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Special pages :
Lettre à Léon Trotski, 17 mai 1928
Auteur·e(s) | Koté Tsintsadzé |
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Écriture | 17 mai 1928 |
Cher L.D.,
Voilà trois mois que nous nous trouvons à Bakhchi‑Sarzil. Bien que Pouchkine ait chanté cette petite ville orientale, nous n'y trouvons rien d'attrayant. Nous avons mis plus de douze jours pour venir de Tiflis ici. C'est que nos autorités n'ont pas voulu nous faire passer par le plus court chemin, Poti, ou Batoum, sur Sébastopol, etc. Le président du G.P.U. l'a reconnu devant moi. Au début, on voulait nous envoyer sur Poti... Mais la gare était pleine d'ouvriers. On les a dispersés. Il y a eu beaucoup d'arrestations près de 80. Tout le quartier environnant était transformé en un camp militaire. On ne laissait passer personne. La garde était placée à un kilomètre autour de la gare. On ne permettait pas aux tramways de s'arrêter devant la gare. A la gare, il n'y avait que les représentants des autorités. Malgré tout cela, on ne nous a pas faits venir à mais on a téléphoné que "le départ était différé". Au bout de trois heures environ, on nous a annoncé que nous allions passer par Bakou. Les ouvriers ont réagi politiquement comme il le fallait devant notre déportation. Même plus que nous ne nous y attendions. Il s'est produit la même chose lors du départ du premier groupe. On voulait les cacher aussi et les faire partir par une autre gare, mais nos camarades (ils étaient 81) sont allés à l'avance à la gare principale et les ouvriers ‑ entre 6 et 700 ‑ ont rompu les barrages et occupé le quai. On n'a pas laissé entrer les autres et ils sont restés sur la, place de la gare. Il y avait cette fois presque 2000 ouvriers (lors de notre départ, il y en avait beaucoup plus). La différence est que, la première fois, les ouvriers avaient pu venir à la gare, alors que la deuxième fois, dès le matin, on ne laissait approcher personne. Les autorités ont commencé à disperser les ouvriers quand ils ont entonné l'Internationale et sorti le portrait de Lénine : au cours de la bagarre, ce portrait a été déchiré par un agent du G.P.U.
L'état d'esprit des ouvriers a été excellent. Si nous étions restés à Tiflis une année entière, nous ne serions pas arrivés à faire autant que l'a fait ce départ pour affermir et assurer dans les masses la sympathie en notre faveur.
Nos cadres sont inébranlables malgré la faim, le froid, les persécutions et les brimades qui accablent chaque Oppositionnel. Je ne sais pas comment vont les choses en Russie. J’avoue que nous ne sommes pas contents de certains de nos "chefs". Même très mécontents. Ils sont très individualistes, tirent des conclusions hâtives dictées exclusivement par leur état d'âme personnel. Vous connaissez en particulier mon attitude à l'égard de Zinoviev. Je n'ai pas un sou de confiance en lui ou ses partisans. Des gens sans vertèbres.
On nous dit que vous êtes malade. Nous vous avons télégraphié de Bakou et avons reçu votre réponse. Nous sommes heureux de savoir que vous allez mieux.
Dans la question de la lutte, nous sommes inébranlables. Nous espérons que nous ne nous séparerons pas dans nos points de vue.
Un salut chaleureux de la part de Lado (Dumbadzé). Nous vous serrons fortement la main. Attendons la lettre promise. Salut amical.
P.S. Il faut souligner que, pendant le passage à tabac à la gare, au moment du départ de nos camarades, personne n'a été épargné. On a rossé de vieux camarades ouvriers comme Iassan Dnephbénadzé, membre du parti depuis 1908, tuberculeux. On a voulu arrêter Arakela que les ouvriers rassemblées portaient, mais les ouvriers ont empêché la police de les arrêter. On a battu des femmes, de vieilles révolutionnaires.