Lettre à Léon Sedov, 13 janvier 1932

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Mon cher Ljova,

Aujourd'hui est arrivé pas mal de matériel allemand de sources diverses. Je vais pouvoir écrite plus "solidement" la nouvelle brochure.

La question naturellement n'est pas de forcer Scholem ; des gens peuvent attendre, peut-être sources de fonds, etc. Je me rappelle qu’à notre époque, on "travaillait" tout lien personnel, toute adresse. En attendant nos camarades allemands cuisent évidemment dans leur propre jus plus la distribution des brochures.

C'est par les lettres vigoureuses que Souzo a compris qu'il n'était plus possible de se mettre de côté et de faire la politique de Ponce-Pilate. Avant-hier, pour la première fois, il m’a envoyé une lettre tout à fait satisfaisante : il reconnaissait que sa passivité vis-à-vis de la politique de Mill était fausse, que la direction actuelle de la Ligue était la seule concevable, qu'il était prêt à travailler avec eux, voulait travailler avec le secrétariat etc. Précisément parce que je l'ai lié à Mill, il a senti le besoin pressant de se séparer de lui. Ce pas était tout à fait juste et visait précisément l’effet qu'il a obtenu.

Je ne doute pratiquement pas que, de la part des Américains, nous n’aurons aucune difficulté. Je leur ai posé carrément la question de la politique de Shachtman. Je voudrais espérer que Shachtman, à l’[exemple ?] de Souzo, va maintenant comprendre qu'il faut arrêter avec les trucs.

Comme tu le sais, j'ai écrit aux Américains qu'ils doivent éteindre leur dette vis-à-vis du Biulleten russe. En conséquence, ils devraient chercher les moyens de payer. Il me semble que tu devrais procéder de la façon suivante : leur présenter un compte précis des numéros qui leur ont été expédiés avec ta participation directe ; quant aux numéros précédents, leur donner un chiffre global approximatif, bien que sur la base des derniers (si il n'y a pas d'autres points où s'appuyer). Disons un chiffre général de 5 à 800 dollars par numéro sorti. Tu peux ajouter que tu ne réclames naturellement pas un tel chiffre maintenant car tu connais leur difficile situation, mais que, compte tenu de la situation difficile du Biulleten tu aimerais qu'ils paient au moins une partie de cette somme (la moitié ou le quart, selon l'importance de la somme). S'ils proposent eux-mêmes plus - de 100 à 200 dollars - je n'aurai naturellement pas d’objection.

Je ne sais comment ni pourquoi ma lettre à Well l'a indisposé sans le persuader mais je lui ai écrit sur différentes choses dans les deux ou trois dernières années et n'ai jamais pu trouver avec lui un langage commun. Ma dernière lettre était bien entendu un risque parfaitement calculé sur le caractère de ma correspondance avec lui. S'il pense continuer à l’avenir en ignorant ce que je considère comme très important, malgré le fait que je répète et que J'insiste, alors un conflit est absolument inévitable. L'appel à la direction allemande sur la question du secrétariat international est un sérieux avertissement pour Well. Le malheur n'est pas que les gens fassent des bêtises : c'est inévitable. Le malheur commence quand ils n'en apprennent rien.

Souzo écrit que le secrétariat de Paris a été liquidé depuis le départ de M(ill), c'est-à-dire se considère comme transféré à Berlin. Une difficulté de moins une étape de plus. Voyons ce que va nous apporter l'étape de Berlin. Personne naturellement ne s'attend à des miracles. Le travail ne peut être accompli qu'à la mesure des forces réelles. Le plus important, c'est un travail administratif calme et réfléchi, l'harmonisation des conflits accidentels et personnels sans préjugés ni favoritisme.

Si dans tout cela le Bulletin sort régulièrement, même une fois par mois, et contient de sérieux matériaux factuels, alors en soi, ce sera une magnifique réalisation.

Dans une lettre passée, j'ai exprimé l'hypothèse que tu pouvais avoir déjà reçu I’argent d'Amérique. Cela n'a pas été confirmé. La raison en est qu'Eastman, occupé à publier le premier volume (qui sort en février) retenait la traduction du second. Je lui ai télégraphié. J'espère que l'argent sera encore envoyé un jour ou l'autre.

Est-il possible que les Berlinois n’aient pas encore pris contact avec les gens de Francfort ? Cette affaire a commencé après tout il y a longtemps. Quel temps cela prend de former nos gens. Et Hitler, lui, n'attendra pas.