Colonisation des Comores

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ComoresCarte.png

L'archipel des Comores, entre le continent africain et l'île de Madagascar, fut colonisé par la France au XIXème siècle. Il en reste l'île de Mayotte, TOM depuis 1958 et DOM depuis 2009.

1 Historique[modifier | modifier le wikicode]

1.1 XIXème siècle : colonisation française[modifier | modifier le wikicode]

Au début du XIXème siècle, l'archipel est gouverné par un sultanat basé sur l'île d'Anjouan. Mais il est menacé par les raids du royaume de Madagascar, et les puissances européennes tirent profit de ces guerres, et surtout de leur avantage technique, pour s'imposer. C'est la France qui dominera dans la région.

En 1816, le sultan d'Anjouan Abdallah Ier se rend sur l'île Bourbon (la Réunion) pour demander la protection de Louis XVIII. Le 25 avril 1841, Mayotte devient protectorat français : le sultan Adrian Tsouli y est contraint, et en échange il reçoit 5000 francs (d'époque) et la scolarisation de ses enfants à La Réunion. L'impérialisme français gagne par là un port stratégiquement important.

En 1866, la France étend sa domination sur l'archipel : Anjouan devient protectorat français, la marine est envoyée pour "convaincre" le sultan Saidi Abdallah bin Salim réticent.

Le 24 juin 1886, le Sultan de Grande Comore qui a réussi à unifier l'île, grâce aux Français, accepte, sous la pression, de passer sous protectorat français. Il est ensuite exilé pour ne plus revenir. Mohéli est également placée sous protectorat cette même année.

1.2 Tournant du XXème siècle : impérialisme renforcé[modifier | modifier le wikicode]

Les élites locales parviennent parfois à jouer d'une certaine marge de manoeuvre grâce à l'éloignement des métropoles et des conflits entre puissances. Mais les îles des Comores sont de plus en plus soumises à l'administration française, qui rationalise et affirme son pouvoir. Suite aux règles de partage de l'Afrique entre colonisateurs établies à la Conférence de Berlin de 1884, et au traité bilatéral franco-britannique de 1890, il est acquis que la France détiendra la zone des Comores et de Madagascar - qui sera envahie en 1895.

Les îles deviennent alors colonie de «Mayotte et dépendances», et vont être de plus en plus dédiées aux plantations coloniales, de plantes à parfums et de vanille principalement. Les plantations couvrent à l'époque près de 50% de la Grande Comore, 40% d'Anjouan, 20% de Mohéli. Les Comores sont d'autant plus intéressantes pour les sociétés exploitantes (comme la Bambao) que les lois y sont peu appliquées et la main-d'oeuvre moins chère par rapport à La Réunion.

Les colons dépossèdent entièrement les paysans comoriens de leurs terres, et les emploient à titre d'«engagés». La langue officielle devenu le français, l'enseignement passe de l'arabe au français. L'usage du swahili se poursuit cependant dans le milieu du commerce.

En 1904 les îles des Comores sont juridiquement unifiées par décret. Un second décré rattache officieusement les Comores à l'administration malgache, le 9 avril 1908.

1.3 1915 et 1940 : les révoltes[modifier | modifier le wikicode]

Après plusieurs exactions et abus, mais désirant néanmoins poursuivre la colonisation, la France se résout à faire surveiller les résidents par les Administrateurs de Mayotte. Pour ce faire la colonie de «Mayotte et dépendances» est rattachée par la loi du 25 juillet 1912 à la colonie de Madagascar. Peu à peu, les terres sont rétrocédées aux Comoriens.

Une révolte importante a lieu en 1915 en Grande Comore. La France envoie des gardes malgaches, puis un détachement de tirailleurs sénégalais, et dans le même temps demande à son administration de s'appuyer sur les notables locaux pour ramener la paix. Peu à peu, le mouvement s'effrite, et l'administration exile certains meneurs.

En mars-avril 1940, une grève éclate dans les plantations d'Anjouan, contre les conditions de travail quasi-esclavagistes et contre la volonté de l'administration de réquisitionner la population pour les exploitations. Le ton monte rapidement et la grève devient insurrection. Une délégation composée de notables locaux dirigés par l'inspecteur Thomas est envoyée par le gouvernorat pour calmer les insurgés. Un des membres les plus remarqués de cette délégation est Saïd Mohamed Cheikh, médecin issu de famille noble, qui se verra offrir des postes importants par l'État français.

1.4 1940-1974 : vers l'autonomie...
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Du 6 juin 1940 à 1942, l'administration coloniale est exercée par le régime de Vichy. Après 1942 celui-ci échoit, comme celui de Madagascar, au Royaume Uni jusqu'au 13 octobre 1946.

Parallèlement, des membres de l'élite locale demandent - sagement - plus d'autonomie, d'abord vis-à-vis du voisin colonisé Madagascar dont les Comores dépendent. C'est chose faite en 1946 et Dzaouzi devient la capitale du nouveau territoire, qui est directement représenté au parlement français par Saïd Mohamed Cheikh. Ces notables obtiennent également un Conseiller de la République (Jacques Grimaldi), et un Conseiller à l'Union française (Georges Boussenot, député de Madagascar en 1945-1946). En guise de démocratisation, un Conseil général, assemblée locale, est mis en place dans l'archipel pour représenter la population et discuter des problèmes locaux. Mais le véritable pouvoir est toujours détenu par l'administrateur supérieur de la République Française.

Le 15 juin 1953, plusieurs politiques comoriens osent sans y croire faire une déclaration commune demandant l’indépendance. En 1958, l’Assemblée territoriale des Comores choisit le statut de Territoires d'outre-mer, et en application de la loi-cadre, on crée le Conseil de gouvernement, organe exécutif toujours présidé par l'administrateur supérieur, entouré par des ministres désignés par le Conseil régional. Le poste de vice-président du Conseil de gouvernement, confié à Mohamed Ahmed est symbolique. Certains politiciens reprochent à la France de ne pas traiter les Comores comme les autres TOM.

En 1961, les îles obtiennent plus d'autonomie, et Cheikh devient Président du Conseil de Gouvernement, premier personnage du Territoire. Cheikh obtient davantage de marge de manoeuvre, surtout à partir de 1968, ce qui fait un peu bénéficier aux Comores de la fin des Trente glorieuses : le premier lycée ouvre en 1963 à Moroni, un second suit à Mutsamudu en 1970, le réseau routier commence à être bitumé...

1.5 1974 : indépendance, sauf à Mayotte
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Après Mai 68, la revendication de l'indépendance gagne du terrain. Cela amènera la France aux "Accords de juin 1973", prévoyant un référendum. Tous les Comoriens votent pour leur indépendance, sauf les mahorais, qui votent à 65% pour rester un TOM[1].

Cela tient sans doute à plusieurs facteurs profonds :

  • les indépendantistes sont majoritairement des intellectuels de Grande Comore, influencés par Zanzibar, tandis qu'à Mayotte, l'élite locale a des liens plus profond avec la bourgeoisie métropolitaine
  • en 1966, Saïd Mohamed Cheick a fait transférer la capitale des Comores de Dzaoudzi (Mayotte) à Moroni (Grande Comore), ce qui provoque la méfiance des élus de Mayotte envers les indépendantistes
  • à Mayotte, la population malgache sakalave est importante, et moins islamisée
  • la crainte de la misère après l'indépendance (« Tant qu’à être colonisés, autant que ça soit par un pays riche », phrase qui résume en partie le refus de l’élite politique mahoraise de rejoindre les autres îles des Comores dans l’indépendance)

Mais il est certain que la France a agit en coulisses pour conserver au moins une île dans ce secteur stratégique.

1.6 1974-2009 : évolution du statut et drame social
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L’impérialisme français finit par faire de Mayotte une base satellitaire (réception, écoutes, surveillance) dans l’océan Indien. La bourgeoisie française a donc besoin d'un contrôle accru par rapport à celui des TOM. C'est pourquoi en pratique beaucoup de pas sont faits vers la départementalisation. Celle-ci est réclamée de longue date par l'élite mahoraise, mais l'État français rechigne à accorder l'alignement des droits sociaux qui va avec.

Mais cet enjeu impérialiste provoque de véritables drames humains en « décrochant » politiquement et économiquement la population mahoraise de ses voisins. Depuis toujours, la population circule librement entre les différentes îles de l'archipel comorien.

Le gouvernement français commence à construire un mur « radar » pour stopper la circulation avec Anjouan (à 80 km). Ce qui débouche sur le « visa Balladur-Pasqua » qui met en place une machine à fabriquer des étrangers et fait de Mayotte une scandaleuse zone de non-droit pour les enfants en particulier. À Mayotte, les droits de protection des enfants sont bafoués. Ils peuvent être expulsés sans chercher leur filiation.

1.7 2009 : départementalisation et mouvement social
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En 2009 la départementalisation de Mayotte est actée par un référendum.

L’égalité en droit avec la métropole n’est qu’une lointaine perspective... une période transitoire de 25 ans est prévue pour harmoniser fiscalité, lois, etc. Le RSA (un quart de celui de la métropole) sera mise en place en janvier 2012. Le SMIC est de 85 % du salaire minimum de métropole, avec 35 000 personnes travaillant sur près de 200 000 habitants. Le travail clandestin est généralisé dans l’agriculture et le BTP, et Mayotte importe vingt fois plus qu’elle n’exporte. [2]

En 2010, 4 000 enfants ont été abandonnés sur l’île suite à la reconduite à la frontière de leurs parents. [3]

2 Notes et sources[modifier | modifier le wikicode]

http://www.convergencesrevolutionnaires.org/spip.php?article2378

Mayotte-Comores : une histoire néocoloniale, de Pierre Caminade, Survie, Éditions Agone (édition actualisée – 2001).