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Special pages :
La situation dans la Ligue
Chers camarades,
J'ai reçu une lettre du camarade Naville datée du 29 dans laquelle il dit, faisant référence aux camarades du C.E.:
"Ils sont unanimes a penser qu'il est absolument nécessaire que je vous contacte sur les questions internationales qui sont d'une particulière importance à Paris. En ce qui concerne la situation de la Ligue, ils pensent que, bien qu'il serait utile pour moi de passer la situation en revue avec vous, il est par ailleurs indispensable que les questions politiques soient présentées et réglées ouvertement à la conférence nationale de l'Opposition française. A présent nous sommes orientés vers la préparation de cette conférence."
Malheureusement le camarade Naville explique la décision de la C.E. au lieu de la citer. Ce qui nuit toujours à la précision. Mais si l'explication est juste, camarades, je ne peux pas vous cacher mon étonnement. A l'initiative du camarade Naville, si je comprends bien, vous avez jugé nécessaire de m'informer que les questions posées dans la Ligue française ne peuvent être réglées que par la Ligue française - sa conférence, son comité exécutif etc. Cela veut dire que vous supposez que je suis capable d'affirmer être capable de résoudre en privé des questions qui ne peuvent être résolues qu'ouvertement dans une conférence nationale. Cette supposition ou, si vous voulez, cette suspicion contredit si ouvertement toutes les idées élémentaires sur la vie organisationnelle que je ne puis que répéter mon étonnement et mon regret de l'avoir pas reçu le texte intégral de votre décision.
Pendant longtemps j'ai poursuivi une correspondance avec le camarade Naville sur la conférence internationale d'avril et j'ai découvert qu'il était nécessaire de s'appesantir longuement sur le caractère inadmissible qu'il y a à résoudre les questions dans les couloirs au lieu de les présenter formellement à l'organisme en question.
La question que j'ai soulignée le plus fortement pendant la dernière visite du camarade Naville n'était pas la question internationale précisément parce que le "contact" personnel ne pouvait pas faire grand chose en ce domaine. La question qui me préoccupait en liaison avec la visite du camarade Naville ( en-dehors de mon désir personnel de le voir ici, était celle d'essayer, à travers une intervention tout à fait privée et personnelle de l'aider à atténuer la crise interne qui découle de divergences de méthodes mais qui peut conduire à de très sérieux conflits personnels et à des frictions. Ce n'était pas, je le répète, que je voulais interférer sur les droits de la Ligue, d'aucune façon. C'est la conférence qui doit s'exprimer sur les questions qui lui sont soumises. Mais camarades, il y a aussi la question de la façon dont la conférence est préparée et la façon dont les questions lui sont posées. S'il y a un conflit sérieux mais pas insoluble, s'il y a des deux côtés de la bonne volonté pour éviter les formes les plus décourageantes et les plus démoralisantes de la lutte personnelle, on peut toujours obtenir des résultats qui sont tout à fait préliminaires et provisoires, mais de grande importance. C'est la tache que je m'étais assignée pour la rencontre en question.
Je puis attester qu'il n'y a pas eu de problème pour la bonne volonté du camarade Molinier. Malheureusement, je ne peux pas en dire autant du camarade Naville.
Votre résolution et l'habitude du camarade Naville au cours de cette derrière période peuvent réellement donner l'impression que je suis intervenu dans ce conflit de ma propre initiative. Alors même que je crois qu'une telle initiative n'aurait nullement été répréhensibles je dois souligner le fait que je ne suis intervenu sur cette question qu'à l'initiative des camarades français, avant tout Naville. Il fut l'un de ceux qui m'envoyèrent une lettre avec trois signatures (Naville, Gourget, Gérard) qui m'informait du conflit en termes très généraux. Même ma première impression, basée presque entièrement sur me correspondance plutôt abondante avec le camarade Naville, fut non seulement extrêmement pénible, mais me permit de prévoir les conséquences réellement désastreuses que ce conflit pouvait avoir pour la jeune organisation. Pour moi, il ne s'agissait pas du destin politique d'un seul camarade qui risquait d'être exclu (une question importante en soi). Il s'agissait des méthodes de la direction de l'organisation que je trouvais bien plus dangereuses que les maux, réels ou imaginaires, qu'elles étaient censées combattre. Je n'ai pas caché mon opinion préliminaire, sommaire, au camarade Naville, mais étant sollicité d'intervenir par lui, j'ai jugé de mon devoir d'obtenir plus d'informations sur l'affaire, c'est-à-dire de prendre contact avec le camarade Molinier sur ces questions. Je dois souligner que tout cet épisode, y compris le voyage du camarade Molinier, a été le résultat de l'initiative du camarade Naville, puisque le camarade Molinier ne m'avait rien écrit auparavant sur le conflit et n'avait pas demandé mon intervention et que je l'invitai de ma propre initiative, exactement comme j'avais invité le camarade Naville avant lui.
Même si le camarade Naville a jugé ultérieurement que mon intervention était une intrusion (ce qui ne signifie pas bien entendu pour moi que j'allais arrêter l'activité que j'avais commencée pour être utile à la Ligue), il n'avait aucune raison de provoquer votre résolution parce que je ne crois pas qu'en m'invitant à intervenir, il avait lui-même empiété ainsi sur les droits et devoirs de la Ligue.
Le camarade Naville écrit: "Actuellement, la crise interne de la Ligue est un peu localisée". Non, au contraire, elle est en voie d'être internationalisée. J'ai pu le vérifier à chaque pas au cours du dernier mois. Dans les derniers jours, j'ai pu le vérifier une fois de plus, dans l'épisode hongrois, la lettre de Landau, etc. Puisque vous croyez que ces questions devraient être réglées ouvertement à la conférence nationale, je n'aurai pas d'autre choix que de suivre votre initiative et de présenter aux membres de la Ligue mon opinion sur l'ensemble de questions, exactement comme j'ai suivi l'initiative du camarade Naville et m'adressant à vous pour cette explication.
Quant à la situation de notre organisation internationale, nous avons élaboré des propositions ici que je considère comme un minimum des réformes nécessaires pour améliorer la situation de compromis existant depuis le mois d'avril. Bien entendu, je serais plus qu'heureux de discuter de nouveau cette question avec le camarade Naville, mais je vous demande d'analyser nos propositions en votre capacité officielle en tant que comité et de nous communiquer votre opinion, afin qu'on puisse plus tard entreprendre le cours nécessaire d'action de façon énergique et en coopération, sous les yeux de toutes les sections, afin d'activer et de normaliser notre travail international.
En ce qui concerne la lettre du camarade Landau et la position prise par le camarade Naville sur des questions à peu près analogues au sujet du conflit interne en Allemagne - je crois nécessaire que la représentation au bureau ou au secrétariat provisoire ( ?) ne soit pas unilatérale. Si le camarade Naville représente le point de vue de la majorité du C.E., j'estime nécessaire qu'il y ait une représentation de l'Opposition russe. Naturellement tous peuvent se présenter comme représentants de l'Opposition internationale et agir en plein accord.