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Special pages :
Trois procès contre la Nouvelle Gazette rhénane
Auteur·e(s) | Karl Marx |
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Écriture | 24 novembre 1848 |
Neue Rheinische Zeitung n° 153, 26 novembre 1848, 2° édition
Cologne, 24 novembre
Il y a pour l'instant trois procès intentés à la Nouvelle Gazette rhénane - sans compter les poursuites judiciaires contre Engels, Dronke, Wolff et Marx pour des délits politiques soi-disant « hors de propos journalistique[1] ». On assure de source bien informée qu'il y a au moins encore une douzaine d'enquêtes ouvertes contre la « feuille scandaleuse », expression officielle du ci-devant procureur et véritable premier procureur Hecker. (C'est du Hecker tout pur.)
Premier crime. Attaque brutale à la « délicatesse » virginale de six gendarmes royaux prussiens et du roi du Parquet colonais, M. le premier procureur Zweiffel, - représentant du peuple in partibus infidelium[2]- qui dans l'intervalle ne siège ni à Berlin, ni à Brandebourg mais à Cologne, sur le Rhin ! Sur le Rhin ! Sur le Rhin ! C'est là que poussent nos vignes ![3] Et nous aussi, nous préférons le Rhin à la Spree et l'hôtel Disch à l'hôtel Mielenz[4].
Va pour la délicatesse des gens d'armes ! Quant à la « délicatesse » de M. Zweiffel, elle est pour nous un « noli me tangere[5] ! » Nous avons été indignés comme il se doit de ces votes de méfiance indélicats par lesquels ses électeurs au second degré l'ont amené à se retirer. Véritables gardiens de la « délicatesse » virginale de M. Zweiffel, nous le prions de repousser officiellement la déclaration de M. Weinhagen, de Clèves. M. Weinhagen a déclaré dans la Nouvelle Gazette rhénane, sous sa signature, qu'il avait à faire connaître des faits blessants pour l'« honneur et la délicatesse » de M. Zweiffel; qu'il pouvait prouver ces faits, mais qu'il devait s'abstenir de les rendre publics tant que M. Zweiffel cherchait protection dans l'article du Code pénal selon lequel toute dénonciation, même la mieux fondée, sera poursuivie comme calomnie, si elle ne peut pas être prouvée par un jugement du tribunal ou des documents authentiques. Nous en appelons donc à l'« honneur et à la délicatesse » de M. Zweiffel !
Deuxième crime. Hecker le simple et Hecker le double[6].
Troisième crime. Ce crime qui a eu lieu en 1848 est poursuivi à la demande expresse du ministère d'Empire. Le crime Schnapphahnski ![7] Le feuilleton cité comme criminel !
Le ministère d'Empire, dans son acte d'accusation, a reconnu, paraît-il, la Nouvelle Gazette rhénane comme le plus mauvais journal de la « mauvaise presse ». Nous, pour notre part, nous déclarons que le pouvoir impérial est le pouvoir le plus comique des pouvoirs comiques.
- ↑ Marx fait ici un jeu de mots. En allemand unzeitgemäss signifie intempestif ; Marx déforme ce mot en « unzeitungsgemäss » que nous essayons de rendre par « hors de propos journalistique ».
- ↑ Dans les pays occupés par les infidèles. Se dit de l'évêque dont le titre est purement honorifique et ne donne droit à aucune juridiction. On dit par ironie; ministre, ambassadeur, etc. ... in partibus pour désigner un fonctionnaire sans fonction.
- ↑ Extrait du Rheinweinlied (Chant sur le vin du Rhin) de Mathias Claudius.
- ↑ Disch, nom d'un hôtel à Cologne. Mielenz, nom de l'hôtel de Berlin où l'Assemblée nationale prussienne siégea le 15 novembre 1848.
- ↑ « Ne me touchez pas ! » Expression tirée de l'Évangile de Saint Jean (XX, 17). Ce sont les paroles de Jésus à Madeleine. Cette expression s'emploie quand on parle d'une chose à laquelle une sorte de religion empêche de toucher.
- ↑ cf. l'article intitulé « Le procureur général Hecker et la N.G.R. », page 75.
- ↑ À la fin de septembre 1848, le ministre d'Empire de la Justice enjoignit au Parquet de Cologne d'engager une procédure contre la rédaction de la Nouvelle Gazette rhénane. Le motif invoqué était une série de feuilletons qui, sous le nom du « Chevalier Schnapphahnski » raillait le prince Lichnowski, réactionnaire connu. Ce feuilleton : « La vie et les exploits du célèbre chevalier Schnapphahnski », rédigé par Georg Weerth, parut en août, septembre et décembre 1848 et en janvier 1849, sans nom d'auteur dans la N.G.R.