Le parti et le bloc de l’opposition

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Le parti et le bloc de l’opposition

Camarades,

Mon rapport d’aujourd’hui, sur les résultats de l’assemblée plénière du comité central et de la commission centrale de contrôle, se distinguera des autres rapports sur ce thème du fait que les travaux de la séance plénière ont eu, eux-mêmes, un caractère exceptionnel. Toute une série de questions portées à l’ordre du jour de l’assemblée plénière ont été discutées, du point de vue général, en rapport avec des déclarations et les attaques politiques dirigées par l’opposition contre la majorité du comité central. Je me contenterai donc, dans mon rapport d’aujourd’hui, de discuter les grandes questions fondamentales de la vie politique de notre pays, les questions de principe concernant l’activité de notre parti, ainsi que les questions concernant la politique intérieure et, en partie, la politique extérieure de notre pays. C’est pourquoi je devrai, avant de passer à la réfutation du point de vue de la nouvelle opposition, faire précéder mon rapport d’un exposé rapide de la situation de notre pays, étant donné que les divergences fondamentales qui séparent les camarades de l’opposition de la majorité écrasante du comité central sont basées sur l’appréciation de la situation de notre pays et le rôle que doit actuellement jouer notre parti. Ces divergences entraînent des conclusions différentes sur les mesures que notre parti doit réaliser dans la période actuelle de son développement historique.

La Situation Economique[modifier le wikicode]

La croissance économique de notre pays[modifier le wikicode]

Excusez-moi d’être obligé de vous fournir quelques chiffres. La croissance de notre économie, la croissance des forces productives de notre pays, est un fait universellement reconnu chez nous, même par nos pires adversaires. Nos ennemis les plus acharnés et les plus aveuglés sont aujourd’hui obligés de reconnaître notre croissance économique. Mais pour nous autres marxistes et léninistes, qui sommes en train de créer un nouvel ordre social, la question de la croissance économique de notre pays n’est que le premier point et le plus général dans l’analyse de la situation économique. Nous devons immédiatement poser d’autres questions et nous demander si notre industrie, qui constitue la base de la construction socialiste, progresse et, si oui, à quel rythme progresse-t-elle, si elle dépasse le développement de l’agriculture ou si, au contraire, elle est débordée par le développement de l’agriculture. Nous devons nous demander si la disproportion existant entre notre industrie d’Etat et les 22 millions d’exploitations paysannes que compte notre pays s’accroît, ou si, au contraire, nous assistons à un rythme plus rapide du développement de notre industrie. Telle est la première des questions décisives que nous devons nous poser après avoir établi le fait de la croissance économique générale de notre pays.

La disproportion dans le développement de l’agriculture et de l’industrie[modifier le wikicode]

En ce qui concerne la disproportion existant entre le développement de l’agriculture et celui de l’industrie, la situation peut être caractérisée par les chiffres suivants. La production brute de l’agriculture s’est élevée, depuis l’exercice 1922-23 à l’exercice 1925-26, de 66,8 % à 88,1 % du niveau d’avant-guerre. La production brute de l’industrie s’est accrue, pendant le même intervalle de temps, de 34,7 % à 95 % du niveau d’avant-guerre. Exprimée en chiffres absolus, la production agricole s’est élevée de 7,8 milliards de roubles d’avant- guerre à 10,3 milliards, c’est-à-dire de 32 %. Si nous considérons la production brute de l’industrie, nous avons les chiffres suivants : en 1922-23, la production s’éleva à 1 949 millions de roubles d’avant-guerre et, en 1925-26, à 5 215 millions. Notre industrie a donc progressé pendant cet intervalle de temps de 274 %.

Nous en arrivons maintenant à la base vivante de notre industrie, à savoir la force de la classe ouvrière, étant donné que la question de la lutte de classes — notre construction socialiste est une forme particulière de la lutte de classes prolétarienne — sera décidée par les éléments vivants qui constituent, en différentes combinaisons, la base principale de la construction socialiste. La classe ouvrière constitue le matériel vivant fondamental de cette construction socialiste. Elle constitue la classe dominante, la classe dirigeante, la classe de l’avant-garde de la société actuelle, de la période de transition.

Si nous nous demandons comment la classe ouvrière elle- même se développe et comment s’est modifiée sa force numérique, qui constitue, parmi les autres facteurs, le facteur déterminant de sa force sociale de classes, nous voyons le développement suivant :

Le chiffre annuel moyen des ouvriers industriels s’est élevé, au cours de l’exercice 1921-22, à 1 million 240 000 hommes. En juin 1925, ce chiffre s’élève à 1 million 555 000; en juin 1926, à 1 million 898 000, soit, en un an, une augmentation de plus de 300 000 hommes. Nous pouvons poser la même question non seulement du point de vue de l’accroissement numérique de la classe ouvrière, mais aussi du point de vue de l’accroissement proportionnel du revenu de la classe ouvrière dans l’ensemble de notre revenu national. Vous savez que notre pays est principalement un pays agricole. La classe ouvrière constitue encore, chez nous, une minorité infime. Aussi ne devons- nous pas nous étonner de la proportion infime que représente le revenu de la classe ouvrière par rapport au total de notre revenu, mais ce qui importe c’est l’augmentation du rapport du revenu de la classe ouvrière dans l’ensemble du revenu national. La somme des salaires ouvriers, autrement dit le revenu de la classe ouvrière, s’est élevée, en 1922-23, à 20 % de l’ensemble du revenu national, et en 1924-25 cette proportion s’est élevée à 28,1 %, soit une augmentation de près de 50 %.

Mais, depuis, nous avons fait de tels progrès que nos organes de plan économique ont commencé à établir des plans d’orientation pour une période relativement longue. C’est ainsi que nous avons élaboré un plan d’orientation pour les cinq prochaines années. Ce plan a été établi avec la plus grande prudence par les collaborateurs de la Commission du plan économique. D’après ce plan, la croissance de la production agricole, au cours des années 1925-30, sera d’environ 20,8 %, tandis que la croissance de la production industrielle sera d’environ 110 %. il s’agit donc, par conséquent, de la croissance de toute la production industrielle et agricole. Ce rapport sera autre si nous considérons non plus l’accroissement de la production brute de l’agriculture, mais seulement la quantité de marchandises portées sur le marché. D’après les calculs provisoires qui ont été faits à ce sujet, la quantité de produits agricoles augmentera, au cours des cinq prochaines années, d’environ 42 à 43 %. Si nous considérons l’accroissement de 110 % de la production industrielle, prévu par le plan économique, nous voyons que les chiffres d’orientation pour les cinq prochaines années, établis sur la base d’une étude minutieuse des facteurs économiques existants, montrent que la croissance de l’industrie dépassera la croissance de l’agriculture. Telle est la tendance fondamentale de notre économie, que nous avons déjà établie au XIVe Congrès de notre parti.

Ainsi, si nous nous demandons avec quel rythme se développeront l’industrie et l’agriculture, nous pouvons répondre avec assurance qu’en ce qui concerne les prochaines années nous assisterons à un développement de l’industrialisation de notre pays.

L’importance et le rôle du capital privé[modifier le wikicode]

La deuxième question que nous devons nous poser est la question de savoir dans quelle mesure le capital privé s’est développé dans notre pays et quelle importance il occupe par rapport au développement de notre économie d’Etat. Faisons ici une petite remarque : nous devons distinguer entre l’économie privée de notre pays et une économie privée capitaliste, distinction qu’oublient de faire un grand nombre de camarades, et surtout, comme nous le verrons plus tard, les camarades de l’opposition. Car une économie comme la petite exploitation paysanne, qui n’emploie pas de travail salarié, constitue bien une économie privée, mais non pas une économie capitaliste. Mais si nous parlons de notre concurrence avec le capital privé, nous devons nous demander quel est le rapport des forces existant entre notre économie d’Etat, sous toutes ses formes, et l’économie capitaliste privée, c’est-à-dire une économie qui emploie le travail salarié. Malheureusement, nos statistiques dans ce domaine sont très insuffisantes.

Les données dont nous disposons sur le mouvement du capital privé, son accroissement ou sa diminution, n’ont aucun caractère d’exactitude.

Récemment, un fonctionnaire du commissariat des finances, Kutler, essaya de calculer l’importance du capital privé et de l’accumulation annuelle à l’intérieur des entreprises capitalistes privées. Il fit une enquête dans les entreprises privées, qui s’étendit sur environ un dixième des entreprises capitalistes privées tombant sous la loi sur l’impôt de compensation. Ce dernier fait montre,, à lui seul, combien il est difficile de s’appuyer ici sur les conclusions de Kutler. En tout cas, l’enquête de Kutler indique, de toutes les enquêtes faites jusqu’ici sur le rôle du capital privé, le résultat le plus favorable pour eux.

D’après ses calculs, sur la technique desquels je ne m’étendrai pas ici, le bénéfice brut des 323 855 entreprises capitalistes privées existant chez nous s’exprime par une somme considérable qui oscille entre 319 et 585 millions de roubles.

A la dernière séance du comité central, l’un des représentants des plus autorisés de l’opposition, Je camarade Piatakov estima à 400 ou 500 millions de roubles le bénéfice net du capital privé, résultat obtenu grâce à une méthode dans laquelle Dzerjinski et d’autres camarades relevèrent toute une série d’erreurs. Je ne veux pas discuter ces erreurs ; j’indique seulement que Piatakov établissait ses calculs de la manière suivante : 11 % de la production industrielle sont pris par des commerçants privés. En réalité, le commerce privé absorbe un plus grand pourcentage de la production industrielle. D’après certains calculs, ce pourcentage s’élève même à 40 % et même encore davantage. C’est sur la base de ces chiffres que Piatakov a obtenu la somme de l’accumulation capitaliste privée. Il commettait l’erreur principale suivante : si le commerce privé absorbe officiellement 11 % de la production industrielle et, en réalité, plus de 11 %, cela se produit au moyen de plusieurs ventes. Disons, par exemple : nos coopératives ou nos organes subalternes d’Etat, qui achètent à nos organisations d’Etat des marchandises à des prix de gros, les revendent à leur tour au capital privé. On ne peut pas se représenter la chose de telle sorte que le commerce privé met dans sa poche toute la différence existant entre les prix de gros et les prix de détail. S’il reçoit la marchandise en troisième vente, les organes de commerce d’Etat ou les coopératives qui ont vendu la marchandise aux commerçants privés ont déjà pris leur part dans le bénéfice commercial, de telle sorte que le commerçant privé ne reçoit pas toute la différence entre les prix de gros et ceux de détail. Admettons même que le bénéfice brut s’élève, d’après les calculs de Kutler, à environ 400 millions de roubles (je prends la moyenne entre 319 et 585). Ce chiffre est propre à nous effrayer, car 300 ou 400 millions de roubles constituent une jolie somme. Si le bénéfice brut du capital privé s’exprime par une pareille somme, cela représente vraiment un danger considérable pour notre classe ; cela signifierait que le capital privé a pénétré trop en avant dans sa lutte contre nous. Mais, dans ces calculs, on n’a pas tenu compte d’un fait, à mon avis décisif, car cette somme ne constitue pas un bénéfice net, qui exprime l’accumulation capitaliste privée, et c’est pourquoi on ne doit aucunement comparer cette somme avec le bénéfice net de nos entreprises d’Etat, de nos organes commerciaux et de notre industrie d’Etat. Il ne faut pas le faire, surtout parce que dans ce bénéfice est contenu tout le bénéfice brut des entreprises capitalistes, même cette partie des bénéfices qu’il dévore. Prenez maintenant le tableau général : combien d’entreprises fournissent ce bénéfice de 319 à 580 millions de roubles ? Elles sont au nombre de 323 855. Si nous admettons que l’entretien d’une famille nécessite environ 80 roubles par mois (naturellement je peux me tromper, mais cette erreur sera compensée d’un côté ou de l’autre), cela fait environ 1 000 roubles par an. On dévore, par conséquent, 323 millions de roubles par an pour l’ensemble des entreprises capitalistes. Il faut donc retirer des 400 millions de bénéfice brut les 323 millions de roubles ainsi dévorés. Nous arrivons de ce pas à la véritable somme représentant l’accumulation de l’économie capitaliste privée. Cette somme n’est donc nullement comparable aux chiffres représentant le bénéfice net de notre industrie.

Si nous calculons le bénéfice net de notre Industrie, nous ne comptons que notre accumulation, c’est-à-dire ce qui peut être employé à l’extension de l’industrie. Nous ne comptons pas les frais d’entretien du personnel technique, de l’appareil correspondant, etc. Mais quand il s’agit du capital privé, on confond l’accumulation, c’est-à-dire le bénéfice net qui peut être employé à l’extension de l’entreprise, avec le bénéfice brut. Cette seule correction montre déjà un tout autre tableau, un tout autre rapport des forces.

J’ai étudié minutieusement toute une série de correspondances de la province sur la croissance du capital privé dans un certain nombre de régions. C’est ainsi que, dans la région de Leningrad, le capital privé a constamment diminué. Il existe, par contre, d’autres régions dans lesquelles le capital privé a développé ses positions. C’est en Ukraine que le capital privé a le plus augmenté. Mais, même en Ukraine, le capital privé n’a atteint que le niveau de 1924, étant donné qu’après l’année 1923 nous avons exercé une grande pression sur le capital privé, qui oblige celui-ci à reculer. Par la suite, nous avons quelque peu relâché les rênes, ce qui permit au capital privé de recommencer à s’accroître quelque peu et d’atteindre son niveau de 1924.

SI nous considérons notre économie d’Etat, notre économie communale et nos coopératives, le bénéfice net de l’économie socialisée a atteint, en 1924-25, 1 025 millions de roubles et s’élèvera approximativement, en 1925-26 (les calculs définitifs ne sont pas encore établis), à 1 586 millions de roubles. Cette somme représente un bénéfice net. Si, donc, nous admettons les résultats favorables pour les capitalistes privés, obtenus par les calculs de Kutler, et que nous les corrigeons de la manière que j’ai indiquée, c’est-à-dire si nous retirons du bénéfice du capital privé tout ce qu’il nécessite pour son entretien, nous voyons que les positions de notre économie d’Etat sont extraordinairement fortes et ne doivent susciter aucun souci sur le sort de notre construction socialiste. Je crois que les progrès ultérieurs de notre économie renforceront encore nos positions. Il ne faut pas oublier non plus que nous avons déjà prouvé notre capacité de manœuvre dans ce domaine. Il y a quelques années, nous avons exercé une pression sur le capital privé et avons commencé à l’éliminer d’une façon extraordinairement rapide. Mais quand nous avons vu que nous allions trop loin dans ce sens, nous avons quelque peu diminué notre pression. Nous avons montré que nous pouvions le faire. Ces oscillations répétées de la situation économique ont déjà prouvé que la puissance d’Etat joue, chez nous, un grand rôle régulateur, et qu’en cas de véritable danger nous menaçant de la part du capital privé nous serons en état, comme nous l’avons déjà fait, de mettre en mouvement les leviers de notre système de crédit, de notre appareil de transport, de notre appareil fiscal et, d’une façon générale, de l’ensemble de notre appareil économique pour éliminer, quand cela sera nécessaire, le capital privé. Du rapport des forces sociales existantes, nous pouvons tirer à chaque instant toute une série de conclusions nécessaires. Nous voyons, par exemple, que le capital privé s’est jeté maintenant sur le village. Nous devons, par conséquent, renforcer nos positions à la campagne. Nous voyons que le capital privé faisait, il y a peu de temps encore, un usage par trop grand de notre crédit d’Etai. Nous avons dû renforcer ici notre pression. Nous voyons que nous pouvons apprendre du capital privé à hâter notre circulation — étant donné que les ressources du capital privé circulent plus rapidement que les nôtres — dans nos lourdes institutions d’Etat. Nous voyons que le capital privé utilise d’une façon extrêmement intensive le capital étranger. Jusqu’à présent, nous n’avons pas pu réglementer cette affaire. Nous ne pouvons pas encore utiliser dans la mesure nécessaire l’accumulation paysanne pour développer notre industrie et nos coopératives. Ici, également, il est nécessaire de tirer de cette situation toute une série de conclusions. Tout cela est juste ; mais il est complètement faux de dire que le capital privé est suspendu au-dessus de nous comme une nuée d’orage. C’est une pure absurdité.

Les différences de classes au village[modifier le wikicode]

Quelques mots maintenant sur les villages. Un certain nombre de camarades croient que le problème du paysan moyen n’existe plus du tout, parce que la différenciation au sein de la paysannerie s’est très accentuée ces derniers temps. Malheureusement, dans ce domaine, également, nos statistiques sont très insuffisantes. Il n’existe pas de tableau exact sur la différenciation qui se poursuit ces derniers temps dans les villages. Toutefois, je voudrais faire une remarque générale. Si vous considérez n’importe quel pays capitaliste et même un pays qui se développe très rapidement, vous reconnaîtrez que le tableau peut se transformer fondamentalement en quelques années, que la couche des paysans moyens est bien entraînée dans le flot du développement capitaliste, mais que ce processus se poursuit cependant plus lentement que dans l’industrie. Mais s’il en est ainsi dans les pays capitalistes, où tout le mécanisme de la société capitaliste tend au rythme maximum de décomposition de la couche des paysans moyens et de la différenciation au sein de la paysannerie, c’est impossible chez nous du seul fait de la nationalisation du sol. Lénine l’a souvent répété. Je puis m’appuyer sur le discours de Lénine qui a été enregistré sur disques de gramophone et répandu dans tous les villages et dans toutes les villes de l’Union soviétique, comme l’un des discours les plus importants et les plus populaires de Lénine sur la question paysanne. Dans ce discours, il parle de la nationalisation du sol, et de l’importance de la couche des paysans moyens précisément en rapport avec ce fait. Et c’est pourquoi, quoi qu’on dise, nous ne pouvons aucunement aboutir à cette conclusion que chez nous le tableau de la différenciation au sein de la paysannerie s’est modifié considérablement au cours des deux dernières années, c’est impossible.

La croissance des coopératives[modifier le wikicode]

Parmi les facteurs qui sont caractéristiques pour la situation dans notre pays, on sait que le développement des coopératives, et en premier lieu des coopératives agricoles, joue un très grand rôle. Si nous considérons le bilan des coopératives agricoles, nous voyons que, du rr janvier 1923 au

1 er janvier 1924, il a augmenté de quatre fois et demie, et du 1®r janvier 1924 au 1Br octobre 1925, il a augmenté de 90 %. Ce rythme extrêmement rapide du développement des coopératives agricoles parle une langue suffisamment claire. Il montre que, quoique nous ayons commis dans ce domaine des erreurs considérables et que nous n’ayons pas déployé l’énergie nécessaire, nous avons cependant réalisé une grande œuvre.

Le bilan général est favorable pour nous[modifier le wikicode]

Si nous nous posons maintenant la question des rapports entre l’économie d’Etat et l’économie capitaliste privée, nous pouvons dire que, quoique le capital privé se soit accru en chiffres absolus, les positions des éléments socialistes de notre économie se sont relativement renforcées par rapport au capital privé. Le même Kutler, sur lequel je me suis déjà appuyé, déclare que la participation du capital privé à l’ensemble de la vie économique diminue constamment, c’est-à-dire que bien que le bénéfice brut du capital privé s’élève, d’après ses calculs, à plus de 400 millions de roubles, les éléments socialistes de notre économie progressent à une allure beaucoup plus rapide. Ce spécialiste reconnaît donc, par conséquent, que la croissance de l’économie de l’Etat dépasse la croissance de l’économie privée, c’est là, en fin de compte, l’essentiel. Si le capital privé s’est accru et que notre accroissement dépasse cependant le sien, c’est une preuve de la croissance générale de notre pays et du renforcement de notre position dans les cadres de cette vie économique croissante.

Par conséquent, d’une part, l’industrie d’Etat et l’industrie, en général, dépassent l’agriculture ; d’autre part, les éléments socialistes de l’économie dépassent le capital privé.

Telles sont les conclusions les plus importantes que nous pouvons tirer de l’analyse de notre situation économique. Naturellement, ça n’exclut pas le fait que ce développement se poursuit à travers des contradictions. Je ne cache pas du tout que le capital privé s’accroît. J’ai à dessein indiqué les chiffres qui montrent cet accroissement du capital privé. Mais, cependant, le bilan total est en notre faveur, en faveur de la classe ouvrière, en faveur de la dictature prolétarienne et en faveur des éléments socialistes de notre économie.

La Situation Politique Dans L'Union Soviétique[modifier le wikicode]

Arrivons-en maintenant à la situation politique dans notre pays. Je traiterai rapidement cette partie de mon discours, étant donné que la situation politique reflète essentiellement la situation économique de notre pays.

La tranquillisation de la classe paysanne[modifier le wikicode]

Si nous considérons la situation d’un point de vue tout à fait général, nous devons, avant tout, indiquer comme l’un des facteurs principaux déterminant la situation politique de notre pays la tranquillisation de la classe paysanne et de la masse des paysans moyens.

Notre existence se développe actuellement à une allure si rapide que nous oublions souvent quelle était la situation il y a relativement peu de temps. Mais si vous vous rappelez l’époque qui précéda la XIVe Conférence du parti, vous vous souviendrez de l’inquiétude qui existait parmi les larges masses paysannes, et particulièrement parmi les paysans pauvres et les paysans moyens. Dans un très grand nombre d’endroits, les paysans moyens marchaient avec les koulaks et manifestaient, d’une façon très active, leur mécontentement à l’égard du pouvoir des soviets. Nous pouvons constater maintenant une tranquillisation générale dans les villages. La confiance à l’égard du pouvoir soviétique et du parti communiste s’accroît. C’est une conséquence directe de notre juste orientation politique et, en particulier, de notre politique d’animation des soviets, d’égalité révolutionnaire, de réglementation des rapports dans tout le système de nos organes soviétistes et de toute une série de soulagements dans le domaine des impôts agricoles.

Il ne faut pas considérer cette tranquillisation de la classe paysanne indépendamment de la question du renforcement de la dictature prolétarienne. La situation politique de la classe paysanne constitue l’un des facteurs les plus importants pour le renforcement de la dictature prolétarienne. Cette dictature ne doit être affaiblie en aucune circonstance. Ce n’est pas par hasard que Lénine a déclaré que le principe suprême de la dictature prolétarienne était l’alliance avec la classe paysanne. C’était et cela reste l’un des principes les plus importants de l’enseignement léniniste. Le changement favorable de la température politique de notre classe paysanne, non pas aux dépens d’une passivité croissante, mais accompagné, au contraire, d’un renforcement de l’activité de la classe paysanne, est l’un des progrès les plus considérables dans la vie politique intérieure de notre pays. Il signifie le renforcement de la dictature prolétarienne et de l’influence dirigeante.

Notre croissance est également reconnue à l’étranger[modifier le wikicode]

Cette situation des rapports de forces à l’intérieur de notre pays, sur la base de notre accroissement économique et du renforcement des éléments socialistes de notre économie par rapport à l’ensemble de notre vie économique, devait avoir également comme conséquence un certain regroupement des forces sur l’arène internationale. Notre croissance est également reconnue par nos ennemis. Le seul fait de notre croissance les oblige, d’une part, à reprendre avec nous des relations économiques et, d’autre part, à s’efforcer de paralyser cette croissance. Je fais ici allusion à certains préparatifs du gouvernement anglais et de la bourgeoisie anglaise, en vue de réaliser le blocus économique et financier de notre Union.

En ce qui concerne nos demi-amis, c’est-à-dire les larges masses ouvrières, il est aujourd’hui clair pour tout le monde que le fait de la croissance et du renforcement des éléments socialistes pénètre peu à peu, à travers le nuage des mensonges bourgeois, dans les têtes socialistes. Cela se manifeste dans le fait que des délégations ouvrières viennent nous visiter de plus en plus fréquemment. Hier, un camarade communiste arrivé avec la délégation allemande me disait qu’en Allemagne quiconque déclarerait que notre industrie de l’acier n’est pas une industrie socialiste, que le nombre de nos ouvriers diminue, que tout est en recul chez nous, perdrait tout crédit, même auprès des social-démocrates, du fait que cela ne serait qu’une répétition des mensonges de la presse bourgeoise et des leaders les plus réactionnaires de la social- démocratie.

Nous progressons plus rapidement que nos adversaires[modifier le wikicode]

Il est naturellement clair que les forces de nos adversaires s’accroissent dans le domaine politique tout comme dans le domaine économique. Il est clair que nous devons bien voir les dangers politiques qui nous menacent. Il est clair que nous devons voir le danger qui nous menace de la part des gros paysans, des nepmen et des intellectuels bourgeois qui s’allient souvent avec eux. Nous ne devons pas les perdre des yeux, nous devons observer constamment la croissance de ces dangers.

C’est vrai, nous serions de très mauvais politiciens si nous ne voyions pas les choses sous ce rapport. Mais si nous tirons le bilan général, si nous considérons la juste proportion de lumière et d’ombre, si nous voyons notre croissance et la croissance de nos adversaires, nos progrès et nos erreurs, nous devons dire la vérité et cette vérité est que, en général, nous progressons plus rapidement que nos adversaires, qu’aucune nuée d’orage n’est suspendue au-dessus do nous et qu’en général nous sommes dans la bonne voie.

Les divergences idéologiques entre le parti et l’opposition[modifier le wikicode]

J’en viens maintenant aux questions qui ont été posées, en partie, à la séance plénière du comité central par les camarades de l’opposition et, en partie, en dehors de la séance plénière par des écrivains, journalistes, théoriciens, économistes de l’opposition. Je diviserai mon exposé d’après les différents problèmes fondamentaux devant lesquels est actuellement placé notre parti et de l’appréciation desquels dépendent notre politique et les conclusions qu’en tant que dirigeants de la politique de notre parti nous devons tirer de la situation.

La politique économique et d’industrialisation de notre pays[modifier le wikicode]

Prenons, tout d’abord, le premier problème que j’appellerai le problème de la politique économique en rapport avec l’industrialisation de notre pays. Je m’efforcerai d’exposer succinctement les thèses des camarades de l’opposition qui constituent leur plate-forme économique en face de la plate-forme du parti.

Leur première thèse consiste à dire que notre industrie est en voie de recul et que la disproportion existant entre l’industrie et l’agriculture croît aux dépens de l’industrie. J’ai déjà réfuté cette thèse dans mon introduction, il est courant que toutes les oppositions décrivent toujours la situation d’une façon trop sombre, mais cependant il faut observer une certaine mesure. Les camarades de l’opposition prétendent que notre industrie est en recul par rapport à l’agriculture, que la première ne se développe pas aussi vite que la seconde et que la responsabilité en incombe à la politique de notre parti et de la majorité du comité central.

Déjà, lors des discussions sur la politique des prix, en 1921, on accusa le comité central de notre parti d’être responsable du recul de notre industrie par rapport à l’agriculture. Vous vous rappelez, camarades, quelle réponse les événements ont apportée à cette accusation ? Dès la première année qui suivit la discussion de 1923, notre industrie fit un bond de 60 %. Au cours de l’année suivante, notre industrie fit un nouveau bond de 40 %. Déjà, la thèse sur le recul de notre industrie repose sur des chiffres inexacts. J’ai posé la question sous une forme positive au début de mon rapport, et vous avez vu que le bilan total est, sans aucun doute, en faveur de l’industrie.

La seconde thèse consiste à dire que nous devons maintenant appliquer une politique industrielle beaucoup plus intensive et particulièrement par élévation des prix des produits de notre industrie. Piatakov, qui à la dernière séance plénière prit la parole au nom de l’opposition, déclara qu’il fallait élever les prix des produits de notre industrie. Les camarades de l’opposition sont d’avis que cette élévation des prix aura pour conséquence une industrialisation plus intensive de notre pays. Nous pensons que cette politique est absolument fausse. Nous ne pouvons pas admettre cette politique parce qu’une élévation des prix des produits de notre industrie, dont la plus grande partie est consommée dans les villes et constitue l’un des éléments du niveau des salaires, aurait pour résultat de diminuer le salaire réel et d’influer défavorablement sur la stabilité de notre devise. Nous ne pouvons pas accepter cette politique, parce que non seulement elle ne nous permettra pas de surmonter le mal principal de nos organisations industrielles, le mal bureaucratique, le mal des frais trop élevés de l’appareil industriel et de l’appareil commercial, le mode d’organisation irrationnelle du travail, mais elle rendra plus difficile encore la possibilité de surmonter toute une série de lacunes de notre industrie. Si nous habituons maintenant notre industrie et nos organes économiques à une politique d’élévation des prix, nos fonctionnaires des organes économiques ne feraient rien pour améliorer l’organisation du travail, pour diminuer les dépenses improductives, pour établir une organisation rationnelle du travail, pour réduire les frais d’entretien et le coût de production et pour améliorer la qualité des produits. Tout monopole cache en lui le danger d’une certaine moisissure, d’une certaine tendance à se reposer sur ses propres lauriers. Le capitaliste privé, l’entrepreneur privé, a toujours été poussé en avant par la concurrence. Quand Pierre travaille mal et a des frais d’entretien élevés alors que, chez Paul, ces frais sont moindres, Paul bat Pierre, la concurrence abat les entrepreneurs qui travaillent avec des frais élevés. Mais si nous avons en mains toute la grande industrie, si nous disposons d’un monopole d’Etat et que toutes les positions essentielles nous appartiennent, si nous n’utilisons pas notre direction en vue de rendre la production meilleur marché et de l’améliorer, nous aurons devant nous toutes les conditions d’une moisissure de notre industrie sur la base du monopole. Ce qui est réalisé par la concurrence dans la société capitaliste doit être obtenu chez nous par une pression constante sous l’assaut des besoins des masses : produire mieux, meilleur marché et fournir de meilleures marchandises et à meilleur marché.

Si dans notre politique des prix nous nous écartons de cette attitude de principe, nous ne remplirons pas le commandement de Lénine, d’après lequel notre industrie doit fournir à l’économie paysanne des produits à meilleur marché que le faisait le capitalisme, mais au contraire nous nous mettrons dans une situation telle que les ouvriers et, à plus forte raison, les paysans nous diront : « Pourquoi avez-vous fait la révolution si votre économie a pour conséquence le renchérissement des produits de notre industrie ? Vous ne comprenez rien à l’économie. »

Nous devons montrer pratiquement que nous comprenons quelque chose à l’économie, et c’est pourquoi notre principal souci doit être de pratiquer une politique de diminution constante des prix en réduisant le coût de production et en mettant de l’ordre dans notre appareil économique d’Etat. J’ai dit plus haut que le capitaliste privé fait circuler son capital plus rapidement, qu’il a moins de frais, qu’il sait mieux épargner, etc., et que, par contre,, notre appareil est lourd, que son capital circule plus lentement, qu’il a des frais immenses. Cela nous écrase. Si nous ne voulons pas succomber devant les capitalistes privés et aller nous-mêmes de l’avant, si nous voulons élever la qualité de notre production pour vendre nos marchandises meilleur marché, pour renforcer notre alliance économique avec les paysans, nous devons travailler énergiquement non pas à élever les prix, mais au contraire à les diminuer.

L’opposition pense que, par sa politique d’élévation des prix, elle arriverait à un accroissement plus rapide de l’industrie, mais nous pensons que c’est une illusion, une tromperie. La politique des prix élevés aurait, au contraire, pour résultat d’arrêter la croissance de notre industrie, de nous faire croire qu’on pourrait tout couvrir à l’aide de la caisse de l’Etat, et elle ne ferait rien pour aller de l’avant, pour se développer et pour devenir un facteur technique et économique de progrès de notre économie.

La troisième thèse consiste à dire que nous sommes menacés d’un danger de la part du capital privé. J’ai déjà réfuté cette thèse dans mon introduction. J’ai pris pour exemple les chiffres les plus favorables pour le capital privé et je crois avoir démontré que même ces chiffres favorables pour le capital privé n’indiquent pas du tout un danger menaçant de la part du capital privé.

La quatrième thèse, enfin, est l’affirmation aux termes de laquelle nos organes d’Etat dégénèrent complètement, qu’ils se détachent complètement des masses et qu’ils se rapprochent davantage des nepman, des koulaks et autres éléments capitalistes. A ce sujet, je dois dire qu’il existe certainement une certaine tendance à une dégénérescence bureaucratique. Mais ce à quoi il faut s’opposer énergiquement, c’est à la thèse selon laquelle notre industrie d’Etat est déjà dégénérée et qu’elle ne représente plus l’industrie de la classe ouvrière. C’est à cette affirmation que tendent les camarades de l’opposition.

Notre industrie est l’industrie socialiste d’Etat de la classe ouvrière avec une altération bureaucratique. Tel est notre point de vue. La lutte contre le bureaucratisme doit être, par conséquent, une de nos tâches principales, et nous devons y consacrer la plus grande énergie. Mais nous sommes encore loin de la thèse établie par les camarades de l’opposition.

La question paysanne[modifier le wikicode]

J’en arrive maintenant au second problème, c’est-à-dire au problème de la classe paysanne.

Il y a un point que nous devons considérer avec une attention particulière, car il constitue pour ainsi dire le tremplin à l’aide duquel la nouvelle opposition lance ses mots d’ordre sur la question paysanne. C’est la confusion entre capital privé et paysannerie, entre paysannerie et économie capitaliste.

Tout d’abord, j’attirerai votre attention sur le livre de Préobrajensky, intitulé Sur la nouvelle économie, livre qui contient la coordination théorique de toutes les propositions, courants, affirmations, thèses, etc., de l’opposition. L’économie de notre pays y est décrite de la manière suivante : d’une part, l’économie d’Etat ; d’autre part, l’économie privée. En dehors de cela, il n’y a rien. L’économie capitaliste privée, l’économie paysanne, celle des paysans pauvres comme celle des paysans moyens, tout cela est confondu. C’est, naturellement, une façon inexacte de poser la question. Lorsque Lénine posa la question de savoir qui battrait l’autre, des capitalistes ou de nous, il la posait du point de vue suivant : qui conquerra la classe paysanne ? Réussirons-nous à gagner la masse principale de la paysannerie ou seront-ce les capitalistes ? Dans la conception de Lénine, la classe paysanne jouait le rôle d’un objet disputé par deux classes adverses. Et si nous posons la question : qui battra l’autre ? cette question sera principalement décidée par celle de savoir qui entraînera la classe paysanne. La classe ouvrière ou la classe capitaliste ? Car entre la classe ouvrière et la classe capitaliste est la lutte pour la conquête de la paysannerie. C’est pourquoi c’est une façon complètement absurde de poser la question, qui est en contradiction formelle avec ce que disait Lénine, de confondre l’économie capitaliste privée avec l’économie paysanne.

Cette question est liée à une autre question, à savoir comment tirer de l’économie paysanne et de l’économie privée, en général, des ressources pour l’industrie et pour l’économie de l’Etat. Il ne faut nullement ici simplifier la question. Il est tout à fait clair que notre industrie d’Etat doit se procurer les ressources nécessaires pour son extension, non seulement au moyen de ce que la classe ouvrière produit à l’intérieur des cadres de cette industrie d’Etat, et que nous devons tirer des domaines en dehors de l’industrie les ressources nécessaires au développement de l’industrie. C’est pourquoi nous devons également en tirer de l’économie paysanne. La classe paysanne doit contribuer à aider l’Etat à développer l’industrie socialiste, et c’est pourquoi les recettes des impôts, les bénéfices industriels sur les produits que nous vendons aux paysans, sont tirés de la classe paysanne.

Il serait faux de dire que l’industrie ne doit utiliser pour son développement que les produits créés par elle. Toute la question consiste bien plutôt à se demander combien pouvons- nous tirer de la classe paysanne, quelles sont les limites de nos exigences et comment pouvons-nous obtenir les meilleurs résultats ? C’est ainsi que se pose la question. C’est là toute la différence qui existe entre nous et l’opposition. Les camarades de l’opposition veulent trop demander aux paysans et veulent exercer sur eux une pression si forte qu’elle serait, à notre avis, irrationnelle au point de vue économique et inacceptable au point de vue politique. Cela ne veut pas dire que nous renonçons à tirer de la classe paysanne des moyens destinés à renforcer l’industrie, mais nous sommes beaucoup plus prudents dans nos calculs et nous faisons ce qui est opportun, politiquement et économiquement. Mais quand on pose la question comme la pose Préobrajensky, et avec lui toute une série d’autres camarades qui ne voient pas la différence entre l’économie capitaliste privée et l’économie paysanne, il est compréhensible que le souci de ces limites soit superflu, que nous devons tirer des capitalistes privés tout ce qui est possible et ne les laisser exister que dans la mesure où on pourra les traire l’année suivante. Mais, en ce qui concerne ¡’économie paysanne, nous ne pouvons pas poser la question de la même façon qu’en ce qui concerne l’économie capitaliste privée. On ne peut pas trouver ici une formule bonne aussi bien pour les paysans moyens que pour les paysans pauvres et les paysans riches, comme le fait Préobrajensky. Une telle façon de poser la question nous mène à des conclusions différentes également dans la politique pratique. L’opposition, comme je l’ai déjà dit, propose de vendre aussi cher que possible ; si l’on vend plus cher au paysan, on reçoit davantage de lui ; c’est en cela que consiste toute la sagesse de l’opposition. Le point de vue d’un camarade de l’opposition, le camarade Ossovski, contenu dans un article que nous avons publié comme article de discussion dans la revue Bolchevik, consiste en ce que nous prenons moins de la classe paysanne que sous le tsarisme, qu’il faut prendre davantage, et par là nous supprimerons tous les maux existant chez nous. Nous ne devons pas juger ainsi, non pas parce que cela serait contraire à notre politique à ¡’égard de la classe paysanne, mais parce que cela est une naïve illusion du point de vue de l’opportunité économique, il est, en effet, ridicule de croire que notre industrie pourrait se développer rapidement dans de telles conditions.

Prenons un exemple grossier : nous pouvons tirer cette année dix fois plus de la classe paysanne que nous le faisons actuellement pour le placer dans l’industrie. Mais que se produira-t-il ? L’année prochaine nous aurons une agriculture qui ne vaudra rien, nous n’aurons pas de matières premières, pas de coton, pas de céréales pour l’exploitation, etc., et dans l’industrie nous jetterons un capital immense en tirant de la classe paysanne tout ce que nous pourrons en tirer. Il serait absurde de penser que nous pouvons ainsi assurer un développement rapide de l’industrie, étant donné qu’au cours des années prochaines nous nous heurterons à la résistance du marché rétréci et que nous ne trouverons pas d’acheteurs pour nos produits.

J’ai pris à dessein un exemple grossier. Nous pouvons voir, par là, que l’allure plus rapide du développement de l’industrie ne peut pas être assurée par la somme maxima que nous pouvons tirer de l’économie paysanne. Ce n’est pas du tout aussi simple. Si nous demandons moins aujourd’hui, nous facilitons par là l’accumulation dans l’agriculture et nous assurons pour demain une plus grande demande de produits de notre industrie. Si nous assurons une plus grande productivité à l’agriculture, nous pourrons, l’année prochaine, sur la base de cette plus grande productivité, demander davantage que nous l’avons fait cette année. Nous nous assurons ainsi pour l’année prochaine un plus grand accroissement de nos revenus que nous pourrons employer pour le développement de notre industrie d’Etat. Si, par suite de cette politique, nous marchons cette année à une allure un peu plus lente, la courbe de notre croissance montera d’autant plus rapidement l’année prochaine ; si nous adoptons la politique de l’opposition, nous augmentons les investissements de capitaux la première année, mais ces placements diminueront d’autant plus rapidement l’année prochaine. Ce n’est pas par de tels moyens que nous pouvons assurer le développement de notre industrie. Nous ne pouvons l’assurer qu’au moyen de la politique adoptée par le comité central. La politique proposée par l’opposition nous mènerait non seulement à toute une série de difficultés politiques, mais elle aurait encore pour résultat de ralentir l’allure du développement de l’industrie.

J’en arrive maintenant à une question dont j’ai déjà parlé plus haut. Les camarades de l’opposition exagèrent d’une façon effrayante la différenciation qui se produit au sein de la classe paysanne, et c’est pourquoi ils manifestent constamment une tendance à ne pas tenir compte des paysans moyens. Ils considèrent avec une attention insuffisante le développement de l’économie des paysans moyens, des coopératives, etc. En relation avec cet aspect de la classe paysanne, ils n’ont pas compris non plus le problème de la transformation de l’économie paysanne, du développement de cette économie vers d’autres voies, vers la voie socialiste, grâce à l’influence croissante des organes de la dictature prolétarienne sur l’économie des paysans moyens. Cette question joue un rôle extraordinairement grand dans notre discussion. Elle constitue la base d’un grand nombre de divergences et l’une des questions fondamentales qui séparent la grande majorité du comité central des camarades de l’opposition.

Le caractère social de l’Etat soviétiste[modifier le wikicode]

Tournons-nous maintenant vers le troisième problème, le problème du pouvoir, de la dictature prolétarienne et de la politique de la dictature prolétarienne à l’intérieur de notre pays. Vous allez peut-être demander : cette question est-elle actuellement devenue une question litigieuse dans notre parti ? Oui, imaginez-vous que l’opposition a également fait de cette question une question litigieuse. Au moyen de toute une série d’attaques, de toute une série d’affirmations, elle a également commencé à exprimer des doutes dans cette question. SI l’on doutait précédemment du caractère de notre industrie socialiste, si l’on doutait de l’exactitude de notre politique à l’égard de la classe paysanne, on doute maintenant du caractère de classe du pouvoir soviétique de notre pays. C’est un nouveau pas dans le développement de la pensée de l’opposition, un nouveau pas s’écartant du point de vue léniniste, de la part des chefs du bloc actuel de l’opposition.

Dans un de ses discours à la séance plénière du comité central, Trotsky parla du caractère non prolétarien du pouvoir soviétique existant dans notre pays. Lorsque la question paysanne fut discutée, en rapport avec les résultats des élections, l’opposition déclara que nous étions menacés d’une déviation koulak, déviation qui exigeait une intervention énergique de notre parti pour s’opposer à un nouveau changement de l’Etat actuel déjà non suffisamment prolétarien.

Il faut remarquer que l’idée selon laquelle notre Etat n’est pas un Etat ouvrier, n’est plus l’Etat de la dictature prolétarienne, joue un rôle de plus en plus important dans l’opposition. On pourrait peut-être croire que cette phrase n’a échappé à Trotsky que dans la chaleur de la discussion. C’est possible, mais c’eût été son devoir de corriger cette affirmation. C’eût été d’autant plus nécessaire que, dans mon discours à l’assemblée plénière du comité central, j’ai fait allusion à cette phrase. Je répète qu’il est possible que Trotsky l’ait dite dans la chaleur de la discussion, mais il n’y a pas que cette phrase. Il y a une étude faite par un membre de l’opposition et qui sera publiée dans un des prochains numéros de la revue Bolchevik, un article du camarade Ossovsky. J’ai déjà indiqué un autre de ses articles publié dans Bolchevik, article dans lequel il prétendait que nous ne devions pas tirer des paysans moins que le tsarisme et les propriétaires fonciers n’ont tiré d’eux. Maintenant, j’en arrive à ses déclarations concernant le caractère de notre pouvoir d’Etat. Camarades, il faut consacrer à cette question un peu plus d’attention, car, comme vous le comprendrez vous-mêmes, la question du caractère de notre pouvoir d’Etat constitue pour nous la question centrale. Existe-t-il chez nous une dictature prolétarienne ou non ? De cette question dépendent toutes les autres questions, car si nous n’avons pas chez nous de dictature prolétarienne, il nous faut réaliser cette dictature prolétarienne et il faut écarter tous les obstacles qui s’opposent à la réalisation de cette dictature prolétarienne.

Ossovsky écrit ce qui suit :

« Il faut se rappeler les paroles que Lénine a prononcées à la séance de la fraction communiste du VIIIe Congrès des soviets. Il disait que notre Etat n’est pas un Etat ouvrier, mais un Etat ouvrier et paysan. Ce n’est que maintenant, dix années plus tard, que nous pouvons comprendre pourquoi Boukharine ne peut pas tirer les conclusions qui découlent du fait que notre Etat n’est pas un Etat ouvrier, mais un Etat ouvrier et paysan. La conception léniniste de l’Etat ouvrier et paysan suppose l’existence inévitable d’une certaine distance qui nous sépare de cet Etat, dans lequel se trouve le prolétariat et, dans une certaine mesure également, la classe paysanne. Les tentatives de supprimer l’écart existant inévitablement entre l’Etat ouvrier et paysan et le prolétariat peuvent avoir des conséquences fatales pour la révolution prolétarienne. »

Si l’on traduit cela en langage ordinaire, cela signifie ce qui suit : nous n’avons pas une dictature prolétarienne, notre Etat n’est pas un Etat ouvrier, mais un Etat ouvrier et paysan, le prolétariat doit défendre ses intérêts propres, par conséquent il doit se dresser, dans une certaine mesure, contre cet Etat ouvrier et paysan. Si, par conséquent, le parti prolétarien veut rester un parti prolétarien, il doit lutter un petit peu contre l’Etat soviétique. Mais il faut dire avant tout que ça commence à devenir une mode d’appuyer toutes les absurdités sur l’autorité de Lénine et l’on pense que cela ne coûte rien, qu’on peut s’exercer dans ce cadre aussi longtemps qu’on veut. Ici, Ossovski s’en prend à ma personne. Lénine, dit-il, a compris que notre Etat est un Etat ouvrier et paysan. Boukharine ne le comprend pas, mais comme l’on sait que Boukharine appartient à la majorité du comité central, il est naturel que le comité central ne comprenne rien à cette question et mène, par conséquent, une politique qui, comme dit Ossovsky, pourrait mener à des résultats extrêmement nuisibles du point de vue de la révolution prolétarienne. Mais je repousse tout d’abord l’appel qu’on fait à l’autorité de Lénine ou, plus exactement, j’en appelle moi-même à ce dernier pour prouver qu’Ossovski a complètement tort et que sa façon de poser la question mène à des conclusions nuisibles pour la révolution prolétarienne.

Lénine a écrit ce qui suit dans son article intitulé « La Crise du parti », à l’occasion de la discussion syndicale :

« A propos de la discussion du 30 décembre, je dois corriger encore une erreur que j’ai commise. Je disais : ‘Notre Etat n’est pas un Etat ouvrier, mais un Etat ouvrier et paysan.’ Boukharine m’interrompit en demandant : ‘Mais lequel ?’ Et, en réponse à son interruption, j’en appelai au VIIIe Congrès des soviets qui venait précisément de se terminer. En lisant le rapport sur la discussion, je vois que j’avais tort et que Boukharine avait raison. J’aurais dû dire : ‘‘L’Etat ‘ouvrier est une abstraction, mais nous avons, en réalité, un Etat ouvrier avec cette particularité que, dans cet Etat, ce n’est pas la population prolétarienne, mais la population paysanne qui ‘constitue la majorité et, d’autre part, un Etat ouvrier avec une défiguration bureaucratique’’. »

C’est là une phrase tout à fait juste et Ossovsky devait an voir que Lénine a dit cela. Lénine disait : « Nous avons un gouvernement ouvrier, mais, dans le pays, c’est la population paysanne qui constitue la majorité. » Très juste, nous avons un Etat ouvrier, mais avec une défiguration bureaucratique. Par conséquent, la dictature prolétarienne a chez nous cette particularité qu’elle existe dans un pays où la population est en majorité paysanne et où l’appareil du pouvoir d’Etat est chargé d’une défiguration bureaucratique. C’est absolument juste, mais quel est le caractère de classe de l’Etat ? C’est un Etat ouvrier. Si l’on nous dit, par conséquent, que notre Etat n’est pas un Etat ouvrier et qu’il est déjà à moitié petit-bourgeois, on prétend que notre Etat est déjà dégénéré et l’on doute de l’existence dans notre pays de la dictature prolétarienne. Nous sommes d’avis que si notre Etat n’est pas un Etat prolétarien, cela a quelque chose de très sérieux. S’il en était ainsi, nous devrions tirer d’autres conclusions et il serait tout à fait naturel que notre parti, s’il est un parti prolétarien, pose à l’ordre du jour des questions signifiant un assainissement radical du pouvoir soviétique actuel. Il n’est pas possible, autrement. Telle est la première thèse.

La prétendue dégénérescence bureaucratique des soviets[modifier le wikicode]

La thèse précédente est liée à la thèse sur la dégénérescence de l’appareil d’Etat et sur la prétendue déviation de notre politique et de la politique de l’Etat soviétiste des intérêts des larges masses prolétariennes. Kamenev déclarait dans son discours : « Votre politique s’éloigne de la ligne de la révolution prolétarienne et des intérêts des larges masses ouvrières. »

Cette déclaration concorde parfaitement avec l’affirmation selon laquelle « notre Etat n’a pas un caractère prolétarien » et selon laquelle « nous ne sommes pas un Etat ouvrier ». Elle concorde parfaitement avec les bruits concernant la dégénérescence du pouvoir soviétiste. L’opposition a montré que les nombreux groupes bureaucratiques de l’appareil d’Etat sont complétés par les groupes bureaucratiques non moins nombreux existant à l’intérieur des organes économiques, des coopératives, des syndicats, etc. Il apparaît donc que, dans notre appareil, nos cadres n’ont rien de commun avec les intérêts des larges masses ouvrières.

Jusqu’ici nous croyions, dans la simplicité de notre âme, que notre parti constituait l’avantgarde prolétarienne. Mais il apparaît maintenant qu’il n’est qu’une clique bureaucratique complètement séparée des masses. Jusqu’ici, nous pensions que le pouvoir soviétique représente chez nous une forme de dictature prolétarienne, et il apparaît maintenant que nous avons un Etat non prolétarien à la tête duquel se trouve une caste bureaucratique. En poursuivant logiquement cet ordre de pensées, on doit en venir nécessairement tôt ou tard à l’idée de la nécessité du renversement du pouvoir soviétique, ni plus ni moins. Et je le répète : si j’étais personnellement convaincu que la situation chez nous est telle que nous n’avons plus une dictature prolétarienne, que chez nous règne une oligarchie complètement séparée des intérêts des larges masses, il faudrait en tirer les mêmes conclusions que Kautsky, c’est-à-dire : renversement du pouvoir soviétiste. Nos camarades de l’opposition ne sont pas encore arrivés à cette conclusion et il semble qu’ils n’iront pas si loin. Je crois tout au moins que le Dieu bolchevique les arrêtera à mi-chemin, et cela sera d’autant mieux du point de vue des intérêts du parti. Mais il faut être un imbécile pour ne pas comprendre que ce développement idéologique mène précisément dans cette direction.

Le prétendu plongeon des soviets dans la petite bourgeoisie rurale[modifier le wikicode]

Il en est de même en ce qui concerne une autre affirmation de l’opposition, aux termes de laquelle nos organes soviétistes tombent de plus en plus dans le marais de la petite bourgeoisie rurale. Les camarades prennent les résultats des élections et disent : « Voyez, dans les soviets ruraux, il y a de plus en plus de paysans, c’est ainsi que nous avons animé les soviets. » Les étages inférieurs de notre bâtiment sont submergés par la petite bourgeoisie, les étages supérieurs par une clique bureaucratique. Ce flot impur finira par nous étouffer.

Cette thèse est vraiment une perle de l’activité créatrice de la nouvelle opposition. Les camarades de l’opposition s’imaginent qu’on peut gouverner dans un pays rural de telle sorte que la classe ouvrière puisse dominer dans chaque village. Comment peut-on s’imaginer que le prolétariat industriel puisse avoir la majorité dans les soviets ruraux ? Pour s’imaginer une telle chose, il faut avoir véritablement une tête de chou à la place de la tête. (Applaudissements.) Quiconque possède même les connaissances politiques les plus élémentaires comprendra que le pouvoir soviétiste et notre appareil d’Etat constituent un système tout à fait particulier qui se compose, en fait, de plusieurs étages. C’est Zinoviev lui-même qui, à de nombreuses reprises, a parlé avec un grand enthousiasme de la nécessité d’attirer à nous les paysans sans parti. Les attirer où ? Dans les soviets. Est-ce un malheur que des paysans sans parti aient été élus aux soviets ? Pas le moins du monde. Quel est le laboratoire dans lequel nous transformons les paysans, surmontons leur psychologie individualiste, les entraînons derrière nous, les amenons à collaborer avec nous au travail de construction socialiste ? Ce laboratoire, c’est les soviets. On voudrait maintenant faire entrer les paysans dans une chambre obscure et les faire apprendre au moyen de la radiotélégraphie. C’est une pure absurdité. Nous transformons les paysans au moyen du travail pratique, nous les entraînons derrière nous, pour assurer la ligne prolétarienne.

La structure de notre appareil d’Etat est la suivante : il existe des organes supérieurs, moyens et inférieurs. En haut se trouvent des cadres très forts, dirigés par notre parti et dont le noyau est composé de membres du parti. Plus nous descendons vers les organes inférieurs, plus nous y trouvons de sans-parti, et dans les villages nos organes s’appuient sur des paysans sans parti. Nous attirons peu à peu les paysans sans parti, c’est-à-dire une couche au fond petite-bourgeoise, dans les étages inférieurs, couche qui est soumise à une direction prolétarienne. Nous transformons les paysans à notre façon, nous les initions à notre travail, nous leur apprenons à travailler selon les nouvelles méthodes et nous les faisons participer à l’œuvre de construction socialiste. C’est ainsi que s’exprime la direction de la paysannerie par le prolétariat. Et si nous faisons entrer les paysans dans les organes inférieurs du pouvoir soviétiste, c’est là une condition indispensable du rôle dirigeant exercé par le prolétariat sur la paysannerie.

Pour réfuter les thèses de l’opposition, on peut encore fournir un autre exemple tiré de l’expérience d’un autre pays. Je prends comme exemple l’Angleterre. L’Angleterre, elle aussi, a mené une guerre impérialiste. On sait que le Premier ministre anglais, Lloyd George, a fait entrer dans son cabinet Henderson en qualité de représentant de la classe ouvrière et des syndicats. Il en a été de même dans un certain nombre d’autres pays ? Dites-moi : est-ce qu’un seul marxiste pourrait affirmer que l’Etat anglais était, à cette époque, un Etat bourgeois prolétarien, parce que Henderson était dans le gouvernement ? Naturellement, une telle affirmation serait une idiotie complète. Vous savez qui parlait ainsi : les opportunistes. Ils disaient : maintenant que Henderson est ministre et parce qu’il est ministre, une nouvelle ère a commencé dans le développement du capitalisme ; les ouvriers participent au pouvoir ; par conséquent, l’Etat n’est plus un Etat bourgeois impérialiste, mais quelque chose de tout à fait autre. Au fond, l’opposition apprécie de la même façon la dictature prolétarienne.

Lorsque Lloyd George prit Henderson dans son cabinet, l’Angleterre ne cessa pas un seul instant d’être un Etat bourgeois impérialiste. Pourquoi ? Pour une raison très simple, parce que la bourgeoisie s’était servie de Henderson uniquement pour transformer l’idéologie de la classe ouvrière et la rendre accessible à l’idéologie bourgeoise. Henderson a rempli la tâche qui lui avait été confiée par la bourgeoisie. Celle-ci put, pour un temps, traîner à sa remorque la classe ouvrière, et c’est pourquoi la nomination de Henderson au sein du ministère constituait la chaîne avec laquelle la bourgeoisie traîna après elle la classe ouvrière, sans changer d’un cheveu le caractère de classe de l’Etat bourgeois. Elle traîna à sa remorque son adversaire de classe. Mais la paysannerie, dans sa partie principale, n’est pas pour nous un adversaire de classe ; elle est notre alliée, et si nous la faisons entrer dans l’appareil de notre administration d’Etat, si nous l’amenons à nous, il faut être vraiment une tête de chou pour prétendre que nous n’avons pas pour cela un Etat ouvrier, mais un Etat hybride ouvrier petit- bourgeois, et d’en tirer cette conséquence qu’il faut défendre la ligne purement prolétarienne contre l’Etat soviétiste.

La racine de l’erreur théorique commise par l’opposition consiste en ce que ces camarades ne comprennent pas que la dictature prolétarienne doit attirer ses alliés dans les organes de la dictature pour les transformer, les diriger, les engager dans les voies socialistes, comme Lénine l’a dit, dans l’intérêt du principe suprême de la dictature prolétarienne, à savoir l’alliance entre la classe ouvrière et la paysannerie. C’est ainsi qu’il faut poser la question. Et si l’on manifeste des doutes sur l’existence de la dictature prolétarienne, pour cette raison que nous n’avons pas de prolétariat industriel dans les villages, et parce que, là où il n’y a pas de prolétariat industriel, il ne peut pas non plus y avoir de prolétaires et que, par conséquent, il ne peut y en avoir dans nos organes inférieurs, cela signifie qu’on ne comprend pas la tâche principale qui nous incombe, à savoir celle de faire participer la masse principale de la paysannerie à l’œuvre de la construction socialiste. Cette incompréhension est un exemple modèle du scepticisme manifesté par l’opposition sur la possibilité de la construction socialiste de notre pays, de cette incompréhension des méthodes de la construction socialiste dont a parlé notre XIVe Congrès.

Les résultats de la campagne électorale[modifier le wikicode]

Quelques mots sur les résultats de la campagne électorale qui vient de se terminer.

La dernière campagne électorale a été la première campagne organisée sur la base de la renonciation à une pression administrative de notre part. Pour la première fois, on a employé de nouvelles méthodes en consacrant nos efforts principaux au travail de préparation idéologique et en donnant une plus grande liberté aux différentes couches de la population qui, d’après notre constitution, ont le droit électoral. Quel fut le résultat de ces élections ? Dans les villages, le pourcentage des communistes élus aux soviets a diminué, et dans les soviets ruraux, et même dans les soviets des villes, sont entrés des éléments qui jusqu’alors étaient complètement mis à l’écart. C’est ce fait qui a permis à l’opposition de prétendre que les soviets avaient fait un plongeon dans le marais petit-bourgeois et que, par là, notre pouvoir d’Etat s’était écarté de la voie prolétarienne, sous la pression de la petite bourgeoisie.

A ce sujet, il faut remarquer ce qui suit : un grand nombre de camarades de province ont constaté que si, dans les soviets villageois, il y a moins de communistes qu’autrefois, aujourd’hui, derrière les communistes élus, se trouve le village tout entier, alors qu’autrefois ils n’étaient élus que fictivement et ne possédaient aucune autorité dans la population. Certes, il y avait autrefois plus de communistes dans les soviets ruraux, mais ces communistes n’étaient pas liés avec la masse et ils ne la dirigeaient pas. Actuellement, nous pouvons dire avec assurance que, même là où un petit pourcentage de communistes ont été élus aux soviets ruraux, cela ne représente aucunement un affaiblissement de notre influence, mais au contraire un renforcement de notre influence et la preuve que nous avons en mains la direction sur la base de la conviction idéologique, et qu’un communiste qui a derrière lui tout le village a plus de poids que dix communistes qui n’ont pas la population derrière eux.

A l’occasion de chaque grande manœuvre, de chaque changement d’orientation, il y a toujours des frais. Un regroupement est toujours nécessaire. Lorsque nous avons déclaré, à la XIVe Conférence du parti, qu’un regroupement s’imposait, un certain nombre de camarades ont perdu la tête. Ils ne savaient plus ce qu’ils devaient faire. Quelques-uns ont oublié de montrer le visage du parti et ont cédé à la pression d’éléments étrangers. D’autres ont perdu toute orientation et ne savaient plus comment se conduire. Ce n’est qu’au bout d’un certain temps qu’a commencé le véritable regroupement. C’est vrai, nous avons fait entrer un grand nombre de paysans dans les soviets ruraux, mais nous ne les avons pas partout soumis à notre influence d’une manière suffisante, et cela a été une faute de notre part. Nous n’avons pas su reconstituer nos rangs avec la vitesse nécessaire, mais nous devions cependant modifier notre politique pour pouvoir aller de l’avant. Il n’y a rien d’effrayant à cela. Maintenant que nous avons reconstitué nos rangs, nous commençons déjà à grouper de nouvelles masses qui jusqu’alors étaient soustraites à notre influence.

Zinoviev a, autrefois, proposé d’organiser des conférences de paysans sans parti, de fonder un journal pour les paysans sans parti, et Sokolnikov a même demandé la légalisation des mencheviks et des S.-R. Ils étaient même prêts à abandonner toutes les positions parce que les villages manifestaient un mécontentement à l’égard du pouvoir soviétique. Par contre, si nous opérons un changement d’orientation d’une façon calme et prudente, d’une main sûre, sans manifester la moindre crainte, alors ces mêmes camarades croient que nous dévions. Nous ne dévions pas, nous renforçons la dictature prolétarienne et, demain, nous la renforcerons encore dix fois plus, grâce à cette même politique qui ne constitue pas une déviation, mais qui est une politique juste.

Je répète encore une fois que si, au XIVe Congrès, l’opposition ne manifestait encore aucun doute sur le caractère de classe de notre Etat, elle manifeste maintenant un véritable scepticisme à l’égard du caractère prolétarien de l’Etat soviétiste.

De la liberté des groupements à la démocratie politique de notre pays[modifier le wikicode]

J’en arrive maintenant au problème de l’appareil du parti dans le système de la dictature prolétarienne.

Vous savez que nous autres, léninistes, nous avons tous considéré jusqu’à présent que l’unité et la fermeté de notre parti étaient la condition indispensable du maintien et du renforcement de la dictature prolétarienne. Nous avons toujours déclaré que la dictature prolétarienne ne pouvait être assurée dans notre pays que si notre parti maintenait le rôle de direction et que s’il est : 1. le seul parti politique existant dans notre pays, ce qui exclut l’existence légale d’autres partis ; et 2. que si le parti est uni, ce qui exclut l’existence de groupes de fractions et de courants organisés. Je ne vous rappellerai pas, camarades, avec quelle énergie, quel luxe de paroles et d’arguments Zinoviev s’est efforcé de démontrer cette vérité élémentaire du léninisme, et maintenant, brusquement, d’un seul coup, tout est changé ; toute l’opposition, Trotsky, Kamenev, Zinoviev, Kroupskaïa, etc., demandent la liberté des fractions à l’intérieur de notre parti. Le premier signal de ce changement d’orientation a été donné par Zinoviev du haut de la tribune du XIVe Congrès. On sait que Zinoviev a dit à ce congrès qu’il fallait faire entrer dans la direction du parti tous les anciens groupements d’opposition. Maintenant, ce germe est devenu non seulement un bourgeon, mais une fleur qui n’est pas, à vrai dire, trop aromatique. (Hilarité.) Si l’opposition maintient sa demande de liberté des fractions, un certain nombre de camarades de l’opposition arriveront à d’étranges conclusions. Le même camarade Ossovsky, dont j’ai déjà parlé plus haut, déclare ce qui suit : « Dans notre pays, il n’y a pas d’unité d’intérêts économiques. La classe ouvrière a ses intérêts propres. La classe paysanne a également les siens, quelque peu différents des premiers. Il y a, d’autre part, chez nous des capitalistes privés qui ont également leurs propres intérêts. Mais nous n’avons qu’un seul parti. Si nous ne voulons pas légaliser les autres partis, il faut faire en sorte qu’il y ait, à l’intérieur de notre parti, des éléments qui représentent les intérêts capitalistes. » C’est le sens de ce qu’a écrit Ossovsky :

« La solution de cette question (celle de l’unité de notre parti) serait facile si l’on devait prouver la possibilité de l’unité d’un parti légal qui ne serait pas le seul parti existant. Car, dans ce cas, nous serions le seul parti gouvernemental, mais non le seul parti dans le pays. Mais il est beaucoup plus difficile de montrer la possibilité d’une unité absolue du seul parti légal existant dans notre pays avec des tendances économiques extrêmement variées. Personne ne conteste le fait que notre économie comprend les domaines dans lesquels l’esprit d’entreprise capitaliste peut jouer un rôle positif. Dans ce cas, le parti, qui reste un parti uni et le seul parti dans notre pays, doit défendre, en fait, tous les intérêts existant dans le pays, par conséquent aussi ceux des entrepreneurs capitalistes. »

Comme on le voit, Ossovsky cherche à justifier la demande concernant la liberté des fractions.

Si vous voulez avoir un seul parti dans le pays où il y a des intérêts différents, dlt-ll, faites en sorte d’accorder une certaine liberté à ceux qui défendent les intérêts des paysans riches et des capitalistes. Il est difficile, dans les cadres de la constitution de notre parti, de défendre les intérêts des paysans riches et des capitalistes. C’est pourquoi, ouvrez la porte et vous aurez une fraction des nepman, une fraction de la petite bourgeoisie, et tout cela ensemble constituera le Parti communiste de l’Union soviétiste. Alors, la dictature fleurira dans notre pays, alors ce parti correspondra à l’Etat ouvrier et paysan. En fait, il faudra bientôt dire Etat des ouvriers, des paysans et des nepman. Alors, tout cela sera dans l’ordre. Etat des ouvriers, des paysans et des nepman, parti ouvrier-paysan et nepman, un seul parti dans le pays et tout sera dans le meilleur des mondes possibles. (Hilarité.) Vous savez maintenant de quoi il s’agit. Les différents groupements fractionnels à l’intérieur de notre parti ont, naturellement, pour base différents courants sociaux, et si nous permettons la constitution de groupements fractionnels, si nous permettons l’existence de fractions à l’intérieur de notre parti, la prochaine étape devra être la légalisation des autres partis.

Un exemple : il existe chez nous une fraction Medviediev dont la plate-forme vous est connue par l’article publié dans la Pravda. Medviediev demande que notre industrie d’Etat soit donnée en concession au capital étranger, il demande la liquidation de l’internationale communiste et de l’internationale syndicale rouge, l’entrée immédiate dans l’internationale d’Amsterdam, la cessation de toute discussion sur la paysannerie, étant donné que la paysannerie représente la « campagne stérile ». C’est là une plate-forme tout à fait menchevique.

On nous dit : « Donnez la liberté à cette fraction, elle s’intitule — plaisanterie à part — « Opposition ouvrière ». Admettons que nous acceptions la liberté des fractions et qu’il y ait dans notre parti une fraction légale Medviediev, alors les mencheviks viendront à nous et diront : nous n’en demandons pas davantage que ce que demande Medviediev. Liquidez l’internationale communiste, liquidez l’internationale syndicale rouge, pratiquez une vaste politique de concessions, crachez sur les paysans. Pourquoi ne voulez-vous pas nous légaliser, s’il y a déjà dans votre parti une fraction légale qui pose ses exigences ? Il est clair que nous devrons légaliser le parti menchevique, mais si nous faisons cela, nous dévierons véritablement de la ligne de la dictature prolétarienne et nous nous engagerons dans la voie de la démocratie politique, dans la voie qui nous a été conseillée depuis longtemps par les mencheviks, par Kautsky, par les S.-R. et par tous nos autres adversaires politiques.

Je dois dire qu’on joue beaucoup actuellement dans les salles de l’opposition avec l’idée de l’existence de deux partis. Le même Ossovsky nous prophétise pour le prochain avenir la constitution de deux partis qui se nommeront au début tous les deux partis communistes : un parti qui sera pour la sortie du comité anglo-russe et défendra un « point de vue international », et un autre parti qui s’imagine qu’on peut construire tout seul le socialisme de notre pays et qui sera un parti « communiste national ». La demande de la liberté des fractions n’est qu’une étape vers la constitution de ces deux partis.

Je suis d’avis qu’en ce qui concerne cette question de la liberté des fractions l’opposition s’écarte complètement des principes élémentaires de l’enseignement léniniste sur le rôle et le caractère du parti de notre pays et sur le caractère organique de notre parti uni, seul parti dans le pays.

Résultats Et Conclusions[modifier le wikicode]

A quoi aboutit l’idéologie de l’opposition[modifier le wikicode]

Je vais examiner maintenant dans quel sens se développe l’idéologie de l’opposition actuelle. Je reviens à la plate-forme de Medviediev.

Ce n’est pas pour rien que l’organisme central de notre parti a publié son article contre la plateforme de Medviediev sous le titre suivant : « Le Danger de droite dans notre parti. » Il n’existe pas un homme d’une intelligence saine qui pourrait nier que le groupe de l’ancienne opposition ouvrière représente l’extrême droite de notre parti, car on ne peut se représenter, dans le domaine de la politique internationale, aucun point de vue plus à droite que le point de vue de la liquidation de l’internationale communiste, que le point de vue de gens qui traitent de « valetaille petite-bourgeoise » les partis communistes de l’Occident « qui vivent de l’argent russe », que le point de vue qui demande la liquidation de l’internationale syndicale rouge et la remise de notre industrie socialiste au capital étranger.

En fait, ce groupe est idéologiquement en dehors de notre parti, et nous devons établir tout d’abord que l’opposition actuelle, qui représente un bloc des différents groupements d’opposition, englobe également le groupe du camarade Medviediev. A nos demandes répétées de repousser le point de vue de Medviediev et de lutter avec nous contre lui, l’opposition ne nous a pas fait de réponse raisonnable. Il y a environ un an, un certain nombre de camarades ont demandé à Zinoviev d’écrire un article en réponse à l’article de Medviediev. Zinoviev ne l’a pas fait. Lorsqu’on lui en demanda la raison à la séance plénière du comité central, il répondit textuellement ce qui suit : « Comme vous dirigez le feu contre la gauche, je n’ai pas considéré comme opportun d’attaquer le camarade de gauche Medviediev. » Ainsi donc, Zinoviev considère la plate-forme de Medviediev comme une plate-forme de gauche. Il en résulte que si Medviediev est de la gauche, Zinoviev est à sa droite. Je ne sais plus ce qu’on peut faire après une telle conclusion. Mais, en réalité, Zinoviev n’est pas à la droite de Medvlediev ; ce n’est heureusement pas encore le cas, mais si vous considérez le visage idéologique des différents groupes d’opposition, sans tenir compte des personnes, on peut trouver un lien idéologique entre tous les groupements de l’opposition.

Qu’écrit Medviediev sur la question paysanne ?

« Il est absurde de penser qu’on peut sauver l’économie petite-bourgeoise. Elle est condamnée à la désagrégation complète. C’est une utopie petite-bourgeoise de croire qu’on peut élever le niveau de l’économie paysanne. »

C’est ce que nous disions sous le régime capitaliste. Mais parler ainsi dans les conditions de la dictature prolétarienne, c’est adopter un tout autre point de vue que le point de vue léniniste. Medviediev conclut qu’il est absurde de s’occuper de la « campagne stérile ». Pourquoi devons-nous, nous vrais prolétaires, nous occuper de cette canaille villageoise ? Cédons plutôt notre industrie au capital étranger pour recevoir quelques centimes de plus. C’est là un véritable point de vue tradeunioniste. Si les camarades de la nouvelle opposition déclarent que la différenciation dans les villages a fait de tels progrès qu’on ne doit plus parler des paysans moyens et si Préobrajensky ne distingue pas le capital privé de l’économie paysanne, c’est là une parenté idéologique incontestable avec Medviediev.

Le fait que l’opposition actuelle manifeste des doutes au sujet du caractère socialiste de notre industrie d’Etat, et que Medviediev accorde si peu d’importance au caractère socialiste de notre industrie, qu’il est prêt à remettre cette industrie au capital étranger, constitue encore un lien de parenté entre ces deux groupements.

Le fait que Medviediev ne croit pas qu’il existe chez nous une dictature prolétarienne et affirme que la tâche de l’organisation prolétarienne consiste à exercer une pression sur l’Etat, et que les autres camarades de l’opposition déclarent que notre Etat est loin d’avoir un caractère prolétarien, constitue encore un autre lien de parenté entre les différents groupes d’opposition.

Enfin, tandis que Medviediev déclare que notre parti est pourri et qu’il s’écarte de la voie d’une véritable politique prolétarienne, Kamenev affirme que cette politique ne correspond plus aux intérêts des larges masses ouvrières.

On nous dira peut-être qu’on ne trouve ni chez Zinoviev ni chez Trotsky quelque chose d’analogue à l’ignominieuse proposition de Medviediev concernant la liquidation de l’internationale communiste. C’est vrai pour le moment, mais si l’opposition continue dans la voie où elle s’est engagée, il est possible qu’il n’en soit plus de même dans l’avenir, Ossovsky, dont j’ai déjà parlé si souvent, a écrit à peu près ce qui suit : « Notre parti est exposé à la pression de différentes formes économiques (rappelez-vous ce que j’ai dit au sujet de la représentation, dans notre parti, des éléments capitalistes), il doit, par conséquent, renoncer à son rôle de parti dirigeant de l’internationale communiste. »

Suivez-moi bien : si le parti communiste de l’Union soviétiste ne renonce pas à son rôle de parti dirigeant de l’internationale communiste, cela signifie qu’il ne la mènera nullement dans la voie révolutionnaire, mais qu’au contraire, étant donné sa « dégénérescence », il provoquera la dégénérescence de l’internationale communiste. Les extrêmes-gauches en Allemagne sont déjà arrivés à cette conclusion. C’est pourquoi ils déclarent qu’il est nécessaire de créer une IVe Internationale, Que dira notre opposition si elle continue à prétendre que notre parti s’est écarté de la voie révolutionnaire et reste cependant à la tête de l’internationale communiste ? Elle dira que l’internationale communiste s’est écartée de la voie révolutionnaire, et elle adoptera une attitude de plus en plus négative à l’égard de l’I. C.

Je répète : nous serons les premiers à remercier le sort si cela ne se produit pas. Mais alors il est nécessaire que l’opposition se détourne de la voie dans laquelle elle s’est engagée et qu’elle fasse bien attention aux conclusions auxquelles elle doit aboutir nécessairement.

L’opposition à un stade intermédiaire, sur la plate-forme trotskyste[modifier le wikicode]

Dans quel sens se développe l’opposition en tant que courant idéologique ? Dans la direction de Chliapnikov et de Medviediev, vers la liquidation complète de l’internationale communiste, vers le scepticisme complet à l’égard de la possibilité de la construction socialiste de notre pays. Actuellement, elle en est encore à un stade intermédiaire, sur la plate-forme de Trotsky. L’idéologie officielle de l’ensemble de l’opposition, y compris les camarades Zinoviev, Kamenev, Kroupskaïa, etc., est une idéologie nettement trotskyste. Lorsque nous avons dît que l’opposition aboutirait au trotskysme, un grand nombre de camarades ne voulaient pas le croire. Ils le niaient. Rappelez-vous comment Zinoviev lutta contre Trotsky, tant dans notre pays que dans la presse des autres partis. Combien de brochures Zinoviev et les autres camarades de l’opposition actuelle n’ont- ils pas écrites contre le trotskysme ? Mais, actuellement, Trotsky est devenu le chef idéologique de tout ce groupe d’opposition, tandis que ni Zinoviev ni Kamenev n’ont aucune idée à eux. Ils font des déclarations communes, élaborent une plateforme commune, avec une signature commune, et ce qui est l’essentiel toutes les idées appartiennent à Trotsky.

Quel est le point de vue de l’opposition actuelle sur la question paysanne ? C’est celui de Trotsky. J’ai déjà exposé nos divergences dans la question de la politique économique. J’ai dit quel était le point de vue de Préobrajensky. Quel point de vue est-ce ? C’est celui de Trotsky qui a triomphé dans l’opposition, tandis que Zinoviev et Kamenev ont capitulé devant lui.

Et dans la question de l’organisation, dans la question de la liberté des fractions, quel est le point de vue défendu put l’opposition ? Naturellement, c’est le point de vue que Trotsky défend depuis plusieurs décades.

A l’assemblée des fonctionnaires de Moscou, du 11 décembre 1923, Zinoviev déclarait ce qui suit au sujet de la discussion avec Trotsky :

« C’est pourquoi je vous prie, camarades, de donner une réponse claire et précise. Si vous croyez que le moment est venu de légaliser les fractions, dites-le clairement. Nous croyons, quant à nous, que ce moment n’est pas venu et qu’il ne viendra pas dans la période de la dictature du prolétariat. Il ne peut pas venir parce que cette question se confond avec celle de la liberté de la presse, des droits politiques des couches non prolétariennes de la population. Qui ne comprend pas cela ne comprend rien à la situation. C’est lié avec notre attitude à l’égard des paysans. Nous ne pouvons pas permettre une scission dans le parti, parce que nous ne pouvons pas permettre une scission dans l’Etat.

« Le moindre désordre dans le parti se répercute immédiatement dans l’appareil d’Etat. La division dans le parti provoquera inévitablement une division dans tout l’appareil d’Etat, c’est pourquoi la question des groupements dans le parti est pour nous une question vitale. »

C’est ainsi que Zinoviev parlait contre Trotsky. Mais, aujourd’hui, il reprend les mots d’ordre contre lesquels il tonnait autrefois, il a tout oublié et il considère probablement comme un bavardage vide de sens tout ce qu’il a dit le 11 décembre 1924 :

« En fin de compte, le trotskysme est une tendance de gauche dans l’esprit européen, c’est-à-dire dans l’esprit opportuniste, pseudo-marxiste, contraire au communisme. »

C’est ainsi que Zinoviev s’exprimait sur le trotskysme. Ailleurs, il déclarait :

« On nous dit parfois que tout le malheur vient du Xe Congrès. Mais la politique du Xe Congrès est la politique du léninisme. Les attaques de Trotsky contre les bases de la politique bolchevique, contre les bases du léninisme, ne peuvent pas être reconnues comme justes. »

Et ainsi de suite.

C’est ainsi que s’exprimait à l’époque le camarade Zinoviev. Mais tout cela a été oublié. Le vainqueur dans le bloc de l’opposition, c’est Trotsky, dont le point de vue, d’après Zinoviev, n’était rien d’autre qu’une variété de menchevisme.

Les sources idéologiques du bloc d’opposition[modifier le wikicode]

Quelles sont les sources idéologiques du bloc d’opposition actuelle ? Je crois que la base fondamentale de l’idéologie de ce bloc d’opposition est vraiment, comme l’a déclaré le XIVe

Congrès, le scepticisme ou, dans le meilleur des cas le doute dans la possibilité de la construction socialiste dans notre pays, et je crois que cela provient des anciens points de vue de tous les représentants du bloc d’opposition actuelle.

Chez Trotsky, ce point de vue correspond à l’affirmation selon laquelle si la révolution internationale ne triomphe pas, le paysan contre-révolutionnaire renversera inévitablement la dictature du prolétariat. C’est ce point de vue, qui est la base de sa théorie de la révolution permanente, qu’il maintient toujours.

Chez Kamenev et Zinoviev, ce point de vue est lié à leur attitude à l’époque de la révolution d’Octobre, alors qu’ils croyaient que notre parti n’était pas à la hauteur des tâches du pouvoir.

En ce qui concerne l’Opposition ouvrière, je rappellerai un fait qu’un grand nombre de nous ont oublié. Parmi les déserteurs d’Octobre se trouvait également Chliapnikov. Lui aussi abandonna son poste aux jours d’Octobre, lui qui occupait à l’époque un poste de commissaire du peuple donna également sa démission, et il ne le fit probablement pas de sa propre initiative, mais vraisemblablement après en avoir délibéré avec le groupe de ses camarades d’opinion.

Les trois groupes principaux qui constituent le bloc d’opposition actuelle ont, dans leur passé historique, donné une appréciation des rapports de force dans le pays, exprimant leur doute sur la possibilité pour la classe ouvrière de tirer, sous la direction de notre parti, notre pays arriéré du marais dans lequel il se trouve. Telles sont les bases idéologiques fondamentales du bloc actuel de l’opposition.

Le parti ne permettra aucune scission fractionnelle[modifier le wikicode]

il est maintenant facile de comprendre pourquoi l’opposition s’est décidée à des actes aussi inouïs, qui ont mené à l’affaire des camarades Lachevitch et autres. Ces actes constituent, dans l’histoire de notre parti, une violation si Inouïe de la discipline qu’un candidat du comité central ne pouvait Incontestablement pas organiser, sans l’approbation de quelques membres du bureau politique, des assemblées contre le parti en vue de renverser le comité central actuel et de créer une organisation qui constitue, en fait, le germe d’un nouveau parti.

Je ne vous démontrerai pas, camarades, tout le caractère criminel de tels actes. Cela me paraît complètement superflu. Chacun le comprendra. Je veux uniquement m’efforcer de me rendre compte comment ce fut possible. Je crois que ce fut possible uniquement parce que ces camarades se sont extraordinairement éloignés idéologiquement de la ligne du parti, parce qu’ils sont, dans leur for intérieur, fortement convaincus que le parti va à l’abîme, qu’il s’écarte d’une politique prolétarienne, qu’il est dans une fausse voie, qu’il mène le pays au bord de l’abîme et qu’il faut employer tous les moyens pour le sauver. Ce n’est qu’ainsi qu’on peut subjectivement justifier ces actes. Mais, du point de vue du parti, ils ne sont pas justiciables. Le comité central et la commission centrale de contrôle se trouvaient devant le fait qu’un groupe de camarades, dont quelques-uns occupaient des postes extrêmement responsables, ont organisé une assemblée illégale contre le parti et contre sa direction. Si nous supportons de tels actes, demain, notre parti aura cessé d’exister en tant que parti léniniste.

C’est pourquoi nous ne pouvons pas le permettre, et nous disons : défendez vos idées, défendez votre point de vue, prenez la parole dans les assemblées du parti. Mais si vous faites des réunions illégales, si vous ne répondez pas aux questions, si vous refusez de témoigner devant la commission centrale de contrôle, si vous vous engagez dans la voie de l’organisation d’un nouveau parti à l’intérieur de notre parti, si vous créez des organisations illégales, nous vous combattrons impitoyablement. Zinoviev avait parfaitement raison de dire, il y a deux ans, que la question de la division du parti était une question vitale du parti et de la dictature prolétarienne.

Naturellement, le danger est quelque peu diminué du fait que les camarades de l’opposition n’ont aucune masse derrière eux. Ils seront de plus en plus comme des généraux sans armée ou comme des amiraux de la flotte suisse. (Hilarité, applaudissements.) Ce sera d’autant plus rapidement le cas que le parti mènera plus énergiquement son travail d’éducation et qu’il se renforcera plus énergiquement au point de vue idéologique.

Ce travail d’éducation est à l’ordre du jour. C’est l’une des tâches principales que nous devons résoudre.

L’opposition spécule sur nos difficultés économiques. Elle calcule qu’il y a un nombre extraordinairement grand de lacunes dans notre vie actuelle, que cette année il s’est produit différentes oscillations dans l’état d’esprit des ouvriers et qu’il s’en produira encore beaucoup à l’avenir. Elle spécule enfin sur le fait que le comité central actuel ne sera pas en état de diriger sans eux le parti. Elle croit que nous succomberons au travail qui dépasse nos forces, mais nous croyons que, même si l’opposition ne nous aide pas pour diriger le parti, nous saurons le diriger sans eux.

(Applaudissements frénétiques.)

Nous surmonterons les difficultés, combattrons les excès et corrigerons nos fautes[modifier le wikicode]

Nous croyons, camarades, que quelque difficile que puisse être momentanément notre situation économique, nos perspectives économiques sont cependant favorables et que la bonne récolte que nous aurons cette année nous permettra de surmonter les difficultés que le pays traverse actuellement. Nous sommes également persuadés que nous réussirons à mener notre parti et notre pays dans la voie du développement. Un grand nombre de gens croient que, chez nous, la situation est telle qu’elle l’était au début de la révolution, lorsqu’il suffisait d’écrire un article avec une bonne orthographe, pour se considérer comme un chef de parti. Entre-temps, de nouveaux éléments se sont formés chez nous. Nous continuerons notre travail en nous appuyant sur la force collective de notre parti. Nous sommes persuadés que nous le mènerons à bonne fin. (Applaudissements frénétiques.)

L’opposition actuelle, comme toute opposition qui s’est jusqu’’ici manifestée dans notre parti et même les groupements qui luttent contre le parti, en dehors de lui, s’appuie sur le fait qu’il nous arrive de commettre des erreurs et que tout ne va pas toujours parfaitement chez nous. J’ai souvent dit que l’insurrection de Cronstadt, en février 1921, s’expliquait parce qu’il y avait chez nous un certain désordre et qu’il se passait certaines choses qui nécessitaient une réaction de notre part. Cette réaction se produisit au moyen de l’introduction de la liberté du commerce et de la suppression des réquisitions de blé. S’il n’y avait pas de bureaucratisme chez nous, si les salaires n’étaient pas encore aussi bas dans toute une série de branches de la production, si les paysans pauvres ne vivaient pas dans de mauvaises conditions chez nous, l’opposition n’aurait aucune base.

Chaque opposition à l’intérieur du parti utilise, naturellement, nos faiblesses. Toute la question est de savoir comment et pour quoi l’on critique.

Quand les camarades de l’opposition déclarent : « Le bureaucratisme vous étrangle », nous répondons : oui, le bureaucratisme est un mal ; mais s’ils disent : « Votre Etat a cessé d’être un Etat prolétarien, c’est un Etat de bureaucrates qui n’a rien de commun avec les masses », nous répondons alors : « Ce n’est pas vrai » ; nous repousserons une pareille critique comme constituant une calomnie à l’égard de notre Etat ouvrier.

Quand on nous dit que telle et telle chose n’a pas été faite et que l’on nous critique, non pas pour nous aider à corriger nos fautes, mais pour s’en servir dans un intérêt fractionnel ; quand on nous critique d’une façon exagérée, quand on calomnie notre parti et l’Etat soviétique, quand on grossit mille fois certaines erreurs de notre Etat et de l’appareil de notre parti, quand on s’en sert pour en faire une plate-forme de fractions et quand nos critiques, loin de nous aider à surmonter les difficultés, s’efforcent de les utiliser pour cuire leur soupe de fractions, nous repoussons de telles critiques, nous engageons la lutte contre une telle opposition, car ces critiques ne constituent pas une critique objective en vue de nous aider à surmonter nos difficultés, mais des tentatives systématiques d’ébranler l’unité de notre parti et de travailler à la légalisation d’autres partis, au moyen de la légalisation des fractions. C’est une déviation de la ligne de la dictature prolétarienne.

Après diverses accusations élevées par l’opposition contre le comité central de notre parti, elle prétendit que le parti devait tirer de ia campagne électorale les conclusions suivantes : 1. une véritable industrialisation ; 2. organisation véritable des paysans pauvres ; 3. alliance véritable avec les paysans moyens ; 4. lutte véritable contre le bureaucratisme ; 6. démocratie intérieure véritable dans le parti. Il en résulte que, chez nous, l’industrialisation n’est pas véritable, que nous n’organisons pas les paysans pauvres, que nous n’avons pas une véritable alliance avec les paysans moyens, etc. C’est ainsi que l’opposition déclare que toute notre politique est fausse et qu’eux seuls peuvent faire une vraie politique.

Mais nous, dans la simplicité de notre âme, nous croyons que les gens qui, aujourd’hui, luttent contre une tendance et demain adhèrent à cette même tendance, qui aujourd’hui repoussent la liberté des fractions dans le parti et demain la réclament, nous croyons que ces gens voyagent avec de faux passeports dans le vrai léninisme.

Je vais vous raconter une histoire comique : dans les cercles de l’opposition, le livre de

Zinoviev sur le léninisme est considéré comme un évangile 100 %. Une partie considérable de ce livre est dirigée contre Trotsky. Mais, maintenant, Zinoviev, pour constituer le bloc avec Trotsky et pour réaliser le vrai léninisme, a laissé tomber ce livre et a renoncé à une nouvelle édition. C’est ainsi qu’ils agissent avec les bases du léninisme.

Nos tâches[modifier le wikicode]

En terminant, quelques mots sur les tâches devant lesquelles nous sommes placés. Notre tâche principale dans la politique économique est de pratiquer actuellement une véritable politique d’industrialisation et de rechercher les moyens de hâter l’allure du développement de notre industrie. Notre tâche consiste également à examiner la possibilité d’une élévation des salaires réels, particulièrement du salaire des couches ouvrières, salaire qui est resté en arrière. Si nous ne pouvions pas remplir cette tâche, il y a quelques mois, il est clair que, si nous réussissons à bien manœuvrer avec notre blé et nos exportations, nous serons en état, en automne, d’augmenter le salaire réel des ouvriers.

La première mesure à réaliser dans notre politique ouvrière doit être la lutte contre les excès du régime d’économie. Parfois, on interprète le régime d’économie de telle sorte qu’on enlève aux ouvriers l’eau pour le thé, ce qui provoque çà et là de petites révoltes en province. C’est une caricature criminelle du régime d’économie. Notre comité central, ou son secrétariat, doit envoyer aux organisations une lettre sur cette question. Enfin, il faut mener la lutte contre le bureaucratisme qui nous étrangle. L’une des idées principales contenues dans le dernier discours prononcé par Dzerjinski avant sa mort fut la lutte impitoyable contre l’immobilité, la lourdeur, le bureaucratisme de notre appareil, contre un état de choses dans lequel une décision doit passer par dix ou vingt organes avant d’être exécutée.

Enfin, en même temps qu’il faut mener à l’intérieur du parti une lutte énergique contre les fractions et groupements, il faut appliquer plus énergiquement la démocratie intérieure, nous devons éduquer à tout prix les adhérents de notre parti et les convaincre de la justesse de la politique adoptée par le comité central.

Le parti communiste est l’un des moteurs principaux de l’administration d’Etat de notre immense pays. Nous entrons dans la période d’automne avec d’immenses tâches à réaliser, nous devons manœuvrer avec les prix des céréales, de manière à les vendre à l’extérieur, et nous devons établir sur cette base notre programme de production et travailler à résoudre la question du logement, la question des salaires, etc. Le début de notre année d’opérations concorde avec la réalisation de la récolte. Le début des travaux d’opérations a une importance extraordinaire pour l’ensemble de l’exercice. Et malgré ces tâches importantes, nous devons entreprendre un vaste travail d’éducation des membres du parti, de manière que chaque membre de notre parti puisse se convaincre par lui-même que la ligne adoptée par la majorité du comité central est une ligne juste. Nous ne sommes pas partisans de dire aujourd’hui une chose et demain le contraire, de lutter aujourd’hui contre telle déviation et de s’y rallier demain. Nous avons notre ligne que nous suivons d’une façon conséquente. Nous lutterons pour cette ligne. Sur cette ligne, nous dirigerons le parti et nous sommes fermement persuadés que l’ensemble du parti, y compris l’organisation de Leningrad, qui a été et restera le pivot du comité central, appliquera complètement cette ligne politique. L’essentiel est de lutter pour la ligne politique juste. Tout le reste en dépend. Notre ligne politique est une ligne politique léniniste de laquelle nous ne dévierons jamais, pour laquelle nous vaincrons.

(Applaudissements prolongés.)

Supplément[modifier le wikicode]

Résumé du discours du 28 juillet 1926 à Leningrad (La CI 1926 n°89, p. 997)


N. Boukharine commente les résultats du plénum du Comité Central

Moscou, le 28 juillet 1926.

Boukharine a rapporté, le 28 juillet, devant la réunion des fonctionnaires du Parti de l’U. R. S. S. à Leningrad.

Il a montré que les thèses de l’opposition constituent une déviation complète du léninisme.

C’est sans pouvoir le prouver que l’opposition prétend que l’industrie de l’Union Soviétiste se développe plus lentement que l’agriculture, elle exagère les dangers que constitue le capital privé, etc.

Boukharine a analysé la situation dans l’industrie et l’agriculture et il a prouvé par le développement du prolétariat et l’élévation du salaire que l’industrie dépasse l’agriculture. Il a comparé le développement de l’économie socialiste avec celui de l’économie privée et il a montré que le produit brut du capital privé s’élève à environ 400 millions de roubles dont il faut déduire 320 millions qui sont nécessaires au capital privé pour satisfaire ses besoins. Cette preuve seule suffit pour montrer que le capital privé ne forme point cette « nuée d’orage » qui menacerait l’Union Soviétiste.

Boukharine a montré que la revendication de l‘opposition concernant un relèvement des prix des objets manufacturés était absolument injustifiée et il a souligne que la tâche principale n’était pas le relèvement mais l’abaissement des prix par la rationalisation de l’économie. Dans son analyse de la situation de l’Union Soviétiste, il a insisté sur la confiance croissante des paysans pauvres et des paysans moyens envers le pouvoir soviétiste et le Parti Communiste, confiance qui s’explique par les efforts du Parti pour donner de la vitalité aux Soviets, pour diminuer les impôts et assurer la légalité révolutionnaire. Tout naturellement, la bourgeoisie croît elle aussi dans les villes et dans les campagnes, mais le Parti a pris en temps utile les mesures nécessaires pour enrayer ce développement. Le principal c’est que les éléments économiques socialistes croissent et se renforcent plus rapidement que les éléments capitalistes, de sorte que le sort de l’édification socialiste ne cause aucun souci.

Dans la question de l’organisation du Parti, le mot d’ordre de l’opposition est la liberté des fractions. En pratique l’opposition a fait bloc avec tous les groupes dirigés contre le parti et que celui-ci a condamné dans ces dernières années. Sous des phrases de gauche, les représentants de l’opposition adoptent le même point de vue que les éléments semi menchéviks qui s’efforcent de liquider l’Internationale Communiste, d’accorder au capital étranger le libre accès dans l’Union Soviétique et veulent y créer, au lieu de la dictature du prolétariat une démocratie parlementaire. Dans les questions du mouvement ouvrier international, l’opposition ne juge pas que la période actuelle est une période de stabilisation provisoire du capitalisme, elle révise vraiment la tactique du front unique et propose de se retirer du comité anglo-russe,

Le camarade Boukharine a terminé son rapport par les déclarations suivantes : le point de départ idéologique de l’opposition est le doute dans la possibilité de l’édification socialiste dans l’Union Soviétiste, le doute dans les forces ouvrières. Les chefs de l’opposition ne reconnaissent pas que personne n’est derrière eux et qu’ils sont des généraux sans armée.

Au cours de vifs débats, les orateurs ont demandé une condamnation impitoyable de toute tentative pour rompre l’unité du Parti et se sont prononcés unanimement pour le soutien du Comité Central qui mène une politique léniniste.

L’assemblée, composée de 3000 camarades, a voté unanimement une résolution pour te maintien de l’unité du parti contre l’activité fractionnelle et les groupements illégaux, et pour une discipline bolchevique de fer.