Lettre à Oskar Seipold, 19 avril 1930

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Cher Camarade Seipold,

Je serais très heureux si vous me faisiez également connaître en privé votre opinion sur l'état de la réunification et ses perspectives. Je considère qu'actuellement cette question est le problème crucial de l'opposition allemande. Je n'ai pas besoin de vous dire que la conférence, par son déroulement général, a fait aux camarades Shachtman et Naville un effet des plus déplorables. Quoi qu'il en soit, ces camarades ont souligné dans leur lettre qu'il existe heureusement, au sein des groupes dirigeants, des camarades qui envisagent de façon vraiment sérieuse et honnête l'unité et l'activité révolutionnaire commune. Dans cet ordre d'idées, les camarades ont aussi cité votre nom. Si les frictions devaient continuer, menaçant par là-même le travail dans son ensemble, la seule possibilité pour ouvrir la voie au développement de l'opposition serait à mon avis la suivante :

Sélectionner et rassembler, au sein de chacun des deux groupes, ceux des cadres dirigeants qui sont capables de s'élever au-dessus de l'ancienne vie de clique et de subordonner à la cause tous les problèmes personnels et secondaires, afin de battre en brèche ceux qui mènent de mesquines querelles de clochers. Il est possible que mes craintes soient exagérées, en tous cas on m'écrit de Paris que les derniers "symptômes" sont satisfaisants. Tant mieux. Je sais toutefois par expérience, que dans un tel état de fragilité, les incidents et les bêtises, même les plus bénins, peuvent avoir les conséquences les plus graves. C'est pourquoi aucune précaution n'est superflue.

La conférence internationale représente certes un pas en avant important. Mais je regrette au plus haut point que la conférence n'ait pas adopté de manifeste, de déclaration de principes. Un tel élément aurait été de la plus grande importance pour la poursuite de notre travail. Par le fait que la conférence soit restée muette, nous nous sommes privés nous mêmes d'une arme importante. Mais la raison d'une telle attitude ne me semble pas claire. Je considère également comme une erreur que l'on n'ait pas pris de résolution concernant les bordiguistes, c'est-à-dire qu'on ne les ait pas placés devant une alternative claire. Dans leurs rangs, il y a bien sûr des nuances diverses. Il nous faut aider ceux qui ont des positions internationalistes contre ceux qui ont des positions nationales.

Le bordiguisme dans sa forme parisienne court le plus vif danger de dégénérer en un sectarisme purement national, en un avatar italien de l'urbahnisme. Et plus les choses traînent en longueur, plus ce danger grandit. Le règlement de la question italienne est d'autant plus nécessaire que nous avons peut-être, dans le parti italien, en dehors du groupe Prometeo, certains camarades plus proches de nos convictions.

Qu’en est-il de notre activité parlementaire ? Espérez-vous avoir bientôt la possibilité de tenir au Landtag un discours-programme ? Il s'agirait en quelque sorte de proclamer du haut de la tribune du Landtag le point de vue de l'Opposition de gauche internationale, et éventuellement son unification effective. Cela serait de la plus haute importance, et votre discours serait évidemment reproduit dans toute la presse de l'opposition internationale.

Où en est Der Kommunist ? Je me réjouis à l'avance de sa parution prochaine.