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Diderot déplorait qu’« entre les hommes, l’indigence condamne les uns au travail, tandis que d’autres s’engraissent de la peine et de la sueur des premiers »<ref>Diderot, ''Principes de la philosophie morale'',1745</ref> mais, très légaliste, il n'envisageait que des petits pas, sauf à la fin de sa vie où il semble se radicaliser. De même pour Helvétius, qui souligne le problème de la répartition des richesses : « Ce n’est point de la masse plus ou moins grande des richesses nationales, mais de leur plus ou moins inégale répartition, que dépend le bonheur ou le malheur des peuples. »<ref>Helvétius, ''De l’homme'', 1772</ref> On peut également relever que [[w:Jean-Joseph-Louis Graslin|Graslin]] fut un des premiers à défendre une idée assez précise d'un [[impôt progressif]] [[Impôt sur le revenu|sur le revenu]].   
 
Diderot déplorait qu’« entre les hommes, l’indigence condamne les uns au travail, tandis que d’autres s’engraissent de la peine et de la sueur des premiers »<ref>Diderot, ''Principes de la philosophie morale'',1745</ref> mais, très légaliste, il n'envisageait que des petits pas, sauf à la fin de sa vie où il semble se radicaliser. De même pour Helvétius, qui souligne le problème de la répartition des richesses : « Ce n’est point de la masse plus ou moins grande des richesses nationales, mais de leur plus ou moins inégale répartition, que dépend le bonheur ou le malheur des peuples. »<ref>Helvétius, ''De l’homme'', 1772</ref> On peut également relever que [[w:Jean-Joseph-Louis Graslin|Graslin]] fut un des premiers à défendre une idée assez précise d'un [[impôt progressif]] [[Impôt sur le revenu|sur le revenu]].   
 
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[[Fichier:M0354 1951-31-299-2 4.jpg|vignette|387x387px|Représentation idéalisée de l'état de nature des « sauvages de la mer du Pacifique »]]
 
[[w:Jean-Jacques Rousseau|Rousseau]] influença beaucoup les intellectuels français à la veille de la [[Révolution française (1789)|Révolution]], notamment par son ''Contrat social'' et son ''Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes''. Il peint un tableau très critique des civilisations (« L’esprit universel des lois de tous les pays est de favoriser toujours le fort contre le faible, et celui qui a contre celui qui n’a rien »<ref>Jean-Jacques Rousseau, ''Émile ou De l'éducation'', 1762</ref>), et contrairement à d'autres, il considère que cet état civil est une construction sociale, qui ne découle pas de l'état de nature.  L'idée présente chez Rousseau que l'homme est originellement bon, mais avili par la société, est en fait une idée qui le précède et qui traverse tout le siècle, qui génère beaucoup de discours et d'utopies à base de « bons sauvages » ([[w:Nicolas Guedeville|Guedeville]], [[w:Claude Buffier|Buffier]]...), entre autres basées sur les échos des [[w:Mission jésuite du Paraguay|réductions jésuites du Paraguay]] ou de Tahiti (chez [[w:Denis Diderot|Diderot]]).<ref>LICHTENBERGER (A.), ''Le socialisme au dix-huitième siècle. Essai sur les idées socialistes dans les écrivains français du dix-huitième siècle, avant la Révolution,'' Paris, 1895.</ref><ref>DUCHET (M.), ''Anthropologie et histoire au siècle des Lumières,'' Paris, 1971.</ref><ref>RIHS (C.), ''Les philosophes utopistes. Le mythe de la cité communautaire en France au dix-huitième siècle,'' Paris, 1970.</ref><ref>VAN WIJNGARDEN, ''Les odyssées philosophiques en France entre 1616 et 1789,'' Amsterdam, 1932.</ref>
 
[[w:Jean-Jacques Rousseau|Rousseau]] influença beaucoup les intellectuels français à la veille de la [[Révolution française (1789)|Révolution]], notamment par son ''Contrat social'' et son ''Discours sur l’origine et les fondements de l’inégalité parmi les hommes''. Il peint un tableau très critique des civilisations (« L’esprit universel des lois de tous les pays est de favoriser toujours le fort contre le faible, et celui qui a contre celui qui n’a rien »<ref>Jean-Jacques Rousseau, ''Émile ou De l'éducation'', 1762</ref>), et contrairement à d'autres, il considère que cet état civil est une construction sociale, qui ne découle pas de l'état de nature.  L'idée présente chez Rousseau que l'homme est originellement bon, mais avili par la société, est en fait une idée qui le précède et qui traverse tout le siècle, qui génère beaucoup de discours et d'utopies à base de « bons sauvages » ([[w:Nicolas Guedeville|Guedeville]], [[w:Claude Buffier|Buffier]]...), entre autres basées sur les échos des [[w:Mission jésuite du Paraguay|réductions jésuites du Paraguay]] ou de Tahiti (chez [[w:Denis Diderot|Diderot]]).<ref>LICHTENBERGER (A.), ''Le socialisme au dix-huitième siècle. Essai sur les idées socialistes dans les écrivains français du dix-huitième siècle, avant la Révolution,'' Paris, 1895.</ref><ref>DUCHET (M.), ''Anthropologie et histoire au siècle des Lumières,'' Paris, 1971.</ref><ref>RIHS (C.), ''Les philosophes utopistes. Le mythe de la cité communautaire en France au dix-huitième siècle,'' Paris, 1970.</ref><ref>VAN WIJNGARDEN, ''Les odyssées philosophiques en France entre 1616 et 1789,'' Amsterdam, 1932.</ref>
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« Périssent donc enfin ces lois arbitraires, faites pour le bonheur de quelques individus au préjudice du genre humain, et périssent aussi ces distinctions odieuses qui rendaient certaines classes du peuple ennemies des autres. »<ref>Jean-Paul Marat, ''Plan de législation criminelle'', 1780</ref>
 
« Périssent donc enfin ces lois arbitraires, faites pour le bonheur de quelques individus au préjudice du genre humain, et périssent aussi ces distinctions odieuses qui rendaient certaines classes du peuple ennemies des autres. »<ref>Jean-Paul Marat, ''Plan de législation criminelle'', 1780</ref>
 
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L’influence de Rousseau dominait largement, chez [[w:Joseph Saige|Saige]]<ref>Joseph Saige, ''[https://books.google.fr/books/about/%C3%89l%C3%A9ments_du_droit_public_fran%C3%A7ais_par.html?id=lLv3zQEACAAJ&redir_esc=y Catéchisme du citoyen]'', 1788</ref>, [[Olympe de Gouge]]<ref>Olympe de Gouge, ''[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k42599j.texteImage Le bonheur primitif de l’homme ou les rêveries patriotiques]'', 1789</ref>... Les revendications égalitaires s'expriment dans les cahiers de doléances, dans le cadre de la convocation des [[états généraux]].<ref>Jean-François Lambert, ''Précis de vues générales en faveur de ceux qui n’ont rien'', 1789</ref><ref>Louis-Alexandre Duwicquet d'Ordre, ''La vie et les doléances d’un pauvre diable pour servir de ce qu’on voudra aux prochains états généraux'', 1789</ref><ref>Dufourny de Villiers, ''Cahier du quatrième ordre, celui des pauvres journaliers, des infirmes, des indigents, etc., de l’ordre sacré des infortunés'', 1789</ref> Certains prennent la défense du « quatrième ordre », la [[paysannerie]], appelant au [[Réforme agraire|partage des terres]].<ref>Restif de La Bretonne,  ''Le plus fort des pamphlets. L’ordre des paysans aux états généraux'', 1789</ref><ref>Anonyme, ''Nécessité et moyens d’établir une loi agraire, d’assurer la subsistance des pauvres, de réformer le clergé et la constitution militaire'', 1789</ref> Un utopiste prolixe comme [[w:Nicolas Edme Restif de La Bretonne|Restif de la Bretonne]] se contente finalement de proposer quelques timides mesures (limiter le [[droit de succession]] en ligne collatérale, fixer le prix des denrées...).<ref>Restif de La Bretonne,  ''Le thesmographe'', 1789</ref> [[François Boissel|Boissel]] déclame contre la propriété privée.
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L’influence de Rousseau dominait largement, chez [[w:Joseph Saige|Saige]]<ref>Joseph Saige, ''[https://books.google.fr/books/about/%C3%89l%C3%A9ments_du_droit_public_fran%C3%A7ais_par.html?id=lLv3zQEACAAJ&redir_esc=y Catéchisme du citoyen]'', 1788</ref>, [[Olympe de Gouge]]<ref>Olympe de Gouge, ''[https://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k42599j.texteImage Le bonheur primitif de l’homme ou les rêveries patriotiques]'', 1789</ref>... Les revendications égalitaires s'expriment dans les cahiers de doléances, dans le cadre de la convocation des [[états généraux]].<ref>Jean-François Lambert, ''Précis de vues générales en faveur de ceux qui n’ont rien'', 1789</ref><ref>Louis-Alexandre Duwicquet d'Ordre, ''La vie et les doléances d’un pauvre diable pour servir de ce qu’on voudra aux prochains états généraux'', 1789</ref><ref>Dufourny de Villiers, ''Cahier du quatrième ordre, celui des pauvres journaliers, des infirmes, des indigents, etc., de l’ordre sacré des infortunés'', 1789</ref> Certains prennent la défense du « quatrième ordre », la [[paysannerie]], appelant au [[Réforme agraire|partage des terres]].<ref>Restif de La Bretonne,  ''Le plus fort des pamphlets. L’ordre des paysans aux états généraux'', 1789</ref><ref>Anonyme, ''Nécessité et moyens d’établir une loi agraire, d’assurer la subsistance des pauvres, de réformer le clergé et la constitution militaire'', 1789</ref> Un utopiste prolixe comme [[w:Nicolas Edme Restif de La Bretonne|Restif de la Bretonne]] se contente finalement de proposer quelques timides mesures (limiter le [[droit de succession]] en ligne collatérale, fixer le prix des denrées...).<ref>Restif de La Bretonne,  ''Le thesmographe'', 1789</ref> [[François Boissel|Boissel]] déclame contre la propriété privée.{{double image|right|Le Pere Duchesne.jpg|140|Jacques René Hébert.JPG|130|Représentation du [[Le Père Duchesne (Révolution française)|Père Duchesne]] (à gauche), [[personnage type]] populaire dont le nom est repris par [[Jacques-René Hébert]] (à droite) comme titre de son journal.}}Lorsque la [[Révolution française|Révolution]] éclate, les [[Utopie|utopistes]] sont confrontés à des camps politiques entre lesquels il devient nécessaire de choisir. La posture de la rêverie n'est plus tenable, et cela conduit à des évolutions notables : certains comme [[w:Nicolas Edme Restif de La Bretonne|Restif de la Bretonne]] tournent vite à la [[contre-révolution]], Marat défend le [[libéralisme économique]] face aux plus socialisants, tandis d'autres comme [[Gracchus Babeuf|Babeuf]] évoluent vers le communisme révolutionnaire. Certains comme [[w:Claude Fauchet (1744-1793)|Fauchet]] du [[Cercle social (club révolutionnaire)|Cercle social]], ou [[François-Joseph L’Ange|L'Ange]], tout en étant parmi les plus socialisants, sont poussés vers la droite par horreur de la violence révolutionnaire.
 
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Lorsque la [[Révolution française|Révolution]] éclate, les [[Utopie|utopistes]] sont confrontés à des camps politiques entre lesquels il devient nécessaire de choisir. La posture de la rêverie n'est plus tenable, et cela conduit à des évolutions notables : certains comme [[w:Nicolas Edme Restif de La Bretonne|Restif de la Bretonne]] tournent vite à la [[contre-révolution]], Marat défend le [[libéralisme économique]] face aux plus socialisants, tandis d'autres comme [[Gracchus Babeuf|Babeuf]] évoluent vers le communisme révolutionnaire. Certains comme [[w:Claude Fauchet (1744-1793)|Fauchet]] du [[Cercle social (club révolutionnaire)|Cercle social]], ou [[François-Joseph L’Ange|L'Ange]], tout en étant parmi les plus socialisants, sont poussés vers la droite par horreur de la violence révolutionnaire.
      
Les [[sans-culottes]], qui furent l'avant garde de la révolution, n'avaient pas de vision économique claire. La faim les poussait à la révolte contre les riches « accapareurs » (gros [[marchands]]), mais ils étaient eux-mêmes presque tous des petits patrons, qui ne voyaient rien au delà de la [[Propriété privée|propriété]]. Au plus fort de leur radicalisation, ils opposaient un vague [[égalitarisme]] à la [[Centralisation du capital|concentration du capital]], en revendiquant essentiellement le [[Loi du maximum|contrôle des prix du pain]].
 
Les [[sans-culottes]], qui furent l'avant garde de la révolution, n'avaient pas de vision économique claire. La faim les poussait à la révolte contre les riches « accapareurs » (gros [[marchands]]), mais ils étaient eux-mêmes presque tous des petits patrons, qui ne voyaient rien au delà de la [[Propriété privée|propriété]]. Au plus fort de leur radicalisation, ils opposaient un vague [[égalitarisme]] à la [[Centralisation du capital|concentration du capital]], en revendiquant essentiellement le [[Loi du maximum|contrôle des prix du pain]].
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Dans leur lutte contre la noblesse féodale, les révolutionnaires jacobins ont pu se présenter comme des représentants, non pas seulement de leur [[classe sociale]], mais de tous les déshérités et opprimés. C’était vrai, dans une certaine mesure, puisqu’ils étaient en lutte à mort avec les partisans du retour à l’[[Ancien régime]]. Mais la Révolution donna finalement naissance à une [[République]] [[Bourgeoisie|bourgeoise]] qui réalisa non pas la justice et l’égalité éternelle et absolue mais l’égalité devant des lois le plus souvent faites pour protéger la propriété des possédants. Bien sûr c’était un immense progrès et le plus grand réalisable pour l’époque. Mais les grandes idées des philosophes étaient venues buter contre les faits [[Économie|économiques]] et sociaux. La nouvelle société n’était pas la société idéale rêvée par eux de la Justice et de la Raison.
 
Dans leur lutte contre la noblesse féodale, les révolutionnaires jacobins ont pu se présenter comme des représentants, non pas seulement de leur [[classe sociale]], mais de tous les déshérités et opprimés. C’était vrai, dans une certaine mesure, puisqu’ils étaient en lutte à mort avec les partisans du retour à l’[[Ancien régime]]. Mais la Révolution donna finalement naissance à une [[République]] [[Bourgeoisie|bourgeoise]] qui réalisa non pas la justice et l’égalité éternelle et absolue mais l’égalité devant des lois le plus souvent faites pour protéger la propriété des possédants. Bien sûr c’était un immense progrès et le plus grand réalisable pour l’époque. Mais les grandes idées des philosophes étaient venues buter contre les faits [[Économie|économiques]] et sociaux. La nouvelle société n’était pas la société idéale rêvée par eux de la Justice et de la Raison.
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==== Le communisme de Babeuf ====
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Même si la Révolution française était avant tout dominée par l'idéal petit-bourgeois de la république de petits propriétaires, marginalement, certains se battaient déjà une forme d'organisation [[collectiviste]]. C’est notamment le cas du « premier[[Communisme|communiste]] agissant », [[Gracchus_Babeuf|Gracchus Babeuf]].
Même si la Révolution française était avant tout dominée par l'idéal petit-bourgeois de la république de petits propriétaires, marginalement, certains imaginaient déjà une forme d'organisation [[collectiviste]]. C’est notamment le cas du « premier[[Communisme|communiste]] agissant », [[Gracchus_Babeuf|Gracchus Babeuf]].
      
==Révolution industrielle du 19<sup>e</sup> siècle==
 
==Révolution industrielle du 19<sup>e</sup> siècle==

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