La bourgeoisie juive et la lutte révolutionnaire

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Le Père Coughlin[1] , qui cherche apparemment à démontrer qu'une morale idéaliste absolue n'empêche pas l'homme d'être la pire canaille, a déclaré à la radio que j'avais dans le passé reçu pour la révolution d'énormes sommes d'argent de la bourgeoisie juive des États‑Unis. J'ai déjà répondu dans la presse que c'était faux[2]. Je n'ai pas reçu d'argent non pas, bien entendu, parce que j'aurais refusé un soutien financier pour la révolution, mais parce que la bourgeoisie juive n'a pas proposé un tel soutien. La bourgeoisie juive est restée fidèle au principe : ne rien donner. Même aujourd'hui, quand c'est de sa tête qu'il s'agit. Étouffant dans ses contradictions, le capitalisme dirige des coups forcenés contre les Juifs et en outre une partie de ces coups tombe sur la bourgeoisie juive en dépit de tous ses “ services ” passés rendus au capitalisme. Des mesures de nature philanthropique pour les réfugiés deviennent de moins en moins efficaces en comparaison de l'immensité des maux qui accablent le peuple juif.

C'est maintenant le tour de la France. La victoire du fascisme dans ce pays signifierait un grand renforcement de la réaction et une monstrueuse croissance d'un violent anti‑sémitisme dans le monde entier, surtout aux États‑Unis. Le nombre de pays qui expulsent les Juifs ne cesse de croître. Le nombre de pays capables de les accueillir diminue. En même temps la lutte ne fait que s'exacerber. Il est possible d'imaginer sans difficulté ce qui attend les Juifs dès le début de la future guerre mondiale. Mais, même sans guerre, le prochain développement de la réaction mondiale signifie presque avec certitude l'extermination physique des Juifs.

La Palestine s'est révélée un tragique mirage, le Birobidjan une farce bureaucratique. Le Kremlin refuse d'accepter des réfugiés. Les “ congrès antifascistes ” de vieilles dames et de jeunes carriéristes n'ont pas la moindre importance. Maintenant plus que jamais le destin du peuple juif — pas seulement leur destin politique, mais leur destin physique — est lié indissolublement à la lutte émancipatrice du prolétariat international. Seule une mobilisation courageuse des ouvriers contre la réaction, la constitution de milices ouvrières, la résistance physique directe aux bandes fascistes, une confiance en soi plus grande, activité et audace de la part de tous les opprimés, peuvent provoquer un changement dans le rapport des forces, arrêter la vague mondiale de fascisme et ouvrir un nouveau chapitre dans l'histoire de l'humanité.

La IV° Internationale a été la première à proclamer le danger de fascisme et indiquer la voie du salut. La IV° Internationale appelle les masses populaires juives à ne pas se faire d'illusions et à affronter ouvertement la réalité menaçante. Il n'est de salut que dans la lutte révolutionnaire. Le “ nerf ” de la lutte révolutionnaire, comme celui de la guerre, c'est l'argent. Les éléments progressistes et perspicaces du peuple juif doivent venir au secours de l'avant‑garde révolutionnaire. Le temps presse. Un jour, aujourd'hui, équivaut à un mois ou même à une année. Ce que tu fais, fais‑le vite !

  1. Charles E. Coughlin (né en 1891), d'origine irlandaise, ordonné prêtre catholique en 1916 devint, à la fin des années vingt, un agitateur radiophonique très écouté qui appelait à la croisade contre “ les capitalistes sans‑Dieu, les Juifs, les communistes, les banquiers internationaux et les ploutocrates ”. Il présidait la National Union for Social Justice, et recevait trois millions de lettres par an. Il venait d'accuser Trotsky d'avoir reçu en 1917 une somme importante d'un capitaliste juif.
  2. Cf. la déclaration du 28 novembre 1938, Les accusations du fasciste Coughlin