lettre[2], lui précisant qu’il était autorisé à rentrer en France d’où les ministres de Louis-Philippe l’avaient expulsé.
C'est à lui qu'on doit une réorganisation des prud'hommes, qui en avaient grand besoin. Il avait aussi un projet pour la création de colonies agricoles en France, mais les évènements ne lui laissèrent pas le temps de le réaliser, non plus que l'enquête qu'il avait commencée pour connaître la vraie situation de l'agriculture nationale.
Nommé représentant du peuple par le département de la Seine en , il siégea alors sur les bancs de la Montagne, mais il se sépara peu à peu de ses amis par quelques-uns de ses votes. En effet il considéra les journées de juin comme une attaque injustifiable contre le peuple souverain. Ces troubles, selon lui, ne pouvaient que bénéficier à un dictateur potentiel comme Louis-Napoléon Bonaparte. En conséquence il se rangea aux côtés de Cavaignac lorsque celui-ci déclara l'état de siège, puis réprima et déporta les insurgés. Pour son ancien ami Marx, c'était l'exemple type du petit-bourgeois trahissant les travailleurs. Flocon se prononça également contre l'amendement Grévy, relatif à la nomination du Président de la République. Son soutien à Cavaignac ne l'empêcha pourtant pas de perdre son ministère peu après ces événements, lors de la formation du nouveau cabinet.
Il continua à siéger à gauche pendant le reste de son mandat de député, réclamant la suppression des impôts indirects, s'opposant à la politique étrangère de Louis-Napoléon Bonaparte, et, les derniers jours, demandant, mais en vain, une amnistie totale pour les insurgés de juin. Non réélu à l'Assemblée législative en , Flocon alla rédiger à Strasbourg une feuille démocratique bilingue, Le Démocrate du Rhin, luttant vaillamment pour les principes auxquels il avait consacrés sa vie. En 1850, il présidait l'Association démocratique des amis de la Constitution[3]. Banni par le Coup d'État du 2 décembre 1851, il abandonna la France, qu'il ne devait jamais revoir.
Exilé à Lausanne, il ressentit les tristesses et les amertumes de l'exil, souffrant de la ruine de ses espérances, du grand naufrage de la liberté, regrettant sans doute aussi son soutien inconditionnel en 1848 à Cavaignac, qui lui avait fait perdre l'appui de ses amis. Il subsista difficilement grâce à quelques travaux littéraires. Ce fut lui, par exemple, qui, en 1858, traduisit en français l'ouvrage de Jacob Moleschott Lehre der Nahrungsmittel für das Volk sous le titre De l'alimentation et du régime. L'amnistie de 1859 ne le ramena pas en France : il était de ceux qui ne voulaient rentrer qu'avec la liberté. Alexandre Glais-Bizoin, le visitant au début de l'année 1866, trouva « au fond d'une chambre d'une simplicité extrême, un vieillard assis dans un vaste fauteuil, la barbe et les cheveux tout blancs. Pauvre Flocon ! Quel ravage l'exil et l'affliction exercent sur un homme de cœur ! »
Il mourut dans la misère à Lausanne le à l'âge de 65 ans.
Son corps a été transféré au cimetière du Père Lachaise (division 53).
2 Œuvres[modifier | modifier le wikicode]
- Dictionnaire de morale jésuitique (1824) ;
- Ballades allemandes traduction d'œuvres de Bürger (1827) ;
- Ned Wilmore, roman de mœurs ;
- De l'alimentation et du régime, traduction de l'ouvrage de Jacob Moleschott Lehre der Nahrungsmittel für das Volk (1858)
3 Notes et références[modifier | modifier le wikicode]
4 Voir aussi[modifier | modifier le wikicode]
4.1 Bibliographie[modifier | modifier le wikicode]
- Angelo De Gubernatis, Dictionnaire international des écrivains du jour, Florence, L. Niccolai, 1891.
- Pierre Larousse, Grand Dictionnaire Universel du 19e siècle.
- « Ferdinand Flocon », dans Adolphe Robert et Gaston Cougny, Dictionnaire des parlementaires français, Edgar Bourloton, 1889-1891 [détail de l’édition]