Lettre à Leo Frankel et Louis Eugène Varlin, 13 mai 1871

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Londres, le 13 mai 1871.

Chers citoyens Frankel et Varlin,

J'ai eu des entrevues avec le porteur.

Ne serait-il pas utile de mettre en sûreté les papiers compromettants pour les canailles de Versailles ? Une telle précaution ne peut jamais faire de mal.

On m'écrit de Bordeaux que 4 Internationaux ont été élus aux dernières élections municipales. Les provinces commencent à bouger. Malheureusement, leur action est localisée et « pacifique ».

J'ai écrit plusieurs centaines de lettres pour votre cause à tous les coins du monde où nous avons des sections. La classe ouvrière était du reste pour la Commune dès son origine.

Même les journaux bourgeois de l'Angleterre sont revenus de leur première férocité. Je réussis à y glisser de temps en temps des articles favorables.

La Commune me semble perdre trop de temps à des bagatelles et à des querelles personnelles. On voit qu'il y a encore d'autres influences que celles des ouvriers. Tout cela ne serait rien si vous aviez le temps de rattraper le temps perdu.

Il est tout à fait nécessaire de faire vite tout ce que vous voulez faire en dehors de Paris, en Angleterre ou ailleurs. Les Prussiens ne remettront pas les forts dans les mains des Versaillais, mais après la conclusion définitive de la paix (26 mai), ils permettront au gouvernement de cerner Paris avec ses gendarmes. Comme Thiers et Cie se sont, comme vous le savez, assuré un important pot-de-vin dans leur traité conclu par Pouyer-Quertier, ils ont refusé d'accepter l'aide des banquiers allemands offerte par Bismarck. Dans ce cas, ils auraient perdu le pot-de-vin. La condition préalable de la réalisation de leur traité étant la conquête de Paris, ils ont prié Bismarck d'ajourner le payement du premier terme jusqu'à l'occupation de Paris. Bismarck a accepté cette condition. La Prusse, ayant elle-même un besoin très pressant de cet argent, donnera donc toutes les facilités possibles aux Versaillais pour accélérer l'occupation de Paris. Aussi, prenez garde !