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Special pages :
Lettre à Noël F. Busch, 30 septembre 1939
Auteur·e(s) | Léon Trotski |
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Écriture | 30 septembre 1939 |
Plan d’un Article
Cher Monsieur Busch,
Je vous suis très reconnaissant des commentaires gracieux sur mon article et je suis content que vous gardiez un bon souvenir de notre travail en commun.
J’enverrai le deuxième article, en manuscrit russe, à mon traducteur habituel, M. Charles Malamuth, qui vous en fera une meilleure traduction que nous ne pouvons le faire ici.
Le contenu fondamental du second article sera : les crimes (impostures, fausses accusations, assassinats, particulièrement empoisonnements, suicides forcés de ses adversaires) en tant que méthodes ordinaires de la politique de Staline. La dernière lettre, écrite, ou plus exactement dictée par Lénine avant sa seconde attaque, était une lettre à Staline, rompant avec lui personnellement toutes relations de camaraderie. (Il faut, selon moi, mentionner une photographie très connue qui représente Lénine malade avec Staline sur un banc à Gorky. Cette photographie est un document remarquable : Staline a donné l’ordre qu’on le photographie avec Lénine, qui avait déjà rompu toutes relations avec lui, mais n’était pas capable de se défendre.) L’épisode central, autour duquel tournera le reste, est l’information de Staline au bureau politique, selon laquelle Lénine avait réclamé qu’on lui donne du poison, parce qu’il sentait que la seconde attaque venait. Cet épisode, qui n’a jamais été publié, apparaît sous un éclairage nouveau après les procès de Moscou. Le rôle du poison dans la vie du Kremlin de Staline a été clairement révélé dans le procès de Moscou de mars 1938. Après ce procès, ont été exécutés les meilleurs médecins du Kremlin (le vieux Lévine, Pletnev et Kazakov) en tant qu’ « empoisonneurs ». Ils étaient accusés particulièrement d’avoir hâté la fin de l’écrivain Gorky. Au procès, on découvrit une atmosphère qui n’est comparable qu’avec celle de la décadence à Rome ou de l’époque de la Renaissance. Je fais des comparaisons rapides avec les époques de Néron et de César Borgia. On pourrait même appeler cet article « Borgia au Kremlin ». Il me semble que vous devriez publier des photographies des plus éminents bolcheviks qui ont péri victimes de la vengeance de Staline (tués après un procès, assassinés en secret, empoisonnés, contraints au suicide).
Une partie de l’article sera consacrée à Iagoda, l’ancien chef du G.P.U., qui, pendant dix ans, a été le principal instrument de Staline dans la spécialité assassinats et empoisonnements, etc. mais qui a été ensuite exécuté comme coupable de crimes dont on ne savait rien. Ce serait bien de publier sa photographie.
Une grande partie de cet article est consacrée à des faits, épisodes, caractéristiques personnelles. L’idée fondamentale est la suivante :
Staline est l’unique personnage dans l’histoire de l’humanité dont le nom ait été connu dans son propre pays après qu’il en soit devenu le dictateur. Il n'existe pas de produit plus légitime de l’appareil et il ne pourrait en exister! En même temps, la série ininterrompue d’assassinats, d’impostures, de suicides, etc., témoigne de la désintégration interne de l’appareil dont Staline est le produit et préfigure sa fin tragique.