Travail des enfants

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Jeune vendeuse de beurre de karité à Tafiré en Côte d'Ivoire, 2017

Le travail des enfants est le fait de faire participer des enfants à des tâches productives. Généralement, l'expression renvoie plus particulièrement aux cas où de jeunes enfants sont forcés d'effectuer des travaux pénibles et dangereux, au lieu de pouvoir s'épanouir, jouer, et apprendre.

Le travail des enfants existe depuis longtemps, et dans les sociétés précapitalistes, il était principalement dans la sphère familiale. Le capitalisme a tendance, lorsqu'il est dérégulé et que le rapport de force en faveur du prolétariat est très faible, à pousser de nombreux enfants sur le marché du travail, et à augmenter l'intensité du travail.

Le travail des enfants tend à diminuer, sous la pression des luttes ouvrières, des luttes de certaines forces bourgeoises, du besoin croissant de main d’œuvre éduquée, et du besoin idéologique de renforcer le rôle de la famille.

1 Historique[modifier | modifier le wikicode]

1.1 Sociétés précapitalistes[modifier | modifier le wikicode]

Scène de gaulage d’olives par des adolescents en Grèce antique.

Le travail des enfants existe depuis l’Antiquité : l’enfance était alors une période courte en raison de la faible espérance de vie. Les enfants participent aux tâches domestiques et agricoles. Le cercle familial est le principal « lieu de travail », les enfants participant ainsi à l’économie du ménage. Le plus souvent les garçons apprennent progressivement le métier du père, et les filles sont éduquées à la tenue de la maison.

L’éducation au Moyen Âge n’est guère répandue et reste réservée aux familles nobles ou bourgeoises. Les enfants de paysans sont la plupart du temps mis à contribution au travail agricole. Les filles sont souvent employées dans l’artisanat à domicile, par exemple avec le tissage[1]. Parfois les enfants partent travailler hors du foyer pour répondre à la fois à la demande d’employeurs à la recherche de main-d’œuvre peu coûteuse et au besoin des familles pauvres de subvenir à leurs besoins : les garçons sont affectés aux travaux des champs et les filles travaillent comme servantes.

Des contrats de travail apparaissent sous la forme de « contrats de louage »[2] ou de placement comme apprenti dans les corporations des villes et ce dès 12 ou 13 ans. On trouve ainsi des enfants et adolescents sur les grands chantiers de construction, bénéficiant d’un salaire inférieur à celui d’un adulte quand ils en reçoivent un[3].

Petit marchand de biscuits, 18e s.

Les enfants abandonnés et les orphelins (environ 2 000 abandonnés par an à Paris au début du 18e siècle, 35 000 par an en France vers 1830)[4] sont mis au travail par les institutions qui les recueillent, comme pour des travaux de couture (travaux vendus par la suite), mais aussi placés en apprentissage. Certaines mineures sont prostituées (de force) et des enfants vivent de la mendicité.

À la fin du 18e siècle, l’école reste toujours aussi peu répandue et les enfants sont couramment placés comme valets de ferme à la campagne (dès 9 ou 10 ans) ou comme domestiques en ville. On en rapporte ainsi plus de 120 000 à Londres dans les années 1850[1]. Le travail informel se développe avec les grandes villes et l’on trouve ainsi de jeunes cireurs de chaussures, vendeurs de journaux, porteurs, éboueurs ; on trouve même des enfants dans les théâtres et les cirques à Paris. En l’absence de protection sociale, leur salaire sert de supplément à celui des parents et permet entre autres de subvenir à leurs propres besoins.

Le nombre d’enfants au travail n'était probablement pas moins élevé avant le capitalisme, car nombre d’entre eux étaient auparavant affectés aux travaux des champs ou aux tâches domestiques. En revanche l'industrialisation capitaliste va profondément modifier la nature de ce travail et son intensité.

1.2 Révolution industrielle[modifier | modifier le wikicode]

Enfants dans une mine en 1853

Lors de la révolution industrielle en Angleterre, le travail des enfants a connu un essor sans précédent. Les ouvriers qui se retrouvent en masse prolétarisés dans les usines sont des anciens artisans ou paysans, souvent avec de nombreux enfants. Ces derniers se retrouvent dans les usines à effectuer des tâches subalternes avec les adultes. On trouve ainsi des enfants dans les cotton mills du Nord de l’Angleterre, dans les docks et les ateliers textiles des États-Unis ou dans les filatures françaises[1].

Le travail des enfants, avec celui des femmes, a trois avantages pour les industriels. Il permet de faire pression à la baisse sur les salaires des ouvriers adultes masculins ; il permet de livrer la famille entière au travail ouvrier, ce qui accélère la rupture avec le monde rural traditionnel ; enfin il fournit une main-d’œuvre plus abondante, permettant d’utiliser les machines à plein rendement[5].

La souplesse et la petite taille des enfants leur attribueraient des aptitudes que les adultes n’ont pas. Ils sont employés à des travaux très précis, ils peuvent tirer en rampant les berlines dans les boyaux des mines (hercheur), nettoyer les parties les moins accessibles des machines ou encore rattacher les fils brisés derrière les métiers à tisser[5]. Le travail est très précoce : les enfants de quatre ans sont assez recherchés afin d’être « formés » sur les machines dès qu’ils en ont l’aptitude physique[5].

En Angleterre, les paroisses civiles, qui ont la charge du secours aux enfants déshérités, les vendent aux industriels, par l’intermédiaire de petites annonces dans la presse, lorsqu’elles ne souhaitent plus les secourir ou font face à des surplus d’enfants. Cette traite se fait souvent sans même l’avis des parents[5].

Le travail est non seulement très dur, mais les enquêtes de l’époque témoignent en outre de sévices infligés par des employeurs : les membres trop courts des enfants sont adaptés à la machine par des appareillages, ils sont fouettés lorsque la cadence de production se met à baisser[5].

Ces conditions ont des conséquences sanitaires. Comme les femmes, les enfants travaillant dans le textile sont souvent frappés par la tuberculose, du fait de la poussière et de l’humidité. Ils subissent aussi l’asthme, les allergies diverses. Les enfants souffrent plus particulièrement de scolioses et de rachitisme. D’après une enquête de la British Association de 1878, les garçons de onze et douze ans des milieux ouvriers ont une taille en moyenne inférieure de 12 cm à ceux des milieux bourgeois et aristocratiques allant à l’école[6].

Au cours du 19e siècle, l’importance du travail des enfants varie selon les secteurs et les périodes. Ainsi, si en Angleterre la part des enfants dans la main-d’œuvre de l’industrie cotonnière est de seulement 5 % en 1850, contre 13,3 % en 1834, elle remonte beaucoup à l’occasion des crises économiques (14 % en 1874)[5]. L'historien Howard Zinn précise qu'aux États-Unis en 1880, un enfant de moins de 16 ans sur six travaille (16,7 %)[7].

L’historien E. P. Thompson soutient que l’intensité du travail des enfants s’est considérablement accrue entre 1780 et 1840. Karl Polanyi soulignait en 1944 dans La Grande Transformation que pendant tout le 19e siècle, il était tenu pour un « fait établi » – entre autres calamités induites par la révolution industrielle – « l'authentique tragédie des jeunes enfants que l'on faisait parfois travailler jusqu'à ce qu'ils en meurent dans les mines et dans les usines ». D’après Paul Bairoch, ils commencent à travailler plus jeunes, et les conditions de travail sont aggravées par l’absence des parents dans la mesure où les enfants ne travaillent plus pour leurs parents comme dans les sociétés traditionnelles. La durée du travail s’allonge (parfois à 16 heures par jour dans la première phase de l’industrialisation), pour des tâches monotones et répétitives, et ce pour des salaires dérisoires[8].

La Statistique générale de la France de 1840 recense 130 000 enfants de moins de 13 ans dans les ateliers de plus de dix salariés, 20 % des mineurs de Carmaux sont des enfants en 1850[9] et vers 1840, les enfants forment 12 % des ouvriers de l’industrie. Les accidents dans les usines, les éboulements et les explosions dans les mines causent de nombreux blessés et morts et attirent l’attention du public.

Les premiers rapports émanent de médecins, d’inspecteurs ou d’élus décrivant les accidents et les conditions de travail des enfants. De même, les œuvres de Charles Dickens puis de Victor Hugo, d'Émile Zola ont un certain retentissement ; le travail des enfants est utilisé pour dénoncer l’exploitation de la classe ouvrière. Une partie des industriels réplique que la petite taille des enfants leur permet d’effectuer certaines tâches impossibles aux adultes et que l’emploi d’enfants leur évite de devenir des vagabonds, contribue ainsi à la paix sociale et aide les familles pauvres.

1.3 Luttes contre le travail des enfants[modifier | modifier le wikicode]

Deux filles arborant des slogans « Abolish child slavery » (« Abolissez l’esclavage des enfants »), en anglais et en yiddish, pendant la labor parade à New York le 1er mai 1909.

La revendication de l'interdiction du travail des enfants en dessous d'un certain âge a fait partie des premières luttes du mouvement ouvrier. La question du travail des femmes est alors souvent mêlée à celle du travail des enfants dans les débats, ce qui dénote une vision très paternaliste au sujet des femmes, qu'il faudrait protéger.

La réglementation puis l’abolition du travail des enfants en Europe et en Amérique du Nord prend plus d’un siècle[10].

En Angleterre, le Factory Act de 1833 interdit, dans l’industrie textile, le travail des enfants de moins de 9 ans, et limite le temps de travail journalier en fonction de l’âge (10 heures pour les enfants de 9 à 14 ans, 12 heures pour ceux entre 14 et 18 ans) ; cette loi n’est élargie à l’ensemble des activités qu’en 1853[11]. En France, le docteur Villermé publie son Tableau de l’état physique et moral des ouvriers, tableau horrifiant des conditions de travail des enfants, tandis que le mathématicien Dupin écrit Du travail des enfants qu’emploient les ateliers, les usines et les manufactures en 1840, ce qui mène à la loi du 21 mars 1841 portant l’âge minimum à 8 ans et limitant le travail de nuit. La durée de travail est aussi réglementée et la scolarisation obligatoire jusqu’à 12 ans mais ces mesures n’ont que peu d’effet[12], Louis Villermé dénonçant des industriels qui cachent les enfants lors d’inspections. En 1874, une nouvelle loi limite l’emploi avant 12 ans. Aux États-Unis, certains états industriels comme le Connecticut ou le Massachusetts limitent la durée de travail à dix heures quotidiennes en 1843.

Affiche de 1915 des Industrial Workers of the World (IWW) avec une citation de leur leader William Haywood contre le travail des enfants[13]

À la fin du 19e siècle en Europe, l’âge minimum est encore de 9 ans en Italie, 10 ans au Danemark, 12 ans en Allemagne et aux Pays-Bas mais de 14 ans en Suisse. Le travail de nuit, les dimanches et les jours fériés est prohibé avant 16 ans dans de nombreux pays. L’âge minimum pour la descente dans les mines est en général de un à deux ans plus élevés. La durée de travail est ramenée à 6 heures en Angleterre avant 14 ans, 8 heures en Italie, 12 heures en Belgique[14].

Au Royaume-Uni, ce n'est qu'en 1900 que le travail des enfants de moins de 12 ans est interdit dans les usines.

L'arrivée de la scolarisation obligatoire est le facteur le plus décisif de la baisse du travail des enfants en Europe. L’école entre d’abord en conflit avec l’usine : pour les parents, la scolarité coûte cher tandis qu’avoir un enfant qui travaille améliore l’ordinaire ; pour les industriels, les horaires de l’école concurrencent les heures de travail autorisées. En France, il faut l’imposition de l’école primaire obligatoire de 6 à 13 ans par Jules Ferry en 1880-1881. Sa gratuité permet de changer lentement les mentalités en faisant de l’école la norme, même pour les enfants d’ouvriers qui mettront un certain temps à en comprendre l'intérêt. Les allocations familiales octroyées en fonction de l’assiduité scolaire contribuent encore à cette généralisation, tout en compensant pour les familles pauvres la perte de salaire associée à la fin du travail des enfants[12]. C’est aussi cette mesure qui a permis de réduire significativement (mais pas totalement) le travail domestique et agricole des enfants.

Aux États-Unis, une timide première législation fédérale passe en 1916, mais est annulée en 1918 par la Cour Suprême. Ce n'est qu'en 1938 qu'une loi fédérale interdira le travail des enfants (hors agriculture).

Caricature de The Liberator raillant la décision de la Cour Suprême en 1918


Les autres pays d’Europe et d’Amérique du Nord ont suivi des voies similaires tout en relevant l’âge minimum au cours du 20e siècle pour atteindre généralement 16 ans à la fin de la scolarité obligatoire (en France en 1959).

1.4 Situation actuelle[modifier | modifier le wikicode]

Proportion d’enfants de 5 à 14 ans au travail pour chaque pays, d’après un rapport de la Banque mondiale[15] et des données de l’OIT[16] :
  • Pas de données
  • 0 à 10 % d'enfants au travail
  • 10 à 20 % d'enfants au travail
  • 20 à 30 % d'enfants au travail
  • 30 à 40 % d'enfants au travail
  • Plus de 40 % d'enfants au travail

Dans les pays du centre capitaliste, le travail des enfants est devenu faible depuis la seconde moitié du 20e siècle : l’OIT indique qu’environ 3 % des enfants des pays industrialisés sont « économiquement actifs ». En revanche, dans les pays pauvres, il reste élevé, se rapprochant de la situation de l'Europe de la révolution industrielle.

Selon le niveau d'industrialisation des pays, le travail des enfants y est plus ou moins concentré dans la sphère familiale (et plus invisibilisé), ou dans l'industrie.

Dans les années 1980, certains scandales ont ainsi attiré l’attention du public occidental sur les enfants travaillant dans les ateliers de confection asiatiques (les fameux ateliers de misère ou « sweatshops ») ou sur les enfants des rues survivant de petits travaux. Certaines ONG, tant locales qu’internationales, se sont créées dans le but d’éliminer le travail des enfants. L’OIT a lancé le « Programme focal sur le travail des enfants » en 1992 et des campagnes ont été menées afin de pousser les entreprises européennes et nord-américaines ainsi que les multinationales à ne pas utiliser le travail des enfants. La première estimation globale du nombre d’enfants au travail paraît en 1996 puis est révisée en 2002. Cette estimation a permis de mieux saisir l’ampleur du phénomène ainsi que ses caractéristiques. Toujours en 2002, le 12 juin a été déclaré « journée mondiale contre le travail des enfants ».

En août 2014, la Bolivie autorise le travail des enfants dès l'âge de 10 ans. La loi est annulée en 2018[17].

En République Démocratique du Congo, de nombreux enfants travaillent dans les mines d'or de Kamituga, dans la province du Sud-Kivu[18]. ll a été constaté à plusieurs reprises et dans différents pays en développement que les cigarettiers Philip Morris International et British American Tobacco se fournissent en tabac dans des fermes qui exploitent des enfants[19],[20]. Au Kazakhstan, en 2010, les fermes dans lesquelles se fournit Phillip Morris ont recours à des enfants esclaves[21]. En 2016, l'organisation Human Rights Watch relève que des milliers d'enfants, dont certains ont seulement 8 ans, travaillent dans les plantations d'Indonésie, dans des conditions dangereuses pour eux-mêmes et leur santé (avec par exemple des enfants malades d'avoir manipulé sans aucune protection les feuilles humides, qui peuvent rendre malades, ou des pesticides) ; le tabac en question fait partie de celui qu'achètent certain des gros cigarettiers internationaux[22].

Une constante demeure à travers l'histoire et se poursuit actuellement : les enfants au travail sont issus de familles pauvres, la pauvreté étant une des causes bien établies du travail des enfants[23]. Très souvent, ils font aussi partie d’une classe sociale « basse » comme en Inde où les enfants au travail sont fréquemment des dalits ou d’une caste inférieure ; en Europe de l’Est, ils font souvent partie d’une minorité (comme les Roms) ; en Amérique latine comme en Afrique, les enfants des rues, plus vulnérables, sont davantage au travail. Cette vulnérabilité touche aussi les immigrants pauvres arrivant en Amérique du Nord ou en Europe[24].

Un autre point commun à ces enfants est de quasiment toujours travailler dans des secteurs de faible technologie (on ne trouve virtuellement aucun enfant dans les entreprises à haute technologie), et en particulier dans les secteurs où il y a un important besoin de main-d'œuvre, comme l’agriculture familiale, les grandes plantations ou les ateliers textiles. Dans les manufactures, il y a souvent besoin de main-d’œuvre peu qualifiée mais en grand nombre ; la recherche de main-d’œuvre peu chère conduit alors à utiliser le travail d’enfants[25].

On estimait en 2000 que plus de 210 millions d’enfants de 5 à 14 ans et de 140 millions d'adolescents de 15 à 17 ans exerçaient une activité économique[26] dans le monde ; plus de 8 millions se trouvant dans une des « pires formes de travail des enfants » : enfants soldats, prostitution enfantine, pornographie, travail forcé, trafics et activités illicites.

En 2013, le chiffre avait reculé à 168 millions d'enfants travaillant dans le monde, dont 85 millions dans un travail dangereux.[27]

En 2020, à la faveur de la pandémie, le nombre d'enfants forcés de travailler repart à la hausse[28].

2 Analyse et position de Karl Marx[modifier | modifier le wikicode]

Karl Marx et Friedrich Engels, dans le Manifeste du parti communiste (1847), écrivent parmi les revendications communistes :

« Education publique et gratuite de tous les enfants. Abolition du travail des enfants dans les fabriques tel qu'il est pratiqué aujourd'hui. Combinaison de l'éducation avec la production matérielle, etc. »


Dans le Capital, Marx dénonce l'absence d'accès à l'éducation des enfants de la classe ouvrière, obligés de travailler. Mais il soutient plutôt une forme d'éducation en alternance avec le travail.

« En consultant les maîtres d'école, les inspecteurs de fabrique reconnurent bientôt que les enfants de fabrique qui fréquentent l'école seulement pendant une moitié du jour, apprennent tout autant que les élèves réguliers et souvent même davantage.

Et la raison en est simple. Ceux qui ne sont retenus qu'une demi-journée à l'école sont toujours frais, dispos et ont plus d'aptitude et meilleure volonté pour profiter des leçons. Dans le système mi-travail et mi-école, chacune des deux occupations repose et délasse de l'autre, et l'enfant se trouve mieux que s'il était cloué constamment à l'une d'elles. Un garçon qui est assis sur les bancs depuis le matin de bonne heure, et surtout par un temps chaud, est incapable de rivaliser avec celui qui arrive tout dispos et allègre de son travail.

On trouve de plus amples renseignements sur ce sujet dans le discours de Senior au Congrès sociologique d'Edimbourg en 1853. Il y démontre combien la journée d'école longue, monotone et stérile des enfants des classes supérieures augmente inutilement le travail des maîtres tout en faisant perdre aux enfants leur temps, leur santé et leur énergie, non seulement sans fruit mais à leur absolu préjudice.

Il suffit de consulter les livres de Robert Owen, pour être convaincu que le système de fabrique a le premier fait germer l'éducation de l'avenir, éducation qui unira pour tous les enfants au-dessus d'un certain âge le travail productif avec l'instruction et la gymnastique, et cela non seulement comme méthode d'accroître la production sociale, mais comme la seule et unique méthode de produire des hommes complets. » (...)

« La bourgeoisie, qui en créant pour ses fils les écoles polytechniques, agronomiques, etc., ne faisait pourtant qu'obéir aux tendances intimes de la production moderne, n'a donné aux prolétaires que l'ombre de l'Enseignement professionnel. Mais si la législation de fabrique, première concession arrachée de haute lutte au capital, s'est vue contrainte de combiner l'instruction élémentaire, si misérable qu'elle soit, avec le travail industriel, la conquête inévitable du pouvoir politique par la classe ouvrière va introduire l'enseignement de la technologie, pratique et théorique, dans les écoles du peuple.

Il est hors de doute que de tels ferments de transformation, dont le terme final est la suppression de l'ancienne division du travail, se trouvent en contradiction flagrante avec le mode capitaliste de l'industrie et le milieu économique où il place l'ouvrier. Mais la seule voie réelle, par laquelle un mode de production et l'organisation sociale qui lui correspond, marchent à leur dissolution et à leur métamorphose, est le développement historique de leurs antagonismes immanents. C'est là le secret du mouvement historique que les doctrinaires, optimistes ou socialistes, ne veulent pas comprendre. »[29]

3 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

  1. 1,0 1,1 et 1,2 Bénédicte Manier, Le Travail des enfants dans le monde, La Découverte, Paris, 2003 (ISBN 2-7071-4179-8)
  2. Philippe Ariès, L’Enfant et la vie familiale sous l’Ancien Régime, Seuil, coll. Points Histoire, 1975, 316 p. (ISBN 978-2020042352).
  3. Un apprenti de 14 ans gagne en général le tiers du salaire d’un adulte. Voir Danièle Alexandre-Bidon et Didier Lett, Les Enfants au Moyen Âge, Hachette, 2004 (ISBN 978-2012791565).
  4. Voir l’article Abandon d'enfant sous l'Ancien Régime, source Jean Sandrin, Enfants trouvés, enfants ouvriers, 17e – 19e siècle, Éditions Aubier, 1982 (ISBN 2-7007-0272-7)
  5. 5,0 5,1 5,2 5,3 5,4 et 5,5 Jean-Pierre Rioux, La Révolution industrielle, Nouvelle édition, Points Histoire, 1989 (ISBN 2 02 010871 2), p. 174-175
  6. J.-P. Rioux, op. cit., p. 181-182
  7. Howard Zinn, Une histoire populaire des États-Unis. De 1492 à nos jours, Agone, 2002, p. 309.
  8. Paul Bairoch, Victoires et Déboires, tome I, folio histoire, 2001 (1997), p. 612-618.
  9. Gérard Noiriel, Les Ouvriers dans la société française, Seuil, 2002 (ISBN 978-2020580243)
  10. Bénédicte Manier, op. cit., chap. I « Le travail des enfants dans l’histoire », p. 5-16.
  11. Paul Bairoch, Victoires et Déboires, Tome I, folio histoire, 2001 (1997), p. 616
  12. 12,0 et 12,1 Bénédicte Manier, op. cit., chap. I « Le travail des enfants dans l’histoire », p. 5-16.
  13. Spartacus Educational, Child Labor in America, September 1997 (updated April 2022)
  14. Rapport à la Chambre des députés sur le travail des enfants, des filles mineures et des femmes dans les établissements industriels, 1890, Paris.
  15. (en) Banque mondiale, World Bank World Development Indicators 2005 data series: Labour force, children 5-14 (% of age group, SL.TLF.CHLD.ZS) [présentation en ligne].
  16. (en) OIT, Child Labour Statistics sur le site de l’OIT, compilation divers rapports et enquêtes [lire en ligne].
  17. « Bolivie : des enfants au travail, une réalité quotidienne », sur Franceinfo, (consulté le 17 mars 2021)
  18. « RD Congo : le travail des enfants orpailleurs perdure en toute illégalité dans le Sud-Kivu », sur Les Observateurs - France 24, (consulté le 17 mars 2021)
  19. « Le tabac de Philip Morris produit par des enfants », sur Slate.fr, (consulté le 10 juin 2021)
  20. « Chronique des matières premières - Le tabac du Malawi indésirable aux États-Unis pour cause de travail des enfants », sur RFI, (consulté le 10 juin 2021)
  21. « Ces grandes entreprises qui recourent à l’esclavage et au travail des enfants - Jobat.be », sur jobat.be (consulté le 10 juin 2021)
  22. Le Point magazine, sources AFP, « Indonésie : des milliers d'enfants travaillent dans les plantations de tabac », sur Le Point, (consulté le 10 juin 2021)
  23. Bénédicte Manier, Le Travail des enfants dans le monde, La Découverte, Paris, 2003 (ISBN 2-7071-4179-8) Modèle:Lien brisé.
  24. Bénédicte Manier, op. cit., chap. IV « Un phénomène planétaire : approches régionales », p. 43-81.
  25. Bénédicte Manier, op. cit., chap. V « La fonction économique du travail des enfants », p. 82-89.
  26. OIT, Un avenir sans travail des enfants, Rapport global du directeur général, Conférence internationale du travail, 90e session, Bureau international du travail, Genève, 2002 (ISBN 92-2-212416-2) [lire en ligne].
  27. Le nombre d’enfants qui travaillent dans le monde a reculé d’un tiers depuis 2000, selon l’OIT Ilo.org 23 septembre 2013
  28. « Le travail des enfants en recrudescence pour la première fois en vingt ans », Le Monde.fr,‎ (lire en ligne)
  29. Karl Marx, Le Capital, Livre I, Quatrième section, XV - IX. - Législation de fabrique, 1867