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Sur la Révolution chinoise
I. Le regroupement des forces de classes[modifier le wikicode]
Au VIIe Exécutif Elargi de l’I. C., pour la première fois, depuis le début de l’existence de l’Internationale, on a adopté une résolution détaillée sur la révolution chinoise, contenant une analyse de l’économie chinoise, du rôle de l’impérialisme en Chine, une analyse et une appréciation des différentes forces sociales de classe, une appréciation des rapports actuels entre les différentes classes et des pronostics, c’est-à-dire la prévision des nouveaux regroupements de classes nécessaires au cours de la révolution chinoise.
Au VIIe Plénum, on a déterminé les grandes lignes tactiques pour le Parti communiste de Chine. Je commence par le VIIe Exécutif, pour montrer par avance l’appréciation que l’Internationale Communiste avait donnée, relativement longtemps avant le coup d’Etat de Tchang Kaï Chek, des forces de classe en Chine et des regroupements nécessaires. Le VIIe Exécutif partit, pour prendre ses décisions, de ce point de vue que le développement de la lutte des classes, le développement du mouvement agraire et du mouvement ouvrier, conduiraient inévitablement au passage de la bourgeoisie libérale du front uni national révolutionnaire, dans le camp de la contre-révolution, c’està-dire feraient entrer toute la révolution chinoise dans une étape nouvelle de son développement. Au cours de cette étape, les forces de classes du front révolutionnaire s’appuieront sur le bloc de la classe ouvrière, de la paysannerie et de la petite-bourgeoisie des villes (artisans, petits commerçants, petits intellectuels).
Le coup d’Etat de Tchang Kaï Chek ne fut rien d’autre que l’expression, sous une forme brutale, de ce passage prévu par le VIIe Exécutif de la bourgeoisie libérale au camp de la contrerévolution. Il ne faut, en aucun cas, se représenter le coup d’Etat de Tchang Kaï Chek comme la trahison d’un général isolé. Cette trahison a été l’expression militaire d’un profond regroupement des classes dans le pays, regroupement inévitable, étant donné le développement du mouvement paysan dans les villages, et du mouvement ouvrier dans les villes.
Le dernier Plénum avait surtout à tirer les leçons des événements et à déterminer la tactique du P. C. chinois et de l’Internationale Communiste dans la nouvelle situation. Il fallait, avant tout, apprécier exactement le coup d’Etat de Tchang Kaï Chek. On indiqua que le coup d’Etat de Tchang Kaï Chek marquait le passage à l’autre camp d’un groupe social très important, qui a eu dans le stade précédent du développement du mouvement révolutionnaire en Chine une grande importance politique et qui, au cours du premier stade de développement de la révolution chinoise, a joué le rôle de vrai chef dans la lutte contre l’impérialisme. La bourgeoisie libérale passa au camp de la contrerévolution et le mouvement de libération nationale du peuple chinois en a éprouvé une crise inévitable. Cette crise s’accompagna d’une défaite partielle de la révolution chinoise. Actuellement, nous avons affaire à une autre combinaison des forces sociales, et toute ligne tactique, toute mesure tactique qui partirait des anciens rapports de force serait contrerévolutionnaire et amènerait inévitablement la défaite. Le coup d’Etat de Tchang Kaï Chek a été déterminé par toute une série de facteurs, mais en premier lieu par le développement du mouvement ouvrier, par le développement du mouvement paysan et par la politique des impérialistes. Ces facteurs ont exercé une forte pression sur le front dé la bourgeoisie libérale et ont rendu plus facile la désertion de la bourgeoisie hors du front unique national révolutionnaire.
II. La révolution agraire et le mouvement paysan[modifier le wikicode]
Le Comité Exécutif de l’I. C. pense que la question centrale de la révolution chinoise, en ce qui concerne ses forces motrices intérieures, est aujourd’hui la révolution agraire. Il est aujourd’hui absolument clair que le mouvement paysan, le problème de la nouvelle répartition du sol, la confiscation du sol des différents petits propriétaires fonciers, moyens et grands, que ces revendications, ces mots d’ordre et ces tâches sont au point central de nos devoirs quotidiens. Il est inutile d’indiquer ici en détail quelle importance a la paysannerie dans la population chinoise ; il est superflu de caractériser en détail les relations d’économie sociale dans les campagnes chinoises. Je voudrais me contenter de dire que la marche des événements chinois et le développement du mouvement .paysan réfutent entièrement, par exemple, le point de vue du camarade Radek, qui nie l’existence de survivances féodales en Chine et qui, par suite, laissait complètement inexpliquée l’extraordinaire acuité du mouvement paysan en Chine.
La révolution agraire est donc au point central des événements. La paysannerie avec ses masses immenses entre sur la scène de l’histoire. La paysannerie, au cours du développement de la révolution chinoise deviendra, sous la direction de la classe ouvrière, une des forces vivantes les plus importantes. Il fallait que l’Exécutif examine les moyens de résoudre la question agraire en Chine. La résolution que le Plénum a adoptée dit en toute clarté que, du point de vue du développement de la Révolution chinoise,, les choses les plus importantes sont aujourd’hui la confiscation du sol, la vraie destruction de l’ancien appareil d’Etat dans les villages, la nouvelle répartition du sol par en bas, par les paysans eux-mêmes, par les organisations paysannes, par les comités paysans qui se forment maintenant chaque jour en plus grand nombre. Il faut affirmer ces choses avec une force particulière, car, même parmi les communistes chinois et surtout parmi les membres de la gauche du Kuomintang, subsiste l’illusion que la révolution agraire ne pourra se réaliser que sous forme d’une révolution d’en haut, ou bien qu’elle doit être retardée jusqu’à l’union complète de la Chine. Cette illusion aboutit à entraver le développement du mouvement paysan chinois. Il suffit de citer le dernier discours du camarade Tan Pin Shang, ministre de l’Agriculture du gouvernement de Hankéou, où il n’a pas dit un seul mot sur la nécessité de la confiscation réelle du sol. Dans les cercles du gouvernement de Hankéou, oui, même dans certains cercles des communistes chinois, il y a encore aujourd’hui des tendances à ne pas dépasser les bornes des rapports qui existent aujourd’hui, à maintenir les choses sur la voie d’un règlement pacifique, et à résoudre le problème de la révolution agraire au moyen de décrets. Cela à une époque où la guerre civile vient justement de commencer à la campagne. Jamais on n’a vu pareille solution dans l’histoire d’une révolution, et cela ne se passera pas non plus ainsi en Chine.
Nous pouvons encore citer le discours d’un autre chef du P. C. chinois, le camarade Chen Du Siu, qui exprimait, il n’y a pas longtemps, devant le congrès du parti une conception encore plus étrange. Il disait que le développement de la révolution agraire devait attendre jusqu’à ce que les troupes révolutionnaires chinoises soient entrées dans Pékin et qu’elles aient chassé Tchang Tso Lin de la capitale.
Il est absolument clair que le développement de la révolution agraire, de notre point de vue, du point de vue de la lutte contre l’impérialisme, de la lutte contre la contre-révolution libérale bourgeoise, c’est-à-dire contre Tchang Kaï Chek, du point de vue de l’affermissement de la défense et du développement intérieur du gouvernement de Hankéou, du point de rue de le mobilisation des plus grandes forces possibles dans notre lutte contre la contre-révolution, de tous ces points de vue, le développement de la révolution agraire est la condition essentielle pour résoudre victorieusement les tâches que nous dicte aujourd’hui la révolution chinoise.
Nous ne pouvons pas résoudre aujourd’hui un seul problème sans le développement d’une révolution agraire porté par les masses. Même un processus élémentaire comme celui de l’organisation de nos forces armées nous conduit inévitablement à la nécessité du développement de la révolution agraire, pour cette raison bien simple que le gouvernement de Hankéoù ne peut sans cela gagner la confiance des paysans, ramasser, autour de lui des troupes de soldats véritablement fidèles, assurer ses succès militaires ultérieurs. Le problème central, la tâche centrale, le mot d’ordre central c’est donc notre mot d’ordre du, développement de la révolution agraire. La méthode pour développer la révolution, c’est la confiscation du sol par les paysans eux-mêmes, la suspension du fermage, la prise du pouvoir dans les villages par les unions paysannes et les comités paysans, l’armement des masses paysannes, la défense à main armée du sol qu’on aura ravi aux propriétaires fonciers, etc., etc.
III. Les organisations de masses, le Kuomintang et le P. C.[modifier le wikicode]
Naturellement, les problèmes d’organisation se posent en même temps devant nous. Si notre orientation principale va maintenant vers le développement d’un, mouvement de masses, il est bien compréhensible que nous, devons nécessairement nous orienter vers une croissance énergique et le plus rapide possible des organisations de masses, c’est-à-dire des unions paysannes, des comités paysans, des syndicats ouvriers des unions d’artisans et de petits commerçants, etc. Dans ces organisations de masses, celle de la classe ouvrière et de la paysannerie doivent naturellement former la base. En rapport avec cette orientation, on comprend parfaitement que le Comité Exécutif devait traiter aussi la question de la réorganisation du Kuomintang. Le Kuomintang avait, au moment de sa formation, une structure sociale extrêmement originale et aussi une structure organique extrêmement originale. Il contenait à la fois des éléments purement bourgeois qui formaient la base sociale de classe de ce qu’on appelait l’aile droite, et aussi des ouvriers, des paysans, des petit-bourgeois et des intellectuels. Le Kuomintang, tel qu’il fut organisé par Sun Yat Sen sur la base des combinaisons militaires les plus différentes, était une organisation dont on pouvait tout dire, sauf qu’elle reposait sur le régime de la démocratie intérieure. Quelques chefs ne disposaient pas seulement de tout le pouvoir, mais ils étaient en fait complètement indépendants des organisations locales du Kuomintang. Il n’y avait jamais de vraies réunions, ni de vraies élections. Il faut maintenant changer cette situation de fond en comble, d’autant plus que, sans ce changement radical, le Kuomintang ne serait pas en état de jouer son rôle historique et serait inévitablement éliminé.
La scission du front national révolutionnaire, le passage de la bourgeoisie au camp de la contre-révolution s’accompagna d’une scission dans le Kuomintang. Cette scission du Kuomintang s’est exprimée par le fait que Tchang Kaï Chek a fondé son propre Kuomintang libéral bourgeois de droite. Dans le Kuomintang de gauche, il resta des petit-bourgeois, les ouvriers, les paysans, quelques groupes d’intellectuels bourgeois radicaux et les restes des couches radicales de la grande bourgeoisie. Ces survivants jouent un rôle relativement secondaire.
Quelle est notre tâche pour nous orienter vers la révolution agraire ? Notre tâche, c’est de transformer rapidement le Kuomintang de gauche en le submergeant sous les paysans et les prolétaires. Cette prolétarisation, cet envahissement par les paysans, ne doit pas se faire seulement parmi les membres, mais aussi dans tous les organismes dirigeants de la province et du centre.
Avant-hier, un camarade, membre de la délégation envoyée par l’Internationale Communiste en Chine, est venu nous voir. Il affirme que le rapport des forces dans la direction du Kuomintang de gauche est loin de correspondre à la structure intérieure du Kuomintang, du point de vue des véritables rapports de classes parmi les masses de ses membres. Il nous rapporte que les communistes exercent une grande influence sur les organisations de masses importantes qui sont adhérentes au Kuomintang ou qui se trouvent formellement sous son influence, c’est-à-dire sur cette force de masse qui commence à jouer dans le développement de la révolution chinoise, un rôle de plus en plus grand. Et naturellement, nos communistes chinois ne sont pas des bolcheviks à cent pour cent, nous le savons bien. Ce serait une illusion de demander, même à des communistes, cent pour cent de bolchevisme. Notre parti, lorsqu’il s’est formé, était un groupe d’intellectuels et d’ouvriers qui s’étaient acquis toute l’expérience marxiste de tout le mouvement social-démocrate de l’Europe Occidentale. Les fondateurs de la social-démocratie russe étaient des marxistes fortement cultivés. Les bases marxistes de notre parti existaient déjà au moment de sa fondation. Notre Parti communiste de Chine est issu d’une tout autre base. Il est né du parti populiste de Sun Yat Sen, sans avoir connu les fondements du marxisme. Ce n’est que dans les derniers temps qu’a commencé, grâce au contact avec l’Union Soviétique et avec l’Internationale Communiste, la formation d’un cadre marxiste. Il ne nous faut pas oublier les particularités de cette formation du P. C. chinois. La nécessité de développer la révolution agraire, la nécessité de pousser le développement du mouvement ouvrier, la croissance des organisations de masses, la nécessité d’utiliser les traditions positives du Kuomintang, organisation où la classe ouvrière se trouve en. liaison directe avec la paysannerie et la petite-bourgeoisie et peut diriger leurs forces, tout cela a conduit le Plénum à décider qu’il est nécessaire de réorganiser de façon complète le Kuomintang sur la base d’une participation collective de toutes les formes des organisations de masses, c’est-à-dire des syndicats, des unions paysannes let des comités paysans, des organisations de soldats, des organisations de petits artisans, etc.
Le Comité Exécutif a fixé, en tenant compte de tout cela, les tâches du parti communiste et les formes particulières de ses rapports avec le Kuomintang de gauche. Le Comité Exécutif a indiqué que le parti communiste avait souvent peur du développement d’un mouvement de masse, et en première ligne, du développement du mouvement paysan. A côté de cette trop grande prudence et des hésitations dans la direction du parti communiste lui-même, il y avait aussi une trop grande prudence dans la critique des hésitations et des demi-mesures des gens de la gauche du Kuomintang. Le Comité Exécutif a dit clairement dans sa résolution que le parti communiste, en tant qu’avant-garde du prolétariat, doit naturellement marquer son indépendance comme parti de la classe ouvrière, qu’il ne doit pas se contenter de la critique des hésitations et des demi-mesures des petitbourgeois du Kuomintang, mais qu’il doit, pour ces hésitations, critiquer âprement les chefs du Kuomintang parce que c’est la seule manière qu’aient les artisans et les ouvriers pour pousser en avant ces petit-bourgeois radicaux de gauche dans la direction d’une lutte de masses conséquente des paysans.
IV. La force armée et la Révolution[modifier le wikicode]
Un problème fortement compliqué, c’est le problème de l’armée et celui des forces armées en général. Il faut être là-dessus absolument clair, même la gauche du Kuomintang n’est pas un bloc ouvrier et paysan. Elle contient encore une foule de chefs radicaux bourgeois. Nous avons également la même situation dans le gouvernement de Hankéou. Le gouvernement de Hankéou est loin d’être une dictature de la classe ouvrière et de la paysannerie. Il peut se développer dans cette direction. Il comprend encore des chefs radicaux bourgeois dont on doit dire qu’une partie d’entre eux peut passer à l’ennemi et selon toute vraisemblance, y passera. Mais si on peut dire cela de quelques chefs du Kuomintang de gauche, de quelques membres du gouvernement actuel d’Hankéou, il faut particulièrement montrer cette possibilité a propos de l’appareil de l’armée. En ce qui concerne le Kuomintang; je ne crois pas que de nouvelles scissions soient maintenant possibles, qui puissent entraîner des couches importantes. C’est impossible, parce que les membres du Kuomintang, dans leur masse (je /ais une différence entre la masse et la tête du Kuomintang) forment véritablement un bloc des ouvriers, des paysans et de la petite-bourgeoisie des villes. Mais le fait caractéristique dans la situation présente, c’est que l’armée, l’état-major, les cadres d’officiers sont loin d’être une force dans laquelle on puisse avoir une absolue confiance.
Il faut bien se représenter le caractère particulier de la situation. Nous savons naturellement qu’on peut utiliser de vieux généraux, mais sous certaines conditions, et en particulier, sous la condition d’un affermissement général du pouvoir révolutionnaire, sous la condition que les bases économiques de l’ancien régime (féodalisme) soient disparues et sous la condition que la base d’une existence politique indépendante de ces généraux ait disparu. La situation, aujourd’hui, sur le territoire du gouvernement de Hankéou, est tout à fait autre. Peut-on dire que là-bas, actuellement, la position de la révolution bourgeoise se soit affermie, au moins économiquement? Non. A la campagne, les grands et les moyens propriétaires fonciers, leurs gendarmes et leur police, n’ont pas été chassés. En général, le gouvernement d’Hankéou n’a pas encore la force suffisante. Et, tant que ce renforcement continuera dans les formes militaires, il ne sera pas encore assuré, tant qu’il n’y aura pas à l’intérieur de l’armée même un nombre suffisant de chefs fidèles. Cela a une grande importance. Dans ce sens, la structure de l’armée de Hankéou ne ressemble pas du tout à la structure de notre armée rouge. Dans son ensemble, l’armée marche avec le gouvernement d’Hankéou. Mais il n’y a aucune garantie pour que cela continue à marcher ainsi sans conflit plus ou moins important, sans trahison. Bien mieux, les trahisons sont très vraisemblables et, dans certaines mesures, inévitables.
V. La révolution chinoise et l’opposition[modifier le wikicode]
Le point central des explications du camarade Trotsky est le suivant : Tchang Kaï Chek a infligé une défaite à la révolution chinoise parce que le Comité Central du P.C. de l’U.R.S.S. et la direction de l’Internationale Communiste ont suivi une tactique « criminelle », « traîtresse », « honteuse ». D’après Trotsky, la tactique de l’Internationale Communiste et du C. C. mérite tous ces qualificatifs parce que le C. C. et la direction de l’Internationale se sont placés, vis-à-vis de la bourgeoisie libérale, sur un point de vue menchéviste et non bolchéviste. Trotsky rappelle la position de Lénine et des bolchéviks vis-à-vis de la bourgeoisie libérale dans la révolution démocratique de 1905 et apporte une citation où Lénine dit à peu près :
« Les menchéviks disent : « Cette révolution est une révolution bourgeoise et. par conséquent nous devons soutenir la bourgeoisie » ; les bolchéviks disent : « Cette révolution est une révolution bourgeoise et, par conséquent, il est nécessaire de lutter contre la bourgeoisie contrerévolutionnaire. »
Cette citation de Lénine est absolument juste. Les divergences entre nous et les menchéviks pendant la Révolution de 1905 tournèrent autour de la ligne qu’il fallait suivre dans nos rapports avec la paysannerie et avec la bourgeoisie libérale. Nous opposions au tsarisme et à la bourgeoisie, parmi elle à la bourgeoisie libérale devenue contre-révolutionnaire, un bloc plébéien des ouvriers et des paysans. Les menchéviks, au contraire, soutenaient la bourgeoisie libérale et ne comprenaient pas le rôle de la paysannerie. Telle était la principale divergence entre nous.
Si Lénine n’avait écrit que cela, si la Chine était l’Empire russe de 1905, si la bourgeoisie chinoise avait été, de 1911 à 1926, analogue à notre bourgeoisie libérale, nous mériterions dans tout la caractéristique de menchéviks. Il s’agit du fait que Trotsky, de même que toute notre opposition, ne représentent pas, dans cette question, un point de vue léniniste, méconnaissent les faits et, par conséquent, troublent toute la question.
Il faut faire une différence entre la révolution comme la Révolution russe de 1905 et une révolution de caractère anti- impérialiste dans un pays semi-colonial et « dépendant ». Nous trouvons dans Lénine des indications tout à fait claires et précises pour ce qui concerne cela. Lénine a dit que nous avions le droit de passer avec la bourgeoisie, non seulement des accords, mais même des alliances directes (c’est ce qu’a dit et écrit Lénine au IIe Congrès mondial de l’Internationale Communiste), sous la condition indispensable qui resterait à assurer l’indépendance de notre parti, l’indépendance des organisations ouvrières, etc. Non pas des accords, mais aussi des alliances ! Pourquoi ? Pour la simple raison que le rôle de la bourgeoisie libérale dans ces pays n’est pas du tout le même que le rôle de la bourgeoisie libérale en Russie en 1905. En 1904, la bourgeoisie se permet encore de fronder contre le tsarisme, mais, après la grève d’octobre 1905, la bourgeoisie libérale devient une force ouvertement contre- révolutionnaire. En considérant le lait que notre bourgeoisie n’a pas lutté une seule fois véritablement contre le tsarisme, qu’elle ne pouvait pas non plus le faire, qu’elle devait passer directement et au rythme le plus rapide dans le camp de la contre-révolution, nous avons ainsi fixé notre célèbre tactique vis-à-vis de la bourgeoisie libérale.
Maintenant que Tchang Kaï Chek a commis sa trahison, est-ce que la bourgeoisie chinoise est devenue contre-révolutionnaire ? Oui, elle est devenue contre-révolutionnaire. Mais, de 1911 à 1926, a-t-elle joué un rôle contre-révolutionnaire ? Qui peut affirmer cela ? Elle vient maintenant de passer au camp de la contre-révolution, mais, pendant de nombreuses années, elle a joué un rôle tel que nous étions obligés de la soutenir. Nous étions obligés de l’utiliser, obligés de former un bloc avec elle. Le parti communiste venait de naître, le mouvement ouvrier faisait ses premiers pas, et la bourgeoisie libérale luttait contre les seigneurs féodaux et contre les impérialistes. Elle menait même, contre eux, la lutte armée. Les troupes de Tchang Kaï Chek, relativement peu de temps avant sa trahison, ont entrepris la campagne du Nord. La question se pose : devions-nous ou non soutenir la campagne du Nord ? Devions-nous soutenir cette campagne du Nord, dont Radek dit que c’est une brillante action révolutionnaire ?
La bourgeoisie libérale a joué en Chine, pendant des années, un rôle objectivement révolutionnaire, et elle s’est ensuite épuisée. Elle était hors d’état’ de continuer ce rôle, comme l’a fait la bourgeoisie libérale russe dans la Révolution de 1905. Le fait que .la bourgeoisie jouait ce rôle s’explique par la combinaison particulière des forces sociales en Chine, par le caractère antiimpérialiste et national libérateur de la révolution chinoise. Il s’explique aussi par une série de causes qui n’existaient pas au moment de la Révolution russe en 1905. Lénine a bien dit que la différence entre nous et les menchéviks, c’est que les menchéviks soutiennent la bourgeoisie libérale, tandis que nous sommes contre tout accord avec elle. Mais Lénine disait cela pour la Révolution russe de 1905. Il disait tout autre chose pour la révolution en Orient.
Ainsi, lorsque l’opposition soutient la thèse de l’impossibilité d’un accord avec la bourgeoisie libérale en Chine, c’est une interprétation tout à fait fausse des leçons de Lénine. C’est une méthode tout à fait fausse de ne faire aucune différence entre la Russie et la Chine, entre 1905 et 1927, entre le mouvement de la bourgeoisie libérale russe et celui de la bourgeoisie nationale révolutionnaire chinoise. Si l’on se place sur ce point de vue, que la nuit tous les chats sont gris, il n’y a pas d’analyse possible, ni de compréhension des particularités du mouvement chinois.
La thèse qui soutient qu’il n’y a absolument aucun accord possible avec la bourgeoisie chinoise est donc fausse.
Mais il y a une autre question qu’on peut nous poser avec pleine raison. On peut dire que, jusqu’à un certain temps, on pouvait marcher avec la bourgeoisie nationale, mais vous dites vous-mêmes qu’elle a dû en fin de compte passer au camp de la contre-révolution. C’est ce que disait également le VIIe Exécutif Elargi. Mais qu’avez-vous fait pour défendre les prolétaires et les paysans, qu’avez-vous fait pour empêcher leur défaite ? Est-ce que vous ne vous trouvez pas pris dans - le rouage des événements? Est-ce que la trahison de Tchang Kaï Chek ne vous a pas surpris? N’est-ce pas la conséquence de vous être laissé entraîner par votre tactique dans un bloc avec Tchang Kaï Chek? Il faut poser ces questions. Ces questions sont pleinement et complètement justifiées. Maintenant, il faut aller un peu au fond des choses. L’argument le meilleur marché contre nous, c’est celui-ci : à Shanghaï, les ouvriers ont subi une défaite, donc votre tactique ne valait pas un centime.
Il faut repousser absolument cette façon de poser la question. Dans notre Révolution de 1917, nous avons mené une politique juste. Voyions-nous, avant les Journées de Juillet, où nous conduisait le développement ? Oui, nous le voyions. Et pourtant, on nous a battus pendant les Journées de Juillet. Est-ce un fait ou non? C’est un fait. Pourquoi nous a-t-on battus? Pour une raison bien simple. Malgré que notre politique fût juste, nous ne sommes pas arrivés à ramasser nos forces en assez grand nombre pour pouvoir dominer nos ennemis, lorsqu’ils ont ouvert le front contre nous. Nous n’étions pas encore assez grands. Le rapport des forces de classes, malgré la justesse de notre politique, ne nous permettait pas d’être assez forts pour battre notre ennemi.
En Chine, nos camarades ont commis un grand nombre de fautes et même des fautes d’apparence sérieuse dont on peut et dont on doit parler lorsqu’on veut traiter à fond la question de ces fautes. II n’y a aucun doute qu’on n’a pas fait tout le nécessaire pour développer un mouvement de masses dans les villes et dans les campagnes. Il n’y a aucun doute que la direction du P. C. chinois, malgré toutes les directives de l’Internationale communiste, à été, dans une certaine mesure, jusqu’à entraver la révolution agraire. Mais il faut ici affirmer catégoriquement que, même si on avait fait tout ce qu’il était possible de faire, nous n’aurions pas pu, à l’époque actuelle, avoir la victoire dans une bataille directe avec Tchang Kaï Chek. Le VIIe Exécutif Elargi avait donné ses directives : développement d’un mouvement de masses, repousser les éléments de droite hors du Kuomintang, conquérir les positions stratégiques dans l’armée, armer la classe ouvrière et la paysannerie, créer des organisations de masses d’ouvriers et de paysans. L’Internationale Communiste a indiqué cette ligne, la seule qui présentait des garanties politiques. Mais, même si on avait fait tout le possible pour réaliser ces choses, il faut se représenter clairement la véritable situation de fait.
Shanghaï est le point central de tous ces événements.
A Shanghaï, il y avait les forces suivantes: 1° Les forces des impérialistes armés jusqu’aux dents ; 2° les forces de Tchang Kaï Chek, toute l’armée (à l’exception de quelques détachements qui étaient plus ou moins proches des ouvriers et des paysans) ; Tchang Kaï Chek avec une autorité immense qu’il s’était acquise dans les tâches précédentes de la révolution. De plus, il y avait le front des troupes du Nord, etc.
Le camarade Zinoviev proposait malgré tout dans ses thèses comme une garantie particulière, ceci : le prolétariat de Shanghaï aurait dû organiser l’insurrection contre Tchang Kaï Chek. C’est, à notre opinion, une politique absolument absurde. Que serait-il arrivé, si le prolétariat de Shanghaï avait commencé une insurrection directe contre Tchang Kaï Chek ? Elle aurait été étouffée dans l’œuf. Car il est parfaitement clair, que dans une telle situation, il y aurait eu une union solide de toutes les forces anti-ouvrières, de toutes les forces dirigées contre le développement ultérieur de la révolution chinoise. Les forces de Tchang Kaï Chek, de Tchang Tso Lin, des impérialistes étrangers, et, en général, de toutes les forces hostiles à la révolution se seraient réunies pour détruire par le fer et par le feu l’avant-garde du prolétariat de Shanghaï.
On nous dit- que notre tactique n’est pas léniniste. Mais, jamais Lénine n’a approuvé la tactique d’une insurrection à n’importe quel moment. Celui qui le dit, dit un non-sens. Je crois que nos oppositionnels eux-mêmes ne pensent pas ce qu’ils affirment. Lorsque Zinoviev se console en disant que la classe ouvrière d’Amérique et d’Europe aurait sauvé le prolétariat de Shanghaï au cas d’un soulèvement, c’est une imbécillité monstrueuse. En Amérique, il n’y a qu’un petit parti communiste. Tous les cadres réformistes des chefs ouvriers sont des gens achetés qui trahissent la cause de la classe ouvrière. Et vous voulez que ce soit cette canaille qui ait sauvé la classe ouvrière chinoise? Vous voulez qu’ils défendent la révolution chinoise, alors qu’eux, les chefs du prolétariat américain, ils ont, les premiers, demandé qu’on mène une enquête sur nos institutions soviétiques ? Vous devez pourtant savoir que, malheureusement, les masses du prolétariat américain, sont encore derrière ces vauriens. Il faut aussi penser que même le prolétariat d’Europe est plus lent que cela à se mouvoir. Il faudrait mentir ouvertement pour se servir d’un tel argument. Nous savons très bien comment peut arriver une aide. Elle ne vient pas en un jour ou en deux jours, elle vient après des mois et même des années. Les impérialistes auraient pu écraser dans le sang en une seule journée, dans un conflit armé, les ouvriers de Shanghaï. Semer de telles illusions au sujet d’une aide rapide, bâtir là-dessus une plate-forme politique, présenter cela au lieu de la tactique opposée par nous, nous accuser de trahison, parce que nous n’avons pas voulu adopter cette tactique aventurière, c’est tomber dans le fumier de la plus basse démagogie, c’est perdre tout sentiment marxiste et tout sentiment de responsabilité prolétarienne.
La dernière question dans laquelle l’opposition se lance contre nous dans une attaque, c’est la question du mot d’ordre des soviets. Ce mot d’ordre résonne de façon extraordinairement radicale et à cause de cela, nos héros s’y sont particulièrement attachés. Ils ont osé le mot d’ordre de bâtir immédiatement des soviets d’ouvriers, de paysans et de soldats, et, comme nous ne tenions pas cela pour juste de donner ce mot d’ordre dans la période actuelle, ils nous ont, à cause de cela, accusés de trahison. Une simple remarque : en 1923, à la veille des grands événements d’Allemagne, à la veille d’une révolution prolétarienne (non pas une révolution comme celle de Chine, non dans un pays comme en Chine, mais en Allemagne), dans un pays où la classe ouvrière est la majorité, dans un pays qui possède des centres industriels puissants et une industrie puissamment développée, dans un pays qui a déjà traversé une révolution en 1918, et où il y a déjà eu des soviets, le camarade Trotsky était résolument contre le mot d’ordre des Soviets. Il a donné alors contre ce mot d’ordre des arguments dont l’expérience a montré l’inopportunité. Pourtant, il n’y avait là aucune trahison. Il disait alors les choses suivantes : le mouvement englobe de grosses masses, ce mouvement se passe par l’organisation des conseils d’usines, le mouvement de masses s’exprime par la poussée élémentaire de ses conseils d’usines, les conseils d’usines sont donc la forme d’organisation qui nous a été donnée concrètement par ’ le cours des événements. Nous devons, en développant les forces, travailler en nous appuyant sur ces organisations de masses de caractère particulier que sont les conseils d’usines, et on verra ensuite si les soviets sortiront de ce mouvement ou s’ils seront inutiles. C’est ce que disait Trotsky. Lénine était d’avis que la révolution, même la révolution prolétarienne, ne prendra pas toujours et absolument la forme des soviets. D’un autre côté, la forme des soviets ne doit pas absolument signifier la dictature du prolétariat. En particulier, Lénine croyait que la dictature du prolétariat pouvait prendre, en Angleterre, par exemple, la forme du pouvoir des syndicats, ou n’importe quelle autre forme originale. Lénine était, sur cette question, très prudent.
C’est une autre question de savoir s’il était exact de juger ainsi dans la situation concrète de l’Allemagne, en 1923. Je laisse maintenant cette question de côté. Je voulais seulement montrer en toute certitude que le camarade Trotsky était contre le mot d’ordre des soviets à l’origine d’une révolution prolétarienne. Et pourtant, personne n’a accusé Trotsky pour cela de tous les péchés mortels.
Mais, maintenant, le camarade Trotsky ose accuser l’Internationale, qui croit que le temps n’est pas encore venu de lancer en Chine le mot d’ordre des soviets, de trahison, etc., etc. N’est-ce pas, pour être doux, une confiance en soi un peu grosse de la part du camarade Trotsky ?
Pourquoi croyons-nous qu’il est inexact de lancer maintenant et immédiatement le mot d’ordre de la formation de soviets ? Nous croyons qu’actuellement, dans la phase actuelle de la révolution, où le gouvernement d’Hankéou ne représente pas encore la .dictature du prolétariat et de la paysannerie, où il n’est qu’au début de ce développement, il y a une forme historique spécifique d’organisation qui nous a été donnée par tout le cours de ce développement: le Kuomintang. Et c’est justement une forme qui est extraordinairement élastique, qui a de grandes traditions révolutionnaires, qui unit les ouvriers, les paysans et les petit-bourgeois et qui possède encore une grande possibilité d’extension de tous les côtés. Devons-nous dire aujourd’hui déjà que nous crachons sur toute cette crème et que nous voulons chercher quelque chose d’autre? Il faut résoudre cette question. Ici commencent nos divergences tactiques. On pourrait, par exemple, nous proposer la tactique suivante: le parti communiste sort du Kuomintang, il organise des soviets à côté du Kuomintang, contre lui ou même en lutte directe avec lui. Nous voyons clairement où mène cette ligne. Nous voyons clairement que cracher sur le Kuomintang et, par conséquent, aussi sur le gouvernement d’Hankéou, c’est les livrer aux gens de droite et qu’en fait, si on fait cela, on entre aussitôt en conflit avec le gouvernement d’Hankéou et il faut nous orienter vers son renversement. C’est une tactique. Le camarade Zinoviev et le camarade Trotsky écrivaient dans leur première thèse qu’ils nous ont proposée, qu’il est nécessaire de donner le mot d’ordre des soviets et, en même temps, dans le même écrit, ils écrivaient qu’il était nécessaire de soutenir à tout prix et par tous les moyens le gouvernement d’Hankéou, d’en faire un centre organique de la révolution, d’où l’on pourrait lutter contre les Cavaignac, c’est-à-dire contre Tchang Kaï Chek.
Il est absolument clair que ces deux choses sont absolument inconciliables. Puis, le .camarade Trotsky, dans ses propres thèses, qu’il a répandues à l’Exécutif, il faudrait mieux dire dans son article, nous fait cette proposition directe (il a, comme on dit, abattu toutes ses cartes) : « Il est actuellement nécessaire de créer un double pouvoir au moyen de la création d’un centre du pouvoir des soviets contre Hankéou. Hankéou n’est plus rien, la gauche du Kuomintang est une bagatelle, il nous faut créer le centre d’un autre pouvoir, et pour cela, les soviets nous sont nécessaires. »
Il y a là tout un tissu de contradictions publiques. Dans les premières thèses (Trotsky plus Zinoviev), on nous propose la marche suivante : il faut soutenir Hankéou de toutes nos forces et, en même temps, créer des soviets contre Hankéou. Il faut considérer Hankéou comme le centre organique de la révolution et, en même temps, organiser sa destruction. Dans l’article du camarade Trotsky cette contradiction est résolue, et au moyen d’un coup de baguette magique: le Hankéou actuel, de même que l’aile gauche actuelle du Kuomintang, sont tout simplement déclarés comme non existants. Après cela, on comprend comment il est possible de parler de double pouvoir.
En tout cas, le camarade Trotsky, deux ou trois jours après sa proposition sur le soutien de Hankéou, a abattu ses cartes et demandé qu’on s’oriente ouvertement vers le renversement de ce centre en organisant un double pouvoir. Ainsi se découvre le vrai contenu du mot d’ordre des soviets tel qu’il le comprend. Pourtant, on ne peut pas juger ainsi. On peut apprécier de différente façon les différents courants du Kuomintang de gauche. Mais on ne peut nier que c’est une vaste organisation de masse. Lorsque le camarade Zinoviev travaillait au Comintern. il écrivait que le Kuomintang comptait 400.000 membres. Depuis, le Kuomintang a fait des progrès extraordinaires. Lors de la scission du Kuomintang de droite, il n’a perdu que des chefs, des représentants de la bourgeoisie libérale. Mais les masses populaires sont restées dans le Kuomintang. Le gouvernement de Hankéou conduit à l’heure actuelle le combat. Ses généraux sans doute peuvent le trahir, mais toute la bourgeoisie internationale elle-même est obligée de le reconnaître. Comment peut-on le mettre hors de compte ? Nous croyons que Trotsky commet ici une grande faute, tout comme il se trompait en 1905, lorsqu’il voulait sauter par-dessus la révolution bourgeoise démocratique et la paysannerie. Tout le monde connaît sa théorie de la révolution permanente et sa formule de 1905 : « A bas le tsar !
Vive le gouvernement ouvrier ! »
Maintenant, il saute de même par-dessus le Kuomintang, il saute par-dessus le gouvernement de Hankéou qu’il déclarait, deux jours auparavant, être « le centre qui pouvait battre les Cavaignac ». Nous croyons qu’une de nos tâches principales est actuellement de démocratiser le plus largement possible le Kuomintang en développant la révolution agraire, en organisant des comités paysans et des unions paysannes dans la province, en armant les masses, etc. Naturellement, il peut y avoir encore des scissions. Il y en aura sans doute. On ne peut même pas écarter l’hypothèse que le gouvernement de Hankéou sera désorganisé par ces scissions ou battu par ses ennemis. Il peut se faire que, par suite de la résistance d’une partie du Kuomintang de gauche à la révolution agraire par en haut, il devienne impossible de continuer à soutenir ce gouvernement dans son ancienne composition. En théorie, rien de tout cela n’est exclu. Mais il ne s’ensuit pas qu’il soit nécessaire de cracher sur le Kuomintang, organisation de masse spécifiquement chinoise. Trotsky, en 1923, ne comprenait pas très exactement les caractères particuliers du développement allemand, lorsqu’il voulait remplacer les soviets par les conseils d’usines. Et maintenant, il ne voit pas les vrais caractères spécifiques, qui existent déjà, du [déve- caractères, particuliers. Sic une ligne manque]
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Encore quelques remarques sur les derniers événements de Chine. L’armée nationale révolutionnaire du gouvernement de Hankéou peut remporter de très grandes victoires. La situation du gouvernement de Hankéou est, malgré tout, encore assez difficile. Le danger militariste est encore grand. Les troupes se trouvent entre les mains de chefs qui ne sont pas toujours suffisamment sûrs. Les officiers et les généraux se dressent contre le développement de la révolution agraire. Le soulèvement de Tchang Cha a créé un nid contre révolutionnaire que d’autres peuvent suivre. D’un autre côté, l’a situation financière et économique est extrêmement difficile. L’entretien de l’armée coûte à lui seul beaucoup d’argent. Il est politiquement impossible de prendre aux paysans ce qui est nécessaire à l’armée sans les payer. Dans le rayon de Hankéou, centre du mouvement révolutionnaire, il y a de grandes fabriques textiles et de grandes mines. La grande bourgeoisie a fermé la plupart des fabriques. Elle est partie à Shanghai et elle a retiré ses dépôts des banques. Une partie de la bourgeoisie moyenne, et même certaines couches de la petite-bourgeoisie se sont également enfuies. La vie économique en souffre. Nous avons écrit, dans notre résolution, qu’il fallait, dans ces cas-là, faire passer les fabriques et les entreprises dans la possession de l’Etat. C’est vite dit, mais il y a encore certaines « catégories » dont on a besoin, par exemple, du capital industriel, car il faut acheter des matières brutes, installer et payer les ouvriers, etc. Cette situation amène une foule de difficultés. Le gouvernement de Hankéou est obligé de manœuvrer vis-à-vis de la petite et même en partie vis-à-vis de la moyenne bourgeoisie.
Les communistes chinois doivent avant tout mettre résolument fin aux hésitations dans leurs propres rangs. Il faut s’orienter avec décision vers le développement du mouvement paysan de masses, vers la prise du sol. Toute autre tactique serait actuellement criminelle. Sur cette base, il faut maintenant former des troupes armées fidèles et réorganiser le Kuomintang Seule, cette base peut servir de contrepoids contre les scissions, les trahisons, les désertions, etc. Les communistes chinois doivent, en conservant le bloc avec la petite- bourgeoisie (c’est-à-dire en lui garantissant qu’on ne touchera pas à sa propriété et en garantissant le sol des soldats des armées nationales) faire tout leur possible pour secouer les masses, les entraîner dans la lutte, transformer la lutte en une véritable armée populaire, réprimer autant qu’on en aura la force toute tentative contre-révolutionnaire, s’appuyer surtout sur la haine révolutionnaire des masses contre les grands propriétaires fonciers, les féodaux et les contre- révolutionnaires.
L’intervention de nos camarades de l’opposition a été si extraordinairement acerbe que, je le répète, même nos camarades les plus corrects, ceux qui n’aiment pas du tout la lutte, ont dit qu’il fallait mettre fin à ce bavardage. La grande majorité était pour des sanctions beaucoup plus dures encore contre l’opposition. Après que le Comité Exécutif eut adopté une résolution contre l’opposition, Trotsky a déclaré que l’opposition mènerait le combat jusqu’au bout. Telles sont actuellement les positions.
Comme il s’agit de choses très sérieuses, et comme notre opposition va jusqu’à dire qu’il ne faut pas poser la question de l’unité en général, mais de l’unité « sur une base léniniste », mais comme ce qu’elle considère comme une base léniniste, c’est sa base à elle, on voit où va le voyage et jusqu’où il peut mener. Nous nous sommes crus non seule ment en droit mais même obligés de prendre une résolution sur l’intervention de .l’opposition. Cette résolution a été adoptée par l’Exécutif contre une seule voix, la voix de Vouïovitch, qui est lui-même condamné dans la résolution. Nous devons dire que nous avons donné à l’opposition la plus grande possibilité de s’exprimer. Ses orateurs ont toujours eu trois quarts d’heure ou une heure de temps de parole et ils ont parlé plusieurs fois. Tous les documents dont j’ai parlé, des écrits qui ont plusieurs centaines de pages, ont été répandus. Tous les délégués les ont lus, ils ont écouté tous leurs arguments. Nous, nous sommes résolus à reprendre la lutte contre 1’opposition, parce que toute cette musique, si elle est claire pour nous, pouvait ne pas être aussi claire peur beaucoup de nos camarades étrangers. Nous avons mené la lutte jusqu’au bout et, à la fin, il était visible que tous les délégués sortaient renforcés dans leur point de vue que l’on ne pouvait plus tolérer ces agissements et qu’il fallait au moins appliquer le minimum des mesures contenues dans la résolution de l’Exécutif.
Nous croyons même que ce masque de dignité que quelques camarades croyaient apercevoir personnellement chez Trotsky, sa pose « chevaleresque », sa défense courageuse de son propre point de vue, etc., nous croyons que même tout cela a été mis en pièces. Aujourd’hui, personne ne croit plus l’opposition. Le 16 octobre, l’opposition a donné « sa promesse solennelle », et aujourd’hui, elle est là première à cracher sur « la parole d’honneur » qu’elle a donnée au parti. Le 16 octobre, l’opposition a promis solennellement qu’elle n’aurait plus rien à faite avec le petit groupe d’Urbahns et de Maslow. Aujourd’hui, au contraire, elle est en relations intimes avec ce groupe et l’organe central de ce groupe va devenir l’organe central de l’opposition. Aujourd’hui, l’opposition accuse le C. C. de notre parti et la direction de l’I. C. de trahison. Elle accuse le C. C. de l’Internationale Communiste d’avoir marché à une certaine étape de la révolution chinoise avec la bourgeoisie. Mais, tout le monde sait que les oppositionnels eux-mêmes étaient, à cette période, membres des organismes dirigeants du P. C. de l’U. R. S. S. et de l’Internationale Communiste. Ils ont pris part à tout ce travail. Au dernier Plénum du Comité Exécutif, ils ont brûlé leurs dernières cartouches. Leurs vertus chevaleresques, ont été démasquées au Plénum. On a arraché à l’opposition le masque sous lequel elle luttait contre la direction de l’Internationale et contre le C. C. de notre parti. Aussi, l’Exécutif de l’internationale a-t-il soudé davantage encore les cadres de nos partis communistes. L’Internationale Communiste sortira consolidée de cette étape de sa lutte intérieure.
II va de soi que des faits aussi caractéristiques font sur chacun une impression profonde. Nous sommes naturellement en face de difficultés immenses. L’impérialisme anglais et tous ses vassaux se préparent contre nous, Nous avons contre nous les forces de Tchang Tso Lin, les relations entre l’Angleterre et l’Union Soviétique sont rompues. Les événements se développent avec une rapidité surprenante. Mais le camarade Trotsky écrit dans ses thèses la phrase suivante : « Le plus dangereux de tous les dangers, c’est... le régime intérieur dans le P. C. de l’U. R. S. S. et dans l’Internationale Communiste... » Quand on a une pareille perspective, quand on voit là le danger principal, si le régime intérieur du P. C. de l’U.R.S.S. et de l’I. C. est l’ennemi principal, alors, marchons contre cet ennemi. Chamberlain et tous les autres ennemis sont à l’arrière-plan. On peut encore attendre avant de lutter contre eux.
Bien que l’opposition nous ait embêtés, bien qu’elle ait fortement ralenti les travaux du Plénum, le Plénum a cependant examiné toutes les questions importantes avec attention et il les a résolues en tenant compte des faits, comme doit le faire une direction de l’internationale Communiste. C’est pourquoi nous espérons que plus nos partis communistes croissent, plus nos forces se consolident, plus la répétition de 1914 s’éloigne de nous. Il n’y aura plus de 1914. En 1927 et en 1928, l’Internationale Communiste lancera dans la balance sa parole bolchéviste, au cours des batailles décisives ! (Applaudissements prolongés.)