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Problèmes d’avant-conférence
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Auteur·e(s) | Léon Trotski |
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Écriture | 9 juin 1938 |
Lettre au S.I. (8059), dictée en français, avec la permission de la Houghton Library.
Source : Œuvres - T. XVIII (EDI)
Source : Œuvres - T. XVIII (EDI)
Mots-clés : Lettre, Quatrième internationale
Cher Ami,
- La réponse de Diego [Rivera] concernant Eiffel[1] vous a été envoyée depuis longtemps. Il me semble un peu, par vos lettres, que le S.I. se sent quelque peu sur la défensive envers Vereeken . C'est faux. Il faut prendre l'offensive d'une manière tranquille, amicale, mais catégorique et implacable. J'aurais proposé de formuler un document spécial englobant toutes les fautes de Vereeken sur le plan politique, sur le plan organisationnel, sur le plan personnel.
- Sneevliet souligne qu'on lui propose de participer à la conférence seulement avec voix consultative. Je crois que, sur ce point, il faut faire tout de suite une concession, c'est‑à‑dire lui proposer la voix délibérative, naturellement à la condition qu'il engage, comme tous les autres, à respecter les décisions communes. Je n'ai pas la moindre illusion sur la bonne (plutôt la mauvaise) volonté de Sneevliet. Mais il ne faut pas lui permettre de rejeter même 1/100 de responsabilité pour la rupture sur nous. Il faut aussi élaborer un document spécial énumérant toutes les tentatives de soulever une discussion théorique et politique avec lui, toutes ses fautes, toutes ses accusations fausses, ses actes de grossièreté et de déloyauté envers diverses sections et camarades. Un document pareil serait d'une grande utilité.
- Si Sneevliet me paraît définitivement perdu pour le mouvement révolutionnaire (je serais heureux de me tromper, mais c'est à Sneevliet de démontrer mon erreur), je n'ai pas encore la même impression sur Vereeken. Peut‑être ai‑je encore des illusions. En tout cas, il faut faire une dernière tentative de le sauver pour le mouvement. Mais cette tentative peut réussir à la seule condition que l'on lui montre une fois pour toutes que nous en avons assez de son sectarisme, opportunisme, individualisme, anarchisme. En même temps, je ne crois pas que nous puissions l'accepter pour le nouveau S.I. Il doit à mon avis recevoir un avertissement.
- Que se passe‑t‑il avec Dauge ? S'agit‑il d'une véritable maladie ou d'un conflit intérieur ? Malgré toutes ses fautes provenant d'un passé social-démocrate, Dauge est politiquement supérieur à Vereeken. Ses articles, bien qu'il parle un peu trop de Iui‑même, ont toujours un objectif politique, c'est‑à‑dire d'action, tandis que Vereeken ne donne que des commentaires abstraits, scolastiques, qui ne mènent à rien, ce qui stérilise La Lutte ouvrière belge.
- Quelle est l'attitude de Lesoil ? Je ne puis m'imaginer qu’il soutient la politique de Vereeken envers le P.O.U.M. , Sneevliet, etc.
- La section russe doit naturellement être représentée dans les mêmes conditions qu'à la conférence précédente. Les amis sur place doivent régler qui sera (seront) le (les) délégués. On peut très bien accepter deux délégués.
- Il serait bon que le secrétariat invite à la conférence, à titre personnel, Diego Rivera.
- Je ne puis nullement me solidariser avec le boycottage de Der einzige Weg de la part des dirigeants de notre section allemande. Quelle que soit l'origine de la revue, elle existe, elle représente la IV° Internationale et elle est utile. Il faut donc la soutenir. Mais je ne me solidarise aucunement avec la composition de la rédaction et les procédés techniques (cinq copies, etc.)[2] . Je comprends que les camarades allemands ne veuillent pas accepter ces conditions pour envoyer leurs représentants dans la rédaction. C'est leur droit en attendant la décision de la conférence. Mais boycotter la revue existante, c'est criminel. Le camarade Held[3] m'a énuméré les fautes de la rédaction. Il me semble avoir raison sur certains points. Mais il s'agit de questions secondaires, de fautes de rédaction et nullement de principe. Je continue à penser que l'attitude du camarade Adolphe dans cette question ne fut pas juste. Comme permanent du S.I., il aurait dû avoir une attitude beaucoup plus prudente dans la question allemande[4] . J'espère qu'une commission spéciale de la conférence pourra régler cette question.
- ↑ Eiffel était le pseudonyme de l'ethnologue allemand Paul Kirchhoff (1900‑1972), ancien dirigeant de la section allemande, qui avait rompu en 1934 et était arrivé au Mexique en novembre 1936 ; il avait accusé Trotsky de dicter à la section mexicaine une politique opportuniste destinée à « assurer » son asile ! Diego Rivera et Octavio Fernàndez qui voyaient en lui l'inspirateur du dirigeant de la section mexicaine, L. Galicia, l'accusaient d'être un agent du G.P.U. Cette accusation avait provoqué une certaine émotion en Europe et le S.I. avait demandé des éléments, que Rivera avait été chargé de fournir. Notons la réserve de Trotsky qui n'expliquera que plus tard qu'il s'agissait, à ses yeux, d'une attaque sans fondement contre un sectaire sans espoir.
- ↑ Trotsky avait appris que le comité de rédaction de la revue Der einzige Weg, créée par le S.I. avec les sections suisses, tchèques et autrichiennes avait des exigences véritablement maniaques sur le plan technique, par exemple la remise de cinq exemplaires de chaque article proposé, etc.
- ↑ La revue avait été fondée par le S.I. en tant que revue théorique de langue allemande. Les dirigeants de la section allemande à Paris, Johre‑Fischer, considéraient qu'il s'agissait d'une entreprise dirigée contre eux et n'avaient pas tout à fait tort. Johre‑Fischer boycottaient la revue. Heinz Epe, qu'on appelait Walter Held (1912‑1942), réfugié en Norvège où il avait beaucoup rencontré Trotsky, soutenait de façon générale Johre‑Fischer, mais collaborait aussi à Der einzige Weg. Il avait informé Trotsky sur cette question.
- ↑ Cette lettre, formellement adressée au S.I., l'était au premier chef à son secrétaire administratif, Adolphe (R. Klement) lequel avait bel et bien abusé de son poste au S.I. pour régler ses comptes avec Johre‑Fischer.