Offensive de la contre-révolution et victoire de la révolution (1849)

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Cologne, le 9 mai.

La contre-révolution marche vite, mais la révolution va encore plus vite.

Si la contre-révolution a obtenu à Dresde des avantages qui laissent présager sa victoire, si, à Breslau , elle a établi état de siège, censure et loi martiale grâce à un putsch, fruit réussi d'une provocation, la révolution est en mesure de présenter de tout autres victoires.

Nous ne voulons pas parler de la rébellion ouverte de la territoriale qui va s'amplifiant rapidement en Prusse rhénane, rébellion qui s'est emparée justement des cantons les plus noirs et blancs; nous ne voulons pas parler du mouvement de l'Allemagne du Sud, trahi de toutes parts par les gouvernements, par la bourgeoisie, par l'Assemblée de Francfort elle-même; nous voulons seulement parler de ces grands événements qui, faisant irruption de l'extérieur, peuvent accorder aux petits mouvements allemands, isolés, trahis, vendus, une unité et un vigoureux soutien; nous voulons parler de la révolution magyare et de la Révolution française.

Tandis que la révolution magyare remporte victoire sur victoire et, qu'après la récente et décisive bataille (qui doit avoir eu lieu le 5 ou le 6 devant Presbourg) elle va se diriger droit sur Vienne qu'elle libérera - la France soudain s'engage à nouveau, ouvertement et en plein jour, dans un mouvement en plein développement. L'évolution souterraine de ces derniers mois cesse; la défaite de l'armée française devant Rome[1] dévoile et compromet tout le gouvernement actuel; le peuple rentre en scène - le peuple, le dernier juge souverain; et que ce soit par les élections ou par la révolution ouverte, le peuple français donnera sous peu au mouvement un élan qui sera ressenti par toute l'Europe.

Les dynastes européens ne verront que trop tôt que le peuple élu de la révolution est toujours le même - la révolution française de 1849 ne les interpellera plus avec des périodes lamartiniennes, mais avec des canons.

  1. Le Pape Pie IX avait vu sa popularité ruinée lorsqu'il avait refusé de déclarer la guerre aux Autrichiens. Son ministre Rossi fut assassiné et le lendemain les républicains réclamaient la convocation d'une Assemblée constituante et la guerre contre l'Autriche. Le Pape fut assiégé dans son palais. Il s'enfuit un peu plus tard, demanda asile au roi des Deux Siciles et se refusa à toute transaction. L'Assemblée constituante réunie à Rome proclama la république le 9 février 1849. Le triomphe des républicains à Rome, puis peu après, à Florence, eut pour contre-coup la reprise de la guerre nationale dans l'Italie du Nord. Vainqueurs à Novare, les Autrichiens furent bientôt maîtres de l'Italie du Nord. Ils occupèrent Parme, Modène, Florence et la Toscane, tout le Nord des États de l'Église. Le Pape les engageait à marcher sur Rome. C'est alors que le gouvernement français (Louis-Napoléon Bonaparte était alors président de la République) décida d'intervenir. Une petite armée commandée par Oudinot fut débarquée à Civita-Vecchia le 25 avril 1849. L'expédition avait officiellement un double objet : prévenir l'intervention autrichienne, réconcilier le pape avec ses sujets. En fait, il s'agissait de rétablir le pape. En raison de l'intransigeance du pape, et sous la pression du parti catholique français, l'expédition aboutit à ce résultat paradoxal : une guerre de la République française coutre la République romaine. Oudinot mit le siège devant Rome, défendue par Garibaldi. Après un mois de combats (3 juin-3 juillet 1849) les Français entrèrent à Rome. Le pape fut remis en possession du pouvoir.