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Special pages :
Joseph Petrovitch Goldenberg (Mechkovski)
Auteur·e(s) | Lev Kamenev |
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Écriture | 26 janvier 1922 |
Vers 1890, le « Groupe de l'Affranchissement du Travail » à l'étranger se trouva dans la nécessité d'élargir ses cadres, d'établir des relations plus étroites et plus continues avec le mouvement ouvrier de Russie, de passer du labeur purement théorique à la formation pratique des cadres du parti ouvrier. L'épreuve était rude. G.-V. Plekhanov et ses collaborateurs du groupe plaçaient au-dessus de tout la préparation théorique, la profonde pénétration de la doctrine marxiste, l'art de défendre les thèses fondamentales de la doctrine de Marx parmi les influences petites-bourgeoises, nationalistes et intellectuelles-anarchistes prédominant dans le milieu révolutionnaire russe de leur temps.
J.-P. Goldenberg fut attiré l'un des premiers par l'activité du « Groupe de l'Affranchissement du Travail ». Il quitta la Russie afin d'étudier le mouvement ouvrier de l'Europe occidentale, se mit promptement en relations avec les groupes ouvriers de France et de Belgique, adhéra aux marxistes et se distingua bientôt comme un protagoniste émérite de la doctrine de Marx.
La méthode de Plekhanov se justifia pleinement. Dès le début de 1890 la classe intellectuelle russe subit toute une longue série de transformations avec une rapidité cinématographique. A l'époque de l'engouement clandestin et superficiel pour le marxisme succéda une époque de « critique » tout aussi superficielle. Il fut de mode d'élaborer des « amendements » de toute sorte à Marx, amendements de Bernstein, inspirés de Nietzsche, de Kant, de Mach. Se couvrant de ces « amendements », les « marxistes » passaient en troupes aux libéraux. Au milieu de ces hésitations, Joseph Petrovitch était l'un des rares demeurés inébranlablement fidèles à la doctrine révolutionnaire de Marx. Son « levain » marxiste résistait à toutes les séductions des intellectuels. Il se plaisait à répéter qu'il était et demeurait le disciple de Plekhanov, du Plekhanov de 1890, marxiste militant, luttant contre tout écart de la théorie du socialisme scientifique.
Pendant l'été de 1905, le centre bolchevik rassembla ses forces pour le coup qui se préparait contre la monarchie des Romanov. Des combats décisifs de masses étaient imminents. Les intellectuels « marxistes » rééduqués à l'avance fuyaient chez les mencheviks et les libéraux. L'état-major des bolcheviks demandait du renfort. On décida alors de faire venir Joseph Petrovitch de Saratov. Il répondit immédiatement à l'appel et, à partir de ce moment, participa à la première révolution de concert avec le groupe fondamental des bolcheviks. Au cours de ces journées de lutte, le Parti eut en sa personne un politicien avisé, un travailleur infatigable, un représentant inspirant le respect général. Joseph Petrovitch faisait invariablement partie des rédactions de toutes les publications bolchevistes, était membre du Comité Central du Parti, le représentait continuellement à toutes les conférences avec les autres partis, avec les unions de sans-parti, etc. Calme, réfléchi, maître de sa parole et de sa plume, Joseph Petrovitch était à cette époque membre permanent du « Conseil de guerre » des bolcheviks. Il savait brillamment exposer et défendre notre idéal et notre tactique aussi bien dans les réunions ouvrières que dans les conférences de partis, en une vive proclamation ou en un tranquille article de journal ou de revue.
Dès ses premières interventions en faveur des bolcheviks, Plekhanov lui adressa une lettre pour lui exprimer sa surprise et tenter de l'attirer du côté de sa tactique opportuniste. Joseph Petrovitch n'estimait pas seulement Plekhanov en tant que théoricien, il l'aimait aussi comme son maître. Mais il répondit à sa lettre en lui rappelant d'une façon mordante et rude que le bolchevisme n'est que l'application de la doctrine révolutionnaire de Plekhanov lui-même aux conditions de la révolution russe de 1905-1806 — et il passa outre.
La réaction arriva. Joseph Petrovitch se trouva parmi les rares échappés des mains de Stolypine-le-pendeur. Il demeura à son poste. Forcé de conspirer sans relâche, il était resté à Pétersbourg l'homme de confiance de l'organisation bolcheviste, correspondait avec l'étranger, se rendit plusieurs fois à la conférence du Parti et avait été chargé par le Comité Central de tenir entre ses mains les fils du travail légal du Parti. Bien entendu, en fin de compte il perdit, fut arrêté et déporté. Le lien immédiat avec le Parti fut brisé.
La guerre éclata. Il n'arriva pas à résoudre les questions posées par elle. Seul, sans camarades proches et sans liaison directe avec le Paru, il se laissa aller à l'emprise générale qui s'était emparée alors des gens de la 2e Internationale. Il marcha sur les traces de ses anciens maîtres, Plekhanov et Guesde, et s'enlisa avec eux dans la fondrière de la défense nationale.
Lorsque, le 4 avril 1917, à la réunion des bolcheviks et des mencheviks au palais de Tauride, Joseph Petrovitch entendit des lèvres de Lénine, récemment arrivé de l'étranger, un appel à la révolution prolétarienne, à la transformation du massacre impérialiste en un combat de classe du prolétariat et de la bourgeoisie, il ne voulut pas se rendre. Il emprunta à, l'arsenal de la 2e Internationale l'arme la plus acérée et tenta de s'en servir pour défendre sa position, « Lénine veut planter l'étendard de Bakounine sur la révolution russe », dit-il dans son discours en réponse au rapport de Lénine. L'arme se trouva être rouillée... Et il sembla que Joseph Petrovitch s'en était rendu compte. Sa foi primitive dans le caractère marxiste de sa position était ébranlée. Une lente révision commença. Il partit pour l'étranger avec une délégation du premier Comité Exécutif Central pan-russe. Les plans pacifistes s'étaient écroulés. La révolution prolétarienne avait triomphé en Russie. Le vieux bolchevik sentait douloureusement son éloignement du Parti, du prolétariat, de la révolution. Et, en fin de compte, le bolchevisme eut raison de toutes les hésitations et de tous les doutes. C'est avec un sentiment de joie et de satisfaction que nous lûmes la lettre que Joseph Petrovitch nous adressa de l'étranger et dans laquelle il faisait part de son désir de revenir en Russie et de lutter dans les rangs du Parti Communiste pour le triomphe de notre cause.
Bientôt, il se rendit à Moscou et se heurta du même coup aux difficultés de la vie moscovite. Après s'être chargé d'un dur labeur, il travailla pendant six mois et mourut, le cœur paralysé, n'ayant pas eu la force de résister à la tâche.
Quelques jours avant sa mort, un groupe de camarades discutait la question du choix d'un camarade que l'on puisse charger d'une affaire importante et pleine de responsabilités, demandant de l'intelligence, du tact, de la fermeté, un dévouement et une discipline absolues. Et tous, sans exception, s'accordèrent à nommer Goldenberg. Maintenant, il est mort. Les « vieux » s'en vont, premiers propagateurs du marxisme parmi les ouvriers russes, premiers constructeurs du parti. Mais ils demeureront pendant de longues années dans la mémoire du prolétariat révolutionnaire russe.