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Special pages :
Lettre de Moscou de S, 25 janvier 1930
Auteur·e(s) | Opposition de gauche |
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Écriture | 25 janvier 1930 |
Je vous envoie quelques nouvelles. D'abord la plus ancienne : lors de la commémoration d'Octobre, un millier environ de nos camarades ont été "retirés de la circulation" dans toute l'Union soviétique. C’est réjouissant, n'est‑ce pas ? Et cela montre les bons sentiments qui prévalent.
Vous savez sans doute qu'il n'y a pas longtemps, les deux mousquetaires[1] ont publié une déclaration où, une fois de plus ‑ combien en tout ? ‑ ils rejoignaient le parti. Voilà ce qui s'est produit. (…) Quand Zinoviev a dû présenter sa déclaration à la réunion de sa cellule, il y avait beaucoup de présents; on lui a donné vingt minutes. Il a commencé à sa façon : "Narrer mon autobiographie, ce serait faire toute l’histoire du parti". Cette introduction a été très applaudie. Au bout de vingt minutes, il n'était pas encore arrivé au 3° congrès. On prolongea son temps de parole. Il a parlé trois heures, souvent interrompu par des applaudissements. A la fin, il a fait comprendre par des phrases soigneusement calculées que l'Opposition, bien qu'elle ait commis des fautes, avait eu en général raison. Ainsi, conclut‑il, "nous luttions non contre le parti, mais contre la droite". Le lendemain, il a été convoqué chez les autorités supérieures qui lui ont lavé la tête et il a fallu du savon noir. Puis il a proposé sa déclaration. Le secrétaire de cellule a été qualifié de conciliateur.
Avec Kamenev, les choses se sont passées différemment. Pendant la réunion, il a eu six minutes et pas une seconde de plus pour exposer son cas. Mais on ne sait comment, on a volé chez lui une lettre privée (il n'a pas de chance avec ses documents privés[2]) où il y avait entre autres cette phrase : "L.D. avait raison de dire qu'on ne peut vraiment rien faire dans le parti". L'affaire a été évoquée au B.P. On voulait même l'exclure. Mais fort opportunément il avait rédigé sa déclaration et la tempête s'est apaisée. Voilà comment se conduisent les "sages" du parti. Leur vie est vraiment cocasse, en fait : il suffit de les faire boire.
Quant à nous, notre moral est excellent. Nous suivons le conseil du vieux Spinoza que vous nous avez donné : "Ni rire, ni pleurer, mais comprendre". Pour ce qui est de pleurer, nous ne pleurons pas. Pour ce qui est de rire, cela nous arrive. On ne peut pas s'empêcher de rire, même si c'est bien jaune, quand on lit dans la Pravda que le paysan moyen tue son bétail et détruit tous ses biens parce qu'il a la ferme intention de rejoindre le kolkhoze. C'est par enthousiasme qu'il sacrifie son bétail. Saisi par la grande ferveur de la "construction socialiste" et de la "ligne générale", il vend tout pour se préparer à la collectivisation intégrale. On ne peut s'empêcher de rire de l'"explication marxiste" donnée à ces phénomènes troublants. Quant au "comprendre" de Spinoza, nous comprenons la situation de la façon suivante.
Il faut réaliser aussi vite que possible le projet d'appel au parti et à la classe ouvrière. Cet appel doit être aussi bref que possible pour pouvoir atteindre toute la classe ouvrière, tout le parti. Il nous faut dire au "chef" non seulement les causes objectives, mais aussi les responsables directs, en les nommant.
Dans cet appel, voilà ce qu'il faut mettre en lumière. Le régime du parti, la situation de la classe ouvrière, l’industrialisation, la collectivisation intégrale, la situation à la campagne, l'ordre d'éliminer le koulak et le nepman en tant que classe au moment où, grâce à la politique centriste, les paysans pauvres et moyens sont ligués contre nous et où, grâce à cette même politique, les liens avec la classe ouvrière commencent à s'affaiblir. Il nous faut crier de toutes nos forces que le centrisme est en train de couper la branche sur laquelle repose le régime soviétique tout entier.
En un mot, il nous faut dire que Staline est en train de détruire la dictature du prolétariat. Il me semble qu'il faut aussi souligner dans cet appel qu'il sera possible de sortir de l'impasse où le centrisme a mené le parti et le pays. Les questions seront l’amélioration de la situation de la de la classe ouvrière dans le domaine politique et économique, la démocratie ouvrière, le vote secret dans le parti et peut-être les syndicats et un cours léniniste dans le pays. Quant à l’introduction par voie administrative du socialisme dans le pays sur une base technique très faible, il faut en finir avec cette idiotie. Il faut rapporter l'ordre de collectivisation intégrale : nous pourrions nous casser la tête dans cette voie. L'ordre de liquidation du koulak par des directives d'en‑haut, au moment où le lien s'affaiblit avec la paysannerie pauvre et moyenne et où la classe ouvrière subit de la part de l'appareil une pression constante, doit être condamné comme aventuriste. Les mots d'ordre "Vive la semaine de 5 jours ! A bas le travail continu ! Vive le repos collectif des ouvriers !" doivent être lancés. Nous devons avertir la classe ouvrière qu'après l'actuel cours ultra‑gauche, le centrisme peut tout aussi facilement introduire une néo‑Nep...
Il faut aussi souligner le fait que ces événements confirment notre plate-forme.
La tactique putschiste de Molotov résulte de la décomposition des partis d'Orient. Il faut accorder aux questions de l'I.C. la grande attention qu'elles méritent. L'Opposition doit être réintégrée. Le parti doit pouvoir suivre sa propre voie. Nous devons appeler tous les ouvriers à chasser les étrangleurs de la démocratie prolétarienne. Nous devons appeler les ouvriers à entreprendre - sans attendre la permission d'en haut ‑ l'épuration du parti, des syndicats, des soviets, de l'écume bureaucratique stalinienne. Nous devons dire que la direction actuelle conduit le pays et la dictature du prolétariat à leur perte et que sa politique pave la voie à la contre-révolution dans le pays .
Votre S.[3]