Salut à Franz Mehring et Rosa Luxemburg

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Le 27 février (1916) Franz Mehring avait 70 ans. Le publiciste le plus remarquable de la social-démocratie allemande et en même temps le plus brillant historien de son développement historique et politique entrant dans sa huitième décennie à l'époque de la crise la plus cruelle du socialisme mondial et par dessus tout de la social-démocratie allemande. Laissez-nous dire dès maintenant : si Mehring nous est si cher et si proche maintenant ce n'est en tant qu'historien ou publiciste émérite du socialisme allemand : le sol est trop brûlant sous nos pieds pour regarder derrière nous et considérer les gens selon leurs mérites historiques ; nous avons rompu immédiatement avec plusieurs personnalités honorées, — non seulement en tant qu'adversaires idéologiques, mais en tant qu'ennemis politiques. Si l'historien des luttes internes de la social-démocratie allemande nous est si proche maintenant c'est parce que dans la lutte présente, aujourd'hui, il a courageusement et sans hésitation pris la position que nous considérons comme le devoir socialiste et l'honneur révolutionnaire. Dès le début de la guerre Mehring s'est prononcé, dans de nombreux articles et discours, contre cette trahison, renforcée à la hâte par les eunuques autoritaires des instances du parti, sous le nom pompeux de «paix civile». Avec Rosa Luxemburg il a publié un numéro du journal «L'Internationale» dont le nom était tout à la fois un programme et un défi à la politique du parti du 4 août. Dans une période d'écroulement menaçant, de l'apostasie des uns et de la faiblesse passive des autres, l'intervention de Mehring contre la politique «des instances du parti» a fourni un appui inestimable au réveil de l'opposition sur l'aile gauche, qui est maintenant le véritable support de l'honneur du prolétariat allemand.

Dans cette lutte, avec Mehring, il y avait Rosa Luxemburg, qui maintenant, après un an d'emprisonnement a retrouvé la liberté — pour une nouvelle lutte. Tous deux — Mehring et Luxemburg — ont été séparés de nous par les tranchées du militarisme creusées par les classes dirigeantes. Mais dans cette lutte que nous menons contre l'Etat de classe maculé de sang frais et poursuivi de nouvelles malédictions; ce combat que nous menons contre ses maîtres, ses défenseurs et ses fervents esclaves Mehring et Luxemburg sont du même côté de la tranchée passant au travers de tout le monde capitaliste.

Dans les personnes de Franz Mehring et de Rosa Luxemburg nous saluons le noyau spirituel de l'opposition révolutionnaire allemande avec laquelle nous sommes liés par une indissoluble fraternité des armes.

Léon Trotsky