Ch. 37 : Introduction

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L'analyse des formes historiques de la propriété foncière ne rentre pas dans le cadre de cet ouvrage. Nous ne nous occupons ici de ce genre de propriété qu'au point de vue de la partie de la plus-value engendrée par le capital qui tombe en partage au propriétaire foncier. Nous supposons donc que l'agriculture est dominée, comme la manufacture, par la production capitaliste et qu'elle est exploitée par des capitalistes ne différant essentiellement des autres capitalistes que par la nature de l'élément et le genre de travail salarié auxquels ils appliquent leur capital. A nos yeux le fermier produit du blé comme l'industriel fabrique du fil ou des machines. Nous admettons par conséquent que le régime capitaliste est étendu à toutes les sphères de production de la société bourgeoise et que les conditions qui en assurent le fonctionnement, tels que la libre concurrence des capitaux, leur transmissibilité d'une branche à une autre, le nivellement des taux de profit, sont arrivées à leur plein épanouissement.

C'est une forme historique de la propriété foncière, une forme acquise sous l'action du capital et de la production capitaliste, qui nous sert de point de départ. Cette forme est le résultat de la transformation soit de la propriété féodale, soit de la petite culture, dans laquelle la production a pour condition la possession du sol par le producteur immédiat et qui est avant tout féconde lorsque la terre est la propriété de celui qui la cultive. D'une manière générale la production capitaliste suppose que les travailleurs soient expropriés de leurs moyens de travail ; en agriculture elle a pour condition que la terre n'appartienne pas aux ouvriers agricoles et que ceux-ci soient subordonnés à des capitalistes exploitant en vue d'un profit. Notre étude n'a donc pas à rencontrer cette objection que d'autres formes de la culture du sol ont existé ou existent encore. Cette objection ne s'adresse qu'aux économistes qui considèrent l'exploitation capitaliste de l'agriculture et la forme de la propriété foncière qui y est adéquate, non comme une phase historique, mais comme une phase définitive et éternelle.

Nous devons partir de la forme moderne de la propriété foncière, parce que notre but est de dégager les conditions de production et de circulation qui sont inhérentes à l'application du capital à l'agriculture. Nous considérerons cette application au point de vue de l'agriculture proprement dite, c'est-à-dire de la production des végétaux formant la base essentielle de l'alimentation d'un peuple. C'est donc la production du blé, l'aliment principal des peuples de la société capitaliste moderne, que nous envisageons. (Au lieu de l'agriculture nous pourrions considérer l'exploitation des mines, les lois étant les mêmes pour les deux.)

Un des grands mérites d'A. Smith est d'avoir démontré que la rente foncière du capital appliqué aux différentes productions agricoles, au lin, aux plantes tinctoriales, au bétail, est déterminée par la rente du capital employé à produire l'aliment essentiel. Aucun progrès n'a été fait depuis lui dans cette direction, et ce que nous aurions à dire pour préciser et étendre sa doctrine aurait sa place dans une étude spéciale de la propriété foncière, ce dont il ne peut être question ici. Nous ne parlerons donc pas ex professo de la partie de l'agriculture qui ne concerne pas directement la production du froment et nous ne l'invoquerons que de loin en loin à titre d'exemple.

Pour être complet, nous étendrons l'expression sol à l'eau, pour autant que celle-ci, considérée comme une dépendance du sol, soit l'objet d'une appropriation.

La propriété foncière suppose que certaines personnes exercent un monopole sur des parties déterminées de la surface terrestre, avec le privilège d'en disposer au gré de leur volonté à l'exclusion de toutes les autres[1]. Cela étant, tout revient à développer quelle est la valeur économique de ce monopole dans la production capitaliste. L'aspect juridique de la question ne résout rien à cet égard, car les conséquences du droit d'user et d'abuser de certaines parties du globe terrestre dépendent de circonstances économiques et nullement de la volonté de ceux qui en sont investis. Ce droit en lui-même n'a d'autre portée que de reconnaître au propriétaire foncier le pouvoir juridique de disposer de la terre comme tout possesseur de marchandise peut disposer de sa marchandise. Il ne fait son apparition dans le monde antique qu'au moment où se dissout l'organisation de la société et il n'est admis dans la société moderne qu'à la faveur du développement de la production capitaliste. Les Européens l'ont introduit en Asie en quelques endroits seulement.

En étudiant l'accumulation primitive (vol. I, chap. XXVI de la traduction française) nous avons vu que la production capitaliste suppose que le producteur immédiat soit sorti de la situation où il est lié directement au sol en qualité d'esclave, de serf, etc., et que le droit de propriété de la terre soit confisqué à la masse du peuple. A ce point de vue l'appropriation individuelle du sol est une condition historique et une base permanente de la production capitaliste, de même que l'exploitation des masses est l'assise des modes de production antérieurs. Cependant la propriété foncière ne revêt pas au début de la production capitaliste une forme adéquate à cette dernière, et c'est la production capitaliste elle-même, en subordonnant l'agriculture au capital, qui se charge de la lui donner, en assurant la transformation de la propriété féodale, de la propriété du clan et de la petite propriété paysanne combinée avec la communauté de la mark. Un des plus beaux résultats de la production capitaliste est d'avoir fait du travail purement empirique de la terre, transmis mécaniquement de père en fils dans la partie la plus arriérée de la société, une agronomie consciente et scientifique autant qu'elle peut l'être sous un régime basé sur la propriété privée[2]. D'une part, elle a affranchi la propriété foncière de tout rapport de domination et d'esclavage, d'autre part, elle a séparé entièrement le travail de la propriété de la terre, qui n'est plus pour le propriétaire foncier que la source d'un tribut que son monopole lui permet de prélever sur le fermier, le capitaliste agricole. Cette séparation est tellement complète que rien ne s'oppose à ce que le propriétaire d'une terre en Écosse passe toute sa vie à Constantinople. La propriété foncière acquiert ainsi sa forme purement économique, et se dépouille de toutes les enveloppes politiques et sociales et de tous les compléments traditionnels qui sont dénoncés, comme nous le verrons plus tard, par les capitalistes industriels et par les théoriciens qui leur servent de porte-parole comme une superfétation inutile et absurde. La production capitaliste aura eu le grand mérite d'avoir rendu l'agriculture rationnelle et capable d'être exploitée socialement, et d'avoir démontré l'absurdité de la propriété foncière. Comme tous les autres progrès historiques, celui-ci fut payé de la ruine complète des producteurs immédiats.

Avant d'aborder l'étude de notre sujet faisons encore quelques remarques afin d'éviter tout malentendu.

Le point de départ de la production agricole capitaliste est l'existence d'ouvriers salariés travaillant la terre pour le compte d'un capitaliste, le fermier, pour lequel l'agriculture est une branche spéciale de production permettant l'exploitation de son capital. Ce fermier-capitaliste paie à des échéances déterminées, annuellement par exemple, au propriétaire foncier, le propriétaire de la terre qu'il exploite, une somme d'argent fixée contractuelle ment (comme l'intérêt), afin de pouvoir appliquer son capital à cette production spéciale. Cette somme d'argent constitue la rente foncière, qu'elle soit payée pour une terre arable, un terrain à bâtir, une mine, une pêcherie, une forêt, et elle doit être acquittée pendant toute la durée du contrat par lequel le propriétaire foncier loue son fonds au fermier. La rente foncière est donc la forme sous laquelle se fait la réalisation économique, la, mise en valeur de la propriété foncière, et nous avons de nouveau devant nous les trois classes qui se trouvent en opposition dans le cadre de la société moderne les travailleurs salariés, les capitalistes industriels et les propriétaires fonciers.

Du capital peut être incorporé à la terre, soit d'une manière plutôt transitoire, lorsque par exemple on améliore le sol par des amendements chimiques ou des engrais, soit d’une manière plutôt permanente, lorsqu'on l’irrigue, draine, nivelle ou couvre de bâtiments d'exploitation. Ce capital, que j'ai désigné ailleurs[3] sous le nom de terre-capital, appartient à la catégorie du capital fixe ; l'intérêt auquel il donne lieu peut faire partie de la rente que le fermier paie au propriétaire foncier[4], mais ne constitue pas la rente foncière proprement dite qui est payée pour l'usage du sol, qu'il soit cultivé ou non. Nous aurions à examiner en détail cette partie du revenu du propriétaire foncier si nous nous étions imposé une étude systématique de la propriété foncière. Mais pareille recherche sort du cadre que nous nous sommes tracé et nous pouvons nous borner à en dire quelques mots seulement. Les avances de capital incorporé plutôt temporairement sont faites sans exception par le fermier. Elles améliorent la, terre[5] et en augmentent le produit au même titre que la culture, lorsque celle-ci est faite d'une manière rationnelle et n'aboutit pas - danger contre lequel messieurs les propriétaires s'assurent dans leurs contrats - à un épuisement brutal comme en Amérique à l'époque de l'esclavage ; elle fait de la terre-matière une terre-capital. De même les capitaux fixes incorporés a la terre d'une manière plutôt permanente sont avancés en grande partie, dans certaines sphères, exclusivement parles fermiers. Or toutes les améliorations apportées a la terre, par le fait qu'elles en sont inséparables, deviennent la propriété du propriétaire foncier à l'expiration du bail. Aussi les propriétaires ont-ils soin, à mesure que la production agricole capitaliste se développe, de raccourcir la durée des baux et de majorer leurs prix de location, à chaque renouvellement de contrat, de l'intérêt des capitaux qui ont été incorporés à la terre, que ceux-ci aient été avancés par eux ou par les fermiers. Il en résulte que la rente s'accroît et que les prix de vente des terres augmentent. Les propriétaires ne vendent donc pas seulement la terre, mais la terre améliorée, la terre avec le capital qui lui a été incorporé et qui ne leur a rien coûté. C'est là un des secrets - abstraction faite du mouvement de la rente foncière proprement dite - de l'enrichissement progressif des propriétaires fonciers, de l'augmentation continue de leurs rentes et de l'accroissement de la valeur en argent de leurs terres, sous l'action des progrès du développement économique, dont ils s'annexent les résultats sans y avoir contribué pour la moindre part - fruges consommere nati[6]. Mais c'est là aussi un des grands obstacles à l'application d'une agriculture rationnelle, parce qu'il en résulte que le fermier s'abstient de toutes les améliorations et de toutes les avances qui ne lui sont pas remboursées intégralement avant l'expiration de son bail. Cet obstacle était déjà signalé au siècle dernier par James Anderson, le véritable père de la théorie de la rente, à la fois fermier pratique et agronome distingué pour son époque, et il est mis en évidence de nos jours par tous les adversaires de la constitution actuelle de la propriété en Angleterre.

Voici en quels termes A. A. Walton caractérise cette situation dans son History of the Landed Tenures of Great Britain and Ireland, London 1865, p. 96, 97 :

« Tous les efforts des nombreuses institutions agricoles de notre pays ne feront pas progresser effectivement et d'une manière très sensible notre agriculture, aussi longtemps qu'ils auront pour résultat d'accroitre la valeur de la propriété foncière et le taux de la rente plus qu'elles n'améliorent la situation des fermiers et des ouvriers agricoles. En général les fermiers savent aussi bien que le propriétaire, son régisseur ou même le président d'une société agricole, qu'un bon drainage, une fumure abondante, un labourage profond, un sarclage soigné sont suivis de résultats merveilleux tant en ce qui concerne l'amélioration de la terre que l'augmentation du rendement. Mais tous ces travaux demandent des avances considérables, et les fermiers savent parfaitement que la plus grande partie des améliorations qu'ils apportent à la terre profitera à la longue au propriétaire qui prélèvera une rente plus élevée ou vendra sa terre plus cher... Ils sont assez malins pour observer ce que ces orateurs (les propriétaires et les régisseurs parlant dans les banquets) oublient toujours soigneusement de dire et pour constater que la part du lion de toutes les améliorations réalisées par les fermiers passe toujours aux propriétaires... Quelle qu'ait été la participation du fermier précédent à l'amélioration de la terre, son successeur verra toujours le propriétaire augmenter la rente en raison de l'accroissement de valeur que ces améliorations auront communiqué au sol ».

Ces faits sont cependant moins apparents pour la terre cultivée que pour celle que l'on couvre de constructions. En Angleterre la majeure partie des terrains destinés à la bâtisse sont, non pas vendus définitivement, mais loués pour nonante neuf ans au moins si possible, durée après laquelle le terrain avec les bâtiments qui le couvrent fait retour au propriétaire.

« Ils (les fermiers) sont obligés, lorsque leur bail expire, de laisser la maison en bon état d'entretien, bien qu'ils aient payé jusque-là une rente exagérée. A peine le bail est-il arrivé à son terme, qu'un agent ou un inspecteur du propriétaire vient visiter la maison, exiger qu'elle soit mise en bon état et en prendre possession pour l'annexer à la propriété de son maître. Les choses prennent un tel développement que si le système fonctionne pendant un temps assez long, toutes les maisons du royaume appartiendront comme les terres aux propriétaires fonciers. Tout le Westend de Londres, au nord et au sud de Temple Bar, appartient presqu'exclusivement à une demi-douzaine de grands propriétaires, est loué, au prix de rentes foncières énormes et les contrats de location qui sont encore en cours ne tarderont pas à expirer l'un après l'autre. Il en est plus on moins de même de toutes les autres villes du royaume. Mais là ne s'arrête pas l'avidité du système de l'exclusivisme et du monopole. Presque toutes les installations de nos docks ont été accaparées d'après la même méthode par le grand léviathan de la terre. » (op. cit., p. 93.)

Le recensement de 1861 accuse pour l'Angleterre et le Pays de Galles, sur une population totale de 20.066.221 habitants, 36.032 propriétaires de maisons ; il est évident que si l'on mettait d'un côté les grands propriétaires et de l'autre les petits, les rapports du nombre de propriétaires au nombre de maisons et à la population seraient tout différents de ce que ces chiffres indiquent au premier abord.

Cet exemple de la propriété immobilière est important :

Il établit nettement la différence qui existe entre la rente foncière proprement dite et l'intérêt du capital fixe incorporé au sol, lequel peut devenir un supplément de la rente foncière. L'intérêt des constructions, de même que l'intérêt du capital que le fermier incorpore à la terre, revient pendant la durée du bail au capitaliste industriel, soit le spéculateur en immeubles, soit le fermier : il est complètement indépendant de la rente foncière, qui doit être payée annuellement, à une époque déterminée, pour l'usage de la terre. Il montre comment le capital incorporé au sol finit par devenir la propriété du propriétaire foncier et comment l'intérêt de ce capital vient au bout d'un certain temps augmenter la rente. Quelques écrivains, les uns comme défenseurs de la propriété foncière contre les attaques des économistes bourgeois, les autres, tels que Carey, dans le but de substituer aux antagonismes de la production capitaliste un système d'« harmonies », ont essayé d'identifier la rente, l'expression économique de la propriété foncière, avec l'intérêt ; par là se serait apaisée l'opposition entre les propriétaires fonciers et les capitalistes. Le procédé inverse fut suivi au début de la production capitaliste. A cette époque la propriété foncière représentait encore, dans la conception populaire, la forme primitive de la propriété privée, tandis que l'intérêt du capital était méprisé et considéré comme un produit de l'usure. C'est alors que Dudley North, Locke et d'autres intervinrent et assimilèrent l'intérêt du capital à la rente foncière, en même temps que Turgot se basait sur l'existence de cette dernière pour justifier l'intérêt. Les écrivains modernes oublient, - sans compter que la rente foncière peut exister et existe pure, sans addition de l'intérêt du capital incorporé à la terre - que le propriétaire foncier qui profite de ce capital, non seulement prélève l'intérêt d'une avance qui ne lui a rien coûté, mais devient gratuitement propriétaire de ce capital lui-même.

La propriété foncière se justifie, comme toutes les autres formes de propriété inhérentes à un système déterminé de production, par ce fait que le système de production lui-même, avec les rapports d'échange qu'il engendre, a une nécessité historique et transitoire. Signalons cependant - nous l'établirons plus loin - que la propriété foncière se distingue de toutes les autres en ce que, même au point de vue de la production capitaliste, elle devient superflue et nuisible dès qu'elle atteint un certain degré de développement.

A un autre point de vue, la rente foncière peut être confondue avec l'intérêt et être dépouillée de son caractère spécifique. Elle se présente sous forme d'une somme déterminée d'argent, que le propriétaire foncier reçoit annuellement comme fermage d'un lopin de terre. Or tout revenu touché en argent peut être capitalisé et considéré comme l'intérêt d'un capital fictif. Le taux de l'intérêt étant de 5 %, par exemple, une rente de 200 £ peut être considérée comme l'intérêt d'un capital de 4000 £. C'est la rente ainsi capitalisée qui fixe le prix d'achat ou la valeur de la terre, laquelle valeur constitue, au premier abord, une catégorie aussi irrationnelle que le prix du travail, puisque la terre n'est pas un produit du travail et n'a par conséquent pas de valeur. Cependant cette forme irrationnelle abrite un réel rapport de production. Lorsqu'un capitaliste achète pour 4000 £ une terre donnant une rente annuelle de 200 £, il encaisse un intérêt annuel de 5 % sur 4000 £, absolument comme s'il avait acheté des valeurs ou prêté son capital. Il met donc en valeur un capital de 4000 £ au faux de 5 %. et il lui suffira d'en toucher le revenu pendant 20 ans pour récupérer le prix de sa terre. C'est pour cette raison qu'en Angleterre le prix d'acquisition des terres est exprimé en tant ou tant d'years' purchase, ce qui n'est qu'une autre expression de la capitalisation de la rente. En calculant de la sorte on envisage le prix d'achat, non de la terre, mais de la rente, d'après le taux ordinaire de l'intérêt, c'est-à-dire qu'on se donne d'avance la rente.

Il résulte de là, la rente étant donnée d'avance comme une quantité constante, que le prix des terres peut varier en raison inverse du taux de l'intérêt. Si, par exemple, le taux de l'intérêt tombe de 5 à 4 %, une rente annuelle de 200 £ correspond à un capital de 5000 au lieu de 4000 £ et le prix d'une même terre passe, dans ce cas, de 4000 à 5000 £, c'est-à-dire de 20 à 25 years' purchase. Pareille variation du prix de la terre est donc déterminée par le taux de l'intérêt, indépendamment du mouvement de la rente foncière. Il en résulte que si l'on fait abstraction de ce mouvement ainsi que de la variation des prix des produits du sol, dont la rente est une partie, le prix de la terre a une tendance à hausser, étant donné :

  1. qu'à mesure que la société progresse, le taux du profit et avec lui le taux de l'intérêt, pour autant que celui-ci se règle d'après celui-là, ont une tendance à baisser ;
  2. que même indépendamment du mouvement du taux du profit, le taux de l'intérêt diminue par suite de l'accroissement de la masse de capital empruntable.

La confusion de la rente foncière avec l'intérêt, dont elle revêt la forme aux yeux de ceux qui achètent des terres, repose sur une ignorance absolue de la nature de la rente et conduit aux conclusions les plus singulières. Dans les pays anciens la propriété foncière est considérée comme une forme distinguée de la propriété, et un achat de terres est envisagé comme un placement de tout repos. Il en résulte que l'intérêt dont on prend le taux comme base quand il s'agit d'acheter des rentes foncières, est généralement moins élevé que celui que l'on compte pour d'autres placements à long terme, et que l'acheteur d'une terre établit son prix d'achat en partant, par exemple, d'un intérêt de 4 % alors qu'un autre placement lui aurait donné 5 %, ce qui revient à dire qu'il paie plus cher une rente foncière qu'un autre revenu. Dans son archi-mauvaise brochure sur « La Propriété », M. Thiers part de cette considération pour conclure que la rente est réduite, alors qu'il en résulte simplement que son prix d'achat est élevé.

Certains apologistes de la propriété foncière cherchent à justifier celle-ci en invoquant que la capitalisation de la rente fixe le prix ou la valeur de la terre, qui fait ainsi l'objet de transactions comme toute autre marchandise et dont l'équivalent a par conséquent été payé par ceux qui la possèdent. Si pareil raisonnement justifie l'appropriation de la terre il doit justifier également l'esclavage, car le produit du travail des esclaves, d'après cette manière de voir, n'est que l'intérêt du capital que leur maître a engagé en les achetant. Justifier la rente foncière par les transactions auxquelles elle donne lieu, c'est dire qu'elle est légitime parce qu'elle existe.

Autant il est important au point de vue de l'analyse scientifique de la rente - la forme économique spécifique de la propriété foncière dans la production capitaliste - de la considérer pure et dégagée de toutes les additions qui la faussent et la défigurent, autant il est important pour la compréhension des conséquences pratiques de la propriété foncière de connaître les éléments qui viennent en obscurcir la théorie.

La pratique fait considérer comme rente foncière tout ce que les fermiers paient sous forme de fermages aux propriétaires fonciers pour être autorisés à cultiver la terre.

Quelles que soient la nature et la source de ce tribut, il a ceci de commun avec la rente foncière proprement dite :

  1. qu'il est prélevé parce que le propriétaine-foncier dispose du monopole d'une partie de la surface de la terre;
  2. qu'il fixe le prix de la terre, qui n'est que le revenu capitalisé du prix de location de cette dernière.

Nous avons vu que l'intérêt du capital incorporé à la terre vient s'ajouter à la rente ; cette partie additionnelle, étrangère à la rente proprement dite, devient de plus en plus importante à mesure que le développement économique du pays fait des progrès. Indépendamment de cet intérêt, le fermage peut comprendre une autre partie, prélevée, soit sur le profit moyen, soit sur le salaire normal, soit sur les deux à la fois, et qui, dans certains cas, notamment lorsque la terre est sans valeur, représente la totalité de la rente. Cette partie provenant du profit ou des salaires prend la forme de la rente foncière parce qu*au lieu d'être remise, ainsi que normalement il devrait en être, au capitaliste industriel ou à, l'ouvrier salarié, elle est payée comme fermage au propriétaire foncier. Au point de vue économique, elle ne fait même pas partie de la rente foncière ; pratiquement elle contribue au revenu du propriétaire, à la mise en valeur de son monopole au même titre que la rente proprement dite et elle intervient comme cette dernière, dans la fixation du prix de la terre.

Nous faisons abstraction en ce moment des circonstances où la rente foncière, qui caractérise un mode d'appropriation du sol inhérent à la production capitaliste, existe sans que la production capitaliste soit appliquée et sans que le fermier soit un capitaliste industriel ou que son système de culture soit capitaliste. C'est ce qui se présente, par exemple, en Irlande. Le fermier y est en général un petit paysan, payant au propriétaire un fermage qui souvent absorbe, non seulement une partie de son profit, c'est-à-dire de son surtravail, auquel il aurait droit comme possesseur de ses instruments de travail, mais une partie du salaire normal que, dans d'autres conditions, il obtiendrait pour la même quantité de travail. Le propriétaire, qui ne fait rien pour l'amélioration du sol, exproprie en outre le fermier du petit capital qu'il a pu incorporer et la terre à force de travail personnel, agissant ainsi comme l'usurier, mais avec cette différence que celui-ci risque son capital. Cette spoliation ininterrompue alimente sans discontinuer les procès auxquels donne lieu la législation rurale irlandaise, qui consacre que le propriétaire qui donne congé ait fermier doit indemniser celui-ci des améliorations qu'il a apportées à la terre ; elle a donné lieu également à cette réponse cynique de Palmerston : « La Chambre des Communes est une chambre de propriétaires fonciers ».

De même nous ne tenons pas compte des circonstances exceptionnelles qui, même dans des pays de production capitaliste, permettent aux propriétaires d'extorquer des fermages absolument en disproportion avec le rapport de la terre. C'est ce qui se présente, par exemple, en Angleterre dans les districts industriels, pour de petits coins de terre donnés en location à des ouvriers, qui y font du jardinage ou de l'agriculture en dilettantes pendant leurs heures perdues (Reports of Inspectors of Factories).

Nous entendons nous occuper de la rente agraire dans des pays de production capitaliste développée. L'agriculture anglaise, par exemple, compte nombre de petits capitalistes que leur éducation, leur instruction, la, tradition, la concurrence et d'autres circonstances ont décidé à se faire fermiers et obligé à appliquer leur capital à la culture de la terre. Ils se trouvent dans la nécessité de se contenter d'un profit plus petit que le profit moyen et d'en abandonner une partie au propriétaire foncier; à cette condition seulement, il leur est permis d'engager leur capital dans l'agriculture. Partout les propriétaires fonciers ont une grande influence sur la législature - cette influence est décisive en Angleterre, - et ils en profitent pour perfectionner leur système d'exploitation. Nous en trouvons un exemple dans les lois de 1815 sur les céréales, créant un impôt sur le pain, votées, on en convint, pour assurer aux propriétaires oisifs les rentes exagérées imposée, pendant la guerre contre les Jacobins. Abstraction faite de quelques années exceptionnellement fertiles, ces lois maintinrent, il est vrai, les prix des céréales au-dessus du niveau auquel ils seraient tombés si l'entrée avait été libre; mais elles n'eurent pas pour conséquence de les élever d'une manière continue à la hauteur que les propriétaires siégeant au Parlement avaient décrétée comme une espèce de prix normal, comme une barrière légale contre l'importation. Ce fut cependant sous l'impression que ces prix normaux seraient atteints que les baux furent conclus. Lorsque la réalité eut chassé l'illusion, on fit une nouvelle loi pour fixer de nouveaux prix normaux, qui de même que les premiers ne furent que l'expression de la fantaisie avide et impuissante des propriétaires fonciers. Aussi, de 1815 jusqu'après 1830, l'agricultural distress fut le thème de tous les jours. Les fermiers ne cessèrent d'être spoliés, si bien que la ruine et l'expropriation firent disparaître toute une génération, qui fut remplacée par une nouvelle classe de capitalistes[7].

Un fait beaucoup plus général et plus important est l'abaissement du salaire de l’ouvrier agricole proprement dit au-dessous du niveau normal moyen, fait qui a pour conséquence qu'une partie du salaire est enlevée à l'ouvrier, devient une fraction de l'argent du fermage et est empochée, sous le couvert de la rente, par le propriétaire foncier. C'est ce qui se présente en général en Angleterre et en Écosse, à part quelques comtés dont la situation est exceptionnelle. Les travaux des commissions d'enquête parlementaires qui furent instituées en Angleterre avant le vote des lois sur les céréales, constituent les recherches les plus précieuses (presqu'inexplorées) que nous ayons jusqu'à présent sur l'histoire des salaires au XIX° siècle ; ils sont en même temps un monument de honte que l'aristocratie et la bourgeoisie anglaises se sont élevé à elles-mêmes. Ils démontrent à l'évidence que les rentes élevées et l'augmentation correspondante du prix de la terre qui caractérisèrent la période de la guerre contre les Jacobins, eurent en partie leur source dans la réduction des salaires et leur abaissement au-dessous du minimum physique, par conséquent, dans la spoliation des ouvriers par les propriétaires fonciers. Différentes circonstances, entre autres la dépréciation de l'argent, l'application de la loi des pauvres dans les districts agricoles, facilitèrent l'obtention de ce résultat, qui fut atteint pendant que les revenus des fermiers ne cessaient de monter et que les propriétaires s'enrichissaient fabuleusement. Les fermiers autant que les propriétaires en arrivèrent à invoquer comme argument en faveur des lois sur les céréales qu'il était matériellement impossible de réduire davantage les salaires des ouvriers agricoles.

Cette situation ne s'est pas essentiellement modifiée. En Angleterre et dans tous les pays de l'Europe une partie du salaire normal continue à passer à la rente. Lorsque le comte Shaftesbury, alors Lord Ashley, un aristocrate philanthrope, fut si extraordinairement ému par la situation des ouvriers des fabriques et se fit leur champion au Parlement dans l'agitation des dix heures, les défenseurs des industriels se vengèrent en publiant la statistique des salaires des ouvriers agricoles dans les villages appartenant au comte (vol. I chap. XXVII, 5, p. 296). Ils démontrèrent ainsi qu'une partie des rentes de ce philantrope était le produit des vols de salaires que ses fermiers opéraient pour son compte dans les poches des ouvriers, et ils fournirent en même temps des données qui purent être mises en parallèle avec les pires révélations des commissions de 1814 et 1815. Chaque fois que les circonstances déterminent un relèvement momentané des salaires des journaliers agricoles, retentissent les plaintes des fermiers, criant qu'une hausse des salaires au-dessus de leur niveau normal, comme dans les autres industries, est impossible et doit entraîner leur ruine si elle n'est pas accompagnée d'un abaissement de la rente. Ce fait est l'aveu que la rente que les fermiers paient aux propriétaires est constituée en partie par une réduction des salaires. De 1849 a 1859, le salaire des ouvriers agricoles haussa en Angleterre par suite d'une série de circonstances dont les principales furent l'émigration des Irlandais, qui supprima l'offre de travailleurs agricoles qui avait son siège en Irlande, une absorption extraordinaire d'ouvriers ruraux par l'industrie, la demande de soldats pour la guerre et des émigrations en masses vers l'Australie et la Californie. En même temps il y eut une baisse de plus de 16 % du prix des céréales (sauf pendant les années 1851-56, pendant lesquelles les récoltes furent mauvaises). Aussi les fermiers demandèrent à cor et à cri l'abaissement de la rente. Ils y réussirent dans quelques cas, mais en général leur demande fut- repoussée. Ils cherchèrent le salut dans la diminution des frais de production, notamment en introduisant des locomobiles et des machines, ce qui supprima en partie l'emploi des chevaux et rendit disponible une partie des journaliers agricoles, créant une surpopulation artificielle, qui ne tarda pas à provoquer une nouvelle baisse des salaires. Celle-ci se produisit malgré la diminution relative de la population agricole pendant ces dix années et malgré sa diminution absolue dans quelques districts purement agricoles[8]. Ces faits sont confirmés par le discours qui fut prononcé le 12 octobre 1865 au Congrès des sciences sociales par M. Fawcett, alors professeur d'Economie politique à Cambridge, mort en 1884 comme ministre des postes. « Les journaliers agricoles commencèrent à émigrer et les fermiers se mirent à se plaindre et à dire qu'ils ne seraient plus à même de payer des rentes aussi élevées que précédemment, l'émigration ayant pour effet de rendre le travail plus cher ». Dans cette phrase la hausse de la rente est nettement identifiée avec l'abaissement des salaires, et comme la circonstance qui augmente la rente augmente par le fait même le prix de la terre, on peut dire que le renchérissement de la propriété foncière marche de pair avec la dépréciation des salaires et réciproquement.

Les mêmes faits sont constatés en France.

« Les fermages augmentent lorsque croissent les prix du pain, du vin, de la viande, des légumes et des fruits, pendant que le coût du travail reste invariable. Lorsque nos vieillards consultent les comptes de leurs parents, ce qui nous ramène d'environ cent ans en arrière, ils constatent qu'à cette époque le prix de la journée de travail dans la France agricole était exactement le même qu'aujourd'hui. Depuis lors, le prix de la viande a triplé... Qui est la victime de cette révolution ? Est-ce le riche, qui possède la ferme, est-ce le pauvre, qui la cultive ?... La hausse des fermages est un indice d'une calamité publique. » (Rubichon, Du Mécanisme de la Société en France et en Angleterre. 2° édit., Paris 1837, p. 101.)

Voici des exemples de l'influence sur la rente d'une diminution du profit moyen d'une part et du salaire moyen d'autre part : Morton, ingénieur agricole, que nous avons cité plus haut, rapporte que l'on a constaté dans quantité d'endroits que la rente est moins élevée pour les grandes fermes que pour les petites, étant donné que

« la concurrence est généralement plus grande pour ces dernières que pour les premières et que les petits fermiers, qui sont rarement en état de s'occuper autrement que dans l'agriculture, sont obligés, afin de se créer une situation passable, d'accepter de payer une rente qu'eux-mêmes savent être trop élevée. » (John. C. Morton, The Resources of Estates, Londres 1858, p. 116.)

A son avis, cette différence s'effacera cependant à la longue en Angleterre, du moins jusqu'à un certain point, sous l'action de l'émigration des petits fermiers. Il cite un exemple démontrant qu'une réduction du salaire du fermier et à plus forte raison une réduction du salaire des gens qu'il occupe fournissent une partie de la rente. Il s'agit des fermes de moins de 70 à 80 acres (30 à 34 hectares) qui sont insuffisantes pour une charrue à double attelage.

« Si le fermier ne travaille pas de ses mains aussi activement que n'importe quel ouvrier, sa ferme ne peut pas lui assurer l'existence. S'il abandonne l'exécution du travail à ses gens et se borne à les surveiller, il est plus que probable qu'il ne tardera pas à constater qu'il n'est pas en état de payer la rente. » (op. cit., p. Il 8.)

Morton en conclut qu'à moins que les fermiers de la région ne soient très pauvres, les fermes ne devraient pas être de moins de 70 acres, afin que le fermier puisse tenir de deux à trois chevaux. Un homme d'une science extraordinaire est M. Léonce de Lavergne, membre de l'Institut et de la Société Centrale d'Agriculture. Dans son Économie rurale de l’Angleterre (que je cite d'après la traduction anglaise, Londres 1855) il fait la comparaison suivante des avantages que rapporte annuellement le bétail en France et en Angleterre (il tient compte de ce qu'en France les bestiaux sont aussi des animaux de trait, ce qui n'est pas le cas en Angleterre) (p. 42) :

France Angleterre
Lait :4 millions de £16 millions de £
Viande :16 millions de £20 millions de £
Travail :8 millions de £
28 millions de £38 millions de £

La différence qu'il signale provient de ce qu'il a estimé le lait à un prix deux fois plus élevé en Angleterre qu'en France, alors qu'il a admis le même prix pour la viande dans les deux pays (p. 35). Le montant de la production du lait en Angleterre doit donc être réduit de 8 millions, et alors le produit total devient le même pour les deux pays. M. Lavergne est réellement très fort; il introduit simultanément dans ses calculs les quantités de produits et les différences de leurs prix; le fait que l'Angleterre produit certains articles plus cher que la France, ce qui signifie simplement que ses fermiers et ses propriétaires prélèvent des profits plus élevés, apparaît ainsi comme un avantage à l'actif de l'agriculture anglaise. L'économiste français montre en outre (p. 48) que non seulement il connaît les résultats économiques de l'agriculture anglaise, mais qu'il ajoute foi aux préjugés, tant des fermiers que des propriétaires.

« Un grand inconvénient se rattache ordinairement à la culture des céréales... celles-ci épuisent le sol sur lequel elles poussent. »

Non seulement M. Lavergne croit qu'il n'en est pas de même des autres plantes, mais il admet que les fourrages verts et les racines enrichissent le sol.

« Les plantes à fourrages tirent de l'atmosphère les éléments principaux de leur croissance et restituent au sol plus qu'elles ne lui enlèvent; elles contribuent doublement, tant par leur action directe que par leur transformation en engrais animal, à réparer le dommage causé par les céréales et d'autres récoltes épuisantes. Il est donc de principe de faire alterner les cultures, ce qui constitue la rotation de Norfolk. » (p. 50-51.)

Rien d'étonnant à ce que M. Lavergne, qui croit ces contes qui sont répandus en Angleterre parmi les cultivateurs naïfs, admet également que la suppression des droits d'entrée sur les céréales a eu pour effet de faire sortir le salaire des journaliers anglais de la situation anormale qui le caractérisait. Que l'on s'en rapporte, en ce qui concerne ce point, à ce que nous avons dit précédemment dans notre premier volume (chap. XXV, 5). Mais écoutons le discours de M. John Bright à Birmingham, le 14 décembre 1865. Ayant parlé des cinq millions de familles qui ne sont pas représentées au Parlement, il continue .

« Parmi elles il y en a un million ou plus d'un million qui sont portées sur la liste des pauvres et un autre million, côtoyant le paupérisme, qui ne sont pas dans une situation plus favorable, ni plus rassurante. Jetez les yeux sur les couches inférieures et ignorantes de cette partie de la société. Considérez leur situation de réprouvés, leur misère, leurs souffrances, leur désespérance. Même aux États-Unis, même dans les États du sud pendant le règne de l'esclavage, le dernier des nègres pouvait espérer qu'un jour s'ouvrirait devant lui une ère de bonheur. Pour la masse qui constitue les couches les plus inférieures de notre pays - je suis ici pour le dire - n'existe ni l'espoir, ni même la vision d'une amélioration. Avez-vous lu dans les journaux de ces derniers jours l'histoire de John Cross, un journalier agricole du Dorsetshire ? Il travaillait six jours par semaine et le fermier qui vingt-quatre ans durant l'avait occupé à raison de huit shillings par semaine lui avait délivré le meilleur certificat. Avec ce salaire John Cross devait faire vivre une famille de sept enfants. Pour chauffer sa femme malade et l'enfant qu'elle allaitait, il prit - d'après la loi, je crois, il vola - un fagot de bois de la valeur de 6 d. et pour ce délit il fut condamné à 14 ou 20 jours de prison. J'ose dire que des milliers de situations comme celle de John Cross existent dans le pays, principalement dans le Sud, et que les investigations les plus habiles n'ont pas permis de découvrir comment ces malheureux parviennent à vivre. Jetez maintenant les yeux sur tout le pays et considérez les cinq millions de familles dont je parlais tantôt. La vérité ne vous oblige-t-elle pas à dire que la masse de la nation qui est exclue du droit de suffrage, peine et peine toujours sans connaitre le repos ? Comparez-la à la classe dirigeante - si j'établis cette comparaison on m'accusera de communisme -, comparez la grande nation qui s'exténue au travail et qui n'a pas le droit de vote à la partie qu'on peut considérer comme constituant la classe dirigeante. Voyez leur opulence, leur étalage de richesse, leur luxe. Voyez leur fatigue - car les dirigeants aussi sont fatigués, mais fatigués d'ennui - et voyez les courir d'un endroit à un autre, comme s'il ne s'agissait que de découvrir de nouvelles jouissances. » (Morning Star du 15 décembre 1865.)

Plus loin nous montrerons comment le surtravail et par conséquent tout le surproduit est confondu avec la rente foncière, qui, du moins dans la production capitaliste et tant au point de vue qualitatif qu'au point de vue quantitatif, est une fraction du surproduit. La base naturelle du surtravail en général, la condition naturelle qui est indispensable pour qu'il puisse exister, est que la nature fournisse - sous forme de produits animaux ou végétaux de la terre, sous forme de produits de la pêche, etc. - les moyens d'existence indispensables pendant un temps de travail plus court que la journée de travail. Cette productivité naturelle du travail agricole, résultant de la cueillette, de la chasse, de la pêche, de l'élevage du bétail, est la base du surtravail, tout travail ayant pour but à l'origine l'appropriation et la production de la nourriture.

La confusion entre le surproduit et la rente foncière est exprimée d'une autre manière par M. Dove. A l'origine le travail agricole et le travail industriel ne sont pas séparés et le second se rattache au premier. Le surtravail et le surproduit de la tribu agricole, de la commune domestique ou de la famille comprennent à la fois du travail agricole et du travail industriel, l'un n'allant pas sans l'autre. La chasse, la pêche, la culture sont impossibles sans des instruments qui y sont appropriés; le filage, le tissage sont à l'origine des travaux qui accompagnent secondairement les travaux agricoles.

Nous avons établi précédemment que de même que le travail de chaque ouvrier se décompose en travail nécessaire et surtravail, de même le travail total de la classe ouvrière peut être envisagé comme si une partie des ouvriers produisait l'ensemble des moyens d'existence (y compris les moyens de production de ceux-ci) de toute la classe ouvrière, c'est-à-dire fournissait le travail nécessaire pour toute la société, pendant que l'autre partie fournirait le surtravail, le travail nécessaire se composant non seulement du travail agricole, mais du travail qui engendre tous les autres produits entrant dans la consommation moyenne des ouvriers. Socialement, on peut donc envisager les choses comme si une division du travail chargeait les uns exclusivement du travail nécessaire et les autres du surtravail. Il en est de même de la division du travail entre les ouvriers agricoles et les ouvriers industriels, le caractère purement industriel du travail des uns ayant pour conséquence le caractère purement agricole du travail des autres. Le travail purement agricole est un produit (même un produit moderne et nullement réalisé dans toute la société) du développement social ; il correspond à un stade nettement déterminé de la production. De même qu'une partie du travail agricole produit des articles de luxe et des matières premières pour l'industrie qui ne sont d'aucune manière destinés à l'alimentation de la masse, de même une partie du travail industriel donne des produits qui constituent des objets de consommation indispensables tant pour les ouvriers agricoles que pour les ouvriers industriels. Ce serait commettre une erreur que de considérer, au point de vue social, ce travail industriel comme du surtravail. Il est en partie du travail nécessaire autant que la partie nécessaire du travail agricole ; il représente, sous une forme autonome, le travail industriel qui précédemment se rattachait naturellement au travail agricole et qui maintenant est le complément nécessaire du travail agricole pur. (Au point de vue purement matériel cinq cents tisserands conduisant des métiers mécaniques produisent bien plus de tissus constituant des surproduits qu'ils ne fabriquent d'étoffes nécessaires pour leur habillement).

En étudiant les formes sous lesquelles apparaît la rente, c'est-à-dire le fermage que paie au propriétaire celui qui utilise le sol dans un but de production ou de consommation, il convient de ne pas perdre de vue que des combinaisons très accidentelles peuvent déterminer les prix des objets qui n'ont pas de valeur en eux-mêmes, soit parce qu'ils ne sont pas le produit du travail (C'est le cas de la terre), soit parce que le travail ne peut plus les reproduire (les antiquités, les œuvres d'art de maîtres réputés, etc.). Pour qu'un objet soit susceptible d'être vendu, il suffit qu'il puisse être monopolisé et aliéné.

Trois erreurs sont avant tout à éviter dans l'analyse de la rente foncière :

La confusion des formes différentes que revêt la rente suivant les stades de l'évolution de la production sociale.

Les différentes formes spécifiques de la rente ont ce caractère commun que le prélèvement de cette dernière est la forme économique sous laquelle la propriété foncière est réalisée et qu'inversement la rente a pour condition la propriété foncière, c'est-à-dire l’appropriation par des individus déterminé de parties déterminées du globe terrestre. Peu importe la manière dont se fait cette appropriation, qu'elle soit réalisée an profit de la personne qui représente la communauté, comme en Asie ou en Égypte, qu'elle soit un corollaire du droit de propriété de certains individus sur la personne des producteurs immédiats, comme dans l'esclavage ou le servage, qu'elle résulte d'un simple droit de propriété de non producteurs sur la nature ou le sol, enfin qu'elle soit la conséquence de ce que dans la production isolée et socialement peu développée, comme dans la colonisation et la petite propriété paysanne, celui qui cultive lui-même une partie de terre s'en approprie directement le produit.

Les différences entre ces diverses formes de la rente peuvent être perdues de vue en présence du caractère qui leur est commun, c'est-à-dire ce fait que la rente, quelle que soit sa forme, est la réalisation économique de la propriété foncière, la fiction juridique qui permet à des individus déterminés de posséder exclusivement des parties déterminées du globe terrestre.

Toute rente foncière représente de la plus-value, est le produit d'un surtravail; même sous sa forme simple de rente naturelle, elle est un surproduit. De là cette erreur que pour expliquer la rente dans la production capitaliste, où elle vient en surplus du profit, qui est lui-même de la plus-value (du surtravail), il suffit d'élucider les conditions générales d'existence de la plus-value et du profit. Ces conditions sont : au point de vue subjectif, que les producteurs immédiats fournissent du surtravail, c'est-à-dire travaillent pendant un temps plus long que celui qui est nécessaire pour la reproduction de leur force de travail ; au point de vue objectif, qu'ils puissent fournir du surtravail, c'est-à-dire que les conditions naturelles soient telles qu'une partie de leur temps de travail suffise à leur conservation et leur reproduction comme producteurs, par conséquent que la production de leurs moyens d'existence indispensables ne consomme pas toute leur force de travail. La fertilité de la nature, d'une part, le développement de la productivité sociale du travail, d'autre part, constituent par conséquent la limite, le point de départ, la base. La première condition de l'existence des producteurs et de toute production en général étant l'obtention des aliments nécessaires, A faut que le travail consacré à la production des aliments - le travail agricole dans le sens économique le plus étendu - soit assez productif pour qu'il ne soit pas entièrement absorbé par la production des moyens d'existence nécessaires pour les producteurs immédiats, c'est-à-dire que du surtravail et du surproduit agricoles soient disponibles. Bien qu'ils ne soient exécutés que par une partie de la société, le travail agricole nécessaire et le surtravail agricole doivent être suffisants pour la production des moyens d'existence nécessaires pour toute la société, par conséquent pour que la grande division du travail soit possible à la fois entre les ouvriers agricoles et les ouvriers industriels et entre les agriculteurs qui produisent des aliments et les agriculteurs qui produisent des matières premières. Si le travail des producteurs d'aliments se divise, en ce qui les concerne directement, en travail nécessaire et surtravail, il ne représente au point de vue social que le travail nécessaire indispensable pour la production des moyens d'existence. Il en est ainsi de toute division du travail, suivant qu'on la considère au point de vue de la société tout entière ou du travail dans un atelier; dans le premier cas, il s'agit du travail nécessaire pour la production d'un article spécial, devant donner satisfaction à un besoin spécial ,de la société. Si cette division est bien proportionnée, les produits des différentes sphères se vendent à leurs valeurs - à leurs coûts de production dans une situation plus développée - ou à des prix dérivés de ces valeurs ou de ces coûts d'après des lois générales déterminées. La loi de la valeur a, en effet, ce caractère qu'elle fait sentir son effet, non sur les marchandises isolées, mais sur l'ensemble des produits de chaque sphère de production rendue autonome par la division du travail, de telle sorte que non seulement chaque marchandise n'absorbe que la quantité de travail nécessaire, mais que chaque sphère n'absorbe que la part nécessaire du travail social total. De même que la valeur d'usage d'une marchandise résulte de ce que celle-ci donne satisfaction à, un besoin, de même la masse des produits sociaux doit être adéquate aux besoins sociaux déterminés quantitativement pour chaque genre de produits, ce qui exige que le travail soit réparti entre les différentes sphères de production proportionnellement à ces besoins. (Cette considération ne doit pas être perdue de vue lorsqu'il s'agit de répartir les capitaux entre les diverses sphères de production.) Ce sont donc les besoins sociaux, les masses de valeurs d'usage que la société réclame, qui déterminent la répartition du temps de travail pour autant qu'ils soient obtenus, non pour être consommés directement comme moyens de subsistance par ceux qui les produisent, mais pour être utilisés comme valeurs d'échange, ne devenant valeurs d'usage que par leur aliénation. Le marché de ces marchandises s'étend à mesure que la division sociale s'accentue, car la subdivision du travail producteur a pour effet de transformer les produits en marchandises devant être échangées entre elles. Or ces phénomènes ne sont pas propres exclusivement aux produits de l'agriculture.

La rente ne peut se développer sous forme de rente payable en argent que dans la production de marchandises et plus encore dans la production capitaliste. Son développement est parallèle à la transformation de la production agricole en production de marchandises et il progresse à mesure que la culture du sol se sépare des autres productions. Le développement de la production de marchandises et par conséquent de valeurs, qui marche de pair avec l'extension de la production capitaliste, a pour effet de faire augmenter les quantités de plus-value et de surproduit ; mais à mesure que celles-ci augmentent, le propriétaire foncier peut profiter davantage de son droit de monopole sur la terre, prélever une part plus importante de la plus value, augmenter la valeur de la rente et hausser le prix de la terre. Alors que le capitaliste est un agent de l'accroissement de la plus-value et du surproduit, le propriétaire foncier n'a d'autre rôle que de percevoir sa part de cet accroissement, qui se réalise en-dehors de son intervention. C'est précisément ce fait qui constitue la caractéristique de sa situation et non ce résultat que la valeur de la terre et de ses produits augmente à mesure que la demande et le marché s'étendent et que par contre coup la masse des producteurs et des marchandises non agricoles devient plus considérable. Mais de ce que ces faits s'accomplissent en dehors de son intervention, il semble que cette création de valeur et de plus-value et cette transformation d'une partie de la plus-value en rente foncière sous l'action exclusive du procès social de production et du développement de la production de marchandises forment son caractère spécifique. C'est en s'inspirant de ces considérations que Dove développe que la rente dépend, non de la masse des produits agricoles, mais de la valeur de ceux-ci, laquelle résulte de la masse et de la productivité de la population non agricole. Il perd de vue qu'il en est ainsi de tout autre produit, car un produit ne se développe comme marchandise que sous l'influence tant de la masse que de la variété des autres marchandises qui peuvent lui être opposées comme équivalents. Ces faits ont été exposés dans la théorie générale de la valeur, où il a été établi que l'échangeabilité d'un produit dépend de la diversité des marchandises qui existent à côté de lui, laquelle détermine la masse dans laquelle il sera produit comme marchandise.

Aucun producteur considéré isolément, qu'il soit industriel ou agriculteur, ne produit de la valeur ni de la marchandise. Son produit ne revêt ces caractères que dans des circonstances sociales déterminées, savoir :

  1. que pour autant qu'il représente du travail social, c'est-à-dire que le temps de travail qui a été nécessaire pour l'obtenir soit une fraction du temps de travail social en général ;
  2. que pour autant que ce caractère social du travail s'affirme par un caractère monétaire, par un prix, exprimant que le ]? roduit peut prendre part d'une manière générale aux échanges. Par conséquent, si pour expliquer la rente on explique la plus-value en général ou même simplement le surproduit, on commet cette erreur que l'on attribue exclusivement aux produits agricoles un caractère qui est commun à tous les produits lorsqu'ils sont marchandises et valeurs. Cette analyse devient encore plus superficielle lorsqu'au lieu de la détermination générale de la valeur on se borne à considérer la réalisation de la valeur d'une marchandise déterminée. En effet, toute marchandise ne peut réaliser sa valeur que dans le procès de circulation et ce sont à chaque instant les conditions du marché qui déterminent si elle réalisera sa valeur et dans quelle mesure.
    Il ne faut donc pas faire remonter à une propriété caractéristique de la rente foncière le fait que les produits de l'agriculture deviennent des valeurs, c'est-à-dire peuvent être opposés comme marchandises aux marchandises des productions non agricoles, ou encore qu'elles se développent comme des expressions spéciales du travail social. Ce qui caractérise la rente c'est que les conditions qui font de plus en plus des produits agricoles des valeurs (des marchandises) et qui en assurent la réalisation, sont aussi les conditions qui permettent au propriétaire foncier de s'approprier une part de plus en plus grande de ces valeurs, bien qu'il n intervienne pas dans leur production. Ce sont ces conditions qui permettent la transformation en rente foncière d'une partie de plus en plus grande de la plus-value.
  1. Rien n'est comique comme la justification de la propriété individuelle du sol par Hegel. L'homme en tant que personnalité doit donner une réalité à sa volonté en en faisant l'âme de la nature extérieure ; il doit par conséquent s'emparer de cette nature et en faire sa propriété privée Si telle est la destinée de la « personne » humaine, il est nécessaire que chaque homme soit propriétaire foncier, afin d'affirmer sa personnalité La propriété du sol et du sous-sol - une institution moderne - ne repose pas d'après Hegel sur un rapport social, mais découle d'un rapport de l'homme comme personnalité à la « nature », du droit absolu de l'homme de disposer de toutes choses. (Hegel, Philosophie des Rechts, Berlin 1840, p. 79.) Tout d'abord il est évident qu'un individu ne peut pas par sa « volonté » s'imposer comme propriétaire à tout autre individu qui a la volonté de s'emparer de la même terre que lui. Ensuite il est impossible de voir jusqu'à quel point la « personnalité » veut réaliser sa volonté, si pour cette réalisation tout un pays est suffisant ou s'il faut toute une série de pays pour que « la souveraineté de ma volonté puisse se manifester à l'égard de quelque chose ». Ici Hegel nage en pleine absurdité. « La prise de possession est d'une nature à part ; je ne m'approprie pas plus que ce que je touche de mon corps ; mais les choses extérieures sont plus étendues que ce que je puis toucher. A la chose que je m'approprie de la sorte s'en rattache une autre. J'exerce la prise de possession par la main ; mais la portée de celle-ci peut être étendue ». (p 90). Cependant à cette autre chose en est reliée une troisième, et ainsi devient illimitée la partie de la terre à laquelle je puis incorporer mon âme en tant que volonté. « Lorsque je possède quelque chose, mon esprit considère immédiatement que non seulement la chose que je possède est mienne, mais également celle qui s'y rattache. C'est pour cette raison que le droit positif doit intervenir ici, car la notion ne conduit à aucune autre déduction » (p. 91). Voilà un aveu d'une extraordinaire naïveté au sujet de la « notion », un aveu qui démontre que la notion qui commence par commettre la bévue de considérer comme absolue une conception juridique de la propriété inhérente à la société bourgeoise, ne comprend « rien » aux conditions réelles de cette propriété. Il établit en même temps que le « droit positif » doit évoluer à mesure que se déroulent les différentes phases du développement économique et social.
  2. Des conservateurs s'occupant de chimie agricole, tels que Johnston, reconnaissent que l'agriculture vraiment rationnelle rencontre partout dans la propriété privée un obstacle insurmontable. Il en est de même de certains professeurs, défenseurs ex professo du monopole de la propriété foncière, tels que Charles Comte, qui a écrit un ouvrage en deux volumes dans le but spécial de défendre l'appropriation individuelle : « Un peuple, dit-il, ne peut atteindre le degré de bien-être et de puissance que comporte sa nature, qu'autant que chacune des parties du sol qui le nourrit reçoit la destination la plus conforme à l'intérêt général. Pour donner à ses richesses un grand développement, il faudrait, s'il était possible, qu'une volonté unique et surtout éclairée présidât à la disposition de chacune des parties de son territoire et la rit concourir à la prospérité de toutes les autres. Mais l'existence d'une telle volonté... ne saurait se concilier avec la division du sol en propriétés privées... et avec la faculté garantie à chacun de disposer de ses biens d'une manière à peu près absolue ». Ch. Comte, Traité de la propriété. Brux., 1835 p. 83). En signalant l'incompatibilité de la propriété et d'une agronomie rationnelle, Johnston, Comte et d'autres n'ont en vue que la nécessité de cultiver le sol d'un pays comme un tout. Ils ne signalent pas que l'agriculture, qui doit pourvoir aux conditions d'existence de toute la chaîne des générations qui se suivent dans l'humanité, rencontre d'autres obstacles provenant de ce que l'obtention des divers produits de la terre est influencée par les variations des prix du marché et tout l'aspect de la production capitaliste, qui a pour objectif le prélèvement d'un profit immédiat. Un exemple frappant est fourni par la sylviculture, qui n'est organisée en vue de I’intérêt général que là où les forêts ne font pas l'objet d'une appropriation privée, mais font partie du domaine de l’État.
  3. Misère de la philosophie, p. 465. J'y fais une distinction entre la terre-matière et la terre-capital. « Rien qu'à appliquer à des terres déjà transformées au moyen de production de secondes mises de capital on augmente la terre-capital sans rien ajouter à la terre-matière, c'est-à-dire à l'étendue de la terre... La terre-capital n'est pas plus éternelle que tout autre capital... La terre-capital est un capital fixe, mais le capital fixe s'use aussi bien que les capitaux circulants ».
  4. Je dis « peut » parce que dans certaines circonstances cet intérêt est déterminé par la loi de la rente foncière et peut disparaître, par exemple, sous l'action de la concurrence de terres nouvelles d'une grande fertilité naturelle.
  5. Voir James Anderson et Carey.
  6. Nés pour consommer les fruits de la terre. Horace : Epitres, 1.I, épitres 2, 27. (NdT)
  7. Voir les Anti-Corn-Law Prize Essays. Les lois sur les céréales eurent pour effet de maintenir artificiellement les prix à un niveau élevé. Cette situation fut favorable aux fermiers qui produisaient dans les conditions les plus avantageuses et qui profitèrent de la situation invariable que les lois avaient établie pour la grande masse des fermiers, qui à tort ou à raison comptaient sur ce prix moyen exceptionnel.
  8. John C. Morton, The Forces uses in Agriculture, conférence faite en 1860 à la Society of Arts de Londres et basée sur des documents authentiques recueillis chez 400 fermiers environ dans 12 comtés écossais et 33 comtés anglais.