Lettre à Léon Sedov, 3 septembre 1931

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Mon cher,

J'ai oublié de te répondre sur le camarade Zimmer. Je me souviens très bien de lui en tant qu'auteur d’articles sur l'art à l’académie communiste Ventaik. Dans mon livre sur la littérature, j’ai fait référence réellement à son article intéressant et intelligent avec une grande sympathie. Zimmer m'a rendu visite avec sa femme et tous deux m'ont laissé une excellente impression. Donne lui mes sentiments les meilleurs. Que fait il maintenant ? Quels sont ses plans et intentions ? Je me rappelle qu'il allait écrire tout un livre sur l'architecture moderne et sur l'art moderne en général. A t il réussi à réaliser ce plan ?

S(énine) est parti hier. Nous avons parlé de tout en détail. Il veut visiter des amis en route. Je pense que ce sera très utile.

Avec Nin, apparemment, tout va bien. Il a fait bonne impression à Raymond. Nin à son tour m'écrit que Raymond lui a fait une splendide impression. Que demander de plus ?

Jusqu'à maintenant l’Opposition a fait une politique internationale trop "aristocratique" : ses membres de "base" ne sont pas suffisamment impliquée dans toutes sortes de "désagréments" au sommet, afin, dit on, de ne pas les rebuter. Ce n’est pas une bonne façon d'aborder la question, elle est trop celle de tuteurs, aristocratique précisément. A la base, il y a un manque de confiance dans l’ouvrier de la base; oh ! il va apprendre que ses dirigeants ne sont pas des anges. Une telle méthode ne vaut rien, pour les messieurs les dirigeants, elle facilite leurs cabrioles de boucs ou de moutons. On ne peut la compenser qu’en formant une opinion publique de l’Opposition tout entière et ce n’est pas possible sans information. Il faut toujours se souvenir que l'information est la base de la démocratie de parti. Tous les oppositionnels, vieux et jeunes, haut placés ou à la base, doivent savoir tout ce qui se fait au sommet, les causes des conflits, les défections, et c'est seulement de cette façon qu'il sera possible de juguler rêveurs et intrigants. Il te faut parler en ce sens à la direction de Berlin, et distribuer votre résolution en ce sens à toutes les sections.

Maintenant sur la direction de Berlin elle même et sur l'Opposition allemande dans son ensemble. A certaine signes, je vois qu’il y a aussi des éléments d'"aristocratisme". Le comité de rédaction est composé de trois intellectuels et ils ne sont pas tous allemands. Ce n'est pas du tout bon. Il faudrait introduire dans un comité de rédaction étroit (une troïka) au moins un authentique ouvrier allemand. Le mieux évidemment serait l'actuel éditeur responsable. D’abord, il pourrait mettre dans le travail courant ce qui est tout à fait étranger aux intellectuels étrangers et ce serait bien utile à la cause. Deuxièmement, il ne se sentirait pas seulement éditeur responsable. La commission de presse, sous l'autorité du comité de rédaction devrait aussi être démocratisée : 5 berlinois, par exemple, dont trois ouvriers et deux Leipzigois pour faire bonne mesure. Le plénum avec les gens de Leipzig ne devrait pas se réunir plus de deux fois par mois.

Sur les Français. Il me semble que tu devrais insister pour que Raymond et Frank écrivent à un certain nombre de camarades français ou à tous les membres de la commission exécutive, ou une lettre ouverte au Bulletin (il faut y penser un peu plus) avec le contenu suivant, par exemple : oui, nous avons fait toute une série d’erreurs et de mauvaises initiatives qui auraient pu troubler ou nous,opposer à certains camarades liés à nous par une solidarité idéologique; oui, le travail collectif et le contrôle démocratique ne trouvent pas toujours une place adéquate dans le fonctionnement de la Ligue; tout cela peut être corrigé. Nous sommes prêts à corriger tout cela avec les autres camarades. Nous ne pouvons pas cependant ne pas souligner, une fois de plus, qu’une grande partie des anomalies s’expliquent par la présence, dans la Ligue et à côté, d'un groupe avec des "noms" auquel la cause de l'Opposition de gauche est en essence totalement étrangère, et qui à toute occasion abandonnent le travail, quittent l’organisation, substituent l'intrigue honteuse à la lutte politique, etc. Ce groupe qui a pris sur toutes les questions politiques une position erronée qui n'a apporté et n’apportera à la Ligue ni idées créatrices ni propositions, qui peut seulement se décider à donner des ordres ou à saboter à ce groupe, nous ne pouvons et nous ne voulons faire aucune concession d'autant plus que ce même groupe, comme ses partisans et amis de différents pays, veut une scission et en a déjà partiellement provoqué une. Ainsi notre position est elle claire : pas de concessions à la fraction Rosmer-Naville-Landau- Mahnruf; totale disponibilité pour tout type de concessions pratiques et organisationnelles à ceux des éléments de la Ligue qui ont montré dans l'action qu'ils sont réellement sur le terrain de la Gauche internationale. Si nous nous rassemblons plus fortement sur ce terrain, alors les hésitants qui ne représentent aucune tendance politique, devront choisir. C’est seulement ainsi que nous nous tirerons de cette crise.

Je te donne dans ces lignes simplement un exemple d'un projet de lettre qui ferait une impression magnifique et renforcerait les positions de ses auteurs. Peux tu leur écrire à ce sujet ?

Il n'y a malheureusement pas de chèque encore de l’éditeur espagnol. Peut être est ce dû aux difficultés de transfert en monnaie forte ?

J’ai parlé plus haut de l'éditeur responsable en Allemagne : je voulais parler de Wegener, je viens juste de retrouver son nom.

Est ce que la "conversation avec un membre du parti bien disposé" va être imprimée ? Elle ne va pas très bien avec le thème du livre. Mais cela ne soulèverait pas d'objections particulières.

La préface au livre sera plus substantielle que je ne le voulais initialement. Quelle est la date limite pour l'envoyer ?

Il y a une salade avec les lettres par avion, évidemment la faute de M(aria) I(lyichna). Qu'elle s'explique aussi !

En ce qui concerne Rosmer etc., il faut poser la question de façon si ferme qu'ils désirent évidemment une scission et qu'une scission libérera peut être les mains de la Ligue pour un travail positif. Une telle façon de formuler la question va faire peur à ceux qu'on peut garder au travail. Il va sans dire que la responsabilité de la scission doit être rejetée sur Rosmer et ses amis, ce qui correspond intégralement aux faits.