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Les élections allemandes
Auteur·e(s) | Jules Humbert-Droz |
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Écriture | 24 juin 1920 |
La guerre et ses conséquences économiques ont renforcé la lutte de classe. Dans tous les pays le même phénomène se produit. Les partis du centre, modérés, soucieux de conserver les pratiques vieillies de la démocratie bourgeoise se désagrègent au profit des extrêmes : les partis réactionnaires et les partis révolutionnaires. De plus en plus clairement la concentration des forces se fait à l'extrême droite et à l'extrême gauche et le dilemme se pose brutal et déconcertant pour ceux qui ne veulent ou ne peuvent comprendre la période révolutionnaire que nous vivons : dictature bourgeoise, militaire, avec toutes les mesures de répression qui l'accompagnent, contre la classe ouvrière, ou dictature du prolétariat, avec toutes ses mesures de répression aussi, mais dirigées non plus contre le peuple travailleur au profit des parasites, mais contre tous les vautours du capitalisme au profit du peuple.
Cette concentration aux extrêmes que toutes les élections ont démontrée depuis la fin de la guerre, dans tous les pays du monde, se retrouve dans les dernières élections allemandes. Les partis de la coalition républicaine : majoritaire, démocrate et centre, sont fortement diminués au profit de la gauche, le parti indépendant, et de la droite réactionnaire qui ne cache pas ses sympathies monarchistes. La faillite des socialistes majoritaires est caractéristique ; ils tombent de 11 000 000 de suffrages à 5 000 000 à peine. Le régime de Noske-Scheidemann est jugé et condamné par la classe ouvrière allemande.
La situation créée par cette concentration aux extrêmes est difficile : le cabinet est démissionnaire et, dans les coulisses de la démocratie, on cherche des combinaisons gouvernementales.
La coalition centriste actuelle est trop faible pour vivre, elle doit chercher un appui à gauche ou à droite.
A gauche, les Indépendants, sollicités, refusent de s'y laisser prendre. Ils sont liés par les décisions de leurs congrès et savent bien que la collaboration gouvernementale avec les assassins de Liebknecht et une partie de la bourgeoisie, signifie la mort du parti. L'expérience des majoritaires est trop fraîche pour que les Indépendants la répètent à leurs dépens. C'est donc à droite, sur le parti réactionnaire que s'appuiera le nouveau gouvernement. Il y a longtemps que la réaction a l'influence prépondérante sur la coalition. Mais peut-être les majoritaires auront-ils tiré de la leçon qu'ils viennent de recevoir un peu de sagesse et obliqueront-ils à gauche après avoir épuré leur parti. Dans le cas où ils refuseraient de partager le gouvernement avec la droite le nouveau gouvernement bourgeois aurait toute la classe ouvrière contre lui et il lui deviendrait impossible de gouverner. Déjà certains journaux parlent de dissolution prochaine de ce Reichstag qui ne peut former de gouvernement stable.
Cette situation créée par la lutte de classe renforcée n'est pas spéciale à l'Allemagne. En Italie, Nitti vient de donner une nouvelle fois la démission du cabinet. La Chambre est aussi peu stable que le nouveau Reichstag et on parle aussi sérieusement de la dissoudre. En Bulgarie, la dissolution eut lieu, les nouvelles élections faites sous l'état de siège donnèrent une plus forte concentration aux extrêmes. Le parlementarisme aboutit lui-même à une impasse, il se révèle impuissant devant la lutte de classe. La seule solution possible après la dictature de droite qui ne peut durer que jusqu'au moment où elle aura soulevé la masse ouvrière contre elle, c'est la dictature du prolétariat révolutionnaire.
Le Parti communiste allemand, pour la première fois, a pris part aux élections. Il recueille 400 000 suffrages environ. Ce petit nombre s'explique aisément par une série de causes que nous ne ferons qu'énumérer.
- Jusqu'à son dernier congrès, le P. C. avait inscrit l'antiparlementarisme à son programme et avait fait de la propagande dans ce sens. Ce n'est pas en quelques semaines qu'on peut détruire la mentalité formée par la propagande antérieure.
- Il y a quelques mois, le P. C. s'est divisé ; la moitié environ de ses membres furent exclus et formèrent le Parti communiste ouvrier resté antiparlementaire et qui a entraîné la majorité du parti communiste à Berlin, Hambourg, etc.
- Pendant toute l'année dernière le parti, traqué par la police de Noske, fut illégal, ses journaux interdits, les assemblées dissoutes ou secrètes. Il a maintenu sa vie intérieure, mais n'a pu rayonner et faire sa propagande. Quelques semaines de propagande électorale ne suffisaient pas à couvrir le déficit de cette longue période de persécution.
- Enfin le P. C. a mené la lutte électorale sans avoir de programme parlementaire. Il ne promettait rien aux électeurs, il avait à son programme l'abolition du parlementarisme et la dictature prolétarienne. Les 400 000 voix qu'il a recueillies sur ce programme révolutionnaire et dans ces circonstances très défavorables, montrent qu'il y a en Allemagne 400 000 communistes conscients, sans compter ceux en nombre au moins égal qui se sont abstenus de voter. Nous n'espérions pas un pareil résultat qui montre la vitalité de Spartakus.
Quelle que puisse être l'issue de la crise gouvernementale provoquée par les élections, une constatation demeure, qui s'applique à tous les pays, c'est que les antagonismes de classe, loin de s'affaiblir et de s'atténuer par la pratique du parlementarisme démocratique, grandissent au point de rendre le parlementarisme et la démocratie impossibles.