Lettre à Léon Sedov, 9 décembre 1931

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Mon cher Ljova,

Je t'envoie ci joint une étude des affaires allemandes. Aussi occupé que je sois avec ce maudit second volume, je suis physiquement incapable de m'empêcher de réagir à la situation allemande. Il aurait naturellement été mieux de m'exprimer là-dessus dans la dernière brochure, mais je n'avais pas à ce moment là la dernière proclamation du PC. Je propose que l'étude ci jointe ne soit pas sortie comme brochure (elle est trop courte) mais sous forme de tract, le mieux, pour diffusion gratuite. Il se trouve qu'il n'y a pas de poste aérienne en ce moment, exactement quand on en a plus besoin que jamais.

Pour le Biulleten russe, cette étude vient naturellement trop tard, encore qu'elle est moins importante.

J'ai reçu d'excellentes nouvelles d'Amérique : nous avons réussi à nous débarrasser complètement de Boni. Bien sûr, sa visite à Constantinople avait apporté une quantité d'argent qu'un ouvrier qualifié ne gagne pas durant toute sa vie (il avait pris ça sur mes droits). Néanmoins je suis maintenant libéré de lui et aussi du danger qu'il y avait à ce qu'il dévore la seconde partie de mes droits (tout ça, c'est le travail de Paz). Le nouvel éditeur, selon tout ce qu'on dit de lui et le témoignage d'Eastman, fait une impression excellente: c'est un Fischer américain, mais précisément un Américain, c'est à dire avec plus d'élan encore. J'ai eu aujourd'hui une longue lettre d'eux sur un ton d'une grande élévation. Ils veulent remuer le ciel et la terre et selon ce que dit Eastman c'est justement la réputation qu'ils ont - seulement pour donner au livre une diffusion exceptionnelle.

J'avais imaginé que la résolution sur le conflit entre les Espagnols et M(olinier), exigeait l'introduction d'un paragraphe consacré aux raisons politiques de la suspension du Soviet, dans l'esprit de ce qui était dit dans ma lettre ; il est inadmissible de capituler passivement devant la censure, on doit se battre en utilisant toutes les possibilités légales ; dans ces conditions le boycottage est une tactique de passivité et de capitulation, etc. En conséquence, il est impossible de recourir à semblables arguments pour se couvrir, il fallait dire ouvertement et honnêtement pourquoi on arrêtait la revue.

La décision de confier à Mill la direction de la section russe (ou quelque chose comme ça ) est vraiment magnifique. Mais pour le moment, mieux vaudrait mieux ne pas trop exciter sur cette question. Il faudra trouver une façon plus nette et en même temps plus économique de liquider cette indécence. C'est pour cela qu'il n'y a pas besoin de se hâter à exacerber tout ça mais à chaque manifestation de bassesse et de stupidité, la leur signaler calmement.

Ce que J'ai dit du tract gratuit n'est bien entendu qu'une opinion. Que les camarades allemands décident eux mêmes. Transmets mon salut à Grylewicz. J'ai reçu aujourd'hui les deux petites brochures.

Seipold écrit qu'il pourra être là pour Noël. Si tu en as la possibilité, dis lui que je serais heureux de le voir.

Dans l'étude ci jointe, je frappe un grand coup contre Urbahns. Je ne pense pas que les camarades allemands vont avoir des objections : pour se rapprocher du parti de masses, il faut se désolidariser d'Urbahns précisément maintenant, en toute clarté.

Si on pouvait se débrouiller pour traduire l'étude jointe en Français à Berlin même et la diffuser à toutes les sections parlant une langue romane, ce serait le mieux et cela démontrerait aux brouillons et aux capricieux de Paris que nous pouvons très bien travailler sans eux. J'espère que l'organisation va distribuer, elle-même, mes publications allemandes à toutes les sections.